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Citations de Jules Supervielle (519)


Ces jours qui sont à nous, si nous les déplions
Pour entendre leur chuchotante rêverie
Ah c’est à peine si nous les reconnaissons.
Quelqu’un nous a changé toute la broderie.
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LA TERRE

Petit globe de cristal,
Petit globe de la terre,
Je vois au travers de toi
Ma jolie boule de verre.

Nous sommes tous enfermés
Dans ton sein dur et sévère
Mais si poli, si lustré
Arrondi par la lumière.

Les uns : ce cheval qui court
Une dame qui s'arrête
Cette fleur dans ses atours
Un enfant sur sa planète.

Les autres : assis à table
Ou fumant un petit peu,
D'autres couchés dans le sable
Ou chauffant leurs mains au feu,

Et nous tournons sur nous-mêmes
Sans vertige et sans effort
Pareils au ciel, à ses pierres
Nous luisons comme la mort.
1927.

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MATHEMATIQUES

Quarante enfants dans une salle,
Un tableau noir et son triangle,
Un grand cercle hésitant et sourd
Son centre bat comme un tambour.

Des lettres sans mots ni patrie
Dans une attente endolorie.
Le parapet dur d'un trapèze,
Une voix s'élève et s'apaise

Et le problème furieux
Se tortille et se mord la queue.
La mâchoire d'un angle s'ouvre.
Est-ce une chienne? Est-ce une louve?

Et tous les chiffres de la terre,
Tous ces insectes qui défont
Et qui refont leur fourmilière
Sous les yeux fixes des garçons.

.

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Et plus l'on se regarde
Plus vite l'on s'égare
Dans les sables de l'âme
Qui nous brûlent les yeux
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Derrière trois murs et deux portes,
Vous ne pensez jamais à moi,
Mais la pierre, le chaud, le froid,
Et vous ne m'empêcherez pas
De vous défaire, et vous refaire,
A ma guise, au fond de moi-même
Comme les saisons font des bois
A la surface de la terre.
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Quand nul ne la regarde
La mer n’est plus la mer,
Elle est ce que nous sommes
Lorsque nul ne nous voit.
Elle a d’autres poissons,
D’autres vagues aussi.
C’est la mer pour la mer
Et pour ceux qui en rêvent
Comme je fais ici.
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OUBLIEUSE MÉMOIRE (extraits)

MADAME


Ô vous toujours prête à finir,
Vous voudriez me retenir
Sur ce bord même de l'abîme
Dont vous êtes l'étrange cime.

Dame qui me voulez fidèle à votre image
Voilà que maintenant vous changez de visage ?
Comment vous suivre en vos détours,
Je suis simple comme le jour.

Comment pourrais-je me fier
À ce que vous sacrifiez,
Ou pensez-vous ainsi me dire
Que changer n'est pas se trahir
Que vous vous refusez au gel
Définitif de l'éternel ?

Devez-vous donc, quoi qu'il arrive,
Demeurer secrète et furtive ?
Écoutez, mon obscure reine,
II est tard pour croire aux sirènes.

Ô vous dont la douceur étonne
Venez-vous de jours sans personne ?

p.491
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Jules Supervielle
Hommage à la vie

C'est beau d'avoir élu
Domicile vivant
Et de loger le temps
Dans un coeur continu,
Et d'avoir vu ses mains
Se poser sur le monde
Comme sur une pomme
Dans un petit jardin,
D'avoir aimé la terre,
La lune et le soleil,
Comme des familiers
Qui n'ont pas leurs pareils,
Et d'avoir confié
Le monde à sa mémoire
D'avoir donné visage
A ces mots: femme, enfants...


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Les cris, le délire où tant d’autres s’abandonnent, Supervielle les repousse, les contient, parce qu’il en connaît mieux que d’autres la menace.

-Préface de Marcel Arland-
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Comment s'était formée cette rue flottante ? Quels marins, avec l'aide de quels architectes, l'avaient construite dans le haut Atlantique à la surface de la mer, au-dessus d'un gouffre de six mille mètres ? Cette longue rue aux maisons de briques rouges si décolorées qu'elles prenaient une teinte gris-de-France, ces toits d'ardoise, de tuile, ces humbles boutiques immuables ? Et ce clocher très ajouré ? Et ceci qui ne contenait que de l'eau marine et voulait sans doute être un jardin clos de murs, garnis de tessons de bouteilles, par-dessus lesquels sautait parfois un poisson ?
Comment cela tenait-il debout sans même être ballotté par les vagues ?
Et cette enfant de douze ans si seule qui passait en sabots d'un pas sûr dans la rue liquide, comme si elle marchait sur la terre ferme ? Comment se faisait-il... ?
Nous dirons les choses au fur et à mesure que nous les verrons et que nous saurons. Et ce qui doit rester obscur le sera malgré nous.
À l'approche d'un navire, avant même qu'il fût perceptible à l'horizon, l'enfant était prise d'un grand sommeil, et le village disparaissait complètement sous les flots. Et c'est ainsi que nul marin, même au bout d'une longue-vue, n'avait jamais aperçu le village ni même soupçonné son existence.
L'enfant se croyait la seule petite fille au monde. Savait-elle seulement qu'elle était une petite fille ?
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O DIEU TRES ATTENUE

ô Dieu très atténué
Des bouts de bois et des feuilles
Dieu petit et séparé,
On te piétine, on te cueille
Avec les herbes des prés.
Dieu des légères fumées
Dieu des portes mal fermées
On les ouvrit tan de fois
Que l'air traverse le bois.
Et toi, dans l'humaine écorce,
Dieu de qui n'a plus la force
D'avoir un Dieu résistant
Comme celui qu'abandonne
Par ses blessures le sang.
Dieu qui ne remplis sa chose
Qu'à moitié, comme à regret,
Dieu sur le point de quitter
Le coeur d'un homme qui n'ose
Le retenir, le goûter,
Tu t'absentes, tu reviens,
Tu es toujours en voyage.
Heureux celui qui retient
Un bon Dieu comme un bon vin
Qui prend avec lui de l'âge.
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Vous qui vous demandez, vous, toujours sans nouvelles

"Si je croise jamais un des amis lointains
Au mal que je lui fis vais-je le reconnaître?"

Pardon pour vous ,pardon pour eux, pour le silence
Et les mots inconsidérés,
Pour les phrases venant de lèvres inconnues
Qui vous touchent de loin comme balles perdues,
Et pardon pour les fronts qui semblent oublieux.

LES AMIS INCONNUS
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Ton sol intérieur est là avec ses golfes et ses terres sans merci,
Et tu es celui qui monte dans une barque et part tout seul dans le silence de lui-même,
Tu regardes passer tes propres falaises où tu ne vois pas âme qui vive
Mais parfois des silhouettes noires prises de grande panique
Comme les souvenirs éperdus d'une tête qu'on vient de trancher.
Mais tu n'es pas un assassin et tu te nommes malheureux.
Tu n'as jamais eu d'autre nom,
Et c'est toute ta compagnie.
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Quand les yeux du désir plus sévères qu'un juge, vous disent d'approcher,
Que l'âme demeure effrayée,
par le corps aveugle qui la repousse et s'en va tout seeul
Hors de ses draps comme un frère somnambule
Quand le sang coule plus sombre de ses secrètes montagnes
Que le corps jusqu'aux cheveux n'est qu'une grande main inhumaine...
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soyons seuls un moment
dans un monde d'aveugles
milliards de paupières
autour de nous fermées
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Les émotions faisant maigrir les bovins, courir derrière les vaches nous était une joie défendue. Déféré ne nous permettait pas de les inquiéter. Et souvent j'étais obligé de les admirer au repos et de loin. Elles donnaient à la campagne des nuances bizarres, absurdes, touchantes. Pour moi qui connaissait déjà la France, elles remplaçaient, dans la déserte campagne uruguayenne, ici, un paysan allant à la foire avec sa carriole; là, un village immobile sous la chaleur du jour; un laboureur et sa charrue; des hommes jouant aux boules ou trinquant à la porte d'une auberge ! Elles portaient tout le poids, toute la responsabilité du paysage.
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Je suis si loin de vous dans cette solitude
Qu'afin de vous atteindre
Je rapproche la mort de la vie un moment
Et vous saisis les mains, chers petits ossements.
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PRAIRIE

Le sommeil de mon coeur délie le noeud du jour,
Il roule sourdement l'Europe et l'Amérique
Dont il éteint les phares
Et le chant des cigales.

Le passé, l'avenir
Comme des chiens jumeaux flairent autour de nous.

(p.154)
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LA GOUTTE DE PLUIE

Je cherche une goutte de pluie

Qui vient de tomber dans la mer.

Dans sa rapide verticale

Elle luisait plus que les autres

Car seule entre les autres gouttes

Elle eut la force de comprendre

Que, très douce dans l’eau salée,

Elle allait se perdre à jamais.

Alors je cherche dans la mer

Et sur les vagues, alertées,

Je cherche pour faire plaisir

À ce fragile souvenir

Dont je suis seul dépositaire.

Mais j’ai beau faire, il est des choses

Où Dieu même ne peut plus rien

Malgré sa bonne volonté

Et l’assistance sans paroles

Du ciel, des vagues et de l’air.
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Dans l'oubli de mon corps

L’ESPÉRANCE


Dans l’obscurité pressentir la joie,
Savoir susciter la fraîcheur des roses,
Leur jeune parfum qui vient sous vos doigts
Comme une douceur cherche un autre corps.
Le cœur précédé d’antennes agiles,
Avancer en soi, et grâce à quels yeux,
Éclairer ceci, déceler cela,
Rien qu’en approchant des mains lumineuses.
Mais dans quel jardin erre-t-on ainsi
Qui ne serait clos que par la pensée ?
Ah pensons tout bas, n’effarouchons rien,
Je sens que se forme un secret soleil.
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