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Critiques de Nicolas Texier (55)
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Monts et merveilles, tome 1 : Opération Sabines

Présenté comme l'une des « pépites de l'imaginaire 2018 », « Opération Sabines » fait partie des trois romans propulsés en ce début d'année par les Indés de l'Imaginaire, et bénéficie à ce titre d'un écrin particulièrement soigné (belle couverture de Melchior Ascaride, illustrations intérieures, dramatis personae, annexes...). S'il s'agit là de la première incursion de Nicolas Texier dans le domaine de la fantasy, l'auteur est pourtant loin d'être un amateur puisqu'on lui doit déjà trois autres romans parus chez Gallimard, ainsi, semble-t-il, que plusieurs travaux d'histoire militaire. Cette passion pour l'histoire, on la retrouve incontestablement dans ce premier tome dont l'action se déroule dans une Europe des années 1930 uchronique incroyablement détaillée. La narration est assumée ici par un certain Julius Khool, ancien soldat reconverti en domestique au service d'un jeune mage établi à Londres. Si les premières semaines de ce retour à la vie civile ne sont pas des plus palpitantes pour le vétéran, les choses ne tardent pas à devenir plus intéressantes lorsque son maître se trouve malgré lui embarqué dans une mission organisées par les services secrets britanniques. L'objectif ? Exfiltrer de Venise une vieille connaissance du mage, un certain Valère, dont les dernières découvertes scientifiques sont susceptibles d'aboutir à la création d'armes d'une dangerosité sans précédent, et qui ne doivent donc pour rien au monde tomber entre les mains des ennemis de la couronne. Rien de compliqué, à première vue, sauf que l'ennemi (à savoir la République romaine de Weimar) est déjà sur le coup, de même que certaines créatures de l'Outre-monde qui prennent de toute évidence la menace très au sérieux Le duo se lance alors dans une course contre la montre qui les entraînera de l'Angleterre à Venise, en passant par la Forêt Noire et les territoires de l'empire, jusqu'à l'outre-monde lui-même. Leur route sera évidemment semée d'embûches et rythmée par des rencontres plus ou moins amicales, allant d'une communauté d'ouvriers communistes aux membres d'une curieuse société secrète en passant par le spectre de Jack l’Éventreur, des divinités celtiques, ou encore une « passeuse ». Bref, nos deux héros ne sont pas au bout de leur surprise !



Le roman est extrêmement dense et repose sur de solides atouts qui sont malheureusement contrebalancés par un certain nombre de bémols qui viennent refroidir l'enthousiasme du lecteur. Un mot, d'abord, sur l'intrigue qui se révèle très inégale et se perd parfois dans des détours inutiles. Le rythme varie évidemment en conséquence, certains passages se dévorant à toute vitesse tandis que d'autres s'éternisent, au risque de lasser le lecteur. Celui-ci pourra d'ailleurs être rebuté dès les premières pages par le style de l'auteur qui a en effet la fâcheuse tendance à faire des phrases à rallonge, accumulant les prépositions sur parfois plus d'une quinzaine de lignes. Ce travers s'estompe heureusement progressivement au fil des pages, rendant ainsi la lecture plus aisée, mais ce manque de fluidité nuit tout de même à l'immersion du lecteur qui mettra un certain temps à venir à bout de l'ouvrage, et ce en dépit de ses seulement trois cent cinquante pages.

Cette lenteur dans la lecture s'explique également par le très faible nombre de dialogues (le narrateur nous raconte son histoire à posteriori et choisit trop souvent de résumer le contenu des conversations plutôt que de nous les retranscrire), ainsi que par le nombre incalculable de digressions qui parasitent le récit. Il suffit en effet d'un paysage, d'une rencontre, ou d'une situation périlleuse particulière pour que le narrateur replonge dans ses souvenirs de l'armée, ce qui a souvent pour effet de casser l'ambiance et donnent la regrettable impression que l'auteur cherche à meubler son récit (qui n'en a pourtant pas besoin !). C'est d'autant plus dommage que ces passages sont souvent très intéressants et qu'ils auraient sûrement été plus appréciés s'ils n'avaient pas été intercalés de manière aussi brutale au récit. Cela étant dit, je ne voudrais pas donner l'impression que le style de l'auteur est indigeste car ce n'est absolument pas le cas. Si la plume de Nicolas Texier n'est pas particulièrement fluide, elle est incontestablement travaillée et donne lieu à plusieurs passages vraiment évocateurs. Les quelques dialogues présents dans le roman sont également réussis car plus percutants, et il en va de même des petites touches d'humour qui parsèment le récit de manière efficace.



Il y a également du bon et du moins bon du côté des personnages. Julius Khool est pour sa part un narrateur et un protagoniste intéressant : originaire d'Afrique (ce qui n'est pas très courant), le vétéran a déjà vécu tout un tas d'aventures au moment où l'on fait sa connaissance, puisqu'il nous explique avoir servi en tant que mamelouk aussi bien que lancier de la Table ronde. Celui-ci garde d'ailleurs de terribles souvenirs de ses années passées dans les colonies britanniques et ne cherche jamais à édulcorer les atrocités qu'il a pu être amené à commettre et qui le poussent aujourd'hui à chercher du réconfort dans l'alcool. C'est cette part d'ombre qui rend justement le personnage aussi intéressant, de même que ses nombreuses compétences dans des domaines aussi variées que le combat ou la poésie (l'ouvrage fourmille de références poétiques et littéraires à Shakespeare, Virgile, Keats...). Je serais en revanche beaucoup plus nuancée en ce qui concerne les autres personnages, à commencer par l'acolyte de notre héros, le mage Carroll Mac Mael Muad. Alors certes, celui-ci a l'excuse de la jeunesse, mais cela ne suffit pas à expliquer la quasi inexistence de son rôle dans toute cette affaire ! On sait de plus très peu de choses sur lui, et la faute en incombe à mon sens à la narration : Julius Khool est constamment au centre de la scène et capte donc toute l'attention du lecteur au dépend des autres personnages qui ne font alors plus office que de simples figurants. C'est notamment le cas des agents du MI6 et du SOS (Secret Operations Service) chargés d'encadrer la mission, et plus encore de tous ceux qui vont être amenés à croiser de manière plus ou moins fugace le chemin du héros. Difficile dans ces circonstances de ne pas se sentir complètement détaché et de s'émouvoir de la disparition d'untel ou untel. C'est d'autant plus dommage que certains personnages possèdent un vrai potentiel, à commencer par les personnages féminins qui, si elles n'occupent que des rôles secondaires, n'en demeurent pas moins celles grâce auxquelles nos héros parviennent à se sortir des pires situations. Je serai aussi plus nuancée en ce qui concerne les « méchants » de l'histoire qui sont soit trop caricaturaux (l'agent Bremer), soit totalement mis de côté (Gwaënardel).



Venons-en maintenant à la question de l'univers, qui constitue sans aucun doute le véritable point fort du roman. Si l'intrigue, le style et les personnages m'ont laissé un sentiment mitigé, j'ai ainsi été totalement conquise par le portrait dressé par Nicolas Texier de cette Europe alternative dans laquelle la magie est toujours (et a toujours été) présente. Loin de n'être qu'une pratique marginale, elle occupe ainsi depuis des siècles une place importante et bénéficie d'un traitement très soigné de la part de l'auteur qui nous détaille par le menu les treize différentes « voies merveilleuses » (la magie curative, la divination, l'hypnose, l'enchantement, la voie martiale...). La situation est cependant sur le point d'évoluer à l'époque où se déroule l'action (1937), certains manifestant en Europe une véritable aversion à l'égard des créatures de l'outre-mode et prônant un désenchantement de leur nation au profit de la science et de la technologie, à l'image de la république romaine de Weimar (on devine aisément de quel exemple historique l'auteur a ici choisi de s'inspirer...). Les Royaumes-Unis continuent cela dit d'accorder une place significative à la magie qui se trouve encore au cœur de leur politique, de leurs dispositifs militaires, et évidemment de leur système éducatif. La force de l'ouvrage tient à sa cohérence, l'auteur ayant de toute évidence réalisé un gros travail pour imaginer les conséquences de l'existence de la magie sur nos civilisations, que ce soit dans le domaine social, politique, militaire ou économique. On apprend ainsi, au détour d'un passage, que l'argumentaire développé par les communistes de l'époque prend évidemment en considération le fait que la magie est, comme la richesse, l'apanage d'une seule classe de privilégiés, et réclame donc une démocratisation de son usage. On apprend aussi que la désignation par les devins officiels de jours néfastes (et donc chaumés) dans le calendrier rencontre de plus en plus de critiques de la part de ceux qui jugent la pratique nuisible pour la productivité.



L'auteur multiplie aussi les références littéraires et historiques qu'il s'amuse de toute évidence beaucoup à détourner pour la plus grande joie du lecteur : Freud est ainsi cité dans le cadre de l'essor d'une nouvelle discipline magique basée sur l'étude de la psychologie ; la voie divinatoire a connu un grand boum à la fin de la Grande Guerre lorsque certains de ses pratiquants se sont mis en tête de proposer aux familles de contacter leurs proches morts au combat ; Christopher Marlowe aurait milité pour une utilisation de la « magie d'illusion » au théâtre ; quant à D'Artagnan, il est cité comme une référence en matière de pratiques magico-martiales. Les exemples se comptent par dizaine et tous sont extrêmement astucieux et contribuent à donner plus de corps à cet univers remarquablement bien pensé. Seulement là encore, il y a un petit « mais ». Car la plupart de ces ingénieuses idées ne sont pas développées dans le roman lui-même mais dans les conséquentes (et passionnantes !) annexes situées à la fin de l'ouvrage. Évidemment, la somme de celles-ci justifie à elle seule le fait que l'auteur ne pouvait pas tout mettre dans son roman (d'autant plus que d'autres tomes seront vraisemblablement amenés à suivre), mais qu'il aurait été agréable de voir davantage de ces références ou théories intégrées directement au texte ! Le narrateur se montre notamment très peu bavard en ce qui concerne les différentes formes de magie (qui font l'objet de dix pages pleines en annexes), aussi vous conseillerais-je pour une fois de lire les suppléments avant le roman lui-même et non après : le récit y gagnera en profondeur, et vous en compréhension. De même, si l'aspect est plus développé dans le récit, vous gagnerez aussi à lire les suppléments concernant les bouleversements géopolitiques que rencontre l'Europe des années 1930 avant de vous plonger dans le témoignage de Julius Khool.



Nicolas Texier signe avec ce premier tome de « Monts et merveilles » un roman très dense et qui repose sur un univers cohérent et extrêmement ingénieux. L'ouvrage souffre toutefois d'un certain nombre de points faibles qui viennent malheureusement modérer l'enthousiasme du lecteur (personnages insuffisamment exploités, rythme qui s'essouffle, manque de fluidité dans l'écriture) et c'est d'autant plus dommage que certaines trouvailles sont vraiment excellentes. Reste à voir ce que nous réservent les prochains tomes !
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Monts et merveilles, tome 1 : Opération Sabines

À la 215 ° page j ai dis j'arrête De certains bouquins l on dit que c'était un rendez vous manqué , là je ne suis même pas sûr que l on se soit aperçu à un coin de rue, et pourtant à la lecture du 4° de couverture que de promesses : uchronie , magie espionnage de quoi me faire saliver , déjà de confiance j envisageais l achat des 2 autres volumes .Hélas de digressions en descriptions , d envolées lyriques aux ailes rognées par l ennui , de scènes de mornes actions , en expositions de sentiments éventés , j ai vite déchanté où était la geste tant attendue endormie sans doute . Je voudrais préciser que l auteur a du talent j ai eu l impression de lire un long conte récité par un vieux barde , un druide moussu ou un chaman étique près d un feu de camp mourant dans une improbable savane , mais au fil de la lenteur du déroulé j ai eu l impression que mon pauvre petit cerveau tout riquiqui s 'engluait dans une pâte incolore , molasse légèrement écœurante et paralysante Désolé je ne suis ni assez intelligent , ni subtil pour le style de M. Texier Alors je vais revenir à mes goûts simplets qui ne me prennent pas la tête
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Les Ménades

Révélé en 2018 en tant que « pépite » des éditions Les Moutons Électriques avec sa trilogie « Monts et merveilles », Nicolas Texier est revenu cette année sur la scène des littératures de l’imaginaire français avec un nouveau roman jouant sur un tout autre registre. Exit l’Europe magique uchronique des années 1930 et ses complots, bonjour l’Antiquité grecque et sa mythologie. L’ouvrage se déroule en effet peu de temps après la Guerre de Troie et met en scène une Grèce ancienne dans laquelle les créatures telles que les cyclopes, les satyres ou encore les centaures arpentent bel et bien la terre et où les mythes tirent leurs origines de véritables événements. Fortement inspiré de l’Odyssée, narrant le périlleux voyage d’Ulysse vers son Ithaque natale, le récit met en scène trois jeunes femmes lancées dans une quête désespérée sur la Méditerranée. Originaires de Psili, une petite île jusqu’à présent fort paisible, nos héroïnes se sont résolues à quitter leur foyer afin de partir à la recherche de leurs proches, enlevés par un groupe de guerriers thébains afin d’être réduits en esclavage. Seules rescapées de l’attaque, Lyra, Agame et Enyo ne tardent pas à comprendre que les assaillants cherchaient manifestement moins à se livrer à un raid qu’à rattraper un curieux personnage doté de grands pouvoirs et ayant fait escale à Psili quelques jours seulement avant le drame. Bien décidées à délivrer leurs amis et voisins, et à percer le mystère entourant le mage pourchassé, les jeunes filles entament un long voyage semé d’embûches au cours duquel elles auront à affronter quelques unes des créatures les plus célèbres de la mythologie grecque, du fameux minotaure reclus dans son labyrinthe aux Lotophages auprès desquels s’arrêta un temps Ulysse lui-même, sans oublier un cyclope amoindri, des centaures lubriques ou encore un peuple de demi-géants. Si vous êtes amateur/amatrice de fantasy historique en générale, et de mythologie en particulier, le roman ne pourra que vous ravir tant la reconstitution de la période aussi bien que la réappropriation par l’auteur des certaines grandes thématiques misent en avant dans les mythes grecs sont réussies.



Le récit emprunte évidemment beaucoup à « L’Odyssée », et ce par plusieurs aspects à commencer par sa construction narrative. Le récit est en effet rythmé par une succession d’escales sur des îles de la Méditerranée qui donnent chaque fois lieu à une confrontation avec un nouvel adversaire face auquel les Ménades devront rivaliser de force ou de ruse, selon les circonstances. L’auteur fait de plus explicitement référence à Ulysse dans les pas duquel nos héroïnes marchent à plusieurs reprises, que ce soit lors de leur rencontre avec le cyclope Polyphemos ou encore avec le peuple des Lotophages. C’est avec beaucoup d’intérêt que l’on suit cette course poursuite à travers la Méditerranée qui, en dépit de son caractère à priori répétitif, parvient à ne jamais lasser. Le traitement original proposé par l’auteur des mythes grecs évoqués y est pour beaucoup, Nicolas Texier ayant manifestement potassé de nombreuses sources lui permettant de prendre du recul sur les épisodes mis en scène, et ainsi de surprendre son lecteur. La place des femmes dans la mythologie grecque occupe notamment une place de choix dans la réflexion proposée ici par l’auteur, un peu à la manière de ce que proposait récemment Melchior Ascaride dans sa réinterprétation de l’histoire d’Orphée et Eurydice (« Eurydice déchaînée »). Le choix de mettre en scène des héroïnes, et non des héros comme c’est d’ordinaire le cas dans ce type de récit, n’est évidemment pas anodin, surtout que le profil des jeunes femmes est plutôt atypique puisqu’il s’agit de trois marginales, méprisées ou mises de côté par les autres habitants de Psili en raison de leur physique imposant ou de leur désir d’indépendance. L’auteur fait également référence à plusieurs reprises à une pratique couramment évoquée, mais seulement à titre anecdotique, dans les mythes, à savoir le rapt des femmes par les hommes. Ici remise à plusieurs reprises sur le devant de la scène, cette « tradition » est analysée avec finesse par l’auteur et lui permet d’évoquer plus ou moins ouvertement l’incroyable violence subies par les femmes dans beaucoup de légendes grecques.



Les personnages figurent également au nombre des qualités du roman, qu’il s’agisse des trois Ménades ou bien de la galerie de figures secondaires qui viennent peu à peu s’ajouter à leur expédition. Chacune possède sa spécificité (l’art oratoire pour Enyo, celui de la chasse et du pistage pour Lyra, la force physique pour Agame), ce qui leur permettra de briller à tour de rôle en fonction des épreuves à surmonter ou des adversaires à affronter. Chacune possède aussi une faille (le départ non digéré d’un proche, la maltraitance d’un parent ou encore la volonté d’échapper à un chemin tout tracé), ce qui contribue à rendre ces jeunes femmes parfois un peu distantes plus humaines, et donc plus attachantes. Les habitants de Psili rencontrés au fur et à mesure de l’avancée de la quête des Ménades disposent bien sûr d’une personnalité moins étoffée mais séduisent malgré tout grâce à un trait de caractère dominant à même d’attirer la sympathie (la candeur de Polyphémos, la sagesse de la mère de Lyra, la bonhommie des hommes de Psili qui acceptent sans trop rechigner de se soumettre à l’autorité des jeunes filles…). En dépit de ses nombreuses qualités le roman est cela dit loin d’être parfait et souffre d’un certain nombre de défauts qui viennent parfois rompre le charme. Parmi ces bémols, on peut notamment citer la trop faible place accordée aux dialogues dans le récit qui mise trop souvent sur la narration. Les échanges entre les personnages sont ainsi relativement peu nombreux et tranchent avec le récit par leur registre assez familier et plutôt moderne quand tout le reste du texte est écrit avec une plume élégante et dans un langage plus soutenu, à l'image de ce que l'on peut retrouver dans les sources antiques (le choix de l'auteur de privilégier l'orthographe des noms en grec ancien n'est d'ailleurs pas anodin). Au nombre des déceptions on peut également mentionner la conclusion du roman qui se termine bien trop abruptement par un rebondissement prévisible et peu convainquant.



Nicolas Texier signe avec « Les Ménades » un roman de fantasy historique qui s’inspire et se réapproprie astucieusement certains des plus grands épisodes de la mythologie grecque. Porté par un trio d’héroïnes attachantes, l’ouvrage a le mérite de questionner la place des femmes dans les mythes et de proposer une immersion plaisante dans la Grèce ancienne, et ce en dépit de quelques maladresses qui n’ont cependant rien de rédhibitoires.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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L'ombre à Berlin

Été 1932, Jakob Blumen est accusé du meurtre d'un jeune SS. Sa fille, Adèle n'arrive pas à croire à sa culpabilité et est bien décidée à prouver son innocence, en dépit des milices nazies qui ne vont pas manquer de la traquer. Avec l'aide de sa logeuse ex-bosseuse et lesbienne extralucide et de son ami, soigneur dans un zoo, ils vont s'engager dans une enquête dangereuse plongeant à pieds joints dans le surnaturel auquel le NSDAP semble intiment lié. Pour autant, arriveront-ils à faire éclater la vérité sans y perdre eux-mêmes la liberté et même la vie ?



L'Ombre de Berlin est un récit uchronique qui prend cadre dans la République de Weimar moribonde puisqu'on est propulsé au moment où le pouvoir politique est progressivement confisqué par le NSDAP. La monté du nazisme marque le début des persécutions juives. L'ambiance est donc à la suspicion et à l'accusation. Or, elle sert parfaitement l'intrigue de Nicolas Texier qui prend comme point de départ le meurtre d'un SS et que la police veut faire endosser à un Juif. Il nous embarque dans les méandres d'une enquête : celle d'une jeune fille prête à braver le danger pour innocenter son père. D'ailleurs, ses investigations la conduisent à explorer l'envers du décor de l'idéologie nazie. Sous la plume de Nicolas Texier, l'obsession d'une race aryenne supérieure est ici liée à une résurgence de la mythologie germanique. En effet, les Nazis interprètent les nombreux malheurs qui se sont abattus sur l'Allemagne depuis la Grande Guerre comme étant le signe d'un prochain Ragnarök, autrement une apocalypse dont ils imaginent pouvoir s'extraire grâce au mythique navire Naglfar. Ainsi, l'auteur emprunte avec beaucoup d'ingéniosité des éléments notables des mythes pour servir à dessein son intrigue qui repose allègrement sur le complot.



L'univers imaginé par Nicolas Texier est donc très immersif car il mêle les heures sombres de l'Histoire à un ésotérisme marqué par du spiritisme et des expériences scientifiques fort étranges.



Dans son roman, l'auteur s'appuie sur un duo de personnages féminins détonnant car elles forment pour le moins une association inattendue. Il faut dire que la jeune fille timorée qui vient demander de l'aide à l'ex-bosseuse fort en gueule a de quoi surprendre. Néanmoins, on apprécie autant Adèle pour sa fraîcheur, sa témérité et sa ténacité que Viktoria pour sa personnalité haute en couleurs. Si l'une voit dans cette aventure l'occasion de se chercher et de s'affirmer, l'autre, quant à elle, va devoir affronter son passé pour enfin faire la paix avec elle-même.



Dans ce 20e siècle devenu antisémite et intolérant, quoi de mieux que de mettre en scène une Juive, un handicapé et une homosexuelle pour faire un pied de nez à cette société autoritaire. En outre, ce choix présente également l'intérêt de parler d'inclusivité au sens de l'orientation sexuelle et de la différence physique, ce qui est clairement un point fort de plus de ce roman.



Finalement, L'Ombre de Berlin recèle de nombreuses qualités car non seulement, il nous plonge dans une enquête passionnante mais nous parle également d'amitié et d'amour apparaissant ici comme deux phares balisant l'espoir.



Enfin, on notera les superbes illustrations et la couverture signées Melchior Ascaride qui donnent à cette aventure un avant-propos pour le moins explosif !



Pour en savoir plus, rendez-vous sur Fantasy à la Carte.
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Monts et merveilles, tome 2 : Opération Jabbe..

Julius Khool et Caroll Mac Mael Muad reprennent du service après avoir découvert des notes des parents du jeune enchanteur dans le grenier de la maison de son oncle. Elles montrent qu'ils étaient sur la piste d'Excalibur... Cette épée arrangerait d'ailleurs bien leurs affaires : les Royaumes-Unis sont en guerre... Direction les États-Unis, hostiles à toute magie. A toute ? Non. mais tout dépend qui pratique...

Indiens, chanteuses de jazz mais aussi vieux et vieille sorcières européennes, violence et Far West. Sans oublier l'amour et les pactes étranges... plongée dans un roman que je trouve bien mieux que le tome 1. La verve de Khool est toujours présente, il boit certes moins mais la belle chair ne le laisse pas indifférent malgré son grand âge...Certaines des faiblesses du tome 1 ont été atténuées : les femmes ne sont pas juste des ombres à l'arrière-plan mais ont un vrai rôle, la magie est plus présente (mais toujours pas la solution à toutes les situations, ou alors pas sans contrepartie). Les Indiens aussi sont mis à contributions (même si parfois, j'ai l'impression que c'est un peu caricatural). L'action est plus ramassée, plus punchy, avec beaucoup moins de temps morts.

Ce mélange de roman de gangsters, de conquête de l'Ouest (où les Indiens luttent encore pour leur liberté), et de roman arthurien donne une vraie envie de lire le tome 3...
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Monts et merveilles, tome 1 : Opération Sabines

Soldat qui cherche une vie plus tranquille, loin des armes et des massacres, Julius Khool se fait domestique et est placé chez un apprenti enchanteur, Caroll Mac Mael Muad. Mais dans un monde magique, vivre chez un enchanteur qui a des dettes n'est pas de tout repos. Surtout lorsque le MI6 s'en mêle... Direction Venise où rien ne se passe comme prévu. Évidemment...

Mais c'est ça qui fait les romans d'action et d'aventures ! Et c'est bien pour ça que nous les lisons et souvent les apprécions. D'autant que c'est raconté du point de vue (partial) de Julius, mercenaire retiré de la guerre mais qui ne perd pas une occasion de se battre et de faire parler l'acier. C'est aussi un personnage assez tourmenté, qui aime un peu trop l'alcool... Tourmenté par ses actions pendant son temps sous les drapeaux, alors qu'il est sensible et humain, ouvert aux autres et à la poésie. Mais sans illusion sur ses semblables. Ni sur les êtres de l'outre-monde qu'il va être amené à côtoyer avec son maître.

Les personnages principaux sont vraiment bien incarnés, rendus vivants par la plume de Julius, qui n'évite pas les commentaires et les descriptions lapidaires. Sauf pour les femmes qui sont son autre grande faiblesse...

L'univers est assez déroutant. C'est un monde encore irrigué de magie, mais qui va vers son désenchantement ; une Europe en transition vers plus de progrès technique, de matérialisme avec ce que cela peut avoir de problématique ; pour autant, les Royaumes-Unis et leur magie ne sont pas vues de manière angélique. Les créatures magiques n'ont plus autant de pouvoirs, surtout dans le pays qui représente l'Allemagne, d'où les manifestations magiques sont bannies. Néanmoins... Ce qui fait aussi la force du récit, c'est que la magie est omniprésente mais pas envahissante. Caroll Mac Mael Muad ne fait de la magie pour se sortir de toutes les situations difficiles : il n'en pas toujours l'occasion, la possibilité ou les compétences. Et c'est heureux ! Ce serait trop facile et vraiment pénible pour le.la lecteur.trice. Tandis que là on se croirait dans un film d'action et d'espionnage, du genre nanar assumé puis qui remonte la pente, mais non. Julius et Caroll ne se prennent pas au sérieux, contrairement à leurs différents partenaires, et c'est ce qui fait leur réussite...
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Reflet du roi mourant

Le reflet du roi mourant est une sacrée lecture !



Ce récit emprunte à plusieurs genres et devient un melting pot très intéressant.

Les personnages principaux sont des personnages parfois connus des récits antiques et une famille de freaks, nous passons du récit social à des missions d'infiltration à la farce, c'est vraiment très diversifié.



Ce récit très dense en intrigues et en personnages avance rapidement et va de rebondissement en rebondissement.

Le seul reproche que je ferais est que la relecture n'a pas été très bien faite, j'ai trouvé un certain nombre de fautes de typo, voire de manque de ponctuation. Il manquait aussi parfois des mots dans une phrase et je me souviens d'avoir un peu tiqué de lire "les cheveux" au lieu des "chevaux". C'est dommage car ça sort du livre.
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Les Ménades

Le 10 septembre dernier, Nicolas Texier a fait son grand retour au catalogue des éditions Les Moutons électriques avec un nouveau roman, intitulé Les Ménades.



Après son cycle Monts et Merveilles, une uchronie mêlant magie et espionnage, il change de registre en proposant ici une fantasy teintée de mythologie grecque.



Dans Les Ménades, on marche dans les pas de Lyra, Enyô et Agamê, trois adolescentes qui entretiennent une belle amitié, en marge de leur communauté. Après la venue d'un mystérieux naufragé du nom de Lysio, toutes trois décident, un soir, d'aller célébrer Dionysos au cœur de la forêt. A leur retour, nos apprentie ménades sont effarées de découvrir leur village pillé et incendié. Les anciens ont été sauvagement assassinés, quant au reste de la population, elle a simplement disparu. Mais la stupeur laisse très rapidement la place à la colère, alors nos trois adolescentes décident de prendre la mer à leur tour afin de prendre en chasse les ravisseurs et délivrer les leurs.



Les Ménades nous immerge dans la Grèce antique, dix ans après la célèbre guerre de Troie qui opposa Ménélas, le roi de Sparte au prince Troyen, Pâris après que ce dernier lui ait enlevé sa femme, Hélène. Ce conflit légendaire faisait partie d'un vaste cycle épique, dit le "cycle troyen" dont les œuvres sont aujourd'hui perdues, à l'exception de L'Iliade et L'Odyssée, attribués à Homère. Or, ces deux épopées, textes fondateurs de la culture grecque, puis romaine, constituent encore aujourd'hui une grande source d’inspiration pour les artistes et les écrivains.



C'est clairement le cas de Nicolas Texier qui nous relate le destin tumultueux de ses trois héroïnes à la manière des épopées homériques. En s'embarquant dans cette aventure, Lyra, Agamê et Enyô empruntent certains mêmes chemins qu'Ulysse lors de son long périple de retour de Troie. Aussi, elles débarquent également sur l'île des cyclopes et rencontrent le fameux Polyphème, devenu aveugle suite à une ruse du roi d'Ithaque. Toujours très en colère, le cyclope accepte néanmoins d'aider les jeunes femmes dans leur quête, moyennant la fourniture d'une nourriture abondante. Plus tard, ce sont les terribles Lestrygons qu'elles doivent affronter car c'est auprès de ce peuple mythique de géants féroces et anthropophages que sont retenus les derniers membres de leur village. Enfin, tout comme Ulysse en son temps, elles pénètrent dans le royaume secret des Néréides et y croisent Thétis, la mère d'Achille.



Pour bâtir son univers, Nicolas Texier s'est largement inspiré de la mythologie grecque en empruntant certains épisodes phares de L'Iliade et L'Odyssée ou en introduisant quelques divinités de l'Olympe. En choisissant d'insérer son intrigue dans une fantasy mythologique, l'auteur offre à ses lecteurs un cadre d'action enchanteur et fascinant. Finalement, cette mythologie reste peu utilisée par les auteurs du genre, c'est donc une agréable surprise que de lire ce texte qui ne manque pas d'originalité et de fraîcheur.



En outre, avec Les Ménades, Nicolas Texier se fait l'auteur d'une intrigue passionnante, portée par trois jeunes héroïnes bouleversantes et attachantes. En effet, tenues à l'écart par les autres villageois, elles ont fait de leur différence une vraie force. Enyô est une orpheline qui a été trouvé bébé par l'un des villageois mais marqué par la guerre, c'est un homme brutal et violent qu'elle ne cesse de fuir depuis sa plus tendre enfance. Quant à Agamê, elle n'est pas plus intégrée à la communauté car sa carrure effraie et lui vaut la défiance de tous. Enfin, Lyra est la seule à avoir encore ses parents et pourtant elle ne sent pas plus à sa place. Voici trois êtres courageux qui s'engagent corps et âmes dans cette quête insensée afin de prouver à tous et à elles-mêmes leur valeur.



Dans ce livre, on est donc complètement dans un roman d'initiation dans lequel les jeunes héroïnes vont vivre une multitude d'aventures qui vont les faire mûrir et passer à l'âge adulte.



D'autre part, derrière Les Ménades, Nicolas Texier s'intéresse à des thèmes fondamentaux comme l'amitié, la ségrégation, la solidarité ou encore la tolérance. Il en résulte un roman assez foisonnant qui passionne autant par les questions qu'il pose que par l'univers imaginé... suite sur Fantasy à la Carte.
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Les Ménades

Avec Les Ménades, Nicolas Texier contourne les codes de la fantasy historique inspirée de l'Antiquité Grecque : point de grands événements mythiques puisque nous sommes dix ans après la guerre de Troie et point de héros de la mythologie puisque nous suivons trois jeunes femmes qui décident de sauver les habitants de leur village tous enlevés par des pirates. Le tout donne un roman d'aventures et d'apprentissage vraiment plaisant à suivre.
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Monts et merveilles, tome 2 : Opération Jabbe..

Et c’est reparti pour une nouvelle quête, cette fois Julius Khool et son jeune maître Carroll Mac Mael Muad partent sur les traces de la légendaire Excalibur.



J’ai pris plaisir à retrouver dans ces pages un narrateur poète avec toujours autant de répartie et de gouaille, à découvrir une intrigue prenant naissance en Irlande et nous embarquant ensuite pour les États-Unis, dans un mélange bien dosé de légende arthurienne et d’aventures dans l’Ouest sauvage.



Les défauts du premier tome sont ici effacés, donnant un roman bien plus rythmé, où tout s’enchaîne avec fluidité et où les réminiscences du narrateur, moins nombreuses, s’intègrent beaucoup mieux.

Les personnages secondaires sont bien plus intéressants dans ce récit, l’histoire du jeune enchanteur Carroll est étoffée, il prend plus de place sans que sa personnalité en soit trahie. Les autres personnages, antagonistes ou alliés, que nous découvrons au fil des pages sont vraiment intéressants et ont un rôle bien plus important dans cette aventure.



En résumé, l'auteur a, à mon sens, supprimé tous les éléments négatifs de son premier roman pour nous proposer ici que le meilleur, une aventure trépidante portée par une palette de personnage haut en couleur et narré par un protagoniste tout simplement génial.
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Monts et merveilles, tome 1 : Opération Sabines

Quelle aventure que cette opération Sabines!

Découvrir cette Europe uchronique où la magie est enseignée à l'université n'est pas une mince affaire. L'aventure nous est contée par la voix de Julius le majordome maure d'un enchanteur un peu ballot embarqué malgré lui dans une affaire d'espionnage qui l'entrainera jusque dans l'antre d'une puissant vampire, dans l'outremonde.

L'intrigue peine à démarrer mais les descriptions sont riches et nous font entrer dans un monde très haut en couleur et particulièrement bien décrit. Les deux premières parties sont donc plutôt destinées à poser un univers décrit avec beaucoup de truculence par un ancien soldat alcoolique, jouisseur et porté sur la digression.

Le rythme s'accélère nettement dans la troisième partie et devient endiablé, un vrai rythme d'aventure fantastique.
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Monts et merveilles, tome 1 : Opération Sabines

Ce livre a été un achat impulsif car j'ai craqué sur l'objet en lui-même. J'ai lu en diagonale le résumé (ça me semblait prometteur) et je l'ai pris. C'est vrai que le livre est très beau, de là à dire qu'il est très bon...



On suit les aventures de maître Carroll, enchanteur un peu désinvolte et de son serviteur Julius Khool (le narrateur), ancien soldat. Difficile de tout résumer après avoir lu le livre car tout me reste assez confus mais bon... Ils vont être employé (à leur grand désarroi) comme "espions" afin de retrouver une ancienne connaissance de maître Carroll, un certain Valère, qui a découvert des choses très importantes sur ce qui régit leur monde. Ses découvertes sont capitales et plusieurs personnes sont à sa poursuite et ne lui veulent pas que du bien... dont des créatures de l'outre monde pas très très sympathiques. J'oublie plusieurs des personnages car l'oeuvre en a à foison.

Bref, inutile de rentrer trop dans les détails mais ce que je peux définitivement dire c'est que pour moi c'est un vrai livre d'aventures. Je veux dire par là qu'il se passe toujours quelque chose, et toujours quelque chose de plus gros ou plus étonnant que ce qui s'est passé avant. On navigue entre les mondes, on passe d'une rencontre à une autre, d'un souvenir à un autre et etc. Ce roman est très riche dans le sens où il faut une imagination énorme pour l'avoir écrit. Mais...

Je n'ai pas du tout été emballée. Dès le début il faut se faire au style de l'auteur car le langage est très précis et assez pointu, et je dirai même alambiqué. Ou plutôt ses phrases, puisque je les ai trouvées longues, chargées, bref, c'est pas simple à lire, en tout cas pour moi il fallait vraiment que je reste concentrée pour suivre le fil (que j'ai perdu parfois par fainéantise).

Et tout le long du roman, Julius (donc le narrateur) nous assène de phrases du genre "J'épargnerai au lecteur le récit des aventures qui m'arrivèrent..." mais finalement : il nous raconte tout. Tout le temps. J'ai trouvé ça insupportable par moments car je sentais le gros pavé de souvenirs arriver et je n'en avais juste PAS ENVIE. Voilà. Je voulais juste que l'histoire se poursuive, mais pas être engloutie sous des détails barbants.



Alors voilà je suis déçue parce que ça avait tout pour me plaire mais j'ai été endormie par le style. Tellement dommage !
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Monts et merveilles, tome 1 : Opération Sabines

J'ai trouvé le mariage technologie et magie très intéressant et le personnage de Valère qui représente le déséquilibre intelligemment mis en place.



J'ai eu un peu de mal avec la narration autobiographique. Je peine à m'immerger et à trouver l'histoire crédible même si j'en comprends l'intérêt. Mais ici, Julius est un personnage atypique qui a su me faire poursuivre ma lecture. En comparaison, son Maître m'a paru assez fade, un peu trop même... je suppose qu'il s'étoffera dans les prochains tomes.



Malgré quelques longueurs, j'ai plutôt apprécié ce voyage au travers d'une Europe peuplée de créatures mystiques !
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Curtis dans la langue de Pouchkine

Tout était réuni pour faire de ce livre un moment passionnant, un temps de découverte, un foisonnement d'expériences. Un contexte historique sans équivalent. La ségrégation aux Etats-Unis jusqu'à l'assassinat de Martin Luther King. Une enfance dans un bois de bouleaux. L'indépendance des Etats d'Afrique noire. L'Urss des pires années d'oppression et de censure. Le héros abandonné par son père, qui s'en trouve un autre, et qui ne cesse de se chercher lui-même au fil de voyages qui le mèneront des Etats-Unis au Ghana, du Ghana en Europe de l'Est. L'autre héros, broyé par la dictaure communiste, échoué dans les caves de la Loubianka ou au fond de quelque Goulag. L'imimaginable supercherie artistique. La grande soeur à jamais dévouée. L'histoire d'amour inaboutie. La fidélité au-delà de la mort, à une femme, à un ami, à une idée, à un projet fou.

Et pourtant, des longueurs et des lourdeurs qui étirent à l'infini le récit, qui en font perdre le fil au lecteur, qui en vient à ne plus savoir qui est qui et qui fait quoi. J'ai failli plus d'une fois m'arrêter en route, au milieu d'une phrase dont je ne parvenais plus à retrouver le début.

J'ai persisté, et finalement je n'ai pas été déçue du voyage. La fin du roman vaut tous les détours et toutes les longueurs. On s'y croit, on s'y voit, on est Curtis et, coup de force de l'auteur, une fois la dernière page tournée, on a une seule envie : se replonger dans Dostoïevski ou dans Gogol.
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Les Ménades

Voici un roman qui vous propose d'embarquer pour la mythologie grecque, avec une étiquette "fantaisie", un format intriguant plutôt accrocheur, et un résumé qui met en avant trois femmes puissantes et libres... Il n'en fallait pas plus pour tenter ma chance avec ce livre étiqueté "nouveauté" à la bibliothèque.



Passée cette rencontre, il a fallu relever le défi des premières pages, composées d'une écriture plus ampoulée que soutenue à mon avis, à grand renfort de phrases à rallonge dont l'auteur lui-même finit par perdre le sujet, les prépositions et les accords. Les noms grecs et la rareté des dialogues en rajoutent pour faire obstacle au lecteur le moins opiniâtre, mais je me doutais bien que Nicolas Texier n'allait pas tenir des centaines de pages comme cela... Assez vite la langue devient plus fluide - si on ignore les très nombreuses coquilles (mots manquants, verbes non conjugués, accords incorrects... et vraiment, c'est quasi à toutes les pages ! On dirait que le livre n'a pas été relu, c'est une catastrophe...)



On peut alors se laisser emporter par le rythme effréné de nos trois héroïnes, Enyô, Lyra et Agamê, adolescentes rejetées parce que différentes. Les rites dyonisiaques enseignés par un mage de passage vont leur révéler leur pouvoir : celui du courage, de la parole, de la force, de la chasse, de l'instinct, de l'intelligence, qualités équitablement réparties entre elles trois.

Suite au massacre et à l'enlèvement des villageois de leur île, elles embarquent pour un périple qui les mènera dans tous les hauts lieux de la mythologie grecque, sur fond historique de guerre de Troie et d'Odyssée d'Ulysse (les faits se passant une génération plus tard).



Les ménades sont ces femmes libres, puissantes, que l'on ne peut s'empêcher de suivre et d'admirer, même si on les croit folles. J'ai été très touchée par ces personnages, leur rapport presque naïf à la violence des hommes qui devient petit à petit une conscience aigüe du pouvoir que leur offre la liberté. L'aventure est au rendez-vous, puisqu'elles n'hésiteront pas à adopter un cyclope géant, à défier centaures et géants cannibales, à parcourir la Méditerranée en tous sens pour sauver leurs proches, avant de réclamer pour de bon leur liberté, à la face même du dieu qui a fait d'elles ses ménades.

L'univers est immersif, le propos engagé et sans faux pas, le rythme soutenu. Si bien qu'on décide finalement d'oublier les critiques de forme pour voir où cette folle épopée va mener nos trois combattantes.
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Monts et merveilles, tome 2 : Opération Jabbe..

J'ai retrouvé avec très grand plaisir notre estimé narrateur, Julius Khool, pour cette opération Jabberwock. J'avoue que, pour le plaisir, j'ai relu le tome 1 juste avant, pour y renouer avec les subtilités de l'histoire (grand bien m'en a pris, car il faut bien avouer que l'ensemble est dense !)



On retrouve donc Julius et Carroll, qui s'ennuient dans une vie devenue trop étroite après leurs aventures narrées dans "Opération Sabines". Dans ce tome intermédiaire (puisqu'il s'agit d'une trilogie), on voit se profiler le plus grand danger de l'Histoire de l'humanité, à travers les inventions de Valère, soit les conséquences du fiasco de leur précédente mission.



Fort heureusement, leur destin les rattrape, et les voilà embarqué pour les Amériques pour tenter de sauver la situation, avec tout ce qu'il y a de mépris d'un côté et de l'autre pour les "sauvages", les femmes, les nègres, la pseudo bienséance, etc etc, mais traité avec suffisamment d'ironie pour que ça en devienne drôle. Et cette mission Jabberwock (clin d'œil à Lewis Carroll, dont notre enchanteur porte le nom) a pour but rien de moins que de retrouver la légendaire Excalibur !



J'ai retrouvé les ingrédients qui m'avaient ravie : une narration impeccable dans une langue soignée, beaucoup d'humour, de l'action, du rocambolesque et aussi pas mal d'auto-dérision. Par ailleurs, je reste scotché par la culture de Nicolas Texier, qui évoque mille et une mythologie, parvient à les faire cohabiter, le tout dans un monde proche du notre, presque uchronique (mais avec de la magie). Je trouve l'ensemble non seulement très cohérent et diablement bien construit, mais en plus vraiment très intelligent. Je confesse également être un peu tombée amoureuse de Julius Kool, qui est décidément plein de sensibilité et d'esprit - sous ses airs de vieux briscards.



Autre détail qui a son importance, l'audace de l'auteur qui fait changer de nom un des personnage, ce qui est très perturbant à la fois pour les protagonistes, et pour les lecteurs ! Mais quelle idée géniale !



L'histoire, quasi désespérée, suit sa logique de destruction, et le moins que l'on puisse dire, c'est que l'issu de toute cette aventure est incertaine ! Nous retrouvons quelques têtes connues, dont Lord Sinclair et Sir Random, nous rencontrons l'oncle de Carroll (et c'est hilarant), nous faisons la connaissance de nouveaux personnages, dont Nuit-Sans-Lune, qui va subjuguer notre brave Julius, et sa fille Violette, étrange enfant aussi morte que vivante (et qui fiche les jetons à tout le monde). Des personnages encore hauts en couleurs, et qui font tout le charme de cette série, pour laquelle j'ai un véritable coup de coeur !



Certes, c'est aux éditions Les Moutons électriques, avec une attention portée à la qualité littéraire, un langage parfois soutenu et qui ne semblera pas forcément accessible facilement à tous. Pour autant, il faut oser se lancer, car c'est justement cette narration presque empruntée qui fait tout le sel de cette série, et qui est tout simplement délectable !
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Monts et merveilles, tome 1 : Opération Sabines

Ce roman a beaucoup de qualités, la première et non des moindres c’est son narrateur. Julius Khool est un ancien soldat qui cherche, au début de l’histoire, un travail paisible qui lui permettra de vivre décemment. Vieux soldat qui a vécu pas mal de choses, il a une âme de poète, de la répartie, un sens de l’humour et de l’à-propos. Toutes ces qualités donnent au récit une tournure particulière et j’ai apprécié les différents flashbacks sur son passé.

La deuxième qualité de ce roman c’est son univers que l’auteur nous présente avec minutie. L’histoire débute à Londres en 1937 et va nous faire voyager dans une Europe où les tensions entre les différentes puissances sont palpables. Ce cadre semblable à notre réalité en est pourtant bien éloigné, puisque la magie existe sous différentes formes et que les créatures de l’Outre-monde sont de la partie.

Enfin l’intrigue qui est proposée dans ce premier tome mêlant enquête, poésie, espionnage, ésotérisme, suspense et course poursuite, a su attiser ma curiosité jusqu’à la dernière page.

Ces qualités, et c’est bien dommage, se sont révélées casser à de nombreuses reprises le rythme du récit.

En effet, les flashbacks du narrateur jaillissent parfois sans crier gare alors même qu’un rebondissement important se joue, détruisant ainsi tout le sel de l’instant.

Les autres protagonistes de cette histoire sont bien ternes en comparaison du narrateur. Ils manquent assez souvent d’intérêt et tombent même parfois dans la caricature.

Quant à l’intrigue, même si je l’ai beaucoup apprécié, elle traîne trop souvent en longueur, à cause de différents apartés et alors même que les personnages jouent contre le temps.

L’auteur donne beaucoup de matière à son univers et son personnage principal parfois au dépend de son histoire.
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Monts et merveilles, tome 1 : Opération Sabines

Opération Sabines est un roman de pure fantasy qui se déroule dans une Europe fantasmée où la réalité historique et politique côtoie la fantasy faite d’êtres étranges et inventés.



Julius Khool, ancien soldat maure et donc noir de peau (ce détail est important dans l’histoire) entre au service de Carroll Mac Muad, un apprenti enchanteur qui préfère faire la fête plutôt que d’assister aux cours dispensés par la faculté. Le MI6 convoque Carroll afin de lui confier une mission: retrouver Valère, un de ses anciens camarades de fac, qui détiendrait la formule d’une arme de destruction massive. Le Royaume-Uni souhaite s’en emparer avant qu’elle ne tombe dans de mauvaises mains. Carroll qui n’avait jusque là aucune aptitude au combat ou à la filature va devoir, aidé de Julius, affronter les pires dangers.



Je vais commencer par ce qui m’a plu dans ce roman. J’ai adoré le personnage de Julius, ce domestique hors-norme, ancien soldat. Il possède une répartie qui m’a beaucoup fait rire et c’est clairement lui le protagoniste intéressant de l’intrigue. C’est vrai qu’il fait souvent des apartés sur son passé de soldat, perdant parfois le lecteur, mais j’ai aimé son flegme et sa personnalité originale. A côté, Carroll passe pour un personnage un peu terne.



J’ai aussi aimé l’univers de fantasy développé par l’auteur. Dans cette Europe aux abois, la réalité historique (il y a eu la Grande Guerre) côtoie la plus pure de inventions. Il y a des pythies engagées auprès du MI6 pour y faire des prédictions, des ogres et des fées ou encore des trolls. Bref, l’univers développé par l’auteur est dense et tient la route. Le folklore irlandais est bien développé et j’ai aimé découvrir tous ces êtres de légendes.



En revanche, j’ai trouvé que la narration était plutôt compliquée à suivre. Les phrases sont, certes longues, mais souvent déviantes, perdant le lecteur dans des anecdotes et des considérations futiles. Le problème est que ce tic de narration revient pour quasiment tout dans le roman que ce soit la description d’un monstre ou celui d’une fleur en passant par les actions des personnages. Résultat: le lecteur est un peu paumé par toutes ces circonvolutions. Le style très ampoulé m’a parfois pesé.



Ajoutez cela que l’intrigue ne tient pas sur grand chose. En effet, il s’agit de récupérer ce fameux Valère enlevé par un vampire (je n’ai pas tout compris dans ce passage en fait!). On va d’aventures en aventures sans parfois réellement creuser ce qui aurait pu l’être!



« Opération Sabines » reste un roman intéressant pour son personnage de Julius Khool mais le style trop enlevé gâche la fluidité de la narration et perd le lecteur.
Lien : https://carolivre.wordpress...
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Monts et merveilles, tome 1 : Opération Sabines

J'ai adoré ce roman ! Le style, original pour de la fantasy, a contribué à mon plaisir de lecteur, et le narrateur, Julius Khool, m'a rapidement conquise par son humour et la richesse de son expérience.

L'univers mis en place, mélange entre la réalité historique et l'existence de pratiques magiques, fonctionne très bien, et permet des rebondissements inattendus tout au long du récit, ainsi qu'une réflexion intéressante sur l'impact qu'aurait la magie sur nos civilisations..

J'attends la suite avec impatience !
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L'ombre à Berlin

Berlin, été 1932. Les nazis sont aux portes du pouvoir, les SA installent un climat de terreur dans la population allemande, les persécutions contre les juifs et les batailles rangées avec les communistes sont quotidiennes, les assassinats politiques sont si nombreux, que la presse n'a plus le temps de suivre.

Comme si ça ne suffisait pas, des assassins terrorisent les berlinois.



La jeune et bien prude Adele termine les corrections du Sozialistische Arbeiter Zeitung pour lequel elle travaille avant d'être raccompagner chez elle par Willy, jeune sourd-muet soigneur au zoo de Tiergarten. Arrivés au 7 Parochialstrasse, devant l'horlogerie paternelle, ils découvrent une indescriptible scène de bagarre mêlant SA, policiers, voisins et gangsters locaux. Son père, ancien combattant et juif, vient d'être arrêter pour le meurtre plus ou moins rituel d'un jeune SS. Et on lui en colle un paquet d'autres sur le dos avant même qu'il ait repris sa respiration.

Entre en scène la savoureuse Frau Kolt, logeuse d'Adele et de son père, boxeuse, boiteuse, lesbienne et rompue aux arts divinatoires, ancienne légende du Berlin nocturne et détective à ses heures. C'est dans son appartement digne du cabinet de curiosités qu'Adele trouve refuge, les nazis berlinois rêvant de la pendre.



On va suivre ce curieux couple enquêter dans les sphères berlinoises, où la droite nationaliste catholique, les anciens malfrats rhabillés en guignols SS ou SA, la vieille police prussienne de l'Alex, les milieux ésotériques adeptes d'antiques légendes, les amateurs d'histoires macabres et de magie noire se mélangent selon les intérêts croisés des uns et des autres.

Après une poursuite dans la ville, Nicolas Texier, insére à son histoire une dimension plus fantastique. Que dissimule la sombre demeure de Frau Kolt ? Qui est donc l'invisible Lotte von Sommer ? Et l'alchimiste Sandor Hrabal, surgissant d'un lointain passé ? Quel être se terrait aux côtés d'Adele et Willy alors qu'ils se cachaient dans les loges du Kleines Theater ?

Le vieux bâtiment à colombages du 7 Parochialstrasse est rempli de grimoires, de passages secrets, de bruits de pas, de gémissements, de voix, de pleurs, qui remettent en mémoire le « Malpertuis » de Jean Ray. Ses locataires sont tous plus ou moins détraqués, possédés. Que se passe t-il dans cette vieille bicoque ? Quelle est l'influence de ces vieux murs humides sur les habitants ?



Avec « L'ombre à Berlin », Nicolas Texier livre un bel hommage à la littérature populaire : aventures, amour, magie, enquête, mystères, aucun genre n'est oublié. Il nous fait également le portrait d'une ville prise dans une histoire tempétueuse en la parcourant de long en large à pieds, en métro ou en voiture ; on passe ainsi par des lieux bien connus, l'Alex où siège la police, Unter Den Linden, ou d'autres plus originaux, le cimetière des suicidés de Grunewald-Forst, une crypte dédiée à Wotan.

Pour ajouter encore un peu de plaisir à la lecture du roman, l'éditeur a eu la bonne idée d'ajouter en guise d'apéritif quelques pages d'illustrations couleurs pleine page de Melchior Ascaride qui signe aussi la couverture.



L'écriture plutôt classique est mise au service d'une histoire bien ficelée, avec des personnages attachants, et d'autres franchement repoussants. Voici un roman sans temps mort, dont le rythme jamais ne s'essouffle, qui reprend quelques codes feuilletonesques et n'a aucune difficulté à provoquer de nombreux rebondissements ou à susciter l'effroi, que ce soit en vendant son âme ou tirant à coup de pistolet-mitrailleur.

Il faut déposer un peu de rationalité au vestiaire, se laisser prendre au jeu des âmes fuyantes et des fantômes, du légendaire commerce avec le diable, des vieilles mythologies germaniques et des nazis attifés en sorciers. Tout cela est bien dosé par l'auteur, et le texte ne se transforme pas en fourre-tout illisible.

Finalement, les fantômes du texte sont un peu comme les nôtres, ceux que l'on a perdu et que l'on choisit de garder près de soi.
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