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Critiques de Delphine de Vigan (5527)
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Jours sans faim

«Jours sans faim»… délicat jeu de mots pour un texte intense abordant ce sujet à la fois médiatique et impénétrable qu'est l'anorexie mentale.



Premier roman de Delphine de Vigan publié en 2001 sous le pseudonyme de Lou Delvig, « Jours sans faim » s'impose comme un complément logique et opportun au «Rien ne s'oppose à la nuit» qui ne sera pourtant rédigé que dix ans plus tard. Ces deux oeuvres s'interpellent admirablement et se complètent l'une l'autre : la mère, la fille, toutes deux en proie à leur mal-être et à leur lutte inégale contre les blessures du passé et leurs fardeaux héréditaires.



Car Laure, héroïne de ce livre, c'est elle, Delphine de Vigan. Cette toute jeune femme de dix-neuf ans hospitalisée au dernier stade de son anorexie, c'était elle. Ce mal de vivre et ce saisissant combat livré contre et avec son propre corps ont été les siens.



D'un trait sobre et précis, force et vulnérabilité intensément mêlées, Delphine/Laure évoque sans concession sa maladie et ses symptômes, ne se refusant aucun sarcasme. Elle raconte également ses rencontres – attendrissantes ou fâcheuses – avec ceux qui auront partagé ses trois mois de quotidien hospitalier… visiteurs, malades, personnel soignant, dont le docteur Brunel, son « sauveur » comme elle aime à le nommer.



Traitée ici, selon l'auteur, comme un thème littéraire à part entière, l'anorexie mentale n'est pourtant pas une lubie d'adolescente inspirée par la mode, ce texte l'exprime brillamment si besoin en était. Jamais, en tout cas, parmi les titres que j'ai pu lire de Delphine de Vigan, son écriture ne m'aura semblé aussi sensible, musicale et percutante. Deux excellentes raisons, à mon avis, de découvrir ce livre essentiel et juste, que l'on soit touché par le sujet… ou pas.




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Les enfants sont rois

Le 5 juillet 2001 marquera à jamais Mélanie Claux, alors âgée de 17 ans. Devant sa télévision, entourée de ses parents, elle assiste, comme onze millions de téléspectateurs, à la victoire de Loana. Tapis rouge, feu d'artifice, foule en liesse... une victoire digne d'une coupe du monde ! Dès lors, elle ne rêve que d'une chose : être connue... et reconnue. Après avoir quitté, à 18 ans, La Roche-sur-Yon pour s'installer à Paris, là où tout se passe, elle fréquente l'université, qu'elle quittera assez vite, et travaille dans une agence de voyage. Quelques années plus tard, elle répond à une offre de recrutement de candidats de téléréalité. Et c'est avec une immense joie qu'elle apprend qu'elle est prise pour "Rendez-vous dans le noir !". Malheureusement, tout ne se passe pas comme prévu pour elle... mais qu'importe, la jeune femme fera tout pour être connue...

À des centaines de kilomètres de La Roche-sur-Yon, c'est en cachette que Clara Roussel assiste à la grande finale de Loft Story, ses parents enseignants engagés dans la vie locale et l'action publique (notamment dans le collectif qui avait appelé à boycotter le programme phare de M6) n'appréciant guère ce nouveau genre de programme. Après le bac, elle s'inscrit à La Sorbonne et après sa licence de droit, elle décide de s'inscrire au concours national de la police. Une idée qui n'est pas sans faire sourciller ses parents qui, pourtant, la soutiennent et sont fiers d'elle lors de son admission. Devenue procédurière à la Crime, elle croisera la route de Mélanie Claux, en 2019, lorsque la fille de cette dernière, Kimmy, aura tragiquement disparue...



Delphine de Vigan traite dans son dernier roman de sujets ô combien d'actualité et à controverse, à savoir la téléréalité (de plus en plus présente sur les chaînes) et les vidéos mettant en avant les enfants (les Family Vlogs). C'est ici le cas de la jeune Mélanie qui, à défaut d'avoir pu se faire connaître via la téléréalité, va mettre sur le devant de la scène ses propres enfants, Sammy et Kimmy, et ce, dès leur plus jeune âge. Mises en scène, challenges, stories... elle dévoile tout de leur vie privée. La disparition de sa fille est-elle alors liée, de près ou de loin, à cette exhibition ? C'est ce que va tenter d'éclaircir Clara Roussel, procédurière à la Crime, qui, jusque là novice en ce qui concerne Youtube, Insta ou autre, va tomber des nues en découvrant tout ça. Delphine de Vigan traite, avec un réalisme glaçant mais malheureusement vrai, des conséquences et dérives d'internet et de la téléréalité, et par là même de la sur-consommation, la sur-exposition, du bonheur acheté à coup de likes et petits cœurs. Ses deux héroïnes, que tout semble séparer, sont parfaitement dépeintes, notamment Mélanie (femme naïve ou manipulatrice ?). Addictif, passionnant, ce roman, allant des années Loft à 2031, dresse le portrait implacable et affligeant d'un monde 2.0 perverti...
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Les enfants sont rois

Au pays des aveugles, les borgnes sont rois.



On dit ça.



A l’heure où l’enfance se jouent dans les cours de récréation, certains deviennent des mini stars, vedettes de la consommation sur les réseaux sociaux et sur You Tube.



Et Delphine de Vigan dresse un portrait effroyable de ces enfants rois.

Rois maudits d’avance d’être surexposés, dont le royaume désenchanté interpelle et frappe les le lecteur. Tout existe et pourtant, on a du mal à le croire.



Si je lis De Vigan à chaque nouvelle parution, c’est parce que je ne sais jamais où elle va nous mener. Et j’aime ça. Cette surprise, cette stupeur.



Ici, donc, il est question de ces enfants surimprimés sur nos rétines, nés de parents gavés à la télé réalité et aux rêves de célébrités faciles que l’on expose partout pour faire du like, pour faire du fric. Pour leur bien.

Il est question de sourires factices et de bonheur en tranches que l’on nous vend sur cette drôle de toile jusqu’à s’en étouffer. Il est question de rêves qui se percutent et de destins brisés.



Pour ne pas trop en dire car il faut se plonger dedans, ce roman mélange les genres avec brio.



Polar, roman d’anticipation ou plaidoyer pour l’enfance, on ne sort pas indemne de cette histoire qui pousse à aller au-delà des écrans.



Delphine de Vigan, une nouvelle fois, embrasse son sujet et marque les esprits.



Fascinant, jusqu’à l’écœurement, bouleversant jusqu’à l’effarement …

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D'après une histoire vraie

Une chauve-souris est rentrée dans ma chambre, m'obligeant à éteindre, dans la panique, ma lampe de chevet, pour la laisser repartir par la fenêtre, grande ouverte sur le ciel étoilé, dans des battements d'aile fébriles et des petits cris affolés...Cas de force majeure :j’ai toujours été paniquée par ces bestioles, et n’ai pas pu terminer « D’après une histoire vraie »…Je l'ai donc achevé ce matin, au soleil, dans un climat plus diurne et apaisé..



N’empêche que la bestiole n’a pas manqué d’à propos: c'est bien de vampirisation qu'il s'agit dans ce roman.



Voici le sujet en deux mots : Delphine de Vigan en personne, un peu dépassée par le succès de son dernier roman et guettée par la panne d’inspiration qui suit souvent un best seller, est contactée par une jeune femme qui semble tout connaître d’elle, et, plus troublant encore, la deviner à demi mot. Cette dernière se rend vite indispensable, mais réserve sa présence à la seule Delphine, évitant soigneusement tout contact avec ses proches. Plus elle couve et phagocyte l’écrivain, moins celle-ci arrive à écrire, développant bientôt une véritable phobie face à l’écriture. Alors, L. (c’est le nom de la femme chauve-souris) devient de plus en plus inquiétante, de plus en plus exigeante : Delphine doit écrire ! Mais pas n’importe quelle fiction : elle s’est engagée dans le VRAI avec son dernier livre, c’est sa réalité VRAIE qu’elle doit continuer de livrer en pâture aux lecteurs, autres vampires…



"D’après une histoire vraie" a tout du thriller – on est vraiment scotché à ce livre qui dégage une tension et un malaise palpables…plus subtils, mais tout aussi terrifiants que dans Misery de Stephen King, malicieusement cité en exergue d’une partie du livre !



Mais il a tout du piège littéraire aussi : comme dans un tableau d’Escher, on se demande si l’escalier monte à la tour, ou s’il descend, si l’eau cascade ou si, bizarrement, elle remonte, si l’on voit des chevaux noirs sur fond blanc ou au contraire des oiseaux blancs sur fond noir…



S’agit-il d'une auteure à succès fragile , un peu paumée, aux prises avec une admiratrice manipulatrice et machiavélique ? Ou d’une auteure diaboliquement habile, vampirisant ses admirateurs pour nourrir son univers romanesque?



Est-ce un récit inspiré de faits réels incroyablement romanesques, quoique fortement ancré dans l’actualité littéraire et éditoriale …ou une fiction incroyablement plausible grâce à des effets de réel aussi habiles que trompeurs ?



Le roman-récit donne le vertige….et la mise en abyme va très loin, puisque ce qui s’avère mensonger (bel oxymore) est le fruit d’une « contaminatio » habile de la fiction littéraire…



« Cette histoire est vraie puisque je l’ai inventée » disait ironiquement Boris Vian.



Delphine de Vigan, bien loin de la panne d’inspiration qui sert de prétexte à ce récit, jongle brillamment avec le vrai et le fictif, avec la victime et le bourreau, avec les genres littéraires- autobiographie ? thriller ? essai pervers sur l’écriture romanesque ? - varie les perspectives, les angles d’attaque, bref, nous donne le tournis…



On en redemande…



Une petite chauve-souris, avec le recul, est finalement bien inoffensive au regard de cette vampirisation radicale…



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Les gratitudes

« Vieillir, c'est apprendre à perdre. »

Perdre des gens qu'on aime, forcément, c'est mathématique.

Mais aussi ses facultés physiques et mentales :

« Perdre ce qui vous a été donné, ce que vous avez gagné, ce que vous avez mérité, ce pour quoi vous vous êtes battu, ce que vous pensiez tenir à jamais.

Se réajuster.

Se réorganiser.

Faire sans.

Passer outre.

N'avoir plus rien à perdre. »



A 80 ans passés, Michka perd quelque chose.

Quoi ? Elle ne sait pas exactement. La mémoire, les mots. Et cet effacement la terrorise : « Et puis ça ne sert à rien tout ça, je sais très bien comment ça va finir. A la fin, il n'y aura plus rien, plus de mots, tu comprends, ou bien alors n'importe quoi, pour remplir le vide. »



Dans son Ehpad, trois personnes viennent lui rendre visite. On fait la connaissance de deux d'entre elles : Marie, une jeune femme qui lui doit beaucoup, et Jérôme, l'orthophoniste.



Ce roman pourrait être une pièce de théâtre tant les mots y sont importants, et le décor volontairement minimaliste.

J'ai commencé par trouver le propos trop léger.

C'est sous-estimer Delphine de Vigan. Elle démarre en douceur, sur le ton de l'anecdote autour de sujets rebattus (personnes âgées, fin de vie, enfance, famille), et fait monter la tension, éveille l'empathie, suscite l'émotion.

Ses personnages lui ressemblent, et cela me touche, comme Marie ici - les cheveux en bataille, les yeux cernés, femme douce au passé douloureux, fragile et en proie aux doutes mais déterminée.



Malgré le tragique de l'histoire, on arrive à sourire, notamment avec ces 'jeux' de mots. Lesquels méritent qu'on s'y arrête, parce qu'ils en disent long sur les souffrances et traumatismes de Michka :

« C'est à cause des mots, je t'ai dit. C'est la nuit que... ça se terre... ça se perd, quand je n'arrive pas à m'endormir, je sais bien que c'est à ce moment là qu'ils s'enfouillent, qu'ils s'enfuitent, j'en suis sûre, mais il y a rien à faire, des wagons entiers… ».

Des wagons...



Je ne suis sans doute pas la première et ne serai pas la dernière à conclure avec un MERCI à l'auteur pour sa sensibilité, et pour les échos que je trouve en la lisant.

Parce qu'on oublie parfois de le dire - c'est l'un des sujets de ce roman, d'où le titre.
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No et moi

La chaleur écrase sa lourdeur sur les corps gisant à même le macadam. Des orages éclatent, trombes d’eau qui fracassent ces mêmes corps. Un froid glacial mord l’inertie de ces êtres vivants ou à demi-mort. Les saisons s’enchaînent, se défilent, avancent, sans retour arrière. Inexorablement, le temps marque l’empreinte de ces milliers de personnes habitués des recoins de rue. En cette journée d’été, je descends en sous-sol respirer l’air nauséabond d’un métro, ligne 13 quais puants, mon livre de poche en poche.



Une jeune fille, peut-être trop intelligente pour son âge, s’adapte à sa vie de collégienne tant bien que mal, restant dans son coin à observer ses camarades, à demi cachée derrière le vieux chêne. Un silence au milieu du brouhaha d’une cour de collège. Avant la sonnerie fatidique Lou se promenait encore du côté de la gare d’Austerlitz, promener son regard sur les autres. Et croiser la mine crasseuse et intrigante de No, Nolwenn. Refermée sur elle-même, à peine plus âgée qu’elle… Et pourtant… une ado dans la rue semble vieillir beaucoup plus vite…



Un mélange de crainte et de méfiance au début, le temps de l’appréhension, mais après quelques bières ou quelques vodkas à une table au fin fonds d’un café, loin des regards courants, le courant semble s’établir ; Ne pas avoir peur de certains silences, ni certaines gênes qui peuvent s’instaurer entre deux mondes si différents. Lou est animée d’un profond désir, une envie sincère d’aider son prochain, de lui procurer un toit et plus, une chaleur humaine pour une jeune fille qui semble tant en manquer.



Je ne pensais pas découvrir la plume de Delphine de Vigan directement par ce roman qui semble presque trop humaniste pour le pauvre type que je suis. Elle m’a bien eu. Souvent au bord de l’émotion, certains passages m’ont troublé, les yeux humides qui réagissent à la bonté de cette jeune fille, une âme magnifiquement belle. Peut-on dire que la fin est presque prévisible, chaque être est particulier, même dans la rue. La généralisation de ces laissés-pour-compte n’aboutit qu’à l’absence de profondes décisions. Il faut prendre le temps de lire en eux, pour comprendre avant tout leur histoire, aussi sombre soit-elle. Je finis le roman, mon trajet en métro touche à sa fin, je referme le livre, remonte à la surface, n’ai même pas eu un coup d’œil pour ceux qui dorment sales et puants sur le quai des différentes stations, mon regard plongé exclusivement dans mon bouquin. Je suis vraiment un pauvre type.
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Les enfants sont rois

Pour vivre heureux, vivons cachés.

C'est mon avis, qui ne fait pas l'unanimité à en juger par la multiplication des exhibitions télévisuelles ou sur internet, et du nombre d'aspirants à la célébrité - avec le fric et les paillettes associés.

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Certains rêvent de gloire, pour eux ou leur progéniture.

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Quand un adulte se lance dans l'aventure, c'est à ses risques et périls. Qu'importe d'avoir l'air c**, pourvu qu'on ait l'ivresse - encore faut-il posséder la maturité et la stabilité nécessaires pour anticiper la gueule de bois au réveil. J'ai une pensée attristée pour la gagnante du premier Loft Story, scotchée depuis vingt ans sur un chariot de montagnes russes bloquées sur 'ON'.

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Lorsque des mineurs sont jetés en pâture, c'est encore plus flippant.

Le phénomène n'est pas nouveau : enfants artistes ou sportifs, poussés par des parents persuadés d'avoir donné naissance à un prodige et/ou avides de gagner de l'argent avec le gamin. Je pense aux mères des 'petits rats' de l'opéra du XIXe siècle ('La petite danseuse', C. Laurens), prêtes à vendre leur fille prépubère à de vieux riches. On peut également citer une patineuse artistique des 80's, les frères Jackson, Britney Spears, Drew Barrymore qui incarna l'adorable blondinette dans 'E.T., l'Extraterrestre' (1982), parmi tant d'autres. Et on constate les dégâts quelques années ou décennies plus tard, les 'effondrements psychologiques' (comme dit l'auteur) de ces gens qui ont brûlé les étapes, perdu de précieuses années d'enfance, d'innocence, de jeu, d'ennui, etc.

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Ici, une jeune mère déçue par un coup de projecteur trop éphémère se met en scène avec son mari et leurs deux enfants, qui n'ont que trois et cinq ans au début de l'aventure. Ceci à une cadence infernale. Leur vie est scénarisée, leur quotidien adapté en vue de 'partages' sur les réseaux sociaux. Pour la gloire ? Pas seulement.

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L'intrigue se présente comme un polar, puisqu'il y a d'emblée une disparition et une enquête. En toile de fond, des sujets de société tels que l'exposition médiatique, les réseaux sociaux, la publicité, la profusion, le gaspillage, l'artifice... On retrouve ici des sujets récurrents chez Delphine de Vigan : famille (aimante/toxique), emprise parentale plus ou moins consciente/volontaire, sentiment de vacuité et mal-être. Mais aussi intimité dévoilée et dommages collatéraux (cf. 'D'après une histoire vraie', dans le prolongement de l'autofiction 'Rien ne s'oppose à la nuit').

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Parfaitement documenté, ce roman se lit tout seul - propre et net, sans esbrouffe. Ce style élégant et épuré met en évidence l'horreur de la situation, la folie de cet engrenage. J'ai eu besoin de pauses de temps en temps pour m'extraire de cet univers parallèle complètement dément, me demander si la mère est...

Mais... que celui qui n'a jamais posté, blogué, ne s'est jamais réjoui d'un 'like' lui jette la première pierre.

Que celui qui n'est pas accro à son ordi lui balance un caillou.

Que celui qui ne peut pas se passer trois jours de son téléphone lui envoie un grain de sable (ça, et seulement ça, je peux - en faisant gaffe aux yeux).

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... ♪♫ Kill the Kids ... ♪♫
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Les gratitudes

C’est bien court : une grosse nouvelle ou un petit roman. Attendrissant, un peu triste, plein de bons sentiments.



Mishka vieillit. Et chez elle, les mots s’échappent, sont remplacés par d’autres, qui démontrent la richesse du lexique chez cette ancienne correctrice de journal. Sauf que ce ne sont pas les bons mots qui prennent place dans les phrases qu’énonce la vieille dame. Et cette aphasie s’accompagne de crises d’angoisse qui compromettent son autonomie à domicile. Place donc à l’institution, où l’on est admise après ce qui ressemble comme deux gouttes d’eau à un entretien d’embauche! Humour grinçant qui cache les failles de l’institution mais révélera la fragilité des capacités de notre héroïne.



Suivront les visites de Marie et celle de Jérôme l’orthophoniste, qui tente de ralentir l’évolution, sans illusion sur l’issue.



C’est donc très court, et par conséquent on reste un peu sur sa faim. Les personnages sont esquissés, leur histoire se résument à quelques paragraphes, alors qu’on aurait voulu en savoir plus sur ce qu’était Mishka avant que la maladie ne l’atteigne. On aurait aimé en savoir plus sur la relation de Jérôme avec son père, et sur ce qui se passe dans cette maison de retraite. Tout est abordé mais survolé.





C’est dommage car le ton est juste, l’écriture belle et adroite (belle prouesse que de faire sentir l’évolution vers l’aggravation du langage de Mishka). Et puis le thème principal, annoncé dans le titre est si important, savoir dire merci.
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Les loyautés

La première page définit les loyautés et va de ce fait au cœur de notre être : les fidélités par rapport à notre enfance,à nos êtres chers, nos croyances sont la meilleure et la pire des choses.

Ensuite, par un jeu de voies chorales, nous entrons dans l'action du roman.

Hélène, une prof anciennement blessée dans l'enfance croit déceler un profond mal-être chez Théo, élève de 5ème.

Théo a un ami, Mathis et ensemble ils font des bêtises pour dépasser leurs limites de sensations personnelles.

Les mères des deux enfants donnent aussi leur version des faits.

Un des deux garçons vit bien une véritable situation dramatique mais comme dans ce cas, les parents divorcés, ne communiquent pas, le garçon, par loyauté, pour ne pas trahir un de ses parents, cache la situation à tous.

Hélène est freinée dans son intervention par l'école et un des parents.

Interviendra-t-elle trop tard ? La fin reste ouverte à notre imagination.

J'ai retrouvé avec grand plaisir la magnifique écriture de Delphine de Vigan, son extraordinaire lucidité sur les sentiments familiaux et personnels. Elle explore à merveille les deux jeunes adolescents et leur environnement.

J'ai lu tous ses livres. Celui-ci présente un côté exceptionnel : c'est qu'à un moment où à un autre, on va se retrouver dans un des passages.

Personne n'a ou n'a eu une vie toute lisse, sans souci, sans évènement marquant.

Une lecture que je n'oublierai jamais et dont je relirai des passages, à coup sûr.

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Les gratitudes

Touchée en plein cœur. j’aime Delphine de Vigan, l’auteure et la femme. Touchante et enveloppante, intelligente, hypersensible, humble, attentive bref l’amie que l’on aimerait avoir.

Dans ce roman : La vieillesse et sa fatalité, thème universel mais traité avec tellement de subtilité, d’élégance et de sensibilité qu’une aura particulière s’en dégage.



C’est l’histoire de l’attachante Michka, personne âgée qui perd progressivement ses mots (elle devient aphasique ), ses capacités mnésiques, son corps mais pas sa lucidité.

Sa solitude a un goût métallique et synthétique de téléalarme.



Placée dans une maison de retraite, elle est épaulée par sa jeune amie Marie et Jérôme son orthophoniste. Leur sollicitude sera un rempart à sa détresse.

Surgit régulièrement la directrice de l’établissement figure caricaturale de ce système parfois abusif dont le rendement et la performance sont le seul leitmotiv.

Michka vibre, enfin, elle voudrait encore vibrer sauf que ses envies, ses désirs ses espoirs sont désormais cadenassés et ont basculés dans une zone de non-droit. Le temps, ce tueur légitime, a nettement amoindri ses possibilités, ses espérances. Sa pulsion de vie ne trouve plus suffisamment d’écho dans son corps, dans sa psyché, dans ses sens, essoufflés, s’exprimant à bas régime.



L’auteure met ses mains dans la glaise pour sculpter un portrait de la vieillesse et ses errances avec grâce et réalisme.

Le regret de ce que l’on fut, la peur de ce que l’on devient, la nuit devant soi.





Quel espoir quand tout se déglingue et que la seule vision de l’avenir est le mur inévitable du destin ? : La compassion.



Contre la fatalité du vieillissement on ne peut pas grand chose si ce n’est un regard, une écoute chaleureuse et des actes et gestes compatissants, de l’amour donc.



Delphine de Vigan nous transporte, non sans humour, dans son monde sensible avec pudeur et réserve, elle explore la perte d’autonomie, la perte de soi dans un récit émouvant ponctué de dialogues touchants et drôles.

Très beau.

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Jours sans faim

Un récit poignant, d'une rare intensité et sobriété.

Malheureusement, je ne serai pas objective par rapport à ce témoignage.

Ayant atteint les limites que son corps pouvait supporter, Laure, jeune fille de 36 kilos, est hospitalisée pendant 3 mois, dans un service de nutrition. Alimentée grâce à une sonde naso-gastrique et aidée par toute une équipe médicale, elle va réapprendre, à son rythme, à écouter son corps et à s'alimenter.

Une fois passée cette euphorie et cette jouissance de la maîtrise de son corps, une fois diagnostiquée cette maladie, la voie vers la guérison reste un long combat. Et les séquelles, aussi bien physiques que psychologiques, n'en demeurent pas moins contraignantes.

Delphine De Vigan se met réellement à nu dans ce récit, comparable à un journal intime. Elle a mis des mots sur ses maux et a réussi à nous faire comprendre que l'anorexie mentale est bel et bien une maladie et non un caprice d'adolescentes qui veulent ressembler aux mannequins.

Un récit prégnant, bouleversant et thérapeutique...

Une belle leçon de courage...

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Les heures souterraines

« Mais les gens désespérés ne se rencontrent pas. Ou peut-être au cinéma. Dans la vraie vie, ils se croisent, s'effleurent, se percutent. Et souvent se repoussent, comme les pôles identiques de deux aimants ».



Aucun doute, Mathilde et Thibault, les deux personnages du roman, sont des désespérés. Ils ne se connaissent pas, et on se pose d'emblée la question de savoir s'ils vont se rencontrer (se croiser, s'effleurer, se percuter, se repousser ?), et on se prend à espérer un « happy end », tant ces deux-là souffrent et auraient mérité un peu de répit.



Commençons par Mathilde, cadre supérieure dynamique hyper-compétente, elle est le bras droit de son patron depuis 8 ans. Jusqu'au jour où elle le contredit devant un client. C'est le début de la descente aux enfers : il dénigre son travail et ses compétences devant les collègues, lui retire peu à peu toute responsabilité, toute mission, la prive de son bureau puis d'ordinateur pour la remiser dans un bureau obscur près des toilettes. En droit du travail, on appelle ça harcèlement moral. Mais Mathilde est tellement abasourdie qu'elle nie d'abord l'évidence. Et à force d'attendre que « ça passe », elle se retrouve moralement laminée au point d'être incapable de réagir. Elle est à nouveau au fond du trou, comme il y a 10 ans, après la mort de son mari. Elle avait mis du temps, mais elle avait su remonter la pente, retrouver un travail, qu'elle adorait. Alors on se dit qu'elle a de la force, qu'elle va résister, qu'elle s'en sortira cette fois aussi. Qu'elle va porter plainte, mettre le syndicat et la DRH de son côté, se battre. Entre entreprise de destruction psychologique systématique et minuscules bouffées d'espoir et de courage, on oscille avec elle au bord du gouffre, au bord du quai du métro juste avant que la rame arrive.



Thibault, lui, est médecin aux « Urgences médicales ». Il passe ses journées à parcourir la ville dans sa voiture pourrie, pour aller soigner des angines, des gastro-entérites et surtout des solitudes. Il faut avoir le coeur et l'esprit bien accrochés pour ce travail, et ce n'est pas vraiment le cas de Thibault. Il vient de mettre fin à une relation à sens unique, dans laquelle la femme ne l'aimait pas. Mais la brisure (au propre et au figuré) est probablement plus ancienne, remontant au jour où une portière de voiture s'est claquée sur sa main, l'amputant de deux doigts et de son rêve de devenir chirurgien. Contrairement à Mathilde, dépossédée de son emploi, lui s'abrutit de travail pour éviter de penser. Mais ça ne fonctionne pas, ses patients lui rappelant la misère affective à l'oeuvre dans les grandes villes.



J'ai adoré ce roman. Il se lit en quelques heures, il est bien écrit, et comporte un certain suspense. Mais surtout, j'ai ressenti une totale empathie avec Mathilde, moins avec Thibault, dont l'histoire m'a moins interpellée. Pourtant on pourrait être tenté de prendre en grippe l'inerte Mathilde, et avoir envie de la secouer. Mais grâce à la justesse de l'analyse psycho-sociologique, on comprend qu'elle en est incapable tant son patron a réussi à l'anéantir.

J'ai adoré ce roman, pourtant il est démoralisant. Delphine de Vigan n'est pas une optimiste. Elle dénonce la violence sournoise mais inouïe qui règne parfois dans le monde de l'entreprise, en particulier le sadisme sans nom du harcèlement moral. Elle dépeint aussi, sans pleurnicheries ni misérabilisme, l'isolement, la solitude, la difficulté pour les faibles de résister à cette vie écrasante, impitoyable. Elle ne se/nous berce pas d'illusions en faisant miroiter des lendemains qui chantent. Peut-être que ça ira mieux, mais peut-être pas…

Peut-être que le message à retirer de ces deux tranches de vie, c'est qu'au-delà d'un certain degré de souffrance, on ne s'en sort pas seul. Mais qu'il est parfois difficile de voir la main tendue.

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Rien ne s'oppose à la nuit

Avis mitigé sur ce livre qui évoque quand même des sujets très durs , je n'ai pas ressenti de compassion pour les personnages , bien au contraire , le couple des grands parents surtout , le père puis grand père incestueux , la grand mère d'une indifférence incroyable .

J'ai pourtant lu ce livre assez facilement et peut-être que ce thème bouleversant fait blocage . Moi ce qui m'a marqué , c'est l'écriture froide de l'auteur , je suis pourtant passionnée par tout ce qui touche à la psychiatrie et j'ai trouvé que le portrait de la mère bipolaire était très bien , très réaliste mais en même temps j'avais l'impression de lire la description d'un cas clinique et non pas un récit de vie , c'est de qui m'a dérangé , le contraste avec les confidences très personnelles et si difficiles et la froideur , comme si l'auteur avait contrebalancé la lourdeur des thèmes évoqués par une absence de sentiments . je suis peut-être sévère avec l'auteur mais c'est mon ressenti du moment et tant pis si je suis à contre courant de toutes ces critiques si élogieuses .
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Les gratitudes



D'un coup, les mots se sont envolés, enfouis ou perdus... Autonome jusqu'à aujourd'hui, Michka vit seule chez elle. Elle lit, regarde la télé, reçoit quelques visites. Notamment celle de Marie, son ancienne petite voisine. Autonome jusqu'à ce jour d'automne où, assise sur son fauteuil, Michka ne peut plus bouger ni se lever. Elle appelle alors la téléassistance et Marie accourt pour l'aider. Il ne fait aucun doute que la vieille dame ne peut plus rester toute seule. Alors, les deux femmes se rendent dans un Ephad où la directrice les reçoit gentiment et les prévient dès qu'une place se libère. Ceci acté, la vie de Michka bascule. Des jours routiniers, les visites de Marie, les exercices avec l'orthophoniste, les petites balades dehors... Tout semble étriqué, rétréci. Et les mots, eux, se perdent de plus en plus...



Delphine de Vigan dépeint avec une grande sensibilité et empathie la vieillesse. L'on suit Michka qui devra tout quitter, sa maison, ses bibelots, sa routine si rassurante pour retrouver, du jour au lendemain, dans un Ephad. Elle devra, par-dessus tout, composer avec son nouveau moi, avec ses mots qu'elle perd. À son chevet, Marie, une jeune femme pleine de gratitude et de reconnaissance envers cette vieille dame, et Jérôme, l'orthophoniste qui voudrait tant l'aider à retenir ses mots et l'éloigner, autant que faire se peut, du gouffre. Ce roman, qu'on imagine un brin autobiographique, laisse la place aux silences, aux mains qui se frôlent, aux regards reconnaissants et aimants, aux gestes attentifs et à la vie qui s'effiloche. De ces liens d'affection et de gratitude, l'auteure tisse un récit sensible, touchant et lumineux.
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Les gratitudes

On peut trouver beaucoup de qualités au dernier livre de Delphine de Vigan. La pertinence du portrait des vieilles personnes en fin de vie en est une. On peut trouver aussi le parti pris de décrire un entourage intime et professionnel uniquement bienveillant et empathique (trop beau pour être vrai), irréaliste. Quel que soit son ressenti, on ne peut nier l'intérêt du sujet qui nous touche ou nous touchera tous à un moment de notre vie.



Pour avoir vu ma grand-mère adorée et adorable perdre pied avec la réalité et peu à peu le sens des mots, je sais que vieillir trop est une punition. Alors merci à Delphine de Vigan de le rappeler pour ceux qu'il nous faut accompagner, qu'on aime qui faseillent et qu'on ne reconnaît plus.

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Les gratitudes

Delphine de Vigan a su trouver les mots et le ton justes pour nous parler de la vieillesse et de la perte d'autonomie : sans apitoiement, sans pathos, sans larmoiement, de façon réaliste et avec beaucoup de délicatesse.

Madame Seld, de son prénom Michka, est une ancienne correctrice pour un grand magazine. Cette vieille dame que Marie aimait beaucoup et sans qui elle ne serait peut-être plus là, décède. Elle se demande alors si elle l'a assez remerciée, si elle lui a suffisamment montré sa reconnaissance et si elle a été assez proche, assez présente, assez constante…

Lui reviennent alors les instants partagés : « J'essaie de retrouver ce jour où j'ai compris que quelque chose avait basculé et que le temps dorénavant nous serait compté. »

Le récit de Marie débute. Elle nous raconte comment Michka a rapidement perdu son autonomie jusqu'au jour où elle a dû quitter son appartement pour l'EPHAD. Marie ne sera plus alors, la seule personne à nous narrer ce que sera cette nouvelle vie. Se joindra à elle Jérôme, l'orthophoniste qui, deux fois par semaine, se rend auprès de Michka pour des exercices afin de repousser l'affaiblissement mental.

On apprend aussi que le plus grand regret de Michka est de n'avoir jamais pu exprimer l'immense gratitude au couple qui l'a recueillie pendant la guerre et leur témoigner sa profonde reconnaissance.

L'autrice explore donc aussi le thème des non-dits, des mercis trop longtemps retenus et qu'on n'a plus l'opportunité de dire.

Les gratitudes est un roman bouleversant qui nous touche au plus profond. L'émotion est très forte tout au long du roman. Mais Delphine de Vigan arrive à nous faire sourire quand Michka qui confond les mots ou ne les retrouve plus, les remplace par des mots aux sonorités similaires et cela nous permet de respirer. C'est un livre empli de douceur, de tendresse et de poésie qui m'a bouleversée.

Je pense qu'on ne peut pas sortir tout à fait indemne de cette lecture car qui n'a pas appréhendé un jour ou l'autre de se retrouver en EHPAD et d'être plus ou moins bien traité et qui n'a pas non plus regretté de ne pas avoir su remercier en temps voulu un être cher ?


Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Les heures souterraines

Ce livre ne m'a pas laissée indifferente, c'est une illustration du harcèlement

moral : d'un jour à l'autre vous n'êtes plus rien parce que vous n'avez rien vu arriver, vous avez beau faire tous les efforts, vous êtes échouée au fond du couloir dans un bureau. Ceux que vous pensiez être vos collègues restent à distance c'est chacun pour soi, c'est l'histoire de Mathilde et de sa descente aux enfers : petits mensonges et grosses trahisons de l'entreprise.

Elle est veuve et vit seule avec ses trois enfants.



En parallèle, il y a l'histoire de ce médecin urgentiste Thibault qui décide de mettre fin à sa relation avec Lila car lorsqu'il lui dit "je t'aime" elle lui dit : "non". Lorsqu'il trouve le courage d'y mettre fin, elle lui dit : "merci", "merci pour tout". Il attend ensuite une manifestation de sa part, mais rien : pas de SMS, pas d'appels. Il continue à vivre sa vie professionnelle. Il est seul et le parfum de Lila encore dans sa voiture. Il n'a rien construit, il travaille sans relâche et personne ne l'attend lorsqu'il rentre le soir.



C'est l'histoire de deux êtres qui se bousculent physiquement, mais ne se rencontrent pas....



C'est le style Delphine de Vigan, on se sent à nouveau dans "la peau" des personnages, après je pense que "les Heures souterraines" c'est -d'après une histoire vraie- :



car dans "Rien ne s' oppose à la nuit", elle écrit page 15 :



" dans les mois qui ont suivi j'ai écrit un autre livre sur lequel je prenais des notes depuis plusieurs mois. Avec le recul, j'ignore comment cela a été possible, si ce n'est qu'il n'y avait rien d'autre une fois que mes enfants étaient partis à l'école et que j'etais dans le vide, rien d'autre que cette chaise devant l'ordinateur allumé, je veux dire pas d'autre endroit où m'asseoir, où me poser.



Après onze années passées dans la même entreprise -et un long bras de fer qui m'avait laissée exsangue- je venais d'être licenciée, consciente d'en éprouver un certain vertige quand j'ai trouvé Lucile chez elle....."



Je pense que chaque livre de Delphine de Vigan fait écho à sa propre histoire d'une façon ou d'une autre.



Enfin, par le pur des hasards, j'ai vu sur Arte ce dimanche matin, l'adaptation "des Heures souterraines", bien sûr il n'apporte pas autant de détails que la lecture du livre, mais le film est assez fidèle.



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No et moi

Il est des livres qui vous prennent par la main pour vous envelopper dans une bulle de chaleur. Il est des livres qui vous font rater la cuisson des pommes de terre parce qu'il ne vous reste que dix pages et que vous ne vous sentez pas capable de tenir le repas complet sans être allée au bout (oui, oui, c'est du vécu!). Il est des livres qui font tout oublier, même comment respirer.



Dès les premières pages de No et moi, j'ai su que je me trouvais devant un de ces livres, et j'ai su que je n'en sortirais pas indemne. Ce petit ouvrage de rien du tout, acheté d'occasion trois francs six sous allait laisser sa trace, indélébile.



Tendre, bouleversant... Mais aussi dur et cruel... Voilà autant d'adjectifs qui pourraient décrire ce roman.



Une belle leçon de vie sur le rapport aux autres, sur ces "autres" si différents, en marge de la société, et qui pourtant ont une histoire qui mériterait d'être entendue. Et sur les "autres" comme Lou, dont le cerveau ne fonctionne pas comme celui de la majorité, et que sa différence isole, ou comme Lucas, en échec scolaire, et qui, malgré l'admiration qu'il suscite, est tout aussi seul.



C'est l'histoire d'un exposé, d'une rencontre qui va changer leur vie. Et qui m'a transportée de telle façon que je n'ai pas pu faire de pause, et que je l'ai lue sans m'arrêter. C'est l'histoire d'une ado qui ne comprend pas comment le monde tourne, et qui est convaincue qu'un petit quelque chose peut tout changer. C'est une histoire d'amitié, d'amour.



Quelle force dans l'écriture ! Quelle beauté dans ce récit ! Et quelle critique dans ces lignes... Un portrait bien laid de notre société, au sein de laquelle brille malgré tout une petite lueur, celle de la solidarité, celle qui dit qu'on ne devrait jamais être seul.



Beaucoup ont dit qu'il s'agissait d'un roman pour ado, sans doute à cause de l'âge de protagonistes. Je n'en suis pas sûre. Le sujet est complexe, traité parfois sans détours. Le regard de Lou est lucide, et sa lucidité est parfois douloureuse, laissant le coeur à vif. Je ressens encore ses lacérations. Mais aussi le baume apaisant de son amour. Une trace indélébile je vous disais...
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Les heures souterraines

Ce matin-là, ce lundi 20 mai, Mathilde se réveille tôt et sait qu'elle n'arrivera pas à se rendormir. Parce qu'une voyante lui a prédit qu'un homme allait changer le cours de sa vie et qui la délivrerait, elle espère que quelque chose va effectivement se produire ce jour-là. Comme tous les matins, Mathilde se lève, file sous la douche et prépare le petit-déjeuner pour ses trois enfants qu'elle élève seule. Comme tous les matins, elle prend le métro puis le RER et se rend à son travail. Mais, aujourd'hui, plus que tout, elle est fatiguée, elle n'en peut plus de devoir s'enfermer dans un bureau, de ne plus avoir de travail à faire, de se rendre dans son entreprise où plus personne ne l'attend. Cela dure maintenant depuis le mois de novembre. 8 mois qu'elle vit un enfer. Cadre dynamique dans un grand groupe, elle excellait dans son travail et était le bras droit de son patron, Jacques. Mais parce qu'une fois, en réunion, devant des clients, elle a jugé utile de défendre son point de vue, celui-ci lui mène la vie dure: des réflexions en tout genre, des brimades, des dossiers dessaisis, des voyages d'affaires annulés ou des humiliations devant les collègues. Mathilde tait cette mise à l'écart, elle se sent humiliée et ignorée de tous. Le pire est qu'elle ne comprend pas les raisons de ce changement si brutal...

De son côté, Thibault vient de passer un week-end en amoureux avec Lila. Mais parce qu'il sait qu'elle n'arrivera jamais à l'aimer, qu'elle se dérobe et ne se dévoile pas, il a décidé de la quitter. Ce lundi 20 mai, il reprend son travail aux services des urgences de Paris. Sa journée sera rythmée par l'attente d'un message de Lila, les visites chez les malades et les embouteillages. Entre les gastro-entérites et les rhino-pharyngites, il y a par-dessus tout la solitude, l'espoir de rencontrer au moins une personne dans la journée. Thibault connaît cette détresse, cette misère, cette solitude dans cette ville qui vous happe, vous enferme et vous oppresse...



Ici, l'on suit parallèlement la journée de Mathilde et Thibault, deux êtres en plein désarroi, coincés l'un dans sa voiture et dans la ville et l'autre dans son entreprise, deux âmes en peine qui se ressemblent étrangement, deux solitudes qui, on l'espère, finiront par se croiser. Delphine De Vigan nous offre un livre poignant, tragique et étouffant dans un monde stressant, terriblement anonyme, semblable à l'araignée qui vous emprisonne dans ses filets. Le harcèlement moral, dans son incroyable cruauté, subi de plein fouet par Mathilde, est ici dépeint dans un silence consternant et assourdissant. D'une écriture précise et sensible, l'auteur nous happe avec ses mots et décrit avec une grande justesse ces maux du quotidien, cette cadence infernale que nos deux héros tentent de maintenir.



Les heures souterraines... des minutes sombres...
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Les loyautés

Delphine De Vigan raconte le mal-être de personnes malmenées par la vie, les loyautés qu'elles peuvent éprouver. Ci-après ces quatre personnages :



Hélène, professeur dans un collège, s'inquiète pour Théo, un de ses élèves. Elle-même ayant connu de gros problèmes causés par son père pendant son enfance est persuadée que Théo est lui aussi une victime.

Théo, garçon de douze ans dont les parents sont divorcés, cherche l'apaisement dans l'alcool, Mathis est son ami.

Cécile est la maman de Mathis, elle s'inquiète de l'amitié que son fils porte à Théo. Cécile a d'autres secrets.

D'une très belle écriture, Delphine De Vigan révèle des situations que beaucoup de personnes vivent quotidiennement.

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Delphine de Vigan

Delphine de Vigan a écrit son premier roman "Jours sans faim" sous un pseudonyme. Quel est-il ?

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