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Critiques de Robin Cook (II) (94)
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Le mort à vif

Je connaissais Robin Cook l’américain, je ne connaissais pas Robin Cook l’anglais.

En faite en cherchant des livres du premier que je suis tombé sur le deuxième. Étant curieuse, j’ai acheté trois livres sans savoir ce qu’il valait... Et j’ai bien fait !



J’ai adoré être submergé dans cette enquête hors norme.



Nous suivons un « supposé » sérial killer au début de l’enquête, nous apprenons à le connaître, à débusquer ses infamies, à découvrir toutes les horreurs qu’il a éparpillé.

Puis à la suite de son arrestation nous savons ce qu’il ressent, pourquoi il en est arrivé là ! Enfin, si on peut avoir une explication de la folie.



Un roman prenant où l’horreur est au rendez-vous.



Bonne lecture !
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J'étais Dora Suarez

Une lecture pas vraiment légère ni plaisante.

Quelques scènes mises à part, il n’y a que peu d’action. L’essentiel se passe dans la tête du flic, qui s’identifie, pour on ne sait quelle raison, à la victime.

Quelques invraisemblances notamment à la toute fin (le photographe, l’arrivée des policemen).

Sinon le personnage du tueur, psychopathe masochiste, est assez rare pour être souligné.

La description des pratiques du club, avec les gerbilles, est absolument atroce.
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Quelque chose de pourri au royaume d'Anglet..

Richard Watt, journaliste politique au Royaume-Uni, a fait tout son possible pour empêcher Jobling d'accéder au poste de premier ministre. Ayant échoué et mis à ban, il n'a pas d'autre choix que d'émigrer en Italie, où il achète une ferme et coule des jours heureux. De son exil il contemple la montée en puissance d'un régime totalitaire en Angleterre. Mais quand son pays d'origine demande son extradition, son cauchemar commence...



Cette dystopie de Robin Cook (pas celui des thrillers scientifiques, l'autre) m'a été recommandé par ma libraire. Ecrit dans les années 70, il garde toute sa pertinence face à la montée du populisme dans plusieurs pays. L'auteur décrit avec brio ce climat liberticide qui s'est mis en place, la passivité des citoyens plus soucieux de ne pas perdre le peu de privilèges qu'il leur reste que de se battre pour leur liberté.
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Quelque chose de pourri au royaume d'Anglet..

Voilà bien longtemps que je n’avais pas lu quelque chose de Robin Cook, auteur attachant, à la vie tumultueuse, et aventurière, qui a connu son heure de gloire en France avec « On ne meurt que deux fois » au début des années 80.

J’ai abordé donc ce livre avec un préjugé favorable, nourri par le quatrième de couverture qui mentionne que la presse Anglaise avait jugé ce livre digne de succéder à « 1984 » de George Orwell. Je dirais qu’on est loin d’une tel niveau de perfection. La seule ressemblance avec ce chef d’œuvre, est que l’action se passe sous un régime totalitaire, ayant clivé l’Angleterre du reste de l’Europe, et même du Pays de Galles, et de l’Écosse, avec une population tétanisée, et victime consentante.

En ce sens, il est vrai que ce livre sortit en 1970 n’est pas sans évoquer cette forme de suicide traumatique qu’a été le Brexit, 50 ans plus tard, et que la vision du risque de repli réactionnaire de la Grande Bretagne, s’est avérée assez prophétique. Robin Cook connaît son pays, et si le parallèle avec Orwell est vrai, il est lié à la personnalité des deux hommes. Tous deux issus de milieu petit bourgeois, passés par le collège d’Eton, ils n’hésitèrent pas à pourfendre les valeurs conservatrices de leur pays, tout en y étant attachés. Leur vie aventureuse et à hauts risques, se mêlant au prolétariat, les aurait ils amené à boire un coup ensemble, ou à se retrouver parmi les brigades internationales s’ils avaient vécu à la même époque ?….Je ne sais pas ce qu’Orwell aurait pensé de ce livre, lui qui était critique littéraire à ses heures. Lui aurait il dit, comme moi, que la deuxième partie du livre aurait eu bien besoin d’être retravaillée. Voir, pourquoi pas supprimée.

Deux parties, donc. La seconde commence à la page 197 à la moitié du roman. On bascule alors de l’Italie en Angleterre, et il n’y a pas que le climat qui est plus froid. Je doute que Robin avait envie de rentrer dans son pays, comme son héros, à l’époque où il écrit cette œuvre. Un écrivain parle toujours un peu de lui, et c’est sûrement un euphémisme dans cette affaire. Il n’est pas difficile de comprendre que l’auteur s’est immergé dans son héros paysan, dans un pays qu’il connaît bien pour y avoir vécu et travaillé lui aussi.



Richard Watt, journaliste engagé, s’est exilé en Toscane, où avec sa compagne Anglaise, il est viticulteur, et très bien intégré dans la communauté. Malheureusement, son passé vient se rappeler à lui, et le voilà menacé d’être extradé. On se questionne si le passé plus ou sulfureux de Robin Cook et ses aventures de bad boy n’ont pas installé ce scénario de la perte du paradis promis.



Le livre de 400 pages est donc divisé en deux parties sensiblement égales en volume, mais certainement pas en qualité. Au point qu’on pourrait se demander s’ils ont été écrites par le même auteur. Ou pour quelle raison psychologique ou liée à l’urgence ou à la nécessité, il a du saboter ainsi son livre ? Jugement peut être un peu dur, mais lié à ma déception finale.

La première partie est liée à ce coin de Toscane devenu un refuge. Les premières pages sont d’une belle qualité d’écriture, vous faisant penser que vous êtes tombé sur quelque chose de rare.

« J’ouvre les volets. Il est très tôt ; pourtant le soleil aveuglant de Toscane, qui bombarde le sol de la cour comme une grêle de pièces d’or, se reflète avec violence sur le capot orange du tracteur. Un vent chaud, le sirocco, monte du ravin par bouffées indolentes ; je l’entends bien avant qu’il n’arrive jusqu’à nous pour agiter nos arbres. »



Toute cette première partie est efficacement traduite, dans cette prise de connaissance du pire, de la perte inéluctable des choses, après la révélation venant d’un officier débonnaire de gendarmerie, embarrassé par son devoir d’information. Un processus qui est celui de l’existence, et qui est quelquefois associé à la maladie, rendant encore plus beau ce qu’on abandonne, quand on glisse vers la mort, et que le regard des autres se transforme, entre compassion, et fuite.



La seconde moitié m’est tombée des mains. Elle est liée à l’expérience de l’enfermement, et d’un monde qui se resserre lentement sur la vie. Malheureusement, elle est très peu crédible, voir ridicule. On est loin des textes de Primo Levi sur l’enfermement, et la négation de l’homme, débarrassé de toute sa dimension humaine. L’attitude du héros, revendicatif, et violent, faisant sans cesse dans l’apostrophe, et le passage à l’acte envers ses geôliers, dans des attitudes défiant le shériff et ses hommes alors qu’il est à leur merci sont ridicules, et les dialogues semblent sortir d’un livre de série B, ou de superposer.

Je retiens donc les 197 premières pages de ce roman, qui se seraient suffis à elle mêmes.

Entre la note 4 que j'accorderais à la première partie et un 2 boosté à la seconde, la note 3 me parait satisfaisante, pour un livre qui reste une curiosité. Bravo au traducteur qui a réussi à traduire le titre Shakespearien " A state of Denmark" au mieux.
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Quelque chose de pourri au royaume d'Anglet..

Le choix de Jérôme pour Collectif Polar

Un grand roman et un grand auteur !

Publié en 1970 et salué par la presse anglaise comme un digne successeur du 1984 de George Orwell, Quelque chose de pourri est un roman impressionnant, superbement écrit et étonnamment prémonitoire. Robin Cook y dénonce, comme l'a souligné Jean-Pierre Deloux, le «totalitarisme des démocraties en décadence et dégénérescence, se voulant des modèles de libre entreprise et de libéralisme, qui font fi rapidement de leurs propres lois et de leurs codes judiciaires qu'elles n'hésitent pas à transgresser ou à bafouer au nom de l'intérêt général, d'impératifs économiques, d'états d'urgence ou de sécurité publique».

Mais que nous raconte "Quelque chose de pourri au royaume d'Angleterre"

Dans un futur proche. Richard Watt, journaliste anglais, est obligé de s'exiler en Italie. L'Angleterre, en effet, est gouvernée par un Premier ministre qui refuse d'organiser de nouvelles élections à la fin de son mandat. Mais, Richard Watt est poursuivi, chassé d'Italie et interné dans un camp de concentration

J’aurai pu en choisir d’autres titre de Robin Cook , "J’étais Dora Suarez", bien sûr, "Il est mort les yeux ouverts", l’autre grand roman de sa série The Factory, mais j’aime aussi celui-ci, "Quelque chose de pourri… " Un grand roman dystopique. Un homme vit en Toscane, il a fui l’Angleterre après l’élection de celui qu’il avait dénoncé avec acharnement. Il a dû fuir parce qu’une dictature se mettait en place. Mais peut-on fuir son pays ? Peut-on fuir la violence faite à ses semblables ?
Lien : https://collectifpolar.blog/..
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Le mort à vif

Mon livre préféré sur un tueur en série psychopathe (pléonasme).

À ce jour Robin Cook est pour moi le SEUL ECRIVAIN à avoir eu le courage d'aller au bout de l'Horreur (qui est humaine, comme chacun sait) en pénétrant de façon froidement scientifique le cerveau malade d'un Mort-Vivant obligé de tuer - de la façon la plus sadique et la plus grotesque parfois, en même temps - pour avoir l'illusion d'EXISTER au travers du seul Contrôle qu'il peut avoir sur sa Non-Vie, sans aucune considération éthique, sans empathie et sans remords aucun, mécanismes qu'il ne possède pas, malgré sa parfaite connaissance de la différence entre le "Bien" et le "Mal". En cela Robin Cook nous décrit parfaitement la différence fondamentale entre un "malade mental" type schizophrène - parfaitement irresponsable légalement - et l'authentique psychopathe, vrai "Monstre" en ce qu'il est l'incarnation la plus absolue autant qu'incompréhensible du MAL, ou du Diable pour ceux qui veulent y croire.

À sa facon "littéraire", Robin Cook est l' équivalent du grand scientifique Canadien Robert D. Hare, Ph.D,

pionnier N° 1 de l'étude sur la psychopathologie et créateur du mondialement utilisé "Psychopathy Checklist", dans son ouvrage fondateur "Without Conscience - The Disturbing World of The Psychopath among Us"...

Sans le vouloir, mon psychiatre lui-même m'a involontairement confirmé l'importance de ce livre sur la "Face Sombre" de l'âme humaine, le jugeant si horriblement réaliste qu'il arriva (presque) à me convaincre

de ne jamais le lire (mais il était trop tard), et de m'en débarrasser- ce que je n'ai pas fait, bien entendu.

"Les monstres existent bel et bien, et ils arpentent les recoins les plus obscurs de notre cerveau...dans nos rêves ils marchent à nos côtés, ils sont nos amis, nos frères, nos soeurs, et nous ne les reconnaissons jamais - jusqu'au jour où, pour la première et la dernière fois de notre vie, ces Morts-Vivants se révèlent à nous dans leur Aveuglante Noirceur - et il est TROP TARD, bien trop tard alors pour reconnaître que nous venons juste de rencontrer notre Mort."

Voilà ce que représente pour moi "Le Mort à Vif", chef-d'oeuvre de Robin Cook.
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J'étais Dora Suarez

Bon, c’est bien gentil la rentrée littéraire, les nouveautés, les prix, toussa toussa… Mais faudrait pas que ça m’empêche de pratiquer une de mes activités littéraires favorites à savoir l’exploration du fonds. Et même des grands fonds. Sans bouteilles ni combi, mais avec la satisfaction de rattraper le temps autrefois perdu.



Place donc à J’étais Dora Suarez de Robin Cook, traduit par Jean-Paul Gratias et depuis longtemps repéré comme référence du noir chez Christophe L. et quelques autres. Et ma foi, quel choc !



Un flic marginal, indocile et anonyme est réintégré au sein du A 14 britannique, le service des décès non élucidés, pour y retrouver l’assassin de Dora Suarez et de sa logeuse, sauvagement massacrée à la hache, entre autres sévices physiques et sexuels.



« Il vit tout de suite qu’il avait bien travaillé ; la vieille mourut sous le choc ».



Dans le même temps, Felix Roatta, le patron du Parallel Club est retrouvé abattu. Après la découverte des activités particulièrement sordides qui s’y déroulaient à l’étage, le lien entre les deux affaires s’impose peu à peu.



Pas besoin d’en dire plus, aucun pitch ne pouvant être sincère face à la noirceur de ce roman. Et d’ailleurs, la 4e de couv’ ne s’y essaye même pas, laissant la parole à l’auteur : « Et c‘est pourquoi J’étais Dora Suarez n’est pas seulement un roman noir, et qu’il va encore plus loin, pour devenir un roman en deuil ».



Le choc est immédiat, sous le coup des 50 pages d’un premier chapitre d’une puissance incroyable. Pas de temps mort pour être plongé dans les tréfonds de l’âme humaine. Que reste t-il quand on a touché le fond du désespoir et de la descente aux enfers ? Passer de l’autre côté de l’humanité.



J’étais Dora Suarez est un long cri de souffrance, de solitude et de jusqu’au boutisme pour ceux qui n’ont plus rien à perdre : pute condamnée par le sida, assassin névrotique ou enquêteur désabusé.



« Étant une femme solitaire, à la fois timide et fière, je me suis trouvée catapultée dans un milieu où il était fatal que je me fasse violer, parce que ma réserve apparaissait comme un défi lancé aux hommes ».



Un livre où, bien que morte dès le début, plane constamment l’ombre de Dora qui finit par faire corps avec celui qui tente de la venger, transformant son enquête en quête mystique : « Donnez-moi la main, vous tous, les vivants et les morts, et accordez une pensée, pendant un moment de générosité, à la pauvre Dora Suarez qui n’aurait jamais dû mourir à trente ans, massacrée à coups de hache ».





Un livre qui dit de manière sublime ce qu’est le noir, et qui devrait être lu par tous ceux qui ne savent pas toujours comment définir ce genre.
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J'étais Dora Suarez

Une lecture commune sur Collectif Polar

Les ressentis



Miss Aline : Bonsoir…. Pouvez-vous nous délivrer un premier ressenti global à cette fin de lecture… merci.



Nath : Premier ressenti global : je m’attendais à encore plus sombre…



Sophie Collette : Pas le plus dur que j’ai lu 😄



Frederic Fontes : Déroutant et fascinant à la fois. Comme Nath et Sophie, j’ai lu du Chattam ou du Gilles Caillot bien plus cradingue. Mais ici, si certains passages sont assez hard, je trouve que c’est bien fait. Une manière de nous montrer le monde sans filtres, comme le voit le héros du livre.

Les scènes les plus troublantes pour moi, ce sont celles avec les caleçons sales du tueur, qui font office de trophées, c’est assez dégueulasse !

J’ai trouvé que ça digresse par moment, mais sinon, c’est assez efficace niveau écriture, je viens de me procurer les autres romans de la série.

Par contre, je n’ai rien compris à la scène finale, où on tente de nous expliquer avec les photos ce que le tueur est en train de faire avec le fil de fer et la roue de vélo. Mais bon, peut-être que c’est aussi bien que je ne comprenne pas comment fonctionne sa machine de torture…

Je regrette le fait que les points de vue n’alternent pas temps que ça entre les deux protagonistes. On marche finalement rarement dans les chaussures de sport du tueur.

C’est quand même une enquête assez hallucinante, avec un enquêteur en bout de route, qui fait passer le Andy Sipowicz de la première heure pour un enfant de cœur !

Donc je retiendrai cette histoire de filtres, comme l’objectif du photographe qui mitraille le tueur chez lui. C’est parfaitement à l’image du roman. Pas de filtres, grosses résolutions pour ne perdre aucun détail. Quelques photos floues parfois, qui permettent à l’observateur de s’offrir quelques moments lyriques ou d’introspections. Et le reste de la pellicule qui nous balance à la tronche la triste réalité de cet univers.

Et puis c’est aussi une drôle histoire d’amour…



Ge : Merci Mister Fredo pour ce beau debrief



Thierry Gasparik : Bonjour les amis, désolé de ne pas avoir donné mon avis plus tôt, un peu bousculé par ma chimio!! j’ai lu ce livre il y a quelques semaines déjà, et il ne m’a pas laissé un souvenir impérissable, trop de longueur à mon gout, coté « dark » j’ai lu bien pire, mais malgré tout je me suis un peu attaché au « flic » et à sa personnalité, une fin un peu bâclée et oui pas tout compris sur la machine de torture du tueur, il me faudra trouver un autre ouvrage de cet auteur pour confirmer ou infirmer mon sentiment, bonne journée à toutes et toutes



Sophie Collette : Je suis d’accord avec toi Thierry, le flic est attachant, j’ai l’impression que c’est un peu une surenchère les scènes pipi caca 💩 lol pour moi cela n’apporte rien, il y avait beaucoup de longueur dans les premières pages



Ge : Intéressant votre point de vue messieurs dames.



Ellen Ripley : Bonsoir tout le monde, désolée pour le retard de ma réponse. Et c’est une réponse que je vais faire en toute neutralité, c’est à dire sans lire les retours de qui que ce soit. J’ai mis beaucoup de temps à lire ce livre. Besoin de digérer sans doute les pages absorbées avec difficulté. Je me suis plusieurs fois posée la question de la complaisance de R. Cook dans ce texte, et puis ensuite celle de son personnage de flic. J’ai eu des moments de grande révolte, j’ai plusieurs fois refusé de m’y remettre. Il y a même eu un moment où je me suis revue en train de m’engueuler avec mon père, qui était un grand fan des films de vengeurs de la fin des années 1970, les Bronson notamment. Je trouvais ça facho à mort, cette vision de la victime comme saint et martyr pour la vengeance de qui il faut tout brûler. Dora m’est donc souvent apparu comme ça et c’est ça qui m’a permis de finir le bouquin dans de bonnes conditions intellectuelles. Comment Cook s’inflige ça, comment son héros/narrateur s’inflige ça et comment nous, lectrices et lecteurs on s’inflige ça. Du coup, la question s’est portée automatiquement sur la grosse production aujourd’hui des thrillers à base de tueurs en série charmant et très sexy, super intelligents, cultivés, etc. Quand on lit Dora, on a tout l’inverse de ça. On a à faire à un dingue qui se mutile, on est dans un truc qui parle de la folie et des laisser pour compte, on a une peinture sociale tant du côté de la police en manque de moyens que de celui des malades en manque d’hôpitaux. Bref, on a un roman noir un vrai qui nous met mal et pas juste un truc qu’on lit avec une main moitié fermée devant les yeux parce que youhou, c’est trop flippant. Je ne peux pas dire que j’ai aimé ce roman parce qu’on ne peut pas dire que ce roman est « aimable ». J’en ai chié et je ne le regrette pas. Ça fait deux mois que je l’ai refermé définitivement, je n’y reviendrai plus, mais au moins, j’y pense encore. J’espère que je n’ai pas été trop longue. Ah ! J’oublie un truc qui m’a fasciné et que je n’avais jamais vu ailleurs : le narrateur qui parle à la première personne, qui est l’enquêteur, qui cherche le tueur et qui passe par sa tête comme s’il en était le double. Ça, ça m’a fasciné. Amicalement. Ellen.

Nath : Voilà un sacré retour ! Il y a peut-être une question de génération, effectivement, dans ce ressenti, sachant que ce livre date (si je ne me trompe) de 1990. Moi ce qui m’a le plus dérangée est finalement ce super pouvoir de flic qui fait un peu ce qu’il veut. Il m’a profondément énervée car sous ses airs de chevalier vengeur me semblait se cacher un flic à l’ego démesuré qui traite tout le monde comme de la merde. Sinon, point de vue du détraqué ou de la violence, rien qui me choque (après avoir lu « le manufacturier », il devient difficile d’être choqué !) mais j’imagine que ça ne devait pas être le cas au moment de sa sortie ! En soi, j’ai aimé l’intrigue mais j’ai détesté le personnage du flic !



Ge : Voilà qui est intriguant Mesdames….



Ellen Ripley : Merci pour la question de génération, Nath. S’il faut attendre un énième thriller sur les boucheries serbes – même pas étudiées par Koping pour ce qu’elles furent vraiment pendant le conflit et ensuite – pour juger de la violence d’un roman, alors la période actuelle est effectivement à la surenchère. Et la génération contemporaine de ses lecteurs ne serait donc plus que dans cette attente ? Mais je dois avoir atteint un âge où je ne pige plus grand-chose. Quant au flic de Cook, il n’a pas plus de super pouvoir que ceux qui rivalisent avec l’intelligence des serials killer d’aujourd’hui. Ça peut faire débat. Bonne journée. Ellen



Nath : Quand je disais sacré retour, c’était dans un sens positif (j’ai peur que ça n’ai pas été pris comme tel) et question de génération dans la manière de voir les victimes tant par les cinéastes que les auteurs et effectivement, je constatais aussi que maintenant, les tueurs en série sont plutôt dépeint comme tu le décris avec justesse. Concernant Köping, pour avoir échangé avec lui, il me semblait pourtant qu’il s’était beaucoup renseigné, il a même avoué avoir à plusieurs reprises été obligé de faire un break de quelques jours dans ces recherches afin de sortir un peu de cette horreur historique.

Quand je parle du comportement du flic qui m’a un peu dérangée, c’est sa manière de faire fi du protocole, effectivement, maintenant on croise plutôt des flics entraînés au profilage ou bardé de technologie, d’où encore une question d’époque sans doute où il fallait avoir du bagou et y aller parfois au bluff ou à l’instinct pour obtenir des aveux sans toutes les aides technologiques actuelles…

Après, mon ressenti du flic est tout personnel. Quand je croise des flics un peu en dehors des clous, j’aime bien que leur caractère détestable soit par exemple contrebalancé par une bonne dose d’humour, mais encore une fois, c’est personnel. Désolée si j’ai froissé, ce n’était pas le but, ni non plus d’évaluer le seuil de violence par rapport à une « attente ».



Ge : C’est comme cela que je l’avais aussi compris Nath. La question générationnel, c’est pas la problème de le lire jeune ou plus vieux non c’est pour la date où le livre a été écrit, pour l’époque qu’il décrit et aussi pour le propos qu’il véhicule. Il a été dit à propos de J’étais Dora Suarez, que c’était le chef-d’œuvre de Robin Cook et surtout que ce livre a profondément marqué le genre. C’est en cela que c’est générationnel !

Comme toi, Nath, j’ai trouvé le flic un peu borderline, obsédé par ce crime et la traque du meurtrier. Dire qu’il est bourru est un doux euphémisme, il est totalement sec, aride, fermé aux autres je dirais. Un vrai solitaire, cynique, et désillusionné. C’est surtout un inspecteur sans nom, et pourtant il ressort une part d’humanité voir d’humanisme de lui et ça pour moi ça a été assez déstabilisant.



Miss Aline : Merci pour vos retours. Il en ressort que l’idée du noir est subjective/ propre à chacun. Que manque-t-il à Dora pour le faire basculer vers le noir ? Selon vous que doit-on trouver comme scènes, protagonistes, etc. dans un véritable roman noir ?



Nath : Je pense qu’il n’y a pas forcément de code, parfois un roman sans la moindre violence explicite est vraiment noir, je pense notamment à « Écorces Vives », très sombre mais uniquement avec des sous-entendus. Ici, on est finalement sur quelque chose de plus classique avec un policier qui pourchasse un monstre.



Thierry Gasparik : Bonjour, je suis d’accord avec toi Nath, souvent trop de scènes violente, nuisent au roman, la suggestion est pour moi à titre perso le chemin vers le noir le plus direct car laissant place à l’imaginaire !

Sophie Collette : Je ne suis pas spécialiste mais pour moi il a le code du roman noir, cela représente bien la société, sa noirceur, ses bas-fonds, le côté désespéré des protagonistes, une ambiance lourde et malsaine…enfin c’est mon avis



Ge : Et tous les avis sont recevables. Et comme le dis Jean-Bernard Pouy dans Une brève histoire du roman noir,( Éditions Jean-Claude Béhar, 2009) , le polar regroupe au moins quatre sous-genres : «le roman à énigme, le roman policier, le roman d’angoisse (ou criminel ou thriller), et le quatrième, souvent transversal, le roman noir» Et pour citer un autre auteur que j’admire Jean Patrick Machette dans ces Chroniques où il aborde l’histoire, la théorie et la critique du roman noir. «Je décrète que polar ne signifie aucunement »roman policier ». Polar signifie roman noir violent. Tandis que le roman policier à énigme de l’école anglaise voit le mal dans la nature humaine mauvaise, le polar voit le mal dans l’organisation sociale transitoire. Le polar cause d’un monde déséquilibré, donc labile, appelé donc à tomber et à passer. Le polar est la littérature de la crise»

Pour moi le polar part d’un crime ou d’un délit et ensuite survient le processus de son élucidation. Le roman noir lui n’est pas forcément une enquête, il se sert du prétexte de la transgression de l’ordre pour dévoiler les failles de notre société. Le roman policier lui rétablie l’ordre établi, il y a une espèce de morale, un crime est commis, le coupable est puni. Le roman noir lui ne s’attache pas à retrouver l’ordre établi, non juste il montre le dérèglement de celui-ci !

Pour reprendre Manchette « le bon roman noir est un roman social, un roman de critique sociale, qui prend pour anecdote des histoires de crimes »

Je dirai que le roman noir est l’analyse de la réalité d’une société criminogène. Bon…Non là je vais peut-être un peu loin ! ???



Miss Aline : Qu’est-ce qui vous attire dans la lecture du noir ?



Sophie Collette : Je suis plus fan de thrillers que de roman noir, pour moi le roman noir reste un reflet sombre de notre société, sombre dans les lieux, les personnages, les interactions, on a l’impression qu’il n’y a plus d’espoirs, c’est ma vision du roman noir



Nath : Dans mon cas, j’aime autant les thrillers que les polars, mais ce que j’apprécie surtout, c’est que souvent y sont abordés des thèmes actuels, sociétaux ou historiques. C’est cet aspect que j’aime le plus. Ça me semble aussi souvent des romans avec des personnages ni blanc ni noir, plus proche de la réalité de l’humain que ne peuvent l’être, à mes yeux bien sûr, les autres romans.



Frederic Fontes : Qu’est-ce qui vous attire dans la lecture du noir ?

C’est l’ingéniosité que va devoir développer le héros, avec un champ d’actions limitées, pour mettre la main sur un alter-ego lui aussi ingénieux à sa manière, qui croit qu’il peut faire ce qu’il veut.

C’est l’importance des détails et des traces, de ce qui est dit et tue, ce qui est visible et invisible.

C’est l’affrontement entre celui qui canalise, et celui qui déchaine.

C’est le lecteur qui prend la place de l’observateur et qui comme lui, s’imprègne des détails de la sombre histoire à laquelle il est confronté.

Ce qui me plait dans le noir, c’est autant l’ombre que ce qui la génère.

C’est la capacité d’un auteur à jouer entre la vérité crue, et la capacité à suggérer. J’avoue que je préfère largement la suggestion, qui est un exercice bien plus difficile.

C’est l’art du romancier à faire ressortir l’humanité de ses personnages face aux scènes sordides auxquelles ils sont confrontés.

Dora nous confronte un peu à ça.



Ge : Je n’aurai pas dit mieux. Merci pour vos réponses. Et voici Ludivine qui nous rejoint.

Vous pouvez aussi exposer votre point de vue par rapport aux réponses déjà apportées par les autres participants. Le tout est de rester cordiaux. Chacun a le droit à son avis propre. Mais c’est dans l’échange que nous aurions le plus de change de comprendre vos points de vue.

Alors m’hésitez pas à reprendre ou à compléter et surtout à participer. Et bienvenue @Ludivine. Et aussi @Chantal si tu as eu le temps de finir le livre, ton avis nous serait aussi très précieux. 🙂



Sophie Collette : Bonjour à tous. C’est un très beau projet qui permet de découvrir un genre littéraire plus spécifique, cela nous permet aussi de donner nos impressions, seul petit bémol à mon niveau, j’aurais dû attendre, j’ai fait un aussitôt reçu aussitôt lu, donc cela date. Lol

Pour moi c’est du roman noir, même si je pense que l’on peut toujours trouver plus noir, mais comme disait un célèbre chanteur Belge🤣😉, noir c’est noir il n’y a plus d’espoir.

Pour avoir un roman noir je pense qu’il faut du pessimisme, de la violence, une vision négative de la société, une ambiance lourde pesante malaisante, bref pas de rayon de soleil à l’horizon.

Je me suis rendu compte que ce n’est pas un genre qui m’attire, je préfère le policier à énigme ou plus psychologique…



Geneviève : Merci Sophie, intéressant ce que tu dis là, le roman noir, le roman du désespoir. Moi j’aurai tendance à dire que noir rime avec miroir. Celui de la société qu’il décrit. Je le ferai aussi rimer avec mémoire, car comme le disait plus haut Nath, il est générationnel et par là marqueur de son temps.



Ludivine Campbell : Bonsoir tout le monde ! 🙂 Désolée pour mon arrivée tardive dans le groupe, je m’étais perdue en chemin. 😁 J’espère que vous allez tous, bien.

Vous avez déjà dit pas mal de choses sur le roman, alors je ne vais pas en rajouter beaucoup plus je crois. Mais dans l’ensemble, je suis d’accord avec Sophie sur le fait qu’il y a une surenchère dans les scènes scato, ce n’est vraiment pas un aspect du roman qui m’a attirée… Et comme Thierry, je n’ai pas tout saisi non plus dans l’explication qui été donnée avec le rayon de vélo/objet de torture dans les dernières scènes. Pourtant j’ai relu le passage pour être sûre de bien saisir mais j’ai trouvé l’explication confuse. Bon, j’ai saisi l’idée, c’est déjà ça hihi !

Après je rejoins Nath, je n’ai vraiment adhéré à l’esprit du flic non plus. Dabs l’ensemble j’ai trouvé les flics très bourrus. Il y avait beaucoup de démonstration de testostérone, ce n’était pas très fin, j’ai trouvé. Bon, pour résumé, je n’ai pas vraiment accroché au roman 😇

Mais malgré tout, je suis contente de participer à ce grand projet, et d’avoir découvert ce roman 🙂

Après dans l’histoire, il y avait des sujets de société qui devait être moins publié à l’époque peut-être et qui en font un sujet intéressant. L’auteur parle de la prostitution et de ce qu’on fait subir aux filles dans les « maisons », du sida, et aussi du fait que la justice passe un peu à l’oubliette cette partie de la société.



Miss Aline : Que doit comporter (ou pas) un roman noir pour toi ?



Ludivine Campbell : Bonne question, j’essaie de trouver la réponse adéquate 🤭

Une enquête, un crime ou plusieurs (sans forcément avoir l’avalanche de glauque), des scènes d’angoisse, et un sujet de société. Un crime ou une enquête qui dénoncerait un problème dans notre société. Je pense que J’étais Dora Suarez répond bien au genre du noir, mais l’écriture n’était pas faite pour moi malheureusement.



Ge : Et toi, chère Chantal, nous ne t’avons pas entendu .

Pourrais-tu même en quelques phrases me dire ce que tu as pensé de « J’étais Dora Suarez de Robin Cook »



Chantal : Oh la la … à ma grande honte, je n’ai pas pu terminer la lecture de ce roman . Je n’ai pas réussi à entrer dans le récit, ça m’a paru déprimant à souhait et je n’étais pas dans la disposition adéquate….

Je suis désolée. Je suis sans doute passée à côté d’un bon roman, mais parfois, impossible de rentrer dans l’histoire. J’ai eu la même réaction avec un roman de Karine Giebel …. De même, j’ai dû m’y reprendre à 2 ou3 fois pour lire « Voyage au bout de la nuit ». Mais j’étais bien plus jeune ! Une fois lu, c’est devenu un de mes titres préférés. Alors, je re-essaierai Dora Suarez, même si c’est trop tard pour toi et pour cette fois et cette lecture commune ! J’espère que tu me pardonnes…



Ge : Chantal, pas de soucis, et ta réponse me va parfaitement, ça fait partie du jeu, parfois un livre, un auteur nous échappe, il n’est pas fait pour nous ou comme tu le dis si bien ce n’est sans doute pas le bon timing, pas le bon moment, pas dans notre humeur du moment. C’est comme cela, il faut savoir l’accepter.

Et puis, Aline si tu le permets, pour clore cette lecture commune j’aimerai vous donner à lire quelques citations qui ont retenues mon attention.



Miss Aline : Oui, bonne idée, j’avais demandé il me semble de souligner les passages qui vous qui ont pu vous heurter vous blesser ou vous mettre mal à l’aise.



Ge : Alors je vais peut-être te décevoir mais c’est plus des citations qui illustre mon propos :

« – Oui ? fis-je.

La voix annonça, comme si je n’avais jamais été absent :

– Voilà, c’est fait. Vous êtes réintégrez dans la Police. […]

– Rien n’est fait, dis-je. Il y a l’affaire Fox, la commission de discipline, sans oublier tous les dégâts que je peux provoquer quand on essaie de me faire travailler en équipe avec une bande de connards.

-Tout est arrangé ; l’affaire Fox est oubliée parce que je suis à court de personnel.

– Vous faites tout pour me donner le sentiment qu’on tient à me revoir.

– Personne ne tient à vous revoir, précisa la Voix. Mais, moi, j’ai besoin de vous »

« – Vous êtes un type épouvantable, dit Jollo. Ce n’est vraiment pas la délicatesse qui vous étouffe. […]

– C’est parce que je fréquente les morts, Jollo, expliquai-je. Vous devriez faire comme moi, un de ces jours, au lieu de vous déguiser en commissaire et de lécher les culs et des timbres-poste. »

« Travailler à l’A14, c’est voir ce que personne ne voit jamais : la violence, le malheur et le désespoir, la distance incommensurable, dans l’esprit d’un être humain qui ne connait que la souffrance, entre ses rêves et sa mort »

« Dora, je ne sais jusqu’où je vais devoir avancer dans les ténèbres pour te découvrir, mais essaie de m’aider à te rejoindre, aide-moi à te retrouver je t’en prie, ne t’enfuis pas. De toutes tes forces, aide-moi »



Et pour en savoir plus c'est ci-dessous :
Lien : https://collectifpolar.fr/20..
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J'étais Dora Suarez

Bah pour une fois que je suis d'accord avec un bandeau. Non mais sérieux.



Le truc avec Robin Cook c'est que quand t'en as jamais lu, t'as un peu l'impression de débarquer dans un monde en disant "eh les gars ça vous dit quelque chose : le Parrain de Francis-je-sais-plus-quoi-Copp... Coppola ?".



Bref comme un puceau avec un flingue entre les mains qui voudrait montrer à la terre entière que toi aussi tu sais tirer.



N'empêche que. L'action se situe vers les débuts du sida à Londres. Le flic de Robin Cook est un chevalier blanc aux méthodes moins musclées qu'un Charles Bronson ayant décidé de faire Justicier dans la Nuit. Disons que, plutôt que de régler ses affaires à coups de fusil à pompe, son caractère et ses répliques à couper au couteau à beurre font mouche.



Encore une fois ici, c'est l'histoire qui prime. C'est d'une violence un peu dégueu, je pense que ça équivaut à quand t'as 10/11 ans, que t'as réussi à péta Sev3n au vidéoclub pour faire le chaud mais que tu te retrouves avec une flaque de pisse au pied du canapé. C'est sombre bordel, tellement sombre et cru.



Pour faire face au chevalier blanc (intègre, avec des principes, genre le flic pur tu vois ?) on avait besoin de son antichrist, à savoir un mec complètement fêlé qui se martyrise le zob à cause de son impuissance et qui détruit des nanas à coups de hâche parce que quand t'es serial killer ta seule façon de prouver ton amour c'est de voir du bon gros rouge couler.



Anyways, dans cette Angleterre de la fin des années 80, on se laisse très vite prendre par ce roman qui vous niquera certainement la chair à coté des ongles, votre paquet de clopes avec une ou deux pensées un peu cauchemardesques en bonus.



Si David Peace le dit c'est que c'est bon vous pouvez y aller, la traduction se défend tellement bien que pendant un moment j'ai cru que Robin Cook avait écrit en français t'sais.



Donc tu peux y aller canard, c'est pas grave de rattraper le retard (surtout en polar).



(on devrait me payer à la rime foireuse une fois pour voir, juste par insolence)


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J'étais Dora Suarez

La scène d’ouverture ne perd pas de temps, nous sommes plongés au cœur même du crime dès les premières phrases. La violence, la haine et la vulgarité du tueur. C’est avec son point de vue que nous découvrons l’écriture de l’auteur. Mais si c’est bien le criminel qui ouvre le bal, la suite du récit sera dirigée par l’inspecteur chargé de l’enquête. Et là, mon intérêt s’est amoindri au fil des pages. Les flics sont bourrus, un tantinet clichés. Et malheureusement, je n’ai pas réussi a éprouver de l’affection pour, ne serait-ce qu’un seul des personnages, même pas cette pauvre Dora. Ceci à cause d'une écriture que j’ai trouvé froide... J'aurais essayé !
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Comment vivent les morts

Un sergent de Londres, narrateur du roman, est envoyé en province pour élucider la disparition d'une chanteuse, épouse d'un vieux médecin radié de l'ordre. Le personnage au passé lourd enquête de façon très inhabituelle et se heurte constamment aux conventions de la procédure. Il est lui-même un franc-tireur qui entend mener son enquête seul et fait souvent fi des instances supérieures. Il s'oppose aussi bien à la méfiance des gens de la province - ici Thornhill - qu'à ses collègues souvent incompétents, corrompus ou peu humains. Les dialogues taillés au cordeau sont des moments d'une rare truculence notamment lorsque le sergent narrateur se coltine avec les flics de base peu respectueux des personnes ou le policier corrompu de la localité ou encore les jeunes officiers sûrs d'eux.

Il y est question de cryogénie, d'amour éternel et les longues méditations du personnage narrateur sont empreintes d'un pessimisme noir d'où ressort une ligne de conduite qu'il faut bien se fixer. Sa philosophie flirte avec un anarchisme de bon aloi issu d'un cynisme créé par la société elle-même.

Un polar de bonne facture dont la découverte des tenants et aboutissants importe moins que le point de vue d'un policier qui prend des distances avec son métier.

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J'étais Dora Suarez

Parce qu'il m'a fait passer par toute une gamme d'émotions, ce livre est surement efficace. Est-ce que je l'ai apprécié pour autant? Par moments oui et par d'autres non, je l'ai détesté royalement. D'entrée de jeu l'auteur nous fait partager l'enthousiasme morbide du tueur pendant son premier meurtre avec ses gestes sadiques sur lesquels il s'épanche longuement, crument, de façon très détaillée avec l'intention évidente de choquer; ok on en a vu d'autres, la surenchère écœure un peu mais ça peut aller. Quand il nous livre ici et là, par le biais du journal de Dora ou via les pensées l'enquêteur anonyme, des réflexions sur la condition humaine, sur les classes sociales, sur le fonctionnement de la psyché, il m'épate carrément et dépasse de loin ce que l'on peut attendre d'un polar, même des meilleurs. Par contre toutes les scènes mettant en vedette les flics au poste de police, ici nommé l'Usine, m'ont irrité au plus point tellement ces personnages cabotinent à tour de bras, bafouent toute notion de loi ou de justice, intimident et menacent les suspects au point où on croirait assister à une messe des Hell's Angels. Bref je n'ai pas tellement aimé malgré des éclairs de génie ici et là.

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La rue obscène

Dans ce roman, écrit en 1971, Robin Cook II (le scandaleux britannique, auteur de roman policiers, mais pas seulement), décrit une aristocratie sur le déclin aux moeurs dépravées, qui affronte la PAP, mouvement de protestation en faveur de la propreté morale.



Dans cette "Rue Obscène", au coeur de Soho, un homme d'affaires intrépide et dénué de tout scrupule, ancien d'Eton, a créé un lupanar spécialisé dans le sado-masochisme. A sa tête, le rejeton d'une grande famille désargentée, et dernier du nom.



Lord Eylau, (Hello, formule creuse s'il en est), en parfait gentleman qu'il est par la naissance mais aussi par l'esprit, se laisse donc tenter malgré lui par Viper (le bien-nommé) pour diriger La Maison des Fantasmes, dans laquelle il incarnera le personnage de Louis XVI. On pourrait être censuré à moins!



Roman loufoque et satirique, genre qui rendit célèbre plus tard Jonathan Coe (Testament à l'anglaise date de 1991), La rue Obscène (The Tenants of Dirt Street) , ne semble pas avoir laissé pour les critiques d'autres traces que le résumé de la quatrième de couverture.



Clairement, le livre a dû choquer l'Angleterre pudibonde. Accepter "Soho" est une chose, mais une Maison des Fantasmes, même dans un roman, voilà une chose apparemment impossible au royaume de sa Majesté, même si Mai 68 soit par là.



La couverture a une frappante ressemblance avec "L'Absinthe" de Degas. Quand on y pense, comme les moeurs étaient plus libres alors!



Faut-il voir dans ce roman "déjanté", dont le pasteur M. Aynsham (ain't a sham? Sincère?), homme profondément naïf et finalement touchant, n'est pas la moindre figure, une dénonciation sérieuse de l'hypocrisie sociale? Comme pour toute satire, je dirais que oui. Sauf que celle-ci tient plus de Molière ou de Fielding.



Quitte à me répéter, je continue à penser qu'il est étrange de ne rien trouver sur internet sur La Rue Obscène. Autant pour les "on trouve tout sur internet!
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Quand se lève le brouillard rouge



Pour une fois, étant donné la confusion fréquente, en France tout du moins, entre les deux Robin Cook, tous deux auteurs de romans policiers, je me permets de citer wikipedia qui vous montrera à quel drôle de loustic nous avons à faire, s'agissant du Robin Cook britannique. J'avais lu précédemment "Cauchemar" et en personne non avertie, j'avais pensé à un seul unique auteur, qui curieusement, sortait de son rôle habituel de spécialiste du polar médical qui ne présente pas grand intérêt, en ce qui me concern).



Voici donc un extrait de wiki :



"Il passe les années 1950 successivement à Paris au Beat Hotel (où il côtoie William Burroughs et Allen Ginsberg et découvre l’œuvre de Jean-Paul Sartre) et danse dans les boîtes de la Rive gauche, à New York, où il se marie, enseigne l'italien et monte un trafic de tableaux vers Amsterdam, et en Espagne, où il séjourne en prison pour ses propos sur le général Francisco Franco dans un bar et est trafiquant de voiture2.



En 1960, il rentre à Londres, où il accepte d'être un prête-nom pour Charlie Da Silva, un proche collaborateur des jumeaux Kray. Interrogé par la police néerlandaise à propos d'une escroquerie d'assurances liée au vol supposé d'une toile de Rembrandt, il prétend avoir définitivement renoncé à son passé de criminel en faveur d'une nouvelle vie d'écrivain. Il est aussi reporter pendant la guerre d'Algérie, chroniqueur mondain pour l'Evening Standard, taxi de nuit à Londres et viticulteur en Italie.



Signé Robin Cook, son premier roman, intitulé Crème anglaise (The Crust on its Uppers, 1962), le récit sans concessions d'une descente aux enfers délibérée d'un homme dans le milieu des truands londoniens, obtient à sa publication un succès de scandale immédiat. Suivront des romans de plus en plus noirs et d'un réalisme sordide quasi documentaire, notamment Comment vivent les morts (How The Dead Live, 1986) ; Cauchemar dans la rue (Nightmare In The Street, 1988) ; J'étais Dora Suarez (I Was Dora Suarez, 1990) et Quand se lève le brouillard rouge (Not Till the Red Fog Rises, 1994)



À cause de l'écrivain de polars médicaux Robin Cook, il doit adopter le pseudonyme de Derek Raymond pour le marché anglo-saxon. En France, il continue d'être édité sous son vrai nom, ce qui cause quelque confusion avec son homonyme.



Après avoir bourlingué de par le monde, s'être installé en France, dans un village de l'Aveyron2, en 19743, et avoir exercé toute sorte de petits boulots4, il est décédé à son domicile à Kensal Green, dans le nord-ouest de Londres, le 30 juillet 1994".



Un de ces merveilleux énergumènes comme la Grande Bretagne n'en fait plus, un drôle de gus, ou de Gust, tel le héros de "Quand se lève le brouillard rouge", personnage au coeur tendre, dur prêt à tout et en particulier à la vengeance.







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J'étais Dora Suarez

Quand on ne sait pas quoi choisir dans sa bibliothèque autant miser sur une valeur sûre.

Il est dit que tout véritable amateur de romans noirs et de polars se doit d’avoir lu J’étais Dora Suarez de Robin Cook.

J’ai donc voulu vérifier si ce roman qui a un peu plus de trente ans était toujours à classer au rang des chefs d’œuvre du genre.

Commençons par l’histoire. Ce n’est pas forcément là que nous trouvons ce qui fait la force de ce roman. Un double meurtre sauvage, une jeune femme, Dora, et sa logeuse de quatre-vingt-six ans sont retrouvées dans leur appartement, l’une mutilée à coup de hache et l’autre la nuque brisée quand elle a été violemment projetée contre une horloge. Dans le même temps, un malfrat est lui aussi assassiné dans son appartement. Les deux flics chargés des deux affaires vont travailler ensemble, persuadés que leurs deux dossiers n’en font qu’un. Ça, c’est l’histoire en surface, une trame classique.

Continuons par les personnages et là ça commence à devenir intéressant. Nous avons un flic qui restera anonyme jusqu’à la fin. C’est un flic qui souffre de la perte d’un enfant, c’est un peu cliché mais, finalement, on aime ces flics écorchés par la vie. Quand il découvre les corps de Dora et de la vieille madame Carstairs, il devient obsédé par cette affaire et plus encore par Dora, cette jeune femme si belle mais qui a enduré les pires souffrances, d’une mort affreuse, mais surtout d’une maladie qui faisait alors des ravages.

Nous avons l’assassin dans la peau duquel nous glisse parfois Robin Cook, un psychopathe déséquilibré (oui on frise le pléonasme, je sais).

Et nous avons surtout Dora. Elle n’est à aucun moment vivante dans ce roman et pourtant elle est là à chaque page. Elle pénètre ce flic complètement hors des clous au travers de son « journal », retrouvé sur les lieux du crime. C’est un carnet où elle parle de ses souffrances, de sa maladie et projette de se suicider le jour même de son assassinat.

Le plus marquant dans ce roman c’est évidemment le style et la façon dont l’auteur passe de ce flic au tueur et à ses sensations et pulsions meurtrières puis dans les plus profondes pensées de Dora écrites dans son journal. C’est violent, rugueux et extrêmement sombre.

Le seul bémol que je pourrais trouver c’est le contexte. Ce roman n’a certainement pas eu la même portée sur des lecteurs de 1990 que sur des lecteurs de moins de trente ans en 2020. Le Sida est apparu dans les années 80 et a été bien plus mortel, rappelons-le, que le virus que nous subissons aujourd’hui. En 1990, il n’y avait encore aucun remède tel que la trithérapie pour permettre aux séropositifs de survivre bien longtemps. C’est une mort lente et douloureuse, sans compter de l’aspect « honteux » que les politiciens et les médias de l’époque lui ont donné injustement. En 1990, le Sida faisait extrêmement peur. Donc, lors de la sortie de ce roman, la portée en était complètement différente et il faut se remettre dans ce contexte pour en apprécier toute la force. J’étais ado en 1990, je me souviens de ces années-là où on terrorisait tous les ados en montrant du doigts les homosexuels et les drogués comme s’ils étaient responsables alors qu’ils étaient les premières victimes. Robin Cook décrit la souffrance de cette maladie, physiquement, mais aussi psychiquement en rendant toute relation physique impossible sous peine de donner la mort à son partenaire tout en se sachant condamné.

C’est un roman très puissant et, effectivement, un incontournable du genre.


Lien : http://www.evadez-moi.com/ar..
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J'étais Dora Suarez

Glauque à souhaits, noir et dérangeant, un polar dans la veine d'Ellroy avec un anti héros désespéré mais acharné qui veut sauver le monde. Une histoire d'amour virtuelle entre le policier et la victime qu'il n'a pas connu mais dont il essaie de retracer le parcours.
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Les mois d'avril sont meurtriers

L'essence même du roman noir. Pas question ici d'une enquête à énigmes et aux multiples rebondissements. En réalité, le coupable est trouvé dés les premières pages. Il ne s'agit donc pas de "qui" mais plutôt "pourquoi", et ce pourquoi est l'occasion d'une plongée dans la noirceur de notre monde qui ne laisse pas beaucoup de place à l'optimisme.
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Vices privés, vertus publiques

Ce livre m'a paru être beaucoup plus une étude de mœurs qu'un roman policier, ce qui n'ôte rien à sa qualité intrinsèque. Car le portrait intimiste d'une certaine aristocratie en déroute qui en ressort est frappant, brutalement dessiné, chirurgicalement écrit. On y décortique les errements d'une famille, au sens large, de nobles plus ou moins désargentés qui se cherchent une raison d'exister Que les refuges illusoires se nomment cynisme, dévergondage, aveuglement volontaire ou militantisme, ils sont tous illustrés avec brio, sans complaisance ni fioritures. Cette lecture m'a d'abord étonné, puis désorienté, pour finalement me plaire par son coté subtil et convaincant.
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Les mois d'avril sont meurtriers

Pour sa sombre farce d’avril, Robin Cook l’Anglais, celui de Dora Suarez et du réalisme noir, nous sert un ragoût humain sur fond d’espionnage vaseux à la sauce british. Le plat, qui peut de prime abord sembler alléchant pour les amateurs de romans noirs et de gélatine, laisse comme un arrière-goût amer au fond de la gorge. Ça gratte, ça racle, c’est un peu désagréable et un brin décevant.

En guise de mise en bouche, il y a un cadavre bouilli, mijoté et découpé en tronçons répartis dans quatre sacs en plastique joliment scellés. L’affaire échoue au service des homicides non élucidés, et atterrit sur le bureau 205 de l’Usine ; bureau occupé par un flic anonyme au caractère plutôt bien trempé, à qui il faut peu de temps pour comprendre que ce crime est l’affaire d’un professionnel. Notre limier frondeur identifie rapidement l’auteur de la tambouille infernale : les dés d’une chasse à l’homme sous tension sont ainsi jetés, et c’est par le prisme de ce jeu du chat et de la souris macabre que le narrateur se révèle, esquissant en clair-obscur les contours de ses fêlures.

L’enquêteur sans nom est en effet un pur produit de littérature noire, qui s’accroche à ses clichés comme une moule à son rocher : hanté par le souvenir de sa fille, il est rongé par la violence et la folie omniprésentes. Il est le cavalier solitaire assoiffé de justice, l’éternel rebelle qui refuse la compromission et les institutions tangentes ; il est l’homme au passé douloureux qui méprise sa hiérarchie opportuniste en s’insurgeant contre l’autoritarisme des années Thatcher. Robin Cook met le doigt sur une intrigue savoureuse, avant d’expédier sa traque et de se perdre dans les méandres de l’espionnage de façon presque grotesque. Le suspense retombe comme une baudruche, et la lecture de la deuxième moitié de l’ouvrage s’apparente dangereusement à une corvée. Sensation ingrate d’ailleurs alimentée par une traduction édulcorée et policée signée Jean-Bernard Piat, qui prive ce roman de croustillant et d’acide ; de goût en somme.

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J'étais Dora Suarez

S'il y a bien, dans ce roman, une trinité, celle-ci n'est pas sainte. Au centre se trouve Dora Suarez ; à ses côtés, le flic et le tueur. La victime, son ange gardien, son démon. Présenté par son auteur comme un roman en deuil, J'étais Dora Suarez décline en vérité le roman noir sous le jour d'une humanité vue au travers du prisme de la religiosité chrétienne. Dans cette ambiance glauque à souhait, le lecteur ne surnage que grâce à une narration rythmée par les changements de registre et par une résolution de l'affaire aussi rapide que l'est la descente aux enfers que représente ce roman.



Sans en faire la liste, il paraît évident que J'étais Dora Suarez possède tous les codes du roman noir : un crime pour prétexte, une plongée dans les bas-fonds d'une capitale britannique pourtant très brillante, l'exploration d'une faune menaçante et attirante à la fois et des thèmes tabous comme la maladie, la folie et la sexualité. Notre guide est un policier que son unité, l'A14, rappelle auprès d'elle après avoir écarté ledit flic pour mauvais comportements dans le passé. Exigeant dans son travail, il assume d'avoir renoncé aux avancements que la carrière, d'habitude, procure, pour continuer à danser avec le Mal et, surtout, redonner dignité aux victimes. Il y a en lui quelque chose du justicier qui, ne se contentant pas d'appliquer ou de faire respecter la loi, a fait profondément sienne la devise de protéger les plus faibles. C'est, on le verra, une façon d'avancer lui aussi vers la rédemption et vers son humanité perdue. Peu de bonnes gens dans ce Londres mal famé : hormis l'inspecteur Stevenson, avec lequel le narrateur est amené à travailler, il y a peu à attendre des hommes, y compris des flics eux-mêmes, que la seule crainte de la vague médiatique fait agir pour retrouver le meurtrier de Dora Suarez. Quant à la pourriture humaine, Robin Cook en décrit ici plusieurs couches, de la plus superficielle (la recherche obstinée du gain) jusqu'à la plus profonde, la plus terrifiante (le plaisir dans la mise à mort). Gardons-nous du qualificatif de monstres : ce ne sont là que des hommes.



Un roman en deuil, annonce le titre du livre. Il est vrai que, pour le narrateur, Dora Suarez n'est pas qu'une victime. C'est un symbole tout entier des victimes de ce monde, et c'est pour cela que le narrateur développe pour elle un sentiment presque amoureux. Massacrée à la hache, outragée dans son état de cadavre par le tueur, celui-ci n'a pas enlevé que la vie à Dora Suarez : il lui a aussi pris sa liberté, car Dora était malade du SIDA, en phase terminale, et voulait abréger sa vie le soir où elle fut tuée. À travers elle, c'est aussi sa propre fille, tuée par son ex compagne, que le narrateur veut rétroactivement protéger et aimer : l'enquête devient alors chemin de rédemption.



La thématique religieuse semble particulièrement prégnante dans ce roman, et ce de plusieurs façons. Le premier thème est celui de la rédemption, bien-sûr, que le narrateur cherche à offrir à Dora en lui redonnant sa dignité - en arrêtant le coupable et en la réhabilitant en tant que femme - et à retrouver lui-même. D'autre part, la thématique sexuelle - notamment à travers les activités glauques du Parallel, un club privé et sélect sur la piste duquel seront mis les inspecteurs grâce au meurtre de Félix Roatta, copropriétaire du club et assassiné la même nuit que Dora - rappelle celle du pêché originel. Le Mal, dans le roman, vient du sexe, qui cause les maladies - ainsi le SIDA - et pousse aussi aux perversions les plus diverses - on apprendra le rôle joué par des rats dans ce club - dont Dora, comme d'autres femmes et en cette qualité, justement, est victime. C'est dans les muqueuses tant désirées qu'apparaît, sur le cadavre de Dora, les stigmates les plus terribles de la maladie. Quant au tueur, sa folie à des origines sexuelles bien établies, car tout viril qu'il soit, l'homme n'est pas toujours maître de l'ensemble de son anatomie. C'est pour punir son membre que le tueur s'inflige d'affreuses punitions ; c'est pour être admiré dans sa plus cruelle nudité qu'il tue et mutile ses victimes, jusqu'à les décapiter.



Enfin, il est difficile de ne pas voir, dans les dernières pages, l'acte de Stevenson comme celui d'un Judas, qui trahit mais révèle, ce faisant, l'essence même du combat et de la vie du narrateur, c'est-à-dire la quête d'une justice pas tant humaine qu'idéelle, absolue.



Pour autant, le narrateur n'est pas un Christ perdu à Londres. Il ne veut pas sauver l'humanité - à part en tant qu'idée - mais plutôt les hommes et les femmes en tant qu'individus, les faibles que la société broie sans vergogne. Dans ce monde de souffrance et de mort, certaines disparitions sont plus douloureuses que d'autres : ainsi celle de Dora Suarez pèse infiniment plus que celle de Félix Roatta, dont la disparition ne représente qu'un indice utile pour la résolution de l'enquête. Si Dora est si précieuse, c'est peut-être qu'elle n'est qu'une idée, justement, elle qui fut trahie par son corps et dont le corps a été massacré ; elle existe, pour le narrateur, à travers les mots de son journal intime où elle exprime tantôt sa souffrance, tantôt son soulagement d'avoir rencontré Mme Carstairs qui l'héberge la nuit du meurtre, tantôt son amour pour une âme encore plus en peine que la sienne : celle de son futur meurtrier. N'est-ce pas elle, au final, la figure christique, la grâce faite homme - ou plutôt femme -, le corps souffrant, l'âme dévouée aux autres ?



Il faudrait alors reconnaître que, sans doute, le narrateur a raison de vouloir sauver sinon la vie, du moins l'honneur de Dora Suarez. Ce monde est pourri, déshumanisé, et même ceux qui sont censés faire appliquer la loi travaillent dans un endroit qu'ils dénomment eux-mêmes l'Usine. Les hommes et les femmes sont, dans les clubs sordides et dans les commissariats, objectivés : une telle satisfait les fantasmes les plus tordus, tel autre devient un sac de frappe dans une salle d'interrogatoire (c'est d'ailleurs un point faible narratif notoire, lorsque cent pages de dialogues passent en menace de mauvais traitement ou de peines de prison pour obtenir des aveux). Si la tâche paraît immense - combattre le Mal, glorifier l'humanité -, au moins n'est-elle pas vaine. Pour combattre le Mal, il faut bien le connaître, dit le narrateur ; Robin Cook, en ce cas, est un remarquable ambassadeur.
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