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Citations de Laurent Binet (620)


L'histoire aurait pu s'arrêter là. Mais la geste des hommes est un fleuve dont personne, hormis le Soleil s'il venait à s'éteindre, ne saurait interrompre le cours.
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2. Giorgio Vasari à Michel-Ange Buonaroti

Florence, 2 janvier 1557

Vous voyez tout ce que cette histoire peut avoir de déplaisant, et pourquoi le Duc a tenu à en confier la résolution à un homme de confiance, faisant, dans le même temps, circuler la rumeur que le pauvre Jacopo avait mis faim à ses jours en raison de l'extrême mécontentement de lui même dans lequel il était tombé. Il n'en demeure pas moins que tout ceci me laisse dans un épais brouillard, pour quoi je me permets, afin de démêler les fils embrouillés de cette ténébreuse affaire, de solliciter votre grande sagesse dont je sais qu'elle égale presque votre talent et concourt pleinement à votre génie.
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Il y avait au sein de ce palais un lieu sacré orné de plaques translucides, rouges, jaunes, vertes, bleues. Le plafond y était comme une toile d'araignée creusée dans la pierre, d'une hauteur qui surpassait celle du palais de Pachacutec. A l'extrémité de l'édifice, sur une estrade fastueusement décorée, quoique non entièrement tapissée d'or comme pouvait l'être la maison du soleil, trônait la statue d'un homme très maigre cloué sur une croix. Les hommes tondus manifestaient en ce lieu une dévotion fervente. Les Quiténiens ne doutèrent pas qu'il s'agissait d'une sorte de huaca. Qui était ce dieu cloué ?
page 100 -101
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Car voir, c'est penser. Le spectateur aussi doit mériter son tableau.
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La mémoire n’est d’aucune utilité à ceux qu’elle honore, mais elle sert celui qui s’en sert.
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Il vouiut leur expliquer qu'un dieu qui exigeait qu'on brûlât des hommes vivants, quel qu'ait pu être leur crime, était un dieu mauvais, car le corps des morts devait être conservé afin qu'ils puissent continuer à vivre après la mort, et qu'un tel dieu ne méritait pas qu'on l'adore.
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Difficile d'imaginer ce que Kristeva pense de Sollers en 1980. Que son dandysme historique, son libertinage so French, sa vantardise pathologique, son style de pamphlétaire ado et sa culture épate-bourgeois aient pu séduire la petite Bulgare fraîchement débarquée d'Europe orientale, dans les années 1960, admettons. Quinze ans plus tard on pourrait supposer qu'elle est moins sous le charme, mais qui sait ? Ce qui semble évident, c'est que leur association est solide, qu'elle a parfaitement fonctionné dès le début et qu'elle fonctionne encore : une équipe soudée où les rôles sont bien répartis. A lui l’esbroufe, les mondanités, le n'importe quoi clownesque. A elle le charme slave vénéneux ; glacial, structuraliste, les arcanes du monde universitaire la gestion des mandarins, les aspects techniques, institutionnels et, comme il se doit, bureaucratiques de leur ascension.
Page 161
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Je ressens une très grande répulsion et un profond mépris pour quelqu'un comme Bousquet , mais quand je pense à la bétise de son assassin , à l'immensité de la perte que son geste représente pour les historiens , aux révélations qui n'auraient pas manqué lors du procès et dont il nous a irrémédiablement privés , je me sens submergé de haine . Il n'a pas tué d'innocents , c'est vrai , mais c'est un fossoyeur de la vérité .
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113. Giorgio Vasari à Vincenzo Borghini

Mantoue, 7 avril 1557

Vincenzo, bougre d'âne, qui se souci de Ferrare et de son duc ! Que m'importent vos histoires de banquets, de joueurs de flûte, de vieillard aux oubliettes ou d'épouse réformée ? Le mari peut bien manger sa femme en ragoût si ça lui chante ! La peste soit de cette famille ! Le duc d'Este et son fils vous ont semblé dégénérés ? La belle affaire. Êtes-vous donc le seul à ignorer que la mère du Duc était Lucrèce la putain, fille du Borgia ? Comptez-vous rester encore longtemps là-bas pour y étudier les mœurs et les coutumes locales ?
L'assassin est un peintre. Le fils du Duc sait-il peindre ?
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9. Giorgio Vasari à Vincenzo Borghini

Florence, 7 janvier 1557

Cela ne ressemble pas au Pontormo qui recommençait sans cesse son ouvrage, reprenant tout, jamais satisfait, à la recherche d'une perfection qui n'existait sans doute que dans ses rêves. Il ne pouvait pas ignorer qu'en repeignant sur une peinture déjà sèche, la trace du raccord serait visible pour des yeux avertis, comme un cataplasme sur un membre blessé. Jamais le Pontormo que nous connaissons ne l'aurait toléré.
Pour embrouiller encore toute cette affaire, un autre élément est venu s'ajouter : un certain jour du mois dernier, une femme est venue chez Pontormo alors qu'il était absent.
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Laurent Binet
Je ne réserve pas le même traitement à tout le monde. Pour moi Philippe Sollers et Michel Foucault n’ont pas le même statut. Je mets Foucault dans des situations sexuelles, parfois scabreuses, mais qui ne sont que la réalité de sa vie, ce qui n’empêche pas que j’ai un profond respect pour son œuvre. La majeure partie des intellectuels et des politiques qui traversent mon roman, je respecte leur parole. Après, je retranscris tout ça de manière burlesque, mais sans discréditer leur propos. Cela devient juste du théâtre… et je vais même jusqu’à la bouffonnerie.

Interview parue le 7 mars 2016 dans le blog Les chroniques de Mandor
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(...) dans un souci d'efficacité très allemand , les SS , avant de les abattre , faisaient d'abord descendre leurs victimes au fond de la fosse , où les attendait un " entasseur " . Le travail de l'entasseur ressemblait presque en tout point à celui des hotesses qui vous placent au théatre . Il menait chaque Juif sur un tas de corps et , lorsqu'il lui avait trouvé une place , le faisait étendre sur le ventre , vivant nu allongé sur des cadavres nus . Puis un tireur , marchant sur les morts , abattait les vivants d'une balle dans la nuque . Remarquable taylorisation de la mort de masse . Le 2 Octobre 1941 , l'Einsatzgruppe en charge de Babi Yar pouvait consigner dans son rapport : " Le Sonderkommando 4a , avec la collaboration de l'état-major du groupe et de deux commandos du régiment Sud de police , a exécuté 33771 Juifs à Kiev , les 29 et 30 septembre 1941 . "
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132. Giorgio Vasari à Michel-Ange Buonarroti
Florence, 2 mai 1557

Et c'est à ce moment qu'il advint ce phénomène surnaturel : l'homme qui me menaçait, la pièce tout autour de lui, les cartons, les murs, les toiles, les châssis, les chevalets, les taches de peinture maculant le sol, le garde mort au premier plan, celui mort à l'arrière-plan, le Bacchiacca agonisant (je n'entendais plus ses râles, ni aucun autre son), tout m'apparut comme un tableau parfaitement composé. Mais ce n'est pas tout : je vis des lignes se dessiner dans l'espace, formant une grille parfaitement géométrique, et je reconnus le schéma d'Alberti, sa pyramide de rayons convergeant vers un point unique. C'étaient les lois de la perspective qui prenaient corps devant moi, aussi nettes que si je les avais moi-même tracées à la règle ; je touchais la surface des choses, car ce n'était plus le monde réel que je voyais dans sa profondeur, ou plutôt si !
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[Citant l'hymne national de l'URSS]
« Staline nous a élevés, nous a inspiré la foi dans le peuple. » Simon récite ce couplet à Anastasia qui lui signale qu'après le rapport Khrouchtchev, l'hymne a été modifié pour supprimer la référence à Staline. (Il a fallu attendre 1977, quand même.)
Page 181
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Après tout, il n’y a qu’une seule chose noble ici-bas, et c’est le dessin. L’homme, lui, n’est qu’une tache qui pâlit sur un mur.
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En revanche, je me suis dispensé de notes de bas de page, qui ont l'avantage de mettre en valeur l'érudition de celui qui les rédige mais l'inconvénient de ramener le lecteur au présent de sa chambre. Or, et c'est là tout ce que vous devez savoir : l'histoire se déroule à Florence , au temps de la onzième et dernière guerre d'Italie.
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Simon réfléchit pendant qu’il recule : dans l’hypothèse où il serait vraiment un personnage de roman (hypothèse renforcée par la situation, les masques, les objets lourdement pittoresques : un roman qui n’aurait pas peur de manier les clichés, se dit-il), qu’est-ce qu’il risquerait vraiment ? Un roman n’est pas un rêve : on peut mourir dans un roman. Ceci dit, normalement, on ne tue pas le personnage principal, sauf, éventuellement, à la fin de l’histoire.
Mais si jamais c’était la fin de l’histoire, comment le saurait-il ? Comment savoir à quelle page de sa vie on en est ? Comment savoir quand notre dernière page est arrivée ?
Et si jamais il n’était pas le personnage principal ? Tout individu ne se croit-il pas le héros de sa propre existence ?
Simon n’est pas certain d’être suffisamment armé, d’un point de vue conceptuel, pour appréhender correctement le problème de la vie et de la mort sous l’angle de l’ontologie romanesque, alors il décide de revenir, pendant qu’il est encore temps, c’est-à-dire avant que l’homme masqué qui s’avance vers lui ne lui fracasse la tête avec sa bouteille vide, à une approche plus pragmatique.
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il faut une belle intelligence pour convaincre les autres à ce point que gouverner consiste à n’être responsable de rien.
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Mais ce n’est pas tout : je vis des lignes se dessiner dans l’espace, formant une grille parfaitement géométrique, et je reconnus le schéma d’Alberti, sa pyramide de rayons convergeant en un point unique. C’étaient les lois de la perspective qui prenaient corps devant moi, aussi nettes que si je les avais moi-même tracées à la règle ; je touchais la surface des choses, car ce n’était plus le monde réel que je voyais dans sa profondeur, ou plutôt si ! mais je voyais comme à travers la caméra obscur de Messire Brunelleschi – que son nom soit honoré jusqu’à la fin des temps ! – et ainsi, l’espace d’une seconde, le monde m’apparut comme une surface plane, savamment quadrillée, dans toute la clarté éblouissante de la théorie qui nous fut révélée par ces génies suprêmes : Brunelleschi, Alberti, Masaccio, gloire à vous qui êtes l’honneur de la Toscane éternelle !
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En vérité, Luther était mauvais pour les affaires. Le prêtre rebelle avait toujours vilipendé ce qui constituait le cœur de l'activité des banquiers : le prêt avec intérêt. Et c'est lui, ce petit moine de Wittenberg, qui avait ruiné le lucratif commerce des indulgences, avec lequel Rome devait rembourser les dettes colossales contractées auprès de l'oncle Jacob.
Page 247
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