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Citations de Gaston-Paul Effa (44)


Avant de parler, vérifie si le mot que tu vas utiliser n'abîme pas la chose que tu veux nommer.
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D’un seul coup les parfums du tronc, du terreau, de l’humidité s’effacèrent. Des effluves d’oranger s’amplifièrent. L’oiseau s’était immobilisé. La lumière s’épanouissait, patine d’or clair, ultime générosité d’un soleil renaissant, tout à la fois allègre et cependant mal assuré de soutenir le défi des nuages qui, toute la matinée, s’efforçaient d’éteindre le ciel
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Nous ne cessons d’être les juges implacables de ceux que nous ne connaissons pas. Un mot, un regard, la qualité d’un son ou seulement d’un silence sont pour nous des pièces à conviction dans le procès que nous allons leur intenter.
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"la culture est un de ces miraculeux moments d'accord entre les artistes, les penseurs et la société, qui sont en train de disparaître avec le règne de la médiocrité."
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Quelle mortification, le livre! Comme une entrée dans les ordres. Le regard que l’on avait jusqu’alors porté sur soi-même et sur sa vie ne sera jamais le même. Lorsque je décrivais mon angoisse, ma solitude, je les décrivais dans l’exaltation. L’angoisse, ce n’était pas quand j’écrivais qu’elle me dévorait, mais quand je n’écrivais plus.
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Lève les yeux, regarde ces étoiles,
J'habite dans chacune d'elles,
Tu ne me vois pas, un voile épais te couvre encore les yeux.
Regarde ces nuages qui transportent
L'eau que boiront ceux qui n'ont pas la chance de voyager;
Je suis dans chaque goutte de cette eau.
Si tu verses des larmes à mon départ,
C'est parce que tu n'as pas compris que je suis entrée dans la joie.
Ouvre chaque fenêtre de la maison pour que le soleil y pénètre.
Installe-toi, respire, regarde les fleurs dans ton jardin:
Chacune t'apprend que les morts ne sont pas morts,
Ils ont élu domicile en toi,
Ils sont dans chaque feuille, chaque pétale, chaque insecte.
Ils sont dans le vent qui souffle, dans la tempête qui gronde,
Dans le rayon qui apaise, dans la poussière que tu soulèves
Et qui t'apprends que les morts ne sont pas morts,
Ils ont élu domicile en toi;
Ils sont dans l'enfant qui naît,
Ils sont dans la main que tu touches,
Dans la pierre qui se réchauffe au soleil,
Dans le ruisseau qui serpente,
Dans l'épaisseur de la pluie,
Encore chargée du chant du colibri.
Cette voix, cette main, ce regard, ce sourire, cette ombre claire
Qui passent en mots, c'est encore moi;
Je ne pars pas pour toujours, je te précède
Pour te préparer le chemin de la vraie lumière.
Si je m'absente, c'est pour te souffler que
La joie a son double dans ton cœur.
poème de TALA
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Je voulais payer des factures aujourd'hui et, une fois de plus, il ne reste rien sur notre compte. On est le 10 du mois et je n'ai pas vu passer ton salaire. Comment vais-je payer l'électricité, le loyer, faire les courses jusqu'à la fin du mois ? De ton salaire d'ingénieur, il ne te reste donc rien pour notre famille ? Et tu prétends être un homme intelligent et responsable ?
Je ne peux lui répondre. Je réfléchis. Pour ceux qui me connaissent superficiellement, j'étais, avant de rencontrer Hélène, ce qu'on appelle encore - mais sans doute pour peu de temps - un «élu des dieux». C'est-à-dire un homme né dans la misère, que les fées avaient distingué pour en faire un être à l'abri du besoin. Je dois mon droit d'aînesse à un vieil homme visionnaire ; les esprits lui avaient parlé en songe : malgré mon jeune âge, ma constitution fragile, je serais un jour responsable de tous les miens, je ferais une carrière brillante, j'aurais beaucoup d'argent, j'enterrerais dignement les anciens de mon clan, mon visage serait le soleil des morts, toute ma vie j'honorerais la tradition. Élu très tôt l'aîné de ma famille, je fus pris dans une spirale où tournoyaient avec moi tous ceux que j'aimais. Ces êtres avec lesquels j'étais censé vivre, que j'étais censé protéger, et dont je m'occupais si peu, je les voyais au contraire entraînés avec moi dans le même étrange naufrage.
- Ta famille africaine ne te fait miroiter que ton droit d'aînesse et la tradition lorsqu'elle a besoin d'argent pour payer un mariage, un enterrement de plus. Mais qu'est-ce qu'ils croient là-bas, qu'il suffit de ramasser l'argent dans les caniveaux et de l'envoyer par Western Union ? Ils savent que tu te tapes des journées de douze heures de travail pour eux ?
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De la même façon que s'inscrivent dans le ciel les constellations de la Grande Ourse et de la Petite Ourse ou celle d'Orion ou celle du Centaure, s'inscrivit dans l'obscur de ma chair, de mes larmes, de ma salive et de mon sang la constellation de la déchéance.
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Seuls jours de son enfance si pleinement vécus que ceux qu'il passait avec les chevaux! Il se souviendrait toujours de l'odeur montante, lourde, épicée des cuirs qui faisandent dans l'humidité ou qui font sécher leur sueur au soleil.
Tout petit déjà, sa grand mère le confiait aux chevaux qu'elle élevait, lorsqu'elle étendait le linge ou travaillait au jardin. Grésil, son compagnon de jeu entre tous, se penchait : Bélou prenait la tête de Grésil entre ses mains pour lui déposer un baiser sur le front, à l'image de sa grand-mère au moment de le mettre au lit. Puis il murmurait de douces paroles à l'oreille de son compagnon. Les autres chevaux, nez en l'air, membres raidis, s'empressaient autour de lui, impatients. Sur son visage se lisait l'avant-goût du bonheur et de la paix :
- Oh! Attendez mes amis,je cours chercher le ballon.
Assis sur un tas de foin, de crottes, d'épis de maïs rongés jusqu'à la racine, il faisait voler le ballon et les regardait, l'oeil malicieux. Ses amis poursuivaient maladroitement la balle qu'ils frappaient des membres antérieurs.
Les petits voyous s'en donnent à coeur-joie! leur lançait-il, répétant sans doute une phrase entendue dans la bouche de Mamama.
Quand il pleuvait et qu'ils devaient rester à l'écurie, Bélou inventait d'autres jeux. Il se coiffait d'un vieux chapeau de paille puis s'asseyait devant le boxe de Grésil, l'encourageant à saisir le couvre-chef avec ses dents. Il le grondait affectueusement,le traitant de voleur, avant de recommencer. Si par hasard, celle qu'il appelait Mamama l'entendait, elle lui faisait signe de se taire pour ne pas effrayer les chevaux.
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À 7 h 52, la terre s’était mise à vibrer. Le volcan, dans une violence inouïe, surgie du fond des ténèbres, et dans un grondement assourdissant, creva comme crève un abcès mûri. La mer se voila du sombre drap du deuil. Une nuée ardente mêlée de vapeur d’eau s’abattit sur Saint- Pierre, faisant trente mille morts. La détonation avait été entendue jusqu’à Fort- de- France.
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Le plaisir d'enseigner, le bonheur d'être écouté, la musique des mots, la joie des corps ou leur désarroi. Je découvrais tout. Parce que ce sont nos premières émotions qui sont sans doute les plus vives, qu'ensuite nous ne faisons que confronter à leur souvenir les émotions nouvelles.
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D’un seul coup les parfums du tronc, du terreau, de l’humidité s’effacèrent. Des effluves d’oranger s’amplifièrent. L’oiseau s’était immobilisé. La lumière s’épanouissait, patine d’or clair, ultime générosité d’un soleil renaissant, tout à la fois allègre et cependant mal assuré de soutenir le défi des nuages qui, toute la matinée, s’efforçaient d’éteindre le ciel
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A l'enfant qu'il était, dès les premiers jours privé de mère et négligé par les siens, se replonger dans l'enfance ne paraissait pas seulement l'aspiration la plus vive de la nostalgie : cet enracinement était déjà le voeu d'un plus profond retour, à l'obscure félicité des origines. Sa grand mère qui lui avait tenu lieu de louve, c'était elle là qui, chansons, comptines , parler enfantin, noces merveilleuses des mots et des rythmes, avait dès le commencement infusé en lui l'amour de la langue, de cette langue confondue désormais avec sa respiration même et les battements de son coeur.(P79)
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Tous ces fleuves, et je perçois dans le nom de certains d’entre eux je ne sais quelle promesse, je ne sais quelle tendre et mélancolique alliance, et j’en veux soudain au train de continuer à m’emporter sans avoir seulement ralenti pour me permettre de mieux l’entendre, de lui répondre : ainsi ce nom la Sanaga, m’émeut-il toujours aussi inexplicablement, de la même sorte d’émotion que je n’ai pas cessé de ressentir devant les douces et mystérieuses sonorités de ce nom, à cause de ces trois a, voyelles tendres et liquides qui n’attendent...
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Gaston-Paul Effa
Dès le matin même de la rentrée, je les entendis employer ces tournures qui ne figuraient pas dans la vieille édition de Petit Larousse que je consultais tous les jours, il me sembla que quelque chose se mettait à boiter, qu'une secrète discordance, soudain, rompait l'harmonie d'un monde où, jusqu'alors, j'avais toujours respiré à l'aise, avec lequel grâce à ma grand-mère et mes images tutélaires, je m'étais trouvé, pour ainsi dire, de plain-pied. J'aurais pu penser que ces formes, qui me choquaient plus qu'une simple erreur de langage, n'étaient pas des incorrections, mais des manières de parler propres à l'Alsace, comme cet accent même des élèves qui n'était pas non plus le mien. Pas un instant, pourtant, cette idée ne m'effleura. Je ne doutai pas que l'accent et la langue que, toute mon enfance, j'avais entendus à Douala ne fussent les seuls vrais, et du même coup la certitude s'ancra en moi que la langue française parlée à Douala était aussi l'expression d'une vérité plus secrète, celle d'un autre univers où je n'étais plus, mais qui continuait d'être, et qui seul était habitable. Cette langue française qu'enfant j'avais apprise, en plus des deux cent trente dialectes du Cameroun, pas une seconde je ne songeai à la renier ; pas une seconde je ne doutai d'elle, et quelque chose en moi s'opposa sur-le-champ à ces nouvelles façons de parler.
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Je pouvais enfin nouer les fils de ma vie : le noir de mes origines au blanc de ma destinée.
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Ceux qui quittent le continent pour aller quêter le bonheur ailleurs verront bien que le vrai bonheur est là où ils sont. Mais, s’ils partent parce qu’ils sont en train de mourir à l’endroit où ils sont, alors ce n’est pas la vie qu’ils vont chercher, ce qu’ils cherchent, c’est de partager la mort avec ceux qu’ils considèrent comme la cause de leur impossibilité de vivre.
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Comme dans la tragédie ancienne, la nouvelle les avait précédées. La perdrix avait chanté toute la nuit et tourné autour du village. Il avait suffi de la suivre, comme l’étoile du matin qui guide les bergers dans la nuit. Tel un messager venu du ciel, c’est elle qui avait guidé les femmes du village. Il est rare que, dans une vie, de tels signes soient permis. Quand cela se produit, le monde, souvent, se renverse.
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Douo était né à l'ombre bleue d'un sisal solitaire. Ce parapluie de feuilles, tendu verticalement vers les nuées de papillons, qui traçaient dans le ciel des signes qui s'effaçaient avant qu'on les ait vus, faisait un toit de lumière à la femme qui enfantait.
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À certains moments, quand ma pensée dérive, il y a ce frisson, ce dégoût, soudain, qui s'émeut au fond de mon corps, lorsque je dois faire revenir le poulet dans l'huile de palme, ou lorsque je dois balayer la cour et que ma chair s'identifie aux brins de chaume, à la poussière qui se retire très loin, comme la mer au bout d'une plage.
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