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Un navire de croisière qui s'échoue. le commandant qui prend la fuite. Une trentaine de passagers qui perd la vie. Ca c'est passé il y a quelques années, vous vous en souvenez. Pour un marin, déserter le bord c'est le déshonneur suprême. Et pour un romancier, c'est l'occasion de sonder les abysses de l'âme humaine.
« Lord Jim » de Joseph Conrad, un classique à lire chez Folio.
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La croyance en une origine surnaturelle du mal n'est pas nécessaire. Les hommes sont à eux seuls capables des pires atrocités.
Je suis convaincu que nul homme ne comprend jamais tout à fait ses propres esquives et ruses pour échapper à l'ombre sinistre de la connaissance de soi.
Chapitre VII
Il fut là-dessus d'une franchise parfaite, aussi franc qu'une tuile qui vous tombe sur la tête.
Les forces de la nature sont d'une franchise impitoyable.
FALK.
C'était une bête étrange. Mais les femmes, peut-être, aiment cela. Vu sous ce jour, il valait bien la peine qu'on l'apprivoisât, et je suppose que chaque femme au fond de son cœur se considère comme une dompteuse de bêtes étranges.
Seuls les jeunes gens ont de tels moments. Je n'entends point par là les tout jeunes gens. Non. Les tout jeunes gens n'ont, à proprement parler, aucuns moments. C'est le privilège de la prime jeunesse que de vivre en avance de ses jours, dans toute cette belle continuité d'espérance qui ne connaît ni pause, ni introspection.
On referme derrière soi la petite porte qu'on connaissait, simple garçonnet – pour pénétrer dans un jardin enchanté. Ses ombres même luisent de promesses. Chaque détour du sentier a sa séduction. Et ce n'est point l'attrait d'une contrée inexplorée. On sait pertinemment que tout le flot de l'humanité en est passé par là. C'est le charme de l'expérience universelle, dont on attend une sensation inédite ou personnelle – un peu de soi-même.
(Incipit)
La grande muraille de végétation, masse exubérante et emmêlée de troncs, de branches, de feuilles, de rameaux, en festons, immobile au clair de lune, était comme une invasion folle de vie muette, une vague roulante de plantes, empilée, crêtée, prête à s'abattre sur la crique, à balayer chacune de nos petites humanités hors de sa petite existence.
La conquête de la terre, qui signifie principalement la prendre à des hommes d'une autre couleur que nous, ou dont le nez est un peu plus plat, n'est pas une jolie chose quand on la regarde de trop près.
- La vérité, c'est qu'il ne faut jamais donner trop d'importance à quoi que ce soit dans la vie, en bien ou en mal.
- Vivre à petite vitesse, murmurai-je avec perversité. Ce n'est pas à la portée de tout le monde.
- Vous ne tarderez pas à vous sentir bien heureux de pouvoir seulement continuer à marcher, même à cette vitesse-là, rétorqua-t-il de son air de vertu consciente. Et il y a autre chose : un homme doit savoir tenir tête à sa malchance, à ses erreurs, à sa conscience, et à tout ce qui s'ensuit. Enfin - contre quoi d'autre voudriez-vous vous battre ?
« Notez, reprit-il, en levant un avant-bras, la paume de la main en dehors, si bien qu’avec ses jambes repliées devant lui, il avait la pose d’un Bouddha, prêchant en habits européens et sans fleur de lotus. Notez qu’aucun de nous ne passerait exactement par là. Ce qui nous sauve, c’est le sens de l’utilité, le culte du rendement. Mais ces hommes-là, au fait, n’avaient pas beaucoup de fond… Ils n’étaient pas colonisateurs : leur administration n’était que l’art de pressurer et rien de plus, je le crains. C’était des conquérants, et pour cela, il ne vous faut que la force matérielle, rien dont il y ait lieu d’être fier lorsqu’on la détient, puisque votre force n’est tout juste qu’un accident résultant de la faiblesse des autres. Ils mettaient la main sur tout ce qu’ils pouvaient attraper, pour le seul plaisir de tenir ce qu’il y avait à posséder. C’était là proprement pillage avec violence, meurtre prémédité sur une grande échelle, et les hommes y allant à l’aveugle, comme font tous ceux qui ont à se mesurer aux ténèbres. La conquête de la terre, qui consiste principalement à l’arracher à ceux dont le teint est différent du nôtre ou le nez légèrement plus aplati, n’est pas une fort jolie chose, lorsqu’on y regarde de trop près. Ce qui rachète cela, c’est l’Idée seulement. Une idée derrière cela, non pas un prétexte sentimental, mais une idée et une foi désintéressée en elle, quelque chose, en un mot, à exalter, à admirer, à quoi on puisse offrir un sacrifice… »