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Citations de Laure Murat (300)


expliquer en quoi l'analyse proustienne de l'aristocratie, qui éclairait mon milieu d'origine mieux que l'expérience vécue de l'intérieur, constituait, contre toute attente, l'instrument le plus performant d'une désaliénation sociale.
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Relire consiste à faire d’un livre une matière vivante, à éprouver sa plasticité et sa résistance, à évaluer sa radioactivité par rapport au temps, mais également à soi-même. Le relecteur cherche à se souvenir du lecteur qu’il fut et/ou à découvrir celui qu’il est devenu.
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Une bibliothèque, ce serait donc d’abord cela : un réservoir à relectures potentielles.
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« Le destin n'a pas voulu qu'Emile Blanche vive les débuts de la psychanalyse. Sa méfiance, sa raideur même à l'égard du changement et des "idées modernes" l'auraient sans doute détourné des audaces théoriques sur la sexualité infantile ou l'interprétation des rêves. Ses nombreux rapports d'expertise médico-légale révèlent cependant l'intérêt croissant de la psychiatrie pour l'archéologie des névroses et ce qui allait devenir les préoccupations majeures de l'oeuvre freudienne : rôle de l'enfance, origine des traumatismes, pulsions inconscientes, etc. Emile Blanche n'aura certes pas fait œuvre de précurseur à l'heure où la psychanalyse est encore loin de constituer un système de pensée. Mais dans le détail de ses descriptions et la qualité de ses observations, des pistes, des éléments encore innommés, affleurent comme le motif d'une photographie en cours de révélation dont personne ne saisit encore le sens. » (p. 466)
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« Dernier avatar d'une idéologie de l'exclusion ou produit de l'utopie démocratique, l'asile demeure cet appareil normatif dont l'instauration coïncide avec l'avènement de la société bourgeoise. En superposant naturellement les structures du modèle asilaire et de la pension de famille, la maison de santé du Dr Blanche apparaît ainsi comme un symptôme parfait de son époque, un emblème redoublé de l'ordre scientifique et social. Car à Montmartre, les aliénés vivent avec les Blanche dont ils partagent les repas, la maison et le jardin qu'une haute palissade coupe en deux, afin de séparer les malades les plus dangereux des autres pensionnaires lors de la promenade. » (p. 45)
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La relecture est avant tout un vice auquel je m'adonne. Le livre relu est le compagnon choisi dans les moments de silence et de grande solitude. Certains livres ne révèlent tout leur sens qu'à la deuxième ou à la troisième lecture. Certains livres sont si riches qu'il faut les relire plusieurs fois parce qu'ils n'ont jamais fini de dire ce qu'ils ont à dire. (Linda Lê)
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Pourquoi garde-t-on ses livres, sinon pour les relire un jour? Autant les offrir, les revendre ou les jeter, les déposer sur un banc dans la rue ou les abandonner dans un café, les proposer à un service culturel municipal ou un œuvre caritative (qui les refuseront, faute de place ou d'intérêt) ou s'en débarrasser auprès d'un revendeur qui viendra en soupirant enlever des cartons qui, de toute façon, "ne valent plus rien".

Une bibliothèque, ce serait donc d'abord cela: un réservoir à relectures potentielles. Selon ce principe: je veux pouvoir être sûr, même si l'occasion ne se présentera jamais, de pouvoir un jour accéder à telle œuvre, dans cette édition annotée, et retrouver l'émotion de ma première lecture.
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Il faudrait que je fasse plus attention aux lectrices et aux lecteurs. Dans mon obsession à deviner les titres, j'en oublie les visages concentrés et les mains qui feuillettent. Or il suffit de faire un peu attention pour se rendre compte que le corps du lecteur ressemble souvent, littéralement ou par métaphore, à son livre - effet de projection, bien sûr, mais pas seulement.

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La relecture se trouve donc à l'intersection d'un croisement unique : d'une part, la relecture tisse, verticalement un lien de parenté avec les auteurs du passé, qui peut confiner à l'osmose ; de l'autre, la relecture tisse, horizontalement, un lien de continuité avec soi-même, de l'enfance à l'âge adulte. A la jonction de l'abscisse et de l'ordonnée, le relecteur se situe à un lieu de jubilation, qui non seulement abolit l'espace et le temps, mais lui donne l'impression d'avoir une identité unique, éternelle et sans équivalent. (p. 60)
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Lire ou agir ? Relire ou être ? Là n'est plus la question, qui a été abolie. Car renoncer à l'imaginaire, c'est mourir.
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Relire : ce verbe sans synonyme est plus polysémique qu'il n'y paraît. Relire pour interpréter un rôle, traquer des fautes d'orthographe, vérifier une information, consolider un savoir, jouir à nouveau d'un texte… Si la relecture porte à chaque fois en elle sa mission particulière, elle est presque toujours désir – et promesse – de déchiffrement.
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D'après les géographes, l'Atlantique séparerait les Etats-Unis et la France. Durant près de trente ans, deux femmes ont pourtant réduit l'immensité océane aux proportions plus humaines d'un "doux fleuve de soleil", dont les berges avaient épousé l'arête des trottoirs de la rue de l'Odéon. Au n° 7, Adrienne Monnier tint à partir de 1925 une librairie-bibliothèque de prêt, La Maison des Amis des Livres, rendez-vous favori du Tout-Paris littéraire. Côté pair, au n°12, Sylvia Beach installa en 1921 une boutique fondée deux ans plus tôt sur le même modèle, Shakespeare and Company, devenue en quelques années le passage obligé de tous les écrivains francophones.
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Je ne crois pas que ma grand-mère pouvait imaginer un monde où l'on ne porte pas vos bagages et ne vous ouvre pas les portes. Elle sonnait pour qu'on lui apporte un mouchoir posé sur une table à quelques mètres. Elle n'a jamais fait son lit, ni la cuisine, ni pris le métro - à vrai dire, l'idée ne l'aurait pas effleurée. (page 134)
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Mais la vanité de la vie de cour à Versailles a lentement corrompu un idéal basé à l'origine sur l'honneur, en renforçant les lois de l'étiquette, de la bienséance et des convenances. (page 21)
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...il était accompagné chaque fois d'une femme différente qu'il appelait en privé "Madame de Maintenant"...

Page 67
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Proust se doutait-il seulement qu’en échafaudant son roman il inventait un secours plus puissant que la tendresse d’une mère absente ? Que son œuvre, en proposant un exercice continu de dessillement, y compris en soi-même, livrerait une grille de compréhension et de déchiffrement du monde à la fois souveraine et dynamique, subtile et pénétrante, pour des millions de gens dans le monde? Que tout un chacun sortirait étonnamment augmenté de cette lecture, tant il est vrai qu’une “erreur dissipée nous donne un sens de plus” ? Proust n’endort pas nos douleurs dans les volutes de sa prose, il excite sans cesse notre désir de savoir, cette libido sciendi qui, en séparant l’enfant de sa mère, nous affranchit plus sûrement du malheur que tous les mots de la compassion.
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Il s'agit donc bien pour Proust d'exploiter par tous les moyens la mise en perspective de la mondanité et de la mort, mise au service d'un lent éreintement de l'aristocratie, dont la Recherche constitue en quelque sorte l'incomparable tombeau.
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Quand on insiste tant sur le snobisme proustien il conviendrait de rappeler dans la foulée qu’À la recherche du temps perdu est la critique la plus cruelle et la plus subtile de l’aristocratie française à laquelle se soit jamais livrée la littérature.
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Comme le garçon de café, l’aristocrate « joue avec sa condition pour la réaliser ». Mais la différence, et elle est fondamentale, c’est qu’une fois son service terminé, le garçon de café dépose son tablier et retourne à la vie ordinaire – « Vous pouvez éteindre votre téléviseur et reprendre une activité normale », disaient les Guignols de l’info. L’aristocrate jouera l’aristocrate jusque dans son sommeil. Son rôle est comme la tunique de Nessus : il lui colle à la peau. Le garçon de café, le tailleur, le commissaire-priseur, autres exemples pris par Sartre, peuvent changer de métier et donc de mimiques professionnelles. L’aristocrate est incapable de changer de rôle. Car il a été éduqué dans le mimétisme. S’en défaire, cela reviendrait – croit-il – à changer la nature profonde de son être, comme si la noblesse était une partition inscrite dans les gènes à interpréter tous les jours. Il n’y a pas plus aliéné que l’aristocrate.
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Pour une raison que je ne m’étais encore jamais formulée : la caractéristique principale des gens du monde est d’être constamment en représentation. Il n’y a jamais de relâche dans le spectacle mondain. La façon de s’habiller, de parler, d’être, de manger, de marcher, de dire bonjour, de remercier, de signifier est en permanence sous le contrôle d’un œil au regard fixe, comme la conscience dans le poème de Victor Hugo – « L’œil était dans la tombe et regardait Caïn ». C’est celui de l’Histoire, dont il convient d’être digne. Ce phantasme, ou cette vue de l’esprit, est d’une autorité redoutable, a fortiori dans une famille où l’on s’est illustré sur le champ de bataille. « Il faut bien te persuader, écrivait le quatrième prince Murat à son fils à la chute du Second Empire, que tu as un nom qui est bien lourd à porter et que ce qui serait considéré comme très bien chez tout autre, ne te sera compté que comme passable. » Même les relations censément les plus simples sont marquées par l’idée – en partie inconsciente – d’appartenir à une caste modèle, qui exige d’être toujours à la hauteur et de montrer l’exemple. C’est un jeu de rôles permanent. Un aristocrate jouera l’aristocrate dans la moindre de ses actions, en remerciant un serveur, en saluant une connaissance, en se montrant généreux ou distant. L’aristocrate est, par excellence, quelqu’un qui se prend pour un aristocrate.
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