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Critiques de Mathieu Belezi (357)
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Attaquer la terre et le soleil

Très belle oeuvre. Elle se passe au XIXé siècle mais pourrait être d'hier et d'aujourd'hui. Vive la France et ses beaux discours, ses belles promesses. Arrivés en Algérie, ces colons qui croyaient trouver une terre sainte, un nouvelle vie, n'ont eu que leurs larmes pour pleurer. Les enfants y ont une place toute particulière à mes yeux.

Matthieu Belezi a une écriture tirée au cordeau. Ca cisaille de partout. Ca tranche dans le vif de la nature humaine. On dirait du vécu.

Ce livre ne se raconte pas, il se vit. Il passe sous la peau.

Ce qui est certain c'est qu'il faut le mériter. Il est brut et cassant, et pourtant si tendre et sensible.
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Un faux pas dans la vie d'Emma Picard

Emma Picard n'a pas eu une vie facile, c'est le moins que l'on puisse dire. Nous sommes dans les années 1860. Seule avec ses quatre fils, elle entreprend un voyage vers l'Algérie où l'attend une ferme de 20 hectares. «La France» a promis à Emma une vie d'apprentie-colon, prospère et heureuse. Une promesse fabuleuse qui se ternira au fur et à mesure du trajet et dont l'infime espoir s'envolera à la vue de sa terre, misérable. Elle nous raconte son périple et ses années algériennes. Pour être plus exacte, elle les rappelle à la mémoire de son plus jeune fils qui agonise sur un lit. Nous sentons très vite qu'elle regrette son choix. Elle se lamente sur cette décision qui a ruiné sa vie. Emma Picard va aller de désastre en désastre, un cercle sans fin rythmé par des saisons impitoyables. Sécheresse, nuage de sauterelles, maladies,.. rien ne lui est épargné.

L'auteur nous offre le portrait d'une femme qui, malgré les coups durs du sort, tente de rester debout. Portée par une opiniâtreté et un besoin de croire en des jours meilleurs, elle avance coûte que coûte, jusqu'où ses forces pourront la porter.

J'ai été touchée par cette héroïne courageuse, par sa voix dure, ses propos fatalistes dans lesquels ne transparaît aucune compassion envers elle-même. Coupable, elle le revendique jusqu'à en perdre la foi.

Le style de l'auteur, à la ponctuation rare, nous aide à écouter cette femme par sa fluidité. C'est un roman que j'ai lu pratiquement d'une traite, emportée par cette triste confession et par l'évocation d'un pays qui se laisse difficilement apprivoisé.



J'ai reçu ce livre dans le cadre de "Masse critique", je remercie Babelio et les éditions Flammarion pour ce cadeau.

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Moi, le glorieux

Avec « Le temps des crocodiles », nous avions découvert la figure effroyable d’Albert Vandel, capitaine de l’armée française à la tête d’un bataillon de zéphirs faisant régner la terreur sur les terres d’Algérie aux prémices de la colonisation. Nous avions quitté cet ogre avide de sang, de stupre et de domination en bien fâcheuse posture face à la révolte des fellouzes, après avoir imposé son règne sur l’oasis aux cinquante mille palmiers. Avec « Moi, le Glorieux », nous retrouvons cet abominable personnage à l’âge canonique de cent quarante-cinq ans et au poids corporel non moins mirobolant. Retiré dans sa sublime villa des Eucalyptus, l’homme est devenu richissime, le plus prospère d’Algérie, dominant tous les secteurs du commerce et de l’industrie après avoir intrigué et manipulé dans les sphères du pouvoir pendant plus d’un siècle.



Mais les temps ont changé, la révolte gronde, les fellaghas tranchent les têtes et les couilles des colons français à tour de bras, incendient la ville d’Alger et font sauter des bombes. Toujours autant obnubilé par les ripailles pantagruéliques et les nuits de débauche sexuelle, celui que l’on surnomme Bobby caïd ou Bobby la baraka, se remémore sa gloire passée, radote au grand dam de sa jeune maîtresse kabyle Ouhria, « foutez-moi la paix, monsieur Albert, je dors ». Mais l’ogre conte les époques de sa gloire, les femmes innombrables, les richesses incalculables, les conquêtes impitoyables, remontant le temps avec une verve tout autant passionnée que révoltée, « ils ne m’auront pas ! », face aux soubresauts de cette Algérie qui cherche à se débarrasser de tous ceux qui l’ont montée, violée et spoliée. Alors Albert Vandel doit fuir au bordj Saint-Léon, dans sa forteresse défendue par cent légionnaires armés jusqu’aux dents, accompagné par une douzaine d’administrateurs à sa solde, tous centenaires et grabataires, reliques de la domination coloniale…



Récit empli de brutalité et de vulgarité, mais d’une force évocatrice poignante, « Moi, le Glorieux » se lit suspendu entre l’écœurement et la fascination. C’est un monde qui chavire, et avec lui la figure symbolique d’une domination révolue.

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Attaquer la terre et le soleil

Attaquer la terre et le soleil offre une lecture éprouvante mais salutaire, éprouvante car elle n'épargne aucunement les actes abjects de la conquête de l'Algérie, salutaire parce qu'elle informe in vivo de cette invasion, du point de vue des colons, du point de vue des militaires français. Avec un style incisif, cru, personnel, Mathieu Belezi décrit avec franchise, avec rage, l'espoir des personnes à qui on a vendu la terre promise et le rêve de terres fertiles, l'espoir de soldats à qui on a vendu un combat facile face des hordes locales dociles et soumises, une vie sans danger, des orgies en guise de récompenses et d'humiliation... au final, une vie constamment faite de dangers de mort, sécheresse, maladies, attentats, morts, une vie qui pousse chaque être à perdre de plus en plus son humanité, à s'enfoncer dans le pire, dans l'enfer sur Terre.



Attaquer la terre et le soleil est un roman à la gouaille d'époque, à la plume familière, authentique. Mathieu Belezi alterne les témoignages d'une colon et d'un soldat, deux voix françaises en terre étrangère. Le texte comporte beaucoup de dialogues, des récits collectifs où le "nous" est d'usage, où le "nous" est incarné. Mathieu Belezi compose un récit historique dans Attaquer la terre et le soleil. Par son interprétation personnelle, il transmet l'horreur de ce conflit armé, de ce conflit de populations pour une terre, de ce conflit où tous ont perdu.



Je suis ressortie de cette lecture perturbée par l'âpreté des faits, déboussolée d'y lire des scènes d'une violence inouïe, des scènes répétées. Je ne peux même pas dire si j'ai aimé cette œuvre : je reconnais sa qualité littéraire, sa capacité à m'immerger dans une atmosphère de sang, de larmes, de peur, de haine, de violence (je me répète). 



Une lecture qui ne s'oublie pas, montrant l'agression française sous différents angles (appropriation des terres, des terrains, des biens, des corps), la peur et les représailles constantes. Du lourd, du très très lourd.



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Attaquer la terre et le soleil

L’auteur n’aime pas les majuscules et les points. La ponctuation est donc a minima mais le style simple et alerte emporte bien vite le lecteur dans le sauvage de la nature humaine et des terres algériennes.



La troupe du capitaine sanguinaire enchaîne bains de sang et razzias au nom de la pacification et de la civilisation chrétienne.

C’est cru, cruel, carnassier et charnel. Ce ne sont pas des anges.

Terres ingrates, choléra et attaques de berbères sont autant d’épreuves subies par les colons français, au rang desquels, Séraphine avec sa famille.

Ce sont deux récits qui se croisent et s’entrechoquent pour nous signifier l’horreur et les désillusions des premières années de colonisation.
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Attaquer la terre et le soleil

Parfois, il suffit d’un rien pour que j’ai envie de lire un livre. Je ne connaissais pas du tout l’auteur, Mathieu Belezi, mais j’ai vu par hasard passer sur les réseaux sociaux que son dernier livre « Attaquer la terre et le soleil » venait de recevoir le Prix du Livre Inter 2023 et j’ai eu la curiosité de regarder de quoi il en retournait. Et ce court résumé m’a donné envie de le lire. Certes, je connais la dure réalité de la colonisation en Algérie, mais je n’ai jamais lu quelque chose sur ses débuts. Ça m’a interpellé et intéressé. Lu assez rapidement puisque texte relativement court, 160 pages, mais la force et la férocité du texte resteront longtemps « imprimées » en moi. Ecriture ciselée, ponctuation quasiment absente, mais violence est là dans les mots, les faits, les malheurs et la tristesse. Malheur et tristesse des Algériens qui ne veulent pas de ces colons mais aussi des colons qui finalement se demandent bien ce qu’ils sont venus faire ici sur cette terre qui ne veut pas d’eux. La violence et la bêtise crasse des soldats sont difficilement soutenables. Ils obéissent aux ordres, bêtement, mais aussi avec le plaisir malsain des hommes qui ont un petit pouvoir et qui en usent et en abusent. Le récit alterne entre les razzias et massacres des soldats et l’installation de nouveaux colons fraichement débarqués du bateau à qui la France a promis une terre à cultiver et une nouvelle vie heureuse sur cette terre à libérer de la barbarie (sic). On hallucine ! On ne peut s’empêcher d’avoir un peu de compassion pour ces braves gens pris sans le vouloir vraiment au cœur d’un fait historique qui les dépasse. Mais ma compréhension et mon empathie sont pour les Algériens bien sûr. Comment peut-on pardonner de tels actes de barbarie ? Un livre difficile mais qui me paraît nécessaire et essentiel.
Lien : https://mapassionleslivres.w..
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Attaquer la terre et le soleil

C'est un livre de fiction, un roman véritable.

C'est un livre nécessaire, qui traite de faits historiques tellement tus.



C'est l'histoire de personnages de roman, dans une Algérie colonisée par la France, de français du continent envoyés via une campagne de '' publicité '' de l'état français, pour cultiver la terre dite sauvage de l'Algérie devenue française.



C'est l'histoire de personnages venus du continent, pauvres, crédules et espérant en cette portion de terre gratuite que leur offre l'état français, croyant aussi recevoir une maison et échappant ainsi à une vie de rudesse ou de misère.



En parallèle, c'est l'histoire d'un régiment de soldats français, dans les terres kabyles notamment , complètement fous de guerre, de haine, de violence et de peurs, pillant, tuant, violant, avec un sentiment incroyable de légitimité derrière leur chef.



C'est un roman et c'est l'histoire de la France qui a colonisé un pays, l'Algérie.

Qui a forcément considéré comme un acquis que les populations algériennes étaient sauvages, sales, ignorantes parce que autres. Et que c'était bien pratique pour profiter des richesses du sous-sol et du sol algérien dont avait besoin cette France du continent.



C'est répugnant le colonialisme.



Si vous en doutez, lisez ce roman.

Il est très bien conçu, écrit et sans le dire, démontre magistralement comment le colonialisme est sans éthique ni morale.

Comment Séraphine, sa famille et les autres se verront floués et parqués par le gouvernement français dans des conditions misérables, loin des promesses qui les ont décidé à partir, comment ils devront survivre, face aux épidémies, au découragement, comment les soldats vont devenir de plus en plus violents et comment tous ces gens, pauvres pions du colonialisme d'état, entreront de par la pauvreté, l'ignorance et la peur, dans un rejet et un racisme puissant envers les algériens et algériennes sans même les connaître.



Évidemment, pour le régiment de soldats, ils les rencontreront, mais ce n'est jamais une rencontre, ce ne seront que des massacres.





Oui, c'est un livre, un roman nécessaire, qui nous rappelle ou nous apprend un pan bien laid et dégueulasse de notre histoire de France, qu'il est plus que temps d'affronter.



Un livre salutaire.
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Attaquer la terre et le soleil

Enfin, un roman qui se distingue. Enfin un auteur qui a de la personnalité. Enfin un livre qu’on n’oubliera pas.

Mathieu Belezi y est audacieux tant dans le style d’écriture que dans le thème abordé, il propose une œuvre unique dont il est difficile de se détacher.



Sans ponctuation ni majuscule, le récit apparaît comme une cascade de mots.

En s’affranchissant des règles de syntaxe, Mathieu Belezi nous force à nous concentrer sur son texte. On est vite happer, difficile de lever les yeux du livre tant son univers nous passionne, tant l’horreur décrite nous captive.



L’auteur s’attaque à un thème encore tabou, celui de la colonisation, plus précisément de la genèse de l’Histoire coloniale entre la France et l’Algérie au 19eme siècle; l’auteur s’engage. Il présente la colonisation telle qu’elle a été : une injustice barbare qui a coûté cher tant aux colons auxquels on a menti, qu’aux natifs que l’on a massacré gratuitement. Une bonne excuse pour les âmes malades qui ont pu s’épanouir en martyrisant un peuple.



Deux narrateurs se partagent le récit: Seraphine, jeune mère de famille qui émigre en Algérie avec mari, marmaille et frangine. Ils ont fait confiance au gouvernement qui leur a promis 7 hectares et une maison. Une aventure dans un pays qui a besoin d’être humanisé, d’une population inférieure loin des Lumières de la France.

Ils y trouveront la faim, la maladie, le froid.La chaleur, la peur et la mort.

Le deuxième narrateur est un soldat français. Il est chargé de soumettre les populations, de pacifier le pays. A coup de baïonnette, de fusil et de verge, il tue et viole à foison. Il suit aveuglément son commandant, un psychopathe orgueilleux qui a trouvé une voie royale vers le crime en étant aux manettes d’une troupe docile qu’il abreuve de sermonts et de gnole.



Un roman cruel qu’on n’oubliera pas de sitôt.

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Attaquer la terre et le soleil

Ce roman assez court est un des meilleurs livres que j'ai lu ces derniers mois .

Matthieu Belezi battit son roman sur la colonisation en donnant la parole à deux personnages :

Une femme qui fait partie d'un groupe de colons et un soldat .

Au 19eme siècle, la France avait promis l'Eldorado aux premiers volontaires décidés à partir pour une vie meilleure.

Séraphine nous raconte le voyage harassant qu'elle et ses compagnons font jusqu'en Algérie,leur arrivée au milieu de nulle part ,et les horreurs qu'ils vont endurer .

Le soldat nous embarque avec sa petite troupe qui suit aveuglément un commandant fou et sanguinaire . Et parfois la voix d'un arabe se fait entendre, nous plaçant du côté des colonisés.

Le style très original et époustouflant de Matthieu Belezi donne encore plus de puissance à ce roman qui met en lumière l'absurdité,la violence et la folie qui a amené des hommes à conquérir un pays qui n'avait rien demandé . A lire absolument .
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Attaquer la terre et le soleil

Un récit court et dense, porté en écho par deux narrateurs qui illustrent la sauvagerie profonde des débuts de la colonisation en Algérie. Au moment où la révolution de février 1848 proclame la République, deuxième du nom, la France envoie de l’autre côté de la Méditerranée le sabre pour conquérir et les bras pour travailler. Séraphine raconte la terrible Odyssée des 500 migrants bringuebalés de bateaux en bateaux jusqu’à Marseille, la traversée douloureuse et le réveil brutal à l’arrivée, si loin du paradis promis, sur une terre rude qui transformera la besogne en enfer. Séraphine est le porte-voix du désespoir, au fil des catastrophes qui s’abattent sur la petite communauté, dans une rigueur qui fait penser aux 7 plaies d’Égypte, comme une sanction implacable à la folie meurtrière de la conquête. Car le sabre de l’armée triomphe. Dans un mépris absolu des vies qu’ils rencontrent, la conquête ouvre pour les soldats le droit de trancher les vies sans limites, sans pitié. Le sang devient légitime, et le récit n’épargne rien au lecteur pour en décrire les flots qui inondent la terre sèche et aride. La baïonnette impose sa loi, les soldats en jouent sans état d’âme, condamnés à tuer, comme des machines, des hommes devenus automates, dépossédés d’eux même. L’un d’eux parle au lecteur du fond de sa violence et ces propos-là sont terribles. Quel autre choix cette logique de conquête laisse-t-elle aux indigènes que de tuer à leur tour ? Mathieu Belezi nous plonge dans une conquête carnassière, elle s’abat sur cette terre et ses habitants comme une apocalypse, renvoyant à une fin des temps l’idée d’une réparation, d’une vengeance. Le livre est écrit dans un rythme oppressant, se croisent et se répondent le regard de Séraphine et celui du soldat, les mots sont tendus, effilés comme des armes, la violence emporte tout dans un souffle mortel.

Un livre coup de poing, qui plonge le lecteur dans la réalité d’un massacre, un de ceux que l’histoire a pu étouffer un temps, la décolonisation en Algérie prend en négatif toute sa force et sa légitimité.

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Le Temps des crocodiles

Une troupe de soldats enragés, parcours le désert, tuant, égorgeant, violant, saccageant tous sur leur passage. Ils laissent le désert plus désert que jamais. A leur tête : Albert Vandel, capitaine qui ne souffre aucune contestation et qui n’a aucune pitié. C’est un ogre que rien n’arrête.



« La place était vide à présent, Vandel sortit sa pipe bourrée de kif, l’alluma tranquillement, ferma les yeux

n'avait-il pas pour lui le bon droit de sa race supérieure ? »



Ils espèrent trouver l’eldorado, mille palmiers de l’oasis repérée par les cartes « de ces incapables tapis dans la pénombre ventilée de leurs bureaux d’Alger ».



Une écriture sublime, d’une telle poésie, des descriptions majestueuses du désert pour décrire l’ineffable, la pire des barbaries dont l’homme a été capable envers tout un peuple, tout un pays. Texte accompagné par les sombres et somptueux dessins de Kamel KHÉLIF.



Mathieu BELEZI prend à témoin les animaux, les arbres, les nuages qui ne comprennent pas ce qui vient perturber de manière aussi tragique le désert.



« Les tourterelles racontèrent toute l’histoire aux nuages

- Les capotes bleues-pantalons rouges donnent à manger de la chair humaine aux crocodiles, de la chair morte et de la chair vivante



et les nuages s’empressèrent de répéter aux quatre points cardinaux les horreurs que les tourterelles leur avaient racontées. »



De la belle et grande littérature, pour raconter les horreurs engendrées au temps du colonialisme de l’Algérie.



Je voudrais saluer la maison d’édition « Le Tripode » pour la qualité de leurs ouvrages. Les couvertures et l’écriture sont belles, le papier de qualité. C’est assez rare aujourd’hui, pour être souligner.

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Attaquer la terre et le soleil

Nous sommes au 19ème siècle en Algérie, et nous allons suivre deux groupes de personnes : une famille de colons qui a décidé de quitter la France pour le paradis d'une colonie agricole promise par la République, et des soldats Français.



Les chapitres des colons s'intitulent "rude besogne", ceux des soldats "bain de sang".



Portée par une écriture poétique, ce n'est que douleurs, massacres, viols, fureurs, pleurs, désenchantements et destructions.



Car les colons vont vite déchanter dans leurs baraquements, face à aux maladies, aux animaux sauvages, aux perturbations de la météo ou aux attaques des Arabes "ces monstres sanguinaires, soi-disant poussés par leur Dieu qui n'admettait pas qu'un roumi souille ses terres"



Et les soldats, dirigés par un capitaine ivre de sang, n'ont que la dévastation comme horizon.



C'est dur et j'avoue que j'avais du mal à me replonger dans le récit de toutes ces horreurs. Mais le rythme de la langue, ces longs textes sans ponctuation qui traduisent les pensées des protagonistes, et la beauté du texte, m'ont aidé à affronter cet effroi. L'auteur sait parfaitement nous faire ressentir la folie de cette colonisation dans des conditions extrêmes.



Une lecture dont on ne sort pas indemne.
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Le petit roi

Une seconde incursion pour moi après attaquer la terre et le soleil.



Et toujours une même immersion dans la langue de Mathieu Belezi. Dont j'apprécie la capacité en nous emmener avec une économie de mots à l'essentiel, au cœur de nos humanités, aussi douloureuses soitent-elles.



Un premier roman publié après le second, donc, si j'ai bien suivi. Un enfant qui se retrouve du jour au lendemain chez son grand-père. Abandonné par sa mère.



Par touches successives, Mathieu Belezi dévoile un peu de son histoire, la douleur de l'absence, la lente reconstruction ou plutôt l'émergence d'une identité, d'un lien qui se noue peu à peu avec le monde. Et qui finalement s'effondre.



Comme dans son roman précédent qui est le suivant (vous suivez), le propos n'est pas dénué de dureté, de violence. Mais c'est aussi ce que je peux parfois - souvent ? - rechercher en littérature : être bousculé, surpris. Et à cet égard, c'est une réussite.
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Attaquer la terre et le soleil

Coup de cœur ! (je jette ce cri en préambule, comme ça c’est fait !)



Je n’avais encore rien lu sur la colonisation de l’Algérie du point de vue de l’envahisseur (mais depuis j’ai noté de lire Camus ;-) et surtout à ses tout débuts (de la colonisation, pas de Camus).



Deux points de vue : celui des premiers colons, à qui le gouvernement avait promis une nouvelle vie pleine de richesses et qui ne trouveront qu’une terre aride, la maladie et l’opposition autochtone…



L’autre point de vue est celui des soldats venus pacifier et civiliser les sauvages malgré eux. Sûrs de leur bon droit et de leur mission, ils vont massacrer à tour de bras les algériens qui ont le malheur de croiser leur chemin.



J’ai lu dans quelques critiques qu’il manquerait le point de vue de ces derniers, mais je pense celui-ci tombe sous le sens et est induit par les actes commis par les français, civils et militaires, les premiers en spoliant des terres et les autres en commettant leur exactions.



La plume de Mathieu Belezi est très précise, parfois poétique malgré la lourdeur du sujet. Probablement de par le découpage des phrases et des paragraphes la lecture est un peu haletante et colle bien au rythme probablement voulu par l’auteur.



À noter que si le récit des colons est à la première personne (par la voix d’une jeune mère de famille un peu naïve), celui des soldats est à la première personne du pluriel : le narrateur est dépersonnalisé au profit d’une meute de guerriers sanguinaires à la botte d’un chef charismatique (qui pourrait parfois être ridicule s’il n’était aussi violent).



Un roman très original, dur et violent, mais utile pour comprendre un peu mieux notre histoire de France. Nécessaire en tout cas à ceux qui pensent que « on » a apporté la civilisation, les routes et les écoles dans nos colonies. Qu’"on" a fait œuvre de bienfaisance, en somme.
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Attaquer la terre et le soleil

Je ne sais pas où les critiques et le jury du Prix du livre Inter 2023 ont vu la puissance de ce roman mais personnellement, je suis passée à côté.

"Attaquer la terre et le soleil" de Mathieu Belezi est un livre sur la barbarie de la colonisation qui pourrait se passer n'importe où. C'est un peu dommage car je n'avais jamais lu de roman sur la colonisation française en Algérie au 19eme siècle et c'est ce qui faisait son originalité. C'est aussi pour cela que je l'ai acheté.

C'est raté de ce côté-là probablement parce qu'il voulait donner un côté universel au sujet car on n'apprend rien sur l'histoire de l'Algérie.



On est du côté des colons et des soldats français avec une alternance des chapitres entre (Rude besogne) et (Bain de sang) et on se demande bien pourquoi il y a ces parenthèses.

Les algériens sont des masses et pas des individus, ils sont arabes ou moukères et plus souvent des moricauds.

Séraphine la narratrice ainsi que ses proches et tous ceux de la Colonie agricole sont gardés par des soldats. Ils ne vont avoir que des malheurs et on se demande pourquoi ils ont émigré dans ce pays. Heureusement qu'il y a quelques pages sur le mariage de Rosette et Fernand sinon tout n'est que désastre. Malgré la répétition de l'expression "Sainte et sainte mère de Dieu" il n'y a pas d'intervention divine dans leurs malheurs.



Si Séraphine se sent "plongée dans les flammes d'un enfer à peine imaginable" après avoir perdu plusieurs membres de sa famille dont ses deux petits garçons morts du choléra, on se demande ce que diraient les algériens si on les entendait. Car le (Bain de sang) est un titre qui n'est pas usurpé puisque qu'il n'y a que ça. Les habitants des villages sont embrochés ou décapités, les femmes violées, les maisons brûlées par les soldats français au nom du bon droit des colonisateurs venus pacifier des terres de barbarie.

C'est trop sordide pour que j'accroche au texte même si j'ai bien compris que Mathieu Belezi dénonce la folie des hommes. Quant à Faulkner annoncé en quatrième de couverture je suppose qu'on lui doit les citations en italique mais je ne vois pas ce qu'il vient faire ici.





Challenge Riquiqui 2023

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Attaquer la terre et le soleil

Choisir un livre pour cocher un item de challenge et tomber sur une pépite littéraire tant pour le style que le thème !



C'est ce qui vient de m'arriver avec ce court roman de Mathieu Belezi, Attaquer la terre et le soleil, qui retrace une partie du récit de la conquête de l'Algérie, donnant tour à tour la parole à Séraphine qui s'est embarqué pour l'aventure avec son mari, leurs trois enfants, sa sœur et son beau frère, et à un soldat du contingent sous les ordres d'un capitaine assoiffé de sang voulant donner à la France une terre débarrassée de ses scories indigènes. 



L'attrait d'une terre à cultiver avait convaincu de nombreux français à tenter l'aventure. Mais les maladies, notamment le choléra qui faisait des ravages, les animaux, comme le lion des montagnes, le soleil, si chaud qui brûle tout ... et les incursions des indigènes venus laver dans le sang des colons celui versé par les militaires. 



Un style rapide, haletant, où passe toute la souffrance de Séraphine, renforcé par l'absence de ponctuation de fin de phrases. 



Un roman doublement primé, qui le mérite absolument



Un auteur que je découvre et dont je vais rechercher les autres productions, tant il m'a emportée dans ce récit tragique et violent d'une période peu évoquée des relations franco algériennes. 
Lien : http://les-lectures-de-bill-..
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Attaquer la terre et le soleil

Sainte et sainte mère de Dieu

Je ne connaissais pas Mathieu Belezi et pourtant cela fait vingt ans qu’il écrit.

Ce roman a une fulgurance poignante.

Son sujet, le destin d’une poignée de colons et de soldats pris dans l’enfer du début de la colonisation algérienne au dix-neuvième siècle.

De sa forme, une alternance de chapitres (RUDE BESOGNE) et (BAIN DE SANG), s’élèvent les voix de Séraphine et ensuite celle d’un soldat anonyme.

Le tout avec une ponctuation à minima, à la ligne, qui renforce le côté dramatique de l’histoire.

Des migrants français sont parqués dans un lazaret à Marseille en attendant le départ de la frégate Labrador qui doit les emmener en Algérie.

« Quoi qu’il arrive ne désespérez jamais du gouvernement de la République. Il a les yeux grands ouverts, l’oreille aux aguets de la moindre de vos plaintes, et il fera tout ce qui est en son pouvoir—absolument tout !—pour que la rude besogne de chacun soit récompensée à son juste prix. Parce que vous êtes la force, l’intelligence, le sang neuf et bouillonnant dont la France a besoin sur ces terres de barbarie. Et que cette force, cette intelligence et ce sang neuf sont infiniment précieux. »

Arrivés sur cette terre algérienne, c’est l’effondrement, le sentiment de solitude domine tout.

« grelottant de fièvre et de désespoir nous perdions chaque jour un peu plus de ce qui nous restait de dignité. »

Les maisons promises n’existent pas, de vastes tentes sont là pour les accueillir mais plusieurs famille doivent coexister. La vie s’organise sous la surveillance de jeunes soldats eux-mêmes pas tout à fait aguerris aux tâches qui leur incombent.

Le printemps arrivé, ce ne sont pas des maisons qui sont construites mais des baraquements où ils doivent continuer à cohabiter.

Toutes les sorties et activités sont faites sous escorte militaire. La violence est partout. La scène avec Germaine est au-delà de la barbarie, indicible.

Le choléra décime.

Séraphine et le soldat sont les porte-voix de cette violence.

Mathieu Belezi est le Steinbeck de l’Algérie, le lecteur retrouve cette densité dans la dénonciation de ce qu’il y a de pire dans l’humain.

Les mots traduisent la musique du désespoir et de l’absurde.

Texte court, une écriture au scalpel et des bulles de poésie ça et là pour que le lecteur reprenne son souffle.

En refermant le livre, nos âmes résonnent de ces cris qui disent la violence de la colonisation, terre d’exil qui aurait dû être un havre malgré la rudesse du labeur mais ne fut que bain de sang.

Mathieu Belezi et sa plume acérée nous plonge en apnée dans cet enfer, il broie nos tripes, ses mots sont des armes.

Impossible de ne pas faire le parallèle avec l’actualité, il n’y a pas de bons côtés ni de bonnes origines quand on est migrant.

L’expression « devoir de mémoire » revient souvent dans l’Histoire, mais il me semble que nous pourrions parler de « devoir de réflexion »

Les trois lignes qui concluent le livre sont le dernier cri, déchirant à l’infini.

Décidément un auteur à lire.

©Chantal Lafon




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Attaquer la terre et le soleil

Le titre de ce roman annonce par avance l'absurde de l'action, qu'elle soit projet ou ordre à exécuter. En effet, deux narrateurs prennent en charge le récit en alternance : d'une part, Séraphine qui avec son époux Henri, leurs deux garçons et leur fille Caroline, mais aussi avec Rosette, la soeur de Séraphine et son époux, Louis, quittent leur banlieue parisienne pour un eldorado, une terre promise, en Algérie. D'autre part, un soldat dont on ignore tout sauf que, comme ses camarades, il n'est "pas un ange" comme le leur rappelle leur capitaine dont le comportement n'a rien à envier à ceux que plus tard, on nommera "Nazies"



À travers ces deux narrateurs qui ne se croisent jamais, l'auteur nous fait découvrir une période rarement évoquée, celle de la colonisation de l'Algérie au XIXe siècle, vers 1845.



Séraphine raconte le dur apprentissage de la vie de colons : trois mois dans un campement sous tentes militaires : pluie, boue, odeurs pestilentielles, "comme si chacun de nous, pauvres et naïfs apprentis colons à peine débarqués, était en train de pourrir et de se décomposer". Ensuite, la vie se poursuit sous un soleil de plomb dans des cabanes de bois entourées de palissades  où le choléra fait rage et décime la famille de Séraphine, enfin les attaques de rebelles et le massacre de Rosette et de son nouveau mari. "Sainte et sainte mère de Dieu" tel est le refrain qui rythme le récit de Séraphine, longue descente aux enfers aux paragraphes non ponctués et sans majuscules.



Le récit du soldat, lui, est rythmé par le lancinant refrain, " nous ne sommes pas des anges", réponse sollicitée par le capitaine pour justifier les pires exactions.



On songe à travers cette lecture à la terrible épopée des Raisins de la colère de J STEINBECK mais aussi à La Peste d'Albert Camus. Ici aussi tel le docteur Rieux, un médecin militaire tente tout ce qu'il peut pour sauver les colons
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Attaquer la terre et le soleil

Roman qui alterne deux récits, tous les deux aussi effrayants. Une famille française qui est venue coloniser l’Algérie. La narration est portée par une femme dans cette partie. La deuxième voix est celle d’un soldat, français là aussi.

Dans le premier cas, l’horreur vient surtout des éléments, la maladie, le choléra, mais aussi des Algériens combattants qui commettent des horreurs. Dans le deuxième cas, la violence est intrinsèque au narrateur, à son groupe.



Des atrocités sont décrites, dans les deux camps, mais le point de vue étant celui d’un soldat français qui s’en prend au peuple algérien, j’ai eu la sensation dérangeante que la violence était attribuée à sa qualité de soldat, à celui qui commet des exactions côté français, alors qu’elle semble être présente chez tous les algériens de façon naturelle.

De même, le point de vue sur les femmes algériennes plutôt contentes de coucher avec les soldats qui venaient de tuer leurs maris, est-ce la vision des soldats français qui nous est donnée à lire ? Je me suis peut-être perdue avec ces deux narrateurs aux voix assez différentes.



C’est un livre sombre, violent, dérangeant.

Parce que je n’ai pas su y lire l’intention de l’auteur, il ne me laisse pas une bonne impression.


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Attaquer la terre et le soleil

Attaquer la terre et le soleil

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Deux voix, deux cris, se répondent dans ce superbe roman.

Celui de Seraphine, jeune mère de famille venue prendre possession de quelques hectares de poussière au cœur de l’Algérie fraîchement colonisée.

Celui d’un soldat anonyme embarqué dans une escalade de violence par la rage furieuse d’un capitaine que la barbarie pousse au bord de la folie.

Deux victimes impuissantes, deux destins brisés par des enjeux qui les dépassent, deux témoignages forts et puissants



Algérie, milieu du XIXème. « La France se donne pour mission divine de pacifier ces terres de barbarie, d’offrir aux cervelles incultes les ors d’une culture millénaire […] Et ceux qui refusent notre main tendue seront renversés, écrasés, hachés menus par le fer de nos sabres et de nos baïonnettes ». Et ô combien cette menace sera mise à exécution.

J’avoue mon ignorance sur cette page de l’histoire mais cette lecture m’a fait prendre conscience de sa place essentielle dans la compréhension de ce qui se passera 100 ans plus tard dans ce pays. Je ne connaissais pas cet épisode mais dès les premières lignes j’ai été plongée dans l’âpreté et la rudesse de la vie de ces colons. Ces pauvres hères qui rêvaient d’une vie meilleure et à qui rien ne sera épargné. Touchante et courageuse Seraphine qui invoque « la Sainte et sainte mère de Dieu » mais qui en retour ne récolte que deuils et souffrances. Dieu encore invoqué par ce soldat dans cette excuse sans cesse répétée, scandée comme une conjuration:« nous on n’est pas des anges ». Ce nous qui les englobe tous, qui les déshumanise, qui en fait des êtres désincarnés, insensibles, capables des pires exactions, des plus inhumaines barbaries.

Quant au style il est magistral. Presque pas de majuscule, peu ou pas de ponctuation, donnant au récit une rythmique ample et solennelle. Une succession ininterrompue de phrases livrées dans un souffle, avec urgence, délestées de superflu. Une prose élégante, comme un contrepoint aux horreurs et à la désolation qu’elle décrit. Un roman empli de gravité et de colère où l’union de ces deux voix résonne comme un chant funeste.

Un texte sombre et pourtant éblouissant.

Merci @le.tripode de nous offrir des textes aussi puissants.

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