Jian Ma

- Maman, les fleurs n'ont pas d'yeux, pourquoi meurent-elles alors ?
- Parce qu'elles sont trop belles pour ce monde.
- Papa dit que je suis belle, je vais donc mourir bientôt?
P175

- Et comment ! On voit davantage de cadavres de nourrissons
que de poissons morts clans la région...
Mais personne ne vient jamais les réclamer, aussi les pêcheurs les laissent-ils pourrir sur la berge.
P165

Il y a pourtant un endroit en Chine où lion peut vivre en
liberté: c'est la Commune Céleste.
Elle se trouve dans la province de Guangdong. ]'y ai travaillé quelque temps. Personne ne se préoccupe de savoir combien d'enfants vous avez.

Et il est vraiment impossible de tomber enceinte là-bas.
l'atmosphère de la ville est saturée de produits chimiques qui rendent les hommes infertiles.
P41

les hommes contrôlent notre vagin, l'État contrôle notre utérus.
Vous pouvez essayer de verrouiller votre corps, le gouvernement
en possède toujours la clef.
Tel est le destin des femmes, conclut-elle
des larmes dans les yeux.

-- Un esturgeon de Chine, répond Kongzi. Ce sont les plus
vieux vertébrés du monde. Le gouvernement leur a accordé le statut
"d'espèce protégée numéro un". Ils naissent près des sources du
Yangtze et descendent ensuite jusqu'à la mer.

Dix ans plus tard. ils remontent le fleuve à contre-courant pour se reproduire à l`endroit même où ils ont vu le jour.

Espèce protégée numéro un, vraiment! Ces poissons ont
bien de la chance...

Mais nous autres, pauvres humains, quand
serons nous en mesure de rejoindre notre terre d'origine?

- C'est uniquement lié aux Jeux olympiques: le Parti veut donner l'impression que la Chine est toujours l'héritière de sa culture millénaire, malgré les attentes années durant lesquelles le confucianisme a été voué aux gémonies et remplacé par le credo marxiste-léniniste importé de l'étranger.

Depuis le massacre de Tienanmem, ce pays a perdu son âme. L'argent est devenu sa seule religion.

- Toutes les femmes qui sont enceintes sans autorisation enfreignent les règles du planning familial et mettent en danger le développement économique de notre pays, dit-il.

Les incendies de l’été ne détruiront pas l’herbe / Que la douceur du vent fera renaître au printemps.

On ne se rend compte de l’importance des choses qu’après les avoir perdues.

Mourir, au fond, c’est juste éteindre les lumières.

J’ai le devoir envers mes ancêtres de prolonger la lignée familiale. Quand je pense que depuis la nuit des temps les Chinois ont pu procréer en toute liberté… C’est bien ma veine, d’être né dans une époque où les naissances sont contrôlées !

Nuwa, déesse priée par les femmes qui veulent enfanter :

« Elle se souvient que sa grand-mère s'asseyait avec elle sous cet arbre et lui racontait la légende de la déesse Nuwa, la divinité au visage de femme et au corps de serpents qui a créé le monde et l'espèce humaine. Elle lui disait que dans les parages de la montagne de Nuwa se trouve un lac magique, capable de capturer les reflets de la lune. Au début des temps ce lac avait attiré Nuwa, la faisant tomber du ciel. Après avoir arpenté ses berges pendant des mois, Nuwa s'était sentie seule : elle s'était assise et avait modelé avec de la boue jaune du rivage des silhouettes humaines , auxquelles elle donnait vie. Au bout d'un moment, lasse de progresser aussi lentement, elle avait plongé une corde dans une mare de boue et l'avait secouée dans tous les sens, projetant des éclaboussures qui s'étaient transformées sur le sol en une multitude d'êtres humains... »



Quelques trouvailles auxquelles on préfère ne pas croire : les cheveux humains fermentés utilisés dans la composition de la sauce de soja ; les bébés morts ou invendables parce qu'estropiés, vendus aux restaurants ; les cheveux noirs d'une fillette devenus jaunes grâce aux produits toxiques contenus dans l'eau de la rivière ; les poissons de la rivière morts empoisonnées bien rincés, séchés et vendus au marché.

J'ai traversé ces terres en sachant que jamais je n'y retournerais. Ces villages appartiennent au passé. Ma destination se trouve toujours devant moi, quelque part, sur un autre chemin.

La vie suit le même rythme que le ciel et la terre. Elle fait comme le soleil qui laisse place à la lune, et le jour à la nuit.

Les hommes sont comme les hirondelles ; lorsque l'automne arrivent, ils désirent s'envoler.

Incipit :

Par le trou où se trouvait le balcon couvert, tu vois le faux acacia qui a été abattu se relever lentement. C'est un signe évident que tu vas devoir prendre ta vie au sérieux à partir de maintenant.

"L'homme qui dort dans le lit à côté du mien ronfle bruyamment. Il va finir par me rendre fou. Il est chauffeur routier. Il a toujours peur que quelqu'un lui vole son essence la nuit, il a donc roulé ses barils jusque dans le dortoir. Les vapeurs sont asphyxiantes. Je pars demain dès que je me lève."

Le fœtus ne sait pas ce qui l’attend au juste une fois qu’il sera sorti, mais il a désormais la certitude que ce n’est pas le bon endroit pour venir au monde.

Lorsqu'elle l'a rencontré, âgée de dix-sept ans, elle croyait qu'on se mariait pour la vie et que le gouvernement protégeait le peuple, comme les hommes protégeaient leurs épouses. Mais sitôt le mariage consommé, ces naïves croyances ont volé en éclats . Elle a découvert que les femmes ne sont pas maîtresses de leur propre corps, dont leurs maris et l’État se disputent la possession : les maris pour satisfaire leurs besoins sexuels et engendrer des héritiers mâles (exigence confucianiste : NDR) et l’État pour affermir son pouvoir et faire régner la terreur, en les contrôlant sans arrêt.