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Critiques de Robin Cook (II) (94)
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J'étais Dora Suarez

Dans ce roman, l'enquête devient secondaire, remplacée par l'étrange fascination suscitée par la descente en enfer que nous offre l'auteur. Les descriptions, qu'elles soient liées au tueur, à sa psychologie, ou à celles de l'enquêteur, prennent aux tripes. Il se dégage de cet ouvrage une très prenante impression de "justice du monde", une sensation désespérée et universelle, tandis que Dora Suarez devient l'avatar de toutes les victimes innocentes, passées et à venir. Une lecture qui reste en mémoire.
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J'étais Dora Suarez

Robin Cook nous offre un tableau époustouflant! Tout est très bon dans ce livre: les descriptions des scènes, le caractère franc et direct du policier anonyme qui occupe le centre du récit, le criminel poisseux, le crime odieux... bon, certes, je comprends qu'on puisse émettre certaines réserves face au portrait assez "chien" qui sous-jacent au flic-héros. J'ai pour ma part personnellement pris ce livre (et le duo anonyme-Stevenson) comme une belle grosse claque. Tout scénariste qui entend montrer des policiers durs et face auxquels nulle répartie ne suffit se devrait de lire et d'étudier attentivement ce bouquin! Le héros parvient en outre à rendre Dora terriblement attachante... quelques belles et profondes réflexions parsèment l'ouvrage qui est résolument très bon et que je conseille vivement!

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Comment vivent les morts

Roman noir, très sombre. C'est mon premier roman de cet auteur. Le héros, qui doit être récurrent, est un policier dont on ne connait pas le nom, au passé chargé, affecté au département des « Décès Non Eclaircis », dixit le traducteur, à un moment où le terme de « Cold Case » n'était sans doute pas entré dans le langage commun (le livre datant du milieu des années 80). Le héros est donc chargé d'enquêter sur la disparition d'une femme, depuis plusieurs mois, sans que les proches ou la police locale n'aient jugé utile d'investiguer sérieusement sur le sujet.



Le roman plonge ensuite dans les méandres d'une petite ville de province, éloignée de Londres, avec ses secrets, ses notables, ses secrets, ses malversations. Très réussi.



Plutôt intéressant comme livre, assez dérangeant, on en sort un peu perturbé.
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Cauchemar dans la rue

Kléber est flic au commissariat du boulevard Sébastopol, à Paris.

Un excellent flic mais qui ne supporte pas les bassesses et le manque de savoir faire de ses collègues. Un flic qui a pour meilleur ami, depuis son enfance, un truand notoire. Et qui vit, comble de tout, un amour sans bornes avec Elenya, une ancienne prostituée d’origine polonaise qu’il a sortie de la rue.

Mais un beau jour, Kléber va tabasser un de ses collègues qui l’avait provoqué. Il sera mis alors « à pied » et commencera pour lui le début d’un véritable cauchemar.

Robin Cook nous plonge une fois encore dans la noirceur de l’humanité, mettant en place une histoire simple, dans les rues parisiennes, et nous dévoilant les tourments d’un personnage qui n’a que peu de foi en l’homme. Rien de très réjouissant dans cette descente aux enfers sinon un amour immense qui ronge Kléber et qu’il aimerait vivre en paix.

Le héros ne cesse de réfléchir à ce monde qui l’entoure, un monde qui le dégoûte la plupart du temps, et contre lequel il ne peut s’empêcher de frotter son extrême sensibilité.

Et que l’on se rassure, c’est bel et bien ce monde pourri qui aura le dernier mot.
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J'étais Dora Suarez

La scène d’ouverture ne perd pas de temps, nous sommes plongés au cœur même du crime dès les premières phrases. La violence, la haine et la vulgarité du tueur. C’est avec son point de vue que nous découvrons l’écriture de l’auteur. Mais si c’est bien le criminel qui ouvre le bal, la suite du récit sera dirigée par l’inspecteur chargé de l’enquête. Et là, mon intérêt s’est amoindri au fil des pages. Les flics sont bourrus, un tantinet clichés. Et malheureusement, je n’ai pas réussi a éprouver de l’affection pour, ne serait-ce qu’un seul des personnages, même pas cette pauvre Dora. Ceci à cause d'une écriture que j’ai trouvé froide... J'aurais essayé !
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J'étais Dora Suarez

Relire nos classiques



Certains écrivains, tel Elmore Leonard par exemple, sont piégeux. Ils vous donnent l’illusion que l’écriture est facile pour peu qu’on ait une bonne histoire à raconter. Et puis... On se rend compte que cette fluidité, cette maitrise, ne sont pas à notre portée.



D’autres, eh bien... Ces autres-là sont plus francs, d’une implacable transparence. Robin Cook est de cette trempe. Il nous contemple du Cervin quand nous peinons à gravir une colline. Je parle, bien évidemment, du Robin Cook anglais et non de son homonyme américain qui moulina du thriller médical aussi palpitant que l’encéphalogramme d’un électeur trumpiste du Michigan.



J’étais Dora Suarez est l’un des sommets du polar contemporain et a profondément marqué le genre. Ce roman est un condensé de noirceur, chimiquement pur. Imaginons le noir, le plus noir possible sur cette terre, et enténébrons-le encore un peu. L’obscurité ainsi obtenue se démarque par sa nouveauté, sa crudité.



Les premières pages de Dora Suarez, où un tueur s’emploie à annihiler deux vies humaines, nous débarquent sur un rivage inédit, où, comme des explorateurs prudents découvrant les mœurs étranges des autochtones, nous restons interdits, presque pantelants devant ce spectacle.



La précision de la plume de Cook, sa puissance d’évocation, saisit la lectrice et le lecteur et déclenche un choc thermique, quasi, de l’azote liquide à la pierre chaude dans un même mouvement.



La suite du livre relate la traque du tueur par un flic sensible, boule compacte d’intégrité ombrageuse, amoureux d’une victime, pris de passion pour Dora Suarez, ne se résignant pas à laisser la barbarie sans réplique.



Robin Cook multiplie avec aisance les points de vue narratifs : le « il » clinique, dérangé et dérangeant du tueur, le « je » empathique du flic brisé et tenace, enfin l’italique poignant du journal intime de Dora Suarez qui rythme ce polar adamantin et sensible. Ce panorama changeant affirme un réel suspense dans une pièce où les rôles titres sont déjà connus.



Robin Cook a écrit un polar dont les victimes ne sont pas un point d’entrée mais la raison d’être. J’étais Dora Suarez est un roman en deuil.



(Traduction de Jean-Paul Gratias)
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J'étais Dora Suarez

Un classique contemporain du roman (très) noir. Une merveille d’écriture de la violence et de l’empathie paradoxale. Une ode déjantée et pourtant très maîtrisée aux victimes des meurtres les plus sordides.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2020/04/22/note-de-lecture-jetais-dora-suarez-robin-cook/
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Les mois d'avril sont meurtriers

Un polar bien noir et bien saignant par un précurseur du genre



Le regretté Robin Cook (à ne pas confondre avec l’auteur américain de thrillers médicaux) aura vraiment fait avancer le genre du roman noir. Attention âmes sensibles d’abstenir, les romans de Robin Cook sont d’une noirceur sans espoir, et d’un réalisme très cru.

Les mois d’avril sont meurtriers est mon roman préféré de cet auteur. Le suspense est présent, l’ambiance est glauque, les meurtres sont sanglants, mais la véritable patte de l’écrivain, c’est sa narration, son art du dialogue, et sa capacité à créer des personnages pétris d’humanité, pour le meilleur et surtout pour le pire.

Car Robin Cook a abandonné depuis longtemps ses illusions sur l’espèce humaine.



Le héros du livre, flic travaillant pour l’ « Usine », n’a pas de nom, car c’est son humanité si désespérée qui le caractérise: un personnage droit, émotif, en quête d’une justice pure et véritable, dans un Londres violent et crépusculaire.

Un héros qui traque sans relâche un tueur psychopathe, pervers, implacable et plein d'une étrange bonne conscience. Il n’y a ni bons ni méchants, juste des êtres humains perdus dans un système qui ne leur apporte plus de bonheur depuis longtemps.



Un sommet du roman noir qui a été adapté au cinéma ; Je recommande également « J’étais Dora Suarez ».


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Vices privés, vertus publiques

Public parts, private places


Traduction : Jean-Paul Gratias





Ce patronyme semblant assez répandu dans le monde anglo-saxon, sachez d'ores et déjà que l'auteur de "Vices Privés, Vertus Publiques" n'avait rien de commun avec son homonyme américain, auteur de thrillers médicaux comme "Virus" ou "Toxines" pas plus qu'avec un troisième Robin Cook, lui aussi décédé, et qui fut, celui-là, adversaire acharné de Tony Blair au sein même du Labour.


Sur le Robin Cook qui nous intéresse, voyez ici :


http://romainb.club.fr/Lire/cook/Robincook.html


"Vices Privés, Vertus Publiques" est un roman qui, comme "La Rue Obscène", s'en prend violemment aux tenants de l'establishment britannique.


Ce n'est pourtant pas sans une nostalgie secrète que Cook le démocrate se remémore l'ancienne gentry anglaise, celle de l'Empire colonisateur certes mais celle qui, malgré tout, possédait encore une dignité que les nouveaux riches de l'après-guerre n'ont jamais pu - ni ne pourront jamais - s'acheter.


C'est à cette société en voie d'extinction qu'appartiennent lord Michael Mendip et son cousin, l'Honorable Viper. D'une sensibilité d'écorché vif, éperdument altruiste, Mendip survit à la disparition des revenus familiaux grâce au travail que son cousin lui fournit dans les librairies spécialisées qu'il possède à Soho.


Comme de juste, Viper est l'opposé de Mendip. Ce n'est pas qu'il soit incapable de compassion ou de bonté. Simplement, il a compris depuis longtemps que, dans le monde des affaires, cela n'est pas de mise. Plus ou moins rejeté par sa famille à sa majorité, il a mangé de la vache enragée avant de s'engager dans la voie d'un arrivisme cynique. Désormais amant en titre de Germaine Eriksen, femme d'affaires aveugle et fortunée, il s'occupe tranquillement à amasser son deuxième million de livres. (Sauf erreur de ma part, c'est le même Viper que l'on retrouvera dans "La Rue Obscène.")


Débarque un jour, dans la librairie porno gérée par Mendip, un Grec d'un certain âge, à la recherche de "photos d'art" posées par la propre cousine des deux aristocrates plus ou moins déchus, Lydia Quench. Et c'est, pour Cook, le début d'une description minutieuse et désespérée de la décadence d'une caste.


Bien qu'on n'y croise pas, à proprement parler, de meurtrier, "Vices privés ..." est un roman très noir qui se termine très, très mal, dans une espèce de violence paroxystique. Si l'on excepte Mendip, Viper et sans doute le majordome Forlock, une folie sourde accable les protagonistes. Folie amoureuse en la personne de sir John Odion, amoureux malheureux de Lydia. Folie auto-destructrice chez cette dernière. Folie de meurtre alimentée par l'impuissance sexuelle et sociale chez celui qui la bat à mort. Folie haineuse et rampante chez Béatrice, la soeur de Lydia, qui s'est inscrite au PC et qui, lorsqu'elle réside en la demeure familiale, se fait une obligation de prendre son repas avec les domestiques - au grand scandale de ceux-ci, d'ailleurs. Et folie froide enfin de l'égoïsme chez lady Quench, leur mère.


A l'arrière-plan, leur père, désormais paraplégique, se souvient de sa propre folie d'ignorance et n'aspire plus qu'à mourir puisque la connaissance qu'il possède désormais du besoin d'amour des autres en général et de ses filles en particulier, il lui est désormais impossible de l'exprimer. ;o)
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Quelque chose de pourri au royaume d'Anglet..

Richard Watt, journaliste politique au Royaume-Uni, a fait tout son possible pour empêcher Jobling d'accéder au poste de premier ministre. Ayant échoué et mis à ban, il n'a pas d'autre choix que d'émigrer en Italie, où il achète une ferme et coule des jours heureux. De son exil il contemple la montée en puissance d'un régime totalitaire en Angleterre. Mais quand son pays d'origine demande son extradition, son cauchemar commence...



Cette dystopie de Robin Cook (pas celui des thrillers scientifiques, l'autre) m'a été recommandé par ma libraire. Ecrit dans les années 70, il garde toute sa pertinence face à la montée du populisme dans plusieurs pays. L'auteur décrit avec brio ce climat liberticide qui s'est mis en place, la passivité des citoyens plus soucieux de ne pas perdre le peu de privilèges qu'il leur reste que de se battre pour leur liberté.
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J'étais Dora Suarez

Quand on ne sait pas quoi choisir dans sa bibliothèque autant miser sur une valeur sûre.

Il est dit que tout véritable amateur de romans noirs et de polars se doit d’avoir lu J’étais Dora Suarez de Robin Cook.

J’ai donc voulu vérifier si ce roman qui a un peu plus de trente ans était toujours à classer au rang des chefs d’œuvre du genre.

Commençons par l’histoire. Ce n’est pas forcément là que nous trouvons ce qui fait la force de ce roman. Un double meurtre sauvage, une jeune femme, Dora, et sa logeuse de quatre-vingt-six ans sont retrouvées dans leur appartement, l’une mutilée à coup de hache et l’autre la nuque brisée quand elle a été violemment projetée contre une horloge. Dans le même temps, un malfrat est lui aussi assassiné dans son appartement. Les deux flics chargés des deux affaires vont travailler ensemble, persuadés que leurs deux dossiers n’en font qu’un. Ça, c’est l’histoire en surface, une trame classique.

Continuons par les personnages et là ça commence à devenir intéressant. Nous avons un flic qui restera anonyme jusqu’à la fin. C’est un flic qui souffre de la perte d’un enfant, c’est un peu cliché mais, finalement, on aime ces flics écorchés par la vie. Quand il découvre les corps de Dora et de la vieille madame Carstairs, il devient obsédé par cette affaire et plus encore par Dora, cette jeune femme si belle mais qui a enduré les pires souffrances, d’une mort affreuse, mais surtout d’une maladie qui faisait alors des ravages.

Nous avons l’assassin dans la peau duquel nous glisse parfois Robin Cook, un psychopathe déséquilibré (oui on frise le pléonasme, je sais).

Et nous avons surtout Dora. Elle n’est à aucun moment vivante dans ce roman et pourtant elle est là à chaque page. Elle pénètre ce flic complètement hors des clous au travers de son « journal », retrouvé sur les lieux du crime. C’est un carnet où elle parle de ses souffrances, de sa maladie et projette de se suicider le jour même de son assassinat.

Le plus marquant dans ce roman c’est évidemment le style et la façon dont l’auteur passe de ce flic au tueur et à ses sensations et pulsions meurtrières puis dans les plus profondes pensées de Dora écrites dans son journal. C’est violent, rugueux et extrêmement sombre.

Le seul bémol que je pourrais trouver c’est le contexte. Ce roman n’a certainement pas eu la même portée sur des lecteurs de 1990 que sur des lecteurs de moins de trente ans en 2020. Le Sida est apparu dans les années 80 et a été bien plus mortel, rappelons-le, que le virus que nous subissons aujourd’hui. En 1990, il n’y avait encore aucun remède tel que la trithérapie pour permettre aux séropositifs de survivre bien longtemps. C’est une mort lente et douloureuse, sans compter de l’aspect « honteux » que les politiciens et les médias de l’époque lui ont donné injustement. En 1990, le Sida faisait extrêmement peur. Donc, lors de la sortie de ce roman, la portée en était complètement différente et il faut se remettre dans ce contexte pour en apprécier toute la force. J’étais ado en 1990, je me souviens de ces années-là où on terrorisait tous les ados en montrant du doigts les homosexuels et les drogués comme s’ils étaient responsables alors qu’ils étaient les premières victimes. Robin Cook décrit la souffrance de cette maladie, physiquement, mais aussi psychiquement en rendant toute relation physique impossible sous peine de donner la mort à son partenaire tout en se sachant condamné.

C’est un roman très puissant et, effectivement, un incontournable du genre.


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J'étais Dora Suarez

S'il y a bien, dans ce roman, une trinité, celle-ci n'est pas sainte. Au centre se trouve Dora Suarez ; à ses côtés, le flic et le tueur. La victime, son ange gardien, son démon. Présenté par son auteur comme un roman en deuil, J'étais Dora Suarez décline en vérité le roman noir sous le jour d'une humanité vue au travers du prisme de la religiosité chrétienne. Dans cette ambiance glauque à souhait, le lecteur ne surnage que grâce à une narration rythmée par les changements de registre et par une résolution de l'affaire aussi rapide que l'est la descente aux enfers que représente ce roman.



Sans en faire la liste, il paraît évident que J'étais Dora Suarez possède tous les codes du roman noir : un crime pour prétexte, une plongée dans les bas-fonds d'une capitale britannique pourtant très brillante, l'exploration d'une faune menaçante et attirante à la fois et des thèmes tabous comme la maladie, la folie et la sexualité. Notre guide est un policier que son unité, l'A14, rappelle auprès d'elle après avoir écarté ledit flic pour mauvais comportements dans le passé. Exigeant dans son travail, il assume d'avoir renoncé aux avancements que la carrière, d'habitude, procure, pour continuer à danser avec le Mal et, surtout, redonner dignité aux victimes. Il y a en lui quelque chose du justicier qui, ne se contentant pas d'appliquer ou de faire respecter la loi, a fait profondément sienne la devise de protéger les plus faibles. C'est, on le verra, une façon d'avancer lui aussi vers la rédemption et vers son humanité perdue. Peu de bonnes gens dans ce Londres mal famé : hormis l'inspecteur Stevenson, avec lequel le narrateur est amené à travailler, il y a peu à attendre des hommes, y compris des flics eux-mêmes, que la seule crainte de la vague médiatique fait agir pour retrouver le meurtrier de Dora Suarez. Quant à la pourriture humaine, Robin Cook en décrit ici plusieurs couches, de la plus superficielle (la recherche obstinée du gain) jusqu'à la plus profonde, la plus terrifiante (le plaisir dans la mise à mort). Gardons-nous du qualificatif de monstres : ce ne sont là que des hommes.



Un roman en deuil, annonce le titre du livre. Il est vrai que, pour le narrateur, Dora Suarez n'est pas qu'une victime. C'est un symbole tout entier des victimes de ce monde, et c'est pour cela que le narrateur développe pour elle un sentiment presque amoureux. Massacrée à la hache, outragée dans son état de cadavre par le tueur, celui-ci n'a pas enlevé que la vie à Dora Suarez : il lui a aussi pris sa liberté, car Dora était malade du SIDA, en phase terminale, et voulait abréger sa vie le soir où elle fut tuée. À travers elle, c'est aussi sa propre fille, tuée par son ex compagne, que le narrateur veut rétroactivement protéger et aimer : l'enquête devient alors chemin de rédemption.



La thématique religieuse semble particulièrement prégnante dans ce roman, et ce de plusieurs façons. Le premier thème est celui de la rédemption, bien-sûr, que le narrateur cherche à offrir à Dora en lui redonnant sa dignité - en arrêtant le coupable et en la réhabilitant en tant que femme - et à retrouver lui-même. D'autre part, la thématique sexuelle - notamment à travers les activités glauques du Parallel, un club privé et sélect sur la piste duquel seront mis les inspecteurs grâce au meurtre de Félix Roatta, copropriétaire du club et assassiné la même nuit que Dora - rappelle celle du pêché originel. Le Mal, dans le roman, vient du sexe, qui cause les maladies - ainsi le SIDA - et pousse aussi aux perversions les plus diverses - on apprendra le rôle joué par des rats dans ce club - dont Dora, comme d'autres femmes et en cette qualité, justement, est victime. C'est dans les muqueuses tant désirées qu'apparaît, sur le cadavre de Dora, les stigmates les plus terribles de la maladie. Quant au tueur, sa folie à des origines sexuelles bien établies, car tout viril qu'il soit, l'homme n'est pas toujours maître de l'ensemble de son anatomie. C'est pour punir son membre que le tueur s'inflige d'affreuses punitions ; c'est pour être admiré dans sa plus cruelle nudité qu'il tue et mutile ses victimes, jusqu'à les décapiter.



Enfin, il est difficile de ne pas voir, dans les dernières pages, l'acte de Stevenson comme celui d'un Judas, qui trahit mais révèle, ce faisant, l'essence même du combat et de la vie du narrateur, c'est-à-dire la quête d'une justice pas tant humaine qu'idéelle, absolue.



Pour autant, le narrateur n'est pas un Christ perdu à Londres. Il ne veut pas sauver l'humanité - à part en tant qu'idée - mais plutôt les hommes et les femmes en tant qu'individus, les faibles que la société broie sans vergogne. Dans ce monde de souffrance et de mort, certaines disparitions sont plus douloureuses que d'autres : ainsi celle de Dora Suarez pèse infiniment plus que celle de Félix Roatta, dont la disparition ne représente qu'un indice utile pour la résolution de l'enquête. Si Dora est si précieuse, c'est peut-être qu'elle n'est qu'une idée, justement, elle qui fut trahie par son corps et dont le corps a été massacré ; elle existe, pour le narrateur, à travers les mots de son journal intime où elle exprime tantôt sa souffrance, tantôt son soulagement d'avoir rencontré Mme Carstairs qui l'héberge la nuit du meurtre, tantôt son amour pour une âme encore plus en peine que la sienne : celle de son futur meurtrier. N'est-ce pas elle, au final, la figure christique, la grâce faite homme - ou plutôt femme -, le corps souffrant, l'âme dévouée aux autres ?



Il faudrait alors reconnaître que, sans doute, le narrateur a raison de vouloir sauver sinon la vie, du moins l'honneur de Dora Suarez. Ce monde est pourri, déshumanisé, et même ceux qui sont censés faire appliquer la loi travaillent dans un endroit qu'ils dénomment eux-mêmes l'Usine. Les hommes et les femmes sont, dans les clubs sordides et dans les commissariats, objectivés : une telle satisfait les fantasmes les plus tordus, tel autre devient un sac de frappe dans une salle d'interrogatoire (c'est d'ailleurs un point faible narratif notoire, lorsque cent pages de dialogues passent en menace de mauvais traitement ou de peines de prison pour obtenir des aveux). Si la tâche paraît immense - combattre le Mal, glorifier l'humanité -, au moins n'est-elle pas vaine. Pour combattre le Mal, il faut bien le connaître, dit le narrateur ; Robin Cook, en ce cas, est un remarquable ambassadeur.
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Les mois d'avril sont meurtriers

C'est sans doute un excellent roman policier... Mais je ne suis pas faite pour ces ambiances très noires et glauques...

J'ai lu ce livre il y a plus de dix ans et il m'a laissé un souvenir impérissable de malaise et de tristesse.

Ma note n'est pas représentative de la qualité du livre mais de la déprime profonde dans laquelle sa lecture m'a plongée... J'ai détesté.
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Quelque chose de pourri au royaume d'Anglet..

Mlle Alice, pouvez-vous nous raconter votre rencontre avec Quelque Chose de Pourri au Royaume d'Angleterre ?

"Il suffit généralement que le mot Angleterre figure dans le titre pour que je sois perdue. En voilà un nouvel exemple."



Dites-nous en un peu plus sur son histoire...

"Richard Watt, ancien journaliste politique, a perdu son emploi après avoir ridiculisé le nouveau premier ministre Jobling aux tendances dictatoriales. Il s'est installé depuis en Italie avec sa compagne, regardant sombrer son pays de loin, à moins que Jobling n'est la rancoeur tenace..."



Mais que s'est-il exactement passé entre vous?

"J'aime beaucoup ce genre de livre même si je suis à peu près sûre qu'il ne fait pas autant réfléchir le lecteur que ce qu'on pourrait penser. À mon avis, chacun y trouvera la confirmation de ce qu'il veut croire et passera à côté des indices qui tendent à prouver le contraire, moi y compris certainement. Malgré tout, dans cette époque d'incertitude, il n'est pas inintéressant de se pencher sur cette fiction des années 70, mais toujours tristement actuelle, dépeignant une Angleterre basculant dans le totalitarisme. Ce que j'ai regretté en revanche, ce sont les longueurs et les langueurs des cents premières pages durant lesquelles je me suis plutôt ennuyée. Mais passé ce cap, pas de doute, on peut difficilement abandonné le héros avant de savoir enfin à quelle sauce il sera mangé, même si plus l'histoire avance, plus l'impact est difficile à supporter pour moi."



Et comment cela s'est-il fini?

"L'auteur nous explique que sans espoir, l'homme n'est rien, ce en quoi je suis on ne peut plus d'accord avec lui et du coup, franchement, je ne comprends pas bien cette fin qui me pousserait plutôt, finalement, à déconseiller cette lecture."
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Les mois d'avril sont meurtriers

Je ne sais pas si c’est un coup de cœur ou une déception. C’est ainsi quelquefois et il m’est difficile d’expliquer pourquoi.

Pourtant les ingrédients sont présents pour que ce soit une réussite, notamment cette enquête qui est bien menée, d’autant qu’un corps bouilli dans son sang, coupé en morceaux et mis dans quatre sacs, sans empreinte ce n’est pas évident comme point de départ.

Le sergent à qui l’affaire est confiée, dont on ne connaîtra jamais le nom, est en charge des crimes non résolus. Il travaille seul, à l’Usine (nom donné au commissariat), bureau 205, son supérieur est appelé « la voix » et leurs échanges sont croustillants d’impertinence et d’ordres absolus :



- Vous me surveillez ça toute la nuit s’il le faut !

- Et si je dois aller aux toilettes ?

- Aussi, c’est un ordre, l’esprit doit dominer le corps… (etc.)



Cette impertinence qui lui est reprochée tout au long du bouquin vient du fait que cet homme est un zombie, il est mort à l’intérieur, il n’est plus qu’une enveloppe. Sa femme, Edie, a tué leur petite fille, Dahlia, en la poussant sous les roues d’un véhicule parce qu’elle l’énervait.

Il va voir sa femme Edie de temps en temps à l’asile. Elle ne le reconnaît plus, le conspue, l’insulte, exprès ou pas ? Il s’en fiche. Sauf que la petite Dahlia le hante dans ses rêves, souvent, douloureusement, elle l’appelle : je t’attends Papa, viens me rejoindre, alors il se réveille, se lève et espère le jour.

Ce caractère au fil des pages est entier, plein, intéressant et le lecteur comprend quand le sergent va se jeter dans la gueule du loup sans arme et en passant le premier. L’appel de l’enfant est puissant, drôlement puissant, tellement puissant, présent, là, oui, il faut…



Le tueur un psychopathe, ancien militaire, béret rouge est une tête brûlée, son portrait est superbement bien ficelé par Cook, au même titre que tous les personnages qu’il met en scène.



Le livre est bien construit, les chapitres se suivent facilement, les mots sont bien liés, le phrasé sent bon, bref le lecteur est bien, il se laisse flotter dans ce récit, au fil de l’eau le regard sur la ligne que forment les lettres. Une lecture qui va bien et que j’ai appréciée.



Deux bémols qui font tâche :

La traduction est faible, phrases parfois incompréhensibles que la teneur globale permet d’interpréter et aucune explication sur les citations de personnages ou de lieux.



La traduction du titre me laisse perplexe…



A noter un magnifique poème page 171 :



Là, au bout de ce chemin je vais tourner

Et m’enfoncer dans notre chagrin

J’ai peur qu’aujourd’hui ne soit perdu

Et que nous n’ayons hypothéqué demain…



Idéal pour la Saint-Valentin…



Il est très long, je le transcrirai un jour, peut-être quand je serai plus courageux.



4,5/5



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Les mois d'avril sont meurtriers

Cuisine à l'anglaise *

Les Robin Cook sont deux, comme le cholestérol ! Le bon, ici présent, anglais vagabond et amoureux de la France. Et l'autre, le mauvais, l'écrivain médical et surfait qui pourtant a un certain succès ! Je pense que je vais me faire étriller et que je l'aurai bien chercher. Ou alors être victime d'un virus anti-lecture de ce Monsieur.

Un cadavre est découvert dans un hangar abandonné de Londres. Pour éviter qu'il soit identifié trop rapidement, les assassins, car il s'avère rapidement que la présence de deux personnes était nécessaire, n'ont pas lésiné sur les moyens ! Le corps a été découpé, puis mis à bouillir jusqu’à ce que la viande et la peau soient devenues une masse gélatineuse et grisâtre qui se détache du corps ! Le tout a été mis dans quatre sacs plastique agrafés. Par petites touches et cuisinant certains indics, notre narrateur remonte lentement vers celui qui lui semble être un des deux meurtriers. Billy McGruder, ancien soldat natif d'Ulster, il a été condamné à dix ans de prison pour le meurtre d'un caporal de l'armée britannique et renvoyé de celle-ci. Il a disparu quelques temps et est revenu en Angleterre. La victime est un indic notoire, et le présumé complice de McGruder est retrouvé la tête éclatée de plusieurs balles. Les frères, Pat et Andy Hawes, pourtant emprisonnés semblent être les commanditaires du premier meurtre, mais pour quelle raison ?

Un vol dans une usine de chaussures qui s'est terminé par la mort d'un gardien.....cela a t-il un lien avec la future expulsion de diplomates russes d'Angleterre ?...Au cours de l'enquête, notre héros (?) découvre que l'épouse alcoolique de McGruber a eu une liaison avec Pat Hawes !

Lequel avec une facilité déconcertante s'est évadé d'une prison où il bénéficiait d'un traitement de faveur frôlant la résidence de vacances 5 étoiles ! Pourquoi ?

Un sergent narrateur sans nom, ni prénom, bien brisé par la vie, son épouse démente est enfermée en asile de haute sécurité après avoir tué leur fille. Elle ne parle que de la royauté britannique, lui aimerait qu'elle décède ! Il a de gros problèmes avec sa hiérarchie, la discipline n'est pas sa tasse de thé, ses relations avec certains de ses collègues sont doux euphémisme et pour le moins tendues ! Quant à celles qu'il entretient avec la pègre, elles ne frisent pas l'illégalité, elles sont souvent bien au delà de celle-ci !

En face un psychopathe, tueur aguerri, ancien militaire ayant sillonné le monde, tuant en toute légalité, mais aussi par plaisir. Cet homme a une morale bien à lui, mais il s'y tient. La violence il a grandi avec ! Le jeu du chat et de la souris commence, marché de dupes, donnant donnant, le plus malin l'emporte. Et dans les deux camps, la partie est très serrée !

Quelques comparses personnages secondaires peu reluisants, malfrats de bas étage, indics qui vendraient tout et n'importe quoi pour quelques billets. La police ne sort pas grandie de ce roman, la politique primant tout, pourquoi ce veto au sujet du cambriolage de l'usine de chaussures, pourquoi laisser en dehors de tout cela un notable local, interdiction absolue de l’interroger !

Un très bon Robin Cook, très noir, dérangeant, décortiquant la société anglaise et ses tares, mettant à jour les liens entre la police, les malfrats et quelques espions qui venaient de l'Est.

Ce roman fait partie d'une série nommée "The Factory"(L'Usine ici) qui comprend entre autres "J'étais Dora Suarez".

* bouillie uniquement.
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Quelque chose de pourri au royaume d'Anglet..

Quand Robin Cook (LE Robin Cook) aborde le thème de la dictature, personne n'en ressort indemne. Dans ce roman des années septante, il pose le décor d'une Angleterre plongée dans le chaos par un dictateur contre lequelle l'Ecosse et le Pays de Galle se sont révoltés en devenant indépendants. Le personnage principal est un ancien journaliste politique qui s'est acharné contre le gouvernement en place et s'est exilé en Italie où il mène une existence de paysan jusqu'au jour où il est déporté avec sa compagne en Angleterre.

Un roman absolument incroyable qui pousse à la réflexion tout en nous emmenant dans les tréfonds de l'horreur et de la détresse humaine.

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J'étais Dora Suarez

Bah pour une fois que je suis d'accord avec un bandeau. Non mais sérieux.



Le truc avec Robin Cook c'est que quand t'en as jamais lu, t'as un peu l'impression de débarquer dans un monde en disant "eh les gars ça vous dit quelque chose : le Parrain de Francis-je-sais-plus-quoi-Copp... Coppola ?".



Bref comme un puceau avec un flingue entre les mains qui voudrait montrer à la terre entière que toi aussi tu sais tirer.



N'empêche que. L'action se situe vers les débuts du sida à Londres. Le flic de Robin Cook est un chevalier blanc aux méthodes moins musclées qu'un Charles Bronson ayant décidé de faire Justicier dans la Nuit. Disons que, plutôt que de régler ses affaires à coups de fusil à pompe, son caractère et ses répliques à couper au couteau à beurre font mouche.



Encore une fois ici, c'est l'histoire qui prime. C'est d'une violence un peu dégueu, je pense que ça équivaut à quand t'as 10/11 ans, que t'as réussi à péta Sev3n au vidéoclub pour faire le chaud mais que tu te retrouves avec une flaque de pisse au pied du canapé. C'est sombre bordel, tellement sombre et cru.



Pour faire face au chevalier blanc (intègre, avec des principes, genre le flic pur tu vois ?) on avait besoin de son antichrist, à savoir un mec complètement fêlé qui se martyrise le zob à cause de son impuissance et qui détruit des nanas à coups de hâche parce que quand t'es serial killer ta seule façon de prouver ton amour c'est de voir du bon gros rouge couler.



Anyways, dans cette Angleterre de la fin des années 80, on se laisse très vite prendre par ce roman qui vous niquera certainement la chair à coté des ongles, votre paquet de clopes avec une ou deux pensées un peu cauchemardesques en bonus.



Si David Peace le dit c'est que c'est bon vous pouvez y aller, la traduction se défend tellement bien que pendant un moment j'ai cru que Robin Cook avait écrit en français t'sais.



Donc tu peux y aller canard, c'est pas grave de rattraper le retard (surtout en polar).



(on devrait me payer à la rime foireuse une fois pour voir, juste par insolence)


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Vices privés, vertus publiques

Ce livre m'a paru être beaucoup plus une étude de mœurs qu'un roman policier, ce qui n'ôte rien à sa qualité intrinsèque. Car le portrait intimiste d'une certaine aristocratie en déroute qui en ressort est frappant, brutalement dessiné, chirurgicalement écrit. On y décortique les errements d'une famille, au sens large, de nobles plus ou moins désargentés qui se cherchent une raison d'exister Que les refuges illusoires se nomment cynisme, dévergondage, aveuglement volontaire ou militantisme, ils sont tous illustrés avec brio, sans complaisance ni fioritures. Cette lecture m'a d'abord étonné, puis désorienté, pour finalement me plaire par son coté subtil et convaincant.
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J'étais Dora Suarez

Un classique du roman noir. Éprouvant et émouvant. Un roman qui vous hante à la manière du "Dahlia noir" d'Ellroy.
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