Citations de Henning Mankell (3576)
Il est aussi facile de se perdre à l'intérieur de soi que sur les chemins des bois ou dans les rues des villes.
Le sort des êtres humains est de sombrer dans l’oubli. Nous sommes 110 milliards à avoir vécu jusqu’ici. La plupart sont morts. De combien se souvient-on ? De qui se rappellera-t-on dans cinq cents ans ? On peut construire des pierres tombales monumentales, cela ne change rien. Les livres, eux, continuent de vivre tant qu’ils sont lus. Je pense que certains des miens survivront pendant quelques générations. Mais pas plus. Il faut vivre au présent. J’en ai vendu 40 millions, de quoi puis-je me plaindre ?
- La mort ne me fait pas peur. Ce que je n'aime pas, c'est l'idée que je vais devoir rester morte si longtemps.
J’avais trahi parce que j’avais peur d’être trahi à mon tour. Cette peur du lien, cette peur de sentiments trop intenses pour pouvoir être contrôlés, m’avait toujours poussé à réagir d’une seule façon : l’esquive, la fuite. Pourquoi ? Je n’aurais pas su répondre à cette question. Mais je savais que je n’étais pas le seul. Je vivais dans un monde où beaucoup d’hommes passaient leur vie à avoir peur de la même façon que moi.
- Je ne crois pas aux miracles, et toi non plus. S'ils se produisent, parfait. Mais y croire, les attendre, c'est juste une façon de gaspiller le temps qu'il nous reste.
Les voyages les plus remarquables sont intérieurs, libérés du temps et de l'espace.
Le plus grand danger de la soumission, c'est lorsqu'elle devient une habitude, lorsqu'elle s'insinue comme un poison paralysant les veines, sans même qu'on s'en aperçoive. Alors, la résignation est un fait accompli. Le dernier rempart est tombé, la conscience est obscurcie et commence lentement à mourir.
- Le plus beau, c'est quand il pleut. Je me demande s'il existe quelque chose au monde de plus beau qu'une douce averse d'été en Suède. D'autres pays ont des monuments remarquables, des cimes ou des gouffres vertigineux. Nous, nous avons nos pluies d'été.
Certains côtés des gens ne sont visibles pour personne, sauf pour ceux qui les aiment.
La vie consiste en de nombreuses frontières dont nous ne découvrons l'existence qu'à l'instant de les franchir.
Dans ma cathédrale,
parmi les effluves âcres des acides,
j'ai créé d'autres mondes.
Comme si j'étais plus proche
que Dieu
de cette soupe originelle dont on parle.
Cette soupe qui a donné naissance à l'univers
et à cette lumière qui défile
et que je m'obstine à attendre.
Je suis là, comme à un arrêt d'autobus,
et j'attends la bonne lumière.
Voilà ma vie :
Arrêt. Attente. Lumière.
Je suis allé dehors. La nuit d’hiver était étoilée et immobile. Parfois, quand je vois un ciel comme celui-là, je regrette de ne pas être compositeur.
La plupart des voyages dont on rêve n'ont jamais lieu. Ou alors on les accomplit intérieurement. L'avantage, quand on emprunte ces vols intérieurs, c'est qu'on a de la place pour les jambes.
C'est impossible de voir sur le visage de quelqu'un à quel point il ou elle est abîmé à l'intérieur.
Le lac n’était pas grand. L’eau était complètement noire. Sur la rive opposée à celle où nous nous tenions, il y avait quelques grands rochers, pour le reste, ce n’était que la forêt compacte. Il n’y avait pas à proprement parler de rivage, aucune transition entre l’eau et les arbres. C’était comme si l’eau et la forêt s’empoignaient mutuellement sans que l’une eût le pouvoir de renverser l’autre.
Il y a une beauté spéciale qui n'appartient qu'aux femmes très âgées. Dans leurs rides sont inscrites toutes les marques, tous les souvenirs de la vie écoulée. Je parle des femmes très âgées, celles dont la terre réclame déjà le corps.
J'ai porté la chienne jusqu'à la maison. Elle était plus lourde que je ne l'aurais imaginé. Les morts sont toujours lourds. Puis je suis allé chercher une pioche et j'ai réussi à creuser, après beaucoup d'efforts, un trou suffisamment grand sous le pommier. La chatte me regardait faire du haut du perron. Le corps de la chienne était raide quand je l'ai enfoui avant de combler le trou.
J'ai rangé la pioche et la pelle contre le mur de la maison. La brume du matin était de retour sauf que, maintenant, elle venait de moi; c'étaient mes yeux qui s'embuaient. Je pleurais ma chienne.
On ne connaît personne, soi-même encore moins que les autres.
Existe-t-il une solitude plus grande que celle d'un être humain qui doit affronter la mort tout seul, sans personne pour l'accompagner ?
On oublie ce dont on veut se souvenir et on se souvient de ce qu'on préfèrerait oublier...