AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Lieve Joris (43)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


La chanteuse de Zanzibar

Peu de Belges ont parcouru autant de kilomètres en Afrique que la romancière et essayiste Lieve Joris, qui à 66 ans peut se vanter d'avoir écrit une belle bibliothèque d'ouvrages instructifs sur ce continent. La maison d'édition "Actes Sud" en a traduit une dizaine et plusieurs sont disponibles en format poche dans la collection "Babel".



C'est le cas de "La chanteuse de Zanzibar" un petit recueil de 8 nouvelles de 225 pages, publié en 1992 et paru comme Babel numéro 811 en 2007.



La première nouvelle nous conduit donc à la capitale de Zanzibar et Dar es-Salaam, la capitale de la Tanzanie, dont l'Archipel de Zanzibar fait partie. Dar es-Salaam signifie en Français : la maison de la paix. Bien que l'endroit n'ait pas été toujours une illustration de son nom auguste. Le 7 avril 1972 par exemple, leur premier président et dictateur Cheik Abeid Karume, a été assassiné par balles pendant qu'il était en train de jouer au Bao (un jeu de société africain). Ce tyran, qui travaillait avant sur un bateau, haïssait les intellectuels et se flattait d'avoir constitué un gouvernement dans lequel aucune de ses excellences ministres n'avait terminé ses études secondaires.

Le mari de la chanteuse Aziza de Zanzibar, Latif, fût matraqué à mort par ses interrogateurs après l'attentat. Aziza, pour entretenir ses 3 enfants s'est alors mise à chanter dans les grands hôtels et vit avec sa copine Nagla. Elle apprend petit à petit que son Latif, qu'elle croyait sérieux, avait eu au contraire une tripotée de maîtresses !

Dar es-Salaam doit être un endroit fascinant, en 10 ans, de 2002 à 2012, la population y a presque doublé : de 2,48 millions d'habitants à 4,34 millions.



La seconde nouvelle, intitulée "Noël en forêt vierge", démarre dans les Carpates polonaises, où le jeune Bronek voulait devenir marin, mais comme sa mère s'y opposa, il devint prêtre et fut ordonné tel par l'archevêque de Cracovie, un certain Karol Wojtyla, le futur pape Jean-Paul II. À sa mère, il causa une autre déception en partant comme missionnaire pour la brousse africaine.

C'est sur le bateau avec destination Congo, que Lieve Joris fit sa connaissance et lui promit d'aller le visiter dans son poste à Kokolo, un endroit paumé dans la jungle. Ce qu'elle fit fin 1988. Brontek s'y trouvait seul avec le vieux père Gérard et 3 soeurs catholiques qui soignaient les lépreux dans une sorte d'hôpital de fortune.

Brontek qui avait un caractère jovial et dynamique se morfondait naturellement dans ce trou. Surtout qu'avec les animaux il n'avait que des problèmes. Le chien devait être enfermé car il n'aimait pas les Noirs et prenait les Blancs pour ses alliés. Son premier peroquet se debrouillait bien en Polonais et il avait décidé de l'offrir à sa mère lors d'un congé. Seulement, comme il n'avait pas les papiers nécessaires, le perroquet fût intercepté par la douane belge à l'aéroport de Bruxelles et a fini sa carrière au zoo d'Anvers. Le 2e perroquet avait un large vocabulaire et connaissait même des vers d'un genre osé, mais ne s'exprimait qu'en Flamand.

L'arrivée de l'auteure accompagné d'un chauffeur polonais, Marek, signifiait une bonne nuit de vodka polonaise. La chambre du jeune chef du village était ornée de clichés publicitaires, telles "Avec Belga (des cigarettes populaires) tu n'es jamais seul" et "Les nouvelles grâce à Grundig" (une marque électronique allemande), d'une photo d'Audrey Hepburn, une carte postale avec l'Arc de Triomphe et des dictons plein de sagesse comme "La meilleure façon d'oublier le passé est de rendre le présent meilleur !"

Je vous laisse découvrir la messe de Noël, durant laquelle Bronek avait des difficultés à terminer son sermon à cause des chants de plus en plus forts des croyants locaux, très en forme, moyennant du vin de palme.

Je dois dire que c'est la nouvelle que j'ai préféré, à cause de l'authenticité du contexte et le style ironique poli et discret !



2 nouvelles ont trait à des visites que l'auteure a rendu à 2 Prix Nobel Littérature chez eux : Naguib Mahfouz (1911-2006), Nobel 1988, au Caire en 1989 et Sir Vidiadhar Naipaul (1932-2018), Nobel 2001, à Trinité-et-Tobago, en 1991. Cette rencontre constitue le plus long texte de l'ouvrage avec ses 78 pages, bien que j'ai préféré la première nouvelle, parce que le grand Mahfouz m'est plus sympathique, mais cela n'est bien entendu qu'un avis purement personnel.

Ce serait dommage de résumer ces 2 rencontres pour les véritables amateurs de littérature.



Une nouvelle qu'il ne faut sûrement pas manquer est celle dans laquelle Lieve Joris raconte son séjour au Caire et à l'oasis d'Al-Fayoum, à une centaine de kilomètres au sud-ouest du Caire, en compagnie de l'acteur de cinéma probablement le plus populaire du monde arabe : Mahmoud Abdel Aziz (1946-2016) de nationalité égyptienne. L'homme a tourné dans plus de 100 films et est connu dans tous les pays islamiques pour son interprétation dans une série de télé à grand succès, où il interprète l'histoire de l'espion égyptien Raafat Al-Haggan (1927-1982) qui a "travaillé" 17 ans en Israël.



Pour être honnête, si vous n'avez jamais rien lu de Lieve Joris, je vous conseillerai de commencer par son "L'heure des rebelles" de 2006, situé à Kinshasa du temps de Joseph Kabila, et "Sur les ailes du dragon" de 2015 relatif à l'infiltration de la Chine en Afrique. Un ouvrage très bien documenté et équilibré. Sans oublier son excellent "Les portes de Damas", paru un peu avant, en 1993, mais exceptionnellement révélateur.

Commenter  J’apprécie          527
L'heure des rebelles

Liévé Joris sait de quoi elle parle, elle qui a bourlingué dans de nombreux pays africains.

Dans « L’heure des rebelles » à travers le portrait d’Assani, acteur actif de l’instabilité régnant au Congo (et part la même de la situation de nombreux pays africains) elle nous montre une Afrique gangrenée par de petits dictateurs assoiffés de pouvoir. Au-delà de ces bandes rivales semant désolation et terreur c’est tout un pays qui survit, priant pour d’utopiques jours meilleurs. Le regard de Joris est sans complaisance, on est révolté de voir comment ce continent s’auto détruit à travers une poignée d’hommes qui ne rêvent que de pouvoir. Assani n’est malgré tout qu’un pion, d’autres Assani sont prêt à prendre la main, bien au-delà d’idéaux patriotiques et d‘espoir d‘une vie simplement décente. Un constat instructif remarquablement maitrisé mais aussi désespérant désolant. Des mots pour décrire les maux d’un continent à la dérive.

Commenter  J’apprécie          400
Les portes de damas

Une petite hésitation pour ce livre très dépaysant et instructif acheté il y a un moment dans les rayons de ma librairie promenade : le coin des mots passants. Sans doute ai-je été attirée par le titre et le sujet. Je ne connais pas Lieve Joris, mais j'ai moi aussi une amie syrienne rencontrée lors de mes études.



Donc grosse curiosité !



L'histoire ressemble, au départ, à la notre. Les deux jeunes filles se rencontrent en Irak, elles sont jeunes et la vie se déroule devant elles. Elles s'y projettent à leurs façons, l'orientale et l'occidentale, différentes, parfois semblables. Elles échangent beaucoup : politique, famille, amour, espoirs.



Puis, passe le temps. Des années plus tard, vers 1995, Lieve, désormais adulte et écrivain, ressortissante européenne, célibataire et sans enfants (elle n'en veut pas) rejoint Hala à Damas. Cette dernière est maman d'une petite fille et femme d’Ahmed, détenu politique. Pendant six mois, les filles devenues femmes vont réapprendre à se connaître et découvrir ce que la simple naissance peut changer sur deux personnalités à priori semblables. Peut-on se construire de la même manière quand on réside à Amsterdam et quand on vit en Syrie ?



Ne cherchez pas la guerre dans ce livre, il se termine bien avant, dans les années 2000. L'auteur a cependant rajouté quelques mentions sur le sort de Hala et sa fille après le début du conflit. Il n'existe aucun jugement dans le récit de Lieve, elle se contente de relever les conséquences d'une certaine restriction des libertés, l'influence de la famille et de la religion sur la vie de son amie.



Les portes de Damas décrit aussi très bien les paysages et les villes de Syrie avant la guerre notamment Alep, Damas, Homs et Tadmur. Lieve va rencontrer des intellectuels, des représentants de toutes les communautés et nous révèle ainsi leurs craintes et leurs espérances. Sans totalement expliquer le conflit actuel, ce témoignage nous livre des clés de compréhension.



Hélas, j'ai trouvé le ton un brin journalistique. On a l'impression que les sentiments passent au second plan, que l'amitié Lieve et Hala est un prétexte pour plonger au cœur de la société syrienne.



Intéressant, mais le souffle de la passion manque un peu.
Commenter  J’apprécie          100
Sur les ailes du dragon



Un reportage journalistique sur les liens humains entre l’Afrique et la Chine. L’auteur nous invite avec elle au gré de ses rencontres à Dubaï, Guangzhou, Beijing, Shanghaï, l’Afrique du Sud et le Congo. On plonge dans des vies qui évoluent sur deux continents : les africains attirés par la Chine essentiellement pour des raisons commerciales et les chinois qui sont aussi attirés par la culture et le mode de vie africains. Deux cultures qui peinent à se comprendre mais qui se réunissent sur l’autel du commerce international, pas celui des multinationales à l’origine des dérives bien connues de la mondialisation, mais le commerce à l’échelle des petites entreprises individuelles ou familiales, des boutiquiers qui font de l’import/export en partageant un container sur un grand cargo.

Il est captivant de suivre ces hommes et ces femmes dont on fait peu état dans les médias mais qui sont tant d’acteurs du monde globalisé, de pouvoir observer d’une certaine distance, propice à la réflexion, les problèmes d’intégration et les barrières culturelles que peuvent vivre tous les hommes aux quatre coins de la planète.
Commenter  J’apprécie          102
Ma cabine téléphonique africaine

J'ai reçu Ma cabine Téléphonique Africaine en cadeau au pique-nique de Babélio. Comme je n'avais aucune idée de ce que cachait ce titre original, le livre est resté longtemps dans ma PAL. Quelle bonne idée de l'en sortir!



164 pages, 10 récits, autant de rencontres en Afrique, au Moyen Orient, en Europe de l'Est.



J'aime les écrivains-voyageurs et encore plus  les écrivaines-voyageuses. Après Alexandra David Neel, Mary Kingsley, Isabelle Eberhardt et d'autres, je découvre Lieve Joris  née en Belgique(1953) mais basée aux Pays Bas, donc néerlandophone. Journaliste, boulingueuse elle a écrit de nombreux livres que je compte bien lire!



Ma cabine téléphonique africaine est le titre du premier récit : rencontre avec Bina, receveur des postes dans un village malien en 1996, déjà les touaregs rebelles menacent les autorités ou leurs représentants. La téléphonie mobile n'existe pas dans cette contrée. La cabine de Bina est une institution....Comme j'ai aimé ce récit! Lieve Joris s'efface devant les personnages africains. Elle les campe magnifiquement.



Le second récit, Les Enfants de Mobutu, se déroule au Congo, en 1998, le règne de Mobutu s' achève, il reste un grand désordre et pourtant l'auteure se promène dans la province qui paraît paisible. Elle accompagne un homme d'affaires qui vend, troque, ou achète un peu n'importe quoi. Elle nous fait imaginer l'"ambiance du poisson" sur le bord du lac, on rencontre des pauvres pêcheurs, des cyclistes qui font des kilomètres de pistes défoncées pour transporter 3 malheureux poissons....Aventure humaine, chaleur africaine...



On passe aussi par Dar-es-Salam ou par Saint Louis du Sénégal .



Lieve Joris a posé ses valises en 1982 au Caire. Elle nous invite dans l'appartement de Madame Taher, sa logeuse, bourgeoise déclassée qui fait survivre un monde féminin, désuet, étriqué et décalé.



Puis elle part à Alep et à la frontière de la Syrie et de la Turquie, rencontre Ismaïl,  Kurde qui préfère disserter sur Baudelaire et les surréalistes que de lui faire rencontrer la réalité, "Baudelaire est sans danger" : rencontre touchante.



Les 50 dernières pages se déroulent en Pologne (1987)et en Hongrie (1990) . Rencontre avec Kapucinski - un écrivain -voyageur que j'aimerais lire. Ils ne parleront pas de l'Afrique que les deux auteurs ont parcouru, Kapuscinski fera découvrir la Pologne grise de la fin du communisme. Enfin Lieve Joris aboutit dans un petit village hongrois  sur la Tisza.  Avec une grande délicatesse, elle nous présente les protagonistes de l'histoire récente, l'idéaliste qui voulait changer le monde, le maire communiste, l'institutrice aux prises avec les enfants tziganes qui ne supportent pas la sédentarisation imposée...Aucun jugement, juste une grande sympathie.



Lieve Joris ne se met pas en avant. Elle ne se vante pas de ses aventures. Elle laisse parler les personnages qu'elle rencontre, nous fait sentir les ambiances, les odeurs, les goûts, les manques aussi. Un tout petit livre, un concentré de saveurs!




Lien : http://miriampanigel.blog.le..
Commenter  J’apprécie          70
Fonny

Les familles aimantes, décalées, névrosées, violentes inspirent un grand nombre d'ouvrages. Cet étalage de père alcoolo, de mère schizophrène , de frère violeur, de grand-mère douce et adorée ( on peut mélanger les adjectifs !) peut lasser mais parfois, un regard, une écriture accrochent le lecteur et rendent ces évocations touchantes, surprenantes, parlantes.

Quand l'écrivaine flamande Lieve Joris, réputée pour ces récits de voyage, se penche sur sa famille, c'est avec la même lucidité qu'elle employait pour décrire le quotidien de la vie au Congo ou au Moyen-Orient. En partant de la figure de son frère Fonny, être aussi séduisant que manipulateur, elle nous offre une plongée sans concession dans son univers familial. De l'enfance et ses maisons aimées, de Bobonne, sa grand-mère adorée qu'emportée par les tumultes de sa vie elle abandonnera à son triste sort de vieillarde, de ses parents fantasques, un peu imbibés, de ses nombreux frères et soeurs, plus ou présents, de sa soeur Tribe, joyeuse parce que très simple dans sa tête, Lieve Joris tire un récit où la tendresse, jamais mièvre, se dispute avec une froideur et une exigence de vérité assez rares. Elle n'occulte jamais ses pensées de rejet et de honte face à certaines situations, sentiments tellement humains qu'un certain politiquement correct essaie de rendre de moins en moins audibles, mais qui ici, émeuvent, touchent et donnent force et vérité à ce récit. Le Fonny du titre, homme à la séduction destructrice, clé de voûte de l'ensemble, catalyse à lui tout seul les interrogations de toute une famille, naviguant entre bienveillance, détestation, colère, aveuglement et résignation. C'est une lutte de tous les instants qui nous est décrite, celle d'un groupe d'individus lié par le sang, qui doit faire face au caractère cyclothymique ( bipolaire dit-on trop facilement aujourd'hui) d'un homme dévasté par les drogues, ver dans un fruit aux défenses bien faibles.

La lecture de "Fonny" s'avère bien agréable, tellement le regard porté sur cette famille reste empreint d'une douce lucidité et que revit avec talent, un passé mêlant autant le gris des âmes que l'éclat si particulier du soleil du Nord.
Lien : http://sansconnivence.blogsp..
Commenter  J’apprécie          60
Les hauts plateaux

J’aurais pu franchement apprécier ce récit de voyage qui nous entraîne dans les contrées africaines au même rythme qu’un roman. Lieve Joris a en effet un talent certain pour le romanesque, qui va ici lui permettre de nous raconter avec brio un voyage au Congo à double valeur pour elle : c’est d’abord le premier retour dans ce pays depuis la mort de sa mère en Belgique ; c’est aussi le premier voyage d’une blanche dans ces « hauts plateaux » congolais qui ont réussi à échapper à la colonisation belge. Cette narration romanesque est de plus bien servie par une précision documentaire constante qui nous donne la possibilité de visualiser au plus près lieux, personnes, situations qui sont décrites au fil de la plume de notre auteure belge.



Mais j’ai été plus que gênée par les relents colonialistes qui transparaissent de plus en plus au fil de cette même plume. L’on passe d’un récit dénué de tout jugement, qui ne sert qu’à raconter, décrire le plus fidèlement possible l’expérience vécue, sans filtre culturel d’Occidental en terre étrangère, à des descriptions de conversations et des commentaires condescendants qui laissent poindre la sensation de supériorité de ce même Occidental sur les individus qu’il côtoie. L’on a l’impression que, l’effet de la fatigue causée par cinq semaines de marche aidant, le naturel, chez notre voyageuse venue suivre les traces au Congo de son oncle justement colon, revient au galop pour nous donner une image marquée par un passé difficile à faire taire.



Je ne relirai donc pas de sitôt un récit de Lieve Joris.
Commenter  J’apprécie          60
Les portes de damas

Lieve Joris, écrivain voyageur connu pour ses récits sur l’Afrique, se rend à Damas au lendemain de la guerre du Golfe pour passer quelques mois chez Hala, une amie rencontrée à Bagdad douze ans plus tôt. Son mari, membre du parti communiste, a été arrêté il y a 11 ans. Depuis, elle vit avec sa fille Asma, partageant son temps entre les visites à la prison, son travail d’enseignante à l’université et une famille parfois envahissante. Lieve Joris a du mal à admettre les changements intervenus chez son amie qu’elle a connue pleine d’enthousiasme et de projets d’avenir. La solitude, la pauvreté, le poids des traditions familiales et le climat de psychose créé par le régime d’Hafez al-Hassad ont eu raison des rêves d’indépendance d’Hala.

A travers ce journal, réédité en 2015, l’auteur nous fait partager l’extrême complexité de la société syrienne composée de différentes factions hostiles les unes aux autres et dont la haine est entretenue par un régime autoritaire et répressif. La présence continuelle de la police politique, les mukhabarat, fait peser sur le pays une chape de plomb. Se mettent en place, insidieusement, les conditions d’un affrontement qui mènera la Syrie au chaos le plus total.

Commenter  J’apprécie          63
Mon oncle du Congo

La période à laquelle Lieve fait ce voyage est très intéressante car c'est après la "zaïrianisation" du Congo et le pays est soumis à des forces violentes et souvent opposées. Les Blancs (Belges surtout), veulent conserver leurs acquis, les autochtones sont ballotés entre les conflits de pouvoir. Bref Lieve découvre un pays loin du pays "de carte postale" de son oncle missionnaire !



Je suis plus réservée sur la forme du récit que j'ai trouvé très journalistique. Lieve parle très peu de ses propres sentiments (sauf lorsqu'elle se retrouve en prison...). Elle décrit surtout les lieux et les hommes mais ses réactions personnelles restent timides.



Ce récit reste toutefois un témoignage intéressant. A noter qu'elle a fait ensuite de nombreux et longs séjours en Afrique, au Moyen-Orient et en Europe de l'Est, qu'elle a racontés dans ses livres.

Commenter  J’apprécie          60
Les hauts plateaux

Petit bouquin d'un peu plus d'une centaine de pages, Les Hauts plateaux nous emporte aux confins de la République démocratique du Congo et à ses frontières avec le Rwanda voisin.



C'est la première fois que je lis un auteur belge sur le thème de l'Afrique, et a fortiori du Congo ; le livre semblait d'emblée prometteur : une jeune femme voyageant dans cette région très instable m'intriguant beaucoup...



Lieve Joris nous livre ici une sorte de journal de voyage autobiographique, alternant entre récits de ses journées de marche à travers les montagnes, et de ses quelques séjours dans des bourgades un peu perdues, ses réflexions sur le monde qui l'entoure et ses pensées vers sa mère, dont la mort l'a profondément marquée...Mais dont le sujet est amené de manière surprenante dans le récit, sans que l'on comprenne véritablement le lien avec les évènements qui y sont contés.



Au fur et à mesure de la lecture s'installe finalement une sorte de malaise : si certaines observations sont intéressantes et pertinentes pour quiconque s'intéresse à cette région, notamment sur les différentes ethnies qui y vivent, les mœurs et coutumes faisant peu de place à la femme, et l'atmosphère de conflit qui règne entre différentes milices congolaises, mais aussi entre Rwandais et Congolais, dont on ne connait plus très bien la nationalité au vu de la frontière mainte fois traversée tantôt pour fuir Mobutu, le génocide ou pour reconquérir un territoire, on ne parvient pas à éprouver de l'empathie pour la narratrice, qui nous conte tout cela avec un détachement étonnant et une grande froideur, que je qualifierais même parfois d'hostilité envers ce et ceux qui l'entourent. On passe donc de son désir un peu fou d'atteindre les hauts plateaux à une sorte de mépris qu'elle ne peut s'empêcher d'éprouver devant l'ignorance et la naïveté des personnes qu'elle rencontre, que ce soit sur les sujets de la religion ou du rôle de la femme dans la société. Un peu comme si l'auteur avait été prise entre la tolérance que l'on se doit observer envers des cultures qui nous sont différentes et des pays que l'on visite, et son besoin de se comporter en femme occidentale et libre, qui peut s'affranchir de l'opinion sociale.



J'en garde une impression très mitigée : à lire si le Congo vous passionne, sauvez-vous si vous préférez les bouquins un peu plus positifs sur leur contenu.

Au-delà des ces remarques, ce livre est bien écrit et se lit très rapidement du fait de sa petite taille, heureusement peut-être !
Commenter  J’apprécie          40
Les portes de damas

Comment savoir ce qui se passe à l'intérieur des maisons, dans un pays comme la Syrie ? Aller vivre au milieu des gens, à Damas, et passer le quotidien avec eux pendant quelques mois ; il n'y a rien de mieux pour comprendre et apprendre.

C'est ce qu'a fait la narratrice qui nous livre l'histoire, passionnante et émouvante, de Hala et de sa fille Asma ; c'est donc l'amie européenne de Hala qui revient la voir et qui raconte, Ahmed leur mari et père prisonnier politique communiste pour des années, le reste de la famille très nombreuse, leur vie damascène, les problèmes de la Syrie. On est après la première guerre du Golfe, dans les années 90, sous le régime très autoritaire de Hafez al-Assad, le père de l'actuel président, Bachar al-Assad. La famille Assad est d'origine Alaouite, une branche du Chiisme ; les Alaouites sont un peuple des montagnes, minoritaire en Syrie, où les Sunnites sont de loin les plus nombreux.

L'auteure découvre chez son amie une vie de famille chaleureuse mais tiraillée : Hala a une soeur plus jeune, Shirin, qui est amoureuse d'un Alaouite, et un frère Salim, qui vit à Doha au Qatar pour "y faire de l'argent", et qui va se marier avec une baathiste (du parti politique Baas).

Hala pense que son frère est influencé par les moeurs du Qatar, il n'apprécie pas que sa nièce Asma joue au foot dehors avec de jeunes garçons ni que ses tenues soient peu discrètes.

Extrait : "Qui sommes-nous en train d'introduire dans notre famille, une baathiste et un Alaouite ! Si mon père l'apprenait, il se retournerait dans sa tombe." (p 166)



Tout au long du livre il est question d'une éventuelle libération de prisonniers politiques, comme Ahmed ; peut être à l'occasion de l'élection - truquée - d'Hafez al-Assad. Le gouvernement n'a jamais reconnu l'existence de ces prisonniers politiques qui ont passé de longues années enfermés à cause de leurs idées et qui seront libérés au compte-gouttes.

Le monde extérieur est si peu fiable que chacun se retire dans le cocon familial ; l'omniprésence des agents des mukhabarat (services secrets) crée une atmosphère de peur, de crainte qu'une conversation soit écoutée, de méfiance vis à vis de l'autre. D'où une vie presqu'en huis clos, un peu étouffante. Aussi l'auteure se rend dans différentes villes, dont la très ancienne Alep, ainsi qu'à Tadmur, à Palmyre, et dans le désert, et nous donne alors des visions différentes de ce pays très complexe.



Une immersion intense et très intéressante dans la Syrie d'il y a vingt-cinq ans et qui éclaire les troubles actuels et leurs terribles répercussions.



Extraits : "Le grand monstre qui nous gouverne a fait de chacun de nous un petit monstre. Mais après un moment, elle semble se raviser : ma vision est peut être fausse, ce sont peut-être tous ces petits monstres qui ont engendré le grand monstre." (p 117)



"Bien que nos vies aient pris un cours différent, bien que je me sois souvent heurtée aux limites de notre amitié, Hala fera toujours partie de moi. Dans notre jeunesse, nous nous sommes toutes deux révoltées contre le monde dans lequel nous grandissions. J'ai été récompensée de ma rébellion, elle en a été punie. Ma société a fait de la place pour moi, la sienne l'a forcée de plus en plus dans ses retranchements..." (p 374)





Commenter  J’apprécie          40
Sur les ailes du dragon

Il était temps, en effet, que quelqu'un renverse la perspective et dise l'énergie, les ambitions, les souffrances individuelles qui accompagnent ce nouvel âge colonial.

Lieve Joris le fait avec l'intelligence et l'humilité des meilleurs écrivains itinérants: en donnant la parole à des dizaines de personnages qui, passés d'un continent à l'autre, découvrent le racisme et l'exil.
Lien : http://rss.nouvelobs.com/c/3..
Commenter  J’apprécie          40
Sur les ailes du dragon

La Belge Lieve Joris suit les tribulations du continent noir à Canton, Pékin ou Shanghai. La mondialisation comme vous ne l'avez jamais lue.


Lien : http://rss.feedsportal.com/c..
Commenter  J’apprécie          40
Les hauts plateaux

Un livre de voyage au cœur de l'Afrique.

Dépaysement garanti.
Commenter  J’apprécie          40
Ma cabine téléphonique africaine

Ce livre est une succession d'images sur les pays parcouru par l'auteur: Mali, Congo, Tanzanie, Sénégal, Egypte...)



Sa lecture est un voyage à travers les odeurs, les bruits et les lumières du monde. L'auteur est vraiment excellente dans la description des ambiances.
Commenter  J’apprécie          40
Ma cabine téléphonique africaine

Sympa... Quand on a soi-même parcouru notre étrange planète...
Commenter  J’apprécie          30
Ma cabine téléphonique africaine

Dans ce très beau recueil de nouvelles, l'auteur nous fait voyager à travers plusieurs pays (Mali, Tanzanie, Egypte, Varsovie...)pour nous faire découvrir des façons de vivre, d'être ou de penser différentes des nôtres.

Ainsi nous rencontrons Madame Taher, ancienne femme fortunée de l'époque du roi farouk, dépossédée désormais de ses biens, qui craint toujours qu'"ils" n'arrivent, qu"ils" ne l'espionnent ou ne la volent;également Rachid, immigré vivant à New-York, retournant pour quinze jours dans son pays, la Tanzanie, Ismaïl, amoureux de littérature, qui vit dans un pays partagé entre les chrétiens, les Kurdes et les Bédouins.

La nouvelle qui m'a le plus touchée est sans conteste En Pologne avec Kapuscinski, où l'auteur passe un dimanche à vadrouiller en Pologne avec un journaliste international Kapuscinski, qui reste attaché à son pays et à son histoire et y revient assez souvent.

Quelques beaux passages sont à relever :

p.107 Là, entre les sentiers soigneusement ratissés, se trouve l'histoire de la Pologne - une hisoire de guerres et de révoltes. Ici, les trépassés se sont retrouvés. Les lieutenants de l'armée polonaise qui furent condamnés à mort en 1952 [...] reposent à côté des chefs de la Sûreté qui les firent assassiner. " C'est ça la Pologne, dit Kapuscinski, maintenant ils sont voisins."

p.109 Dernièrement à la radio, on demandai à une jeune fille pourquoi elle voulait un enfant . "Parce que c'est la seule chose que je peux obtenir", a-t-elle dit.



Tout n'est que pauvreté, peur du lendemain, reconstruation fragile, combat pour la vie, et ce journaliste, pourtant réputé et réclamé au niveau international, reste fidèle à son pays, là où d'autres ont fui vers une vie meilleure sans se retrourner.



Voici donc un très beau recueil, à l'écriture masculine (j'en oubliai parfois que l'auteur est une femme!), juste et directe, que je vous recommande vivement
Lien : http://leslivresdagathe.over..
Commenter  J’apprécie          30
Mon oncle du Congo

Nous partons dans ce livre sur les traces du grand-oncle missionnaire de Lieve Joris, à la rencontre du Zaïre de Mobutu, dans les années 80. Du voyage en bateau à l’est du désormais Congo, en passant par Kinshasa, des villages de brousse ou riverains du fleuve Zaïre, à Kisangani… nous allons à la rencontre de ce pays, ancienne colonie belge, et de ses habitants.



J’ai beaucoup aimé le regard de Lieve Joris sur les Congolais, et le regard critique, en parallèle, sur ces Belges toujours présents pour faire de l’argent, dont le mépris pour la population locale l’écœure comme il m’écœure en la lisant.



A l’heure où la gestion par la Belgique de période coloniale est remise en cause, ce livre vient me conforter dans ce ressenti : si un certain nombre de personnes est allé au Congo dans un but désintéressé, pour enseigner, évangéliser… un grand nombre d’autres s’y est rendu pour profiter, se servir, piller et piétiner les populations sur place. Et le départ des Belges du jour au lendemain, en n’ayant pas apporté les bases d’une gestion autonome par le peuple congolais, fait toujours sentir ses conséquences au moment où l’histoire se déroule :



« Diriger un pays, ça ne veut pas dire rouler dans des Mercedes noires et organiser des défilés. »

Commenter  J’apprécie          20
Ma cabine téléphonique africaine

Lieve Joris est une femme extraordinaire. Je ne la connais pas mais j'en suis sure quand je lis ses livres. Son regard ne ressemble à celui d'aucun autre écrivain voyageur dont je me souvienne, trop souvent centrés sur eux-mêmes. Ni à celui d'un reporter, trop souvent plat et sans âme. Elle est les deux, elle est ailleurs, elle est Lieve Joris. Elle est un grand écrivain qui sait nous parler du monde comme personne des petites histoires des hommes et des grands changements du monde.



J'ai déjà parlé de son livre sur la Chine et l'Afrique " Sur les ailes du dragon". "Ma cabine téléphonique africaine" est un ouvrage plus modeste, un recueil de portraits entre l'Afrique et la Pologne. On y rencontre Bina, receveur des postes de Sokolo au Mali; Rashid qui retrouve sa famille à Dar-es-Salam après avoir construit sa vie aux États-Unis; Jacob un hollandais installé sur l'ile de Pemba, pas loin de Zanzibar; Mme Taher et sa pension cairote; Ismail, l'avocat kurde près d'Alep, Ryszard Kapuscinski qui lui fait visiter la Pologne, Piotr et Anna qui la reçoivent dans leur ferme...Les différents récits sont datés entre la fin des années 80 et les années 90.



Elle nous parle d'eux, très peu d'elle ... amicale et intéressée ; indulgente mais pas dupe; leur quotidien difficile, leurs choix de vie, leur combat . Un très beau témoignage du monde.
Commenter  J’apprécie          20
Fonny

Histoire familiale peinte par touches successives de souvenirs, Fonny ressemble à une tapisserie. Autour de l'accident de son grand frère, Lieve Joris convoque ses souvenirs, sa famille, son enfance.

Mais moi, je suis restée en retrait, sur le côté. J'ai regardé les vies s'écouler, les mémoires se rappeler, les pages défiler. Je pourrais dire que je suis passée à côté mais non, ce n'est pas vraiment ça. Je n'ai pas bougé, pas voyagé, pas accompagné. J'ai laissé filer. Ça arrive. Pas facile de donner un avis, un ressenti, quand il ne s'est rien passé. Pas pour moi, pas là, à ce moment-là. Je ne sais pas trop. Ça n'a pas fonctionné, c'est tout. Je ne reproche rien à l'écriture, elle n'est juste pas de celles qui m'emportent. Et puis, j'ai eu le sentiment que l'histoire m'avait tenue à l'écart. Je ne me suis pas sentie invitée. Ça ne s'explique pas, ça ne tient à rien parfois.

Mais ne vous arrêtez pas à ce que j'en ai pensé, on a tous des sensibilités différentes.

Je remercie Actes Sud et Babelio pour la découverte.
Commenter  J’apprécie          20




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Lieve Joris (216)Voir plus

Quiz Voir plus

Auteur Mystère cher à mon Petit Coeur

Une pincée d'anticipation sociale:

Outrage et rébellion
Copyright

8 questions
2 lecteurs ont répondu
Thèmes : polar noir , romans policiers et polars , noir , littératureCréer un quiz sur cet auteur

{* *}