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Critiques de William S. Burroughs (155)
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Le festin nu

William Burroughs est le cliché même de l'auteur underground. Il a eu une vie mouvementée placée sous le signe de la drogue, ses écrits sont subversifs et sont longtemps restés censurés, avant d'être redécouvert par des marginaux plus jeunes que lui qui lui ont voué un véritable culte et lui ont permis d'avoir, enfin, de la reconnaissance.

Et parmi les adorateurs de Burroughs, on trouve quand même Patti Smith, David Bowie et Frank Zappa. Et n'en soyez pas surtout, aussi. Ces trois artistes se sont toujours placés en dehors du système pour faire ce qu'ils avaient envie de faire.



Sachant en plus que le Festin Nu est rapidement cité quand on parle des classiques de la littérature américaine, il n'en fallait pas plus pour que je me décide à le lire. Coup de chance, je suis tombé sur l'édition Imaginaire Gallimard, que je recommande chaudement pour qui voudrait lire ce lire. Cette édition ne s'embarrasse pas d'introduction inutile -à part celle de l'auteur, déjà présente dans l'édition d'origine-, et contient en plus le DVD de l'adaptation du livre par Cronenberg ! Un excellent film, par ailleurs, qui diffère assez du livre mais permet, paradoxalement, de mieux le comprendre.



On ne peut pas décrire le style du Festin Nu, on peut tout au juste le comparer assez maladroitement à quelque chose qui serait obscène, brouillon, sale, répugnant, une sorte de Céline pornographique sans queue ni tête, un cauchemar de mots.

C'est typiquement le livre qu'on aime ou qu'on déteste. Ça passe ou ça casse ! Alors oui, c'est vrai, le style est spécial, voir même novateur, puisqu'il a depuis été bien souvent copié. Oui, d'accord, le Festin Nu n'a pas à faire sens puisqu'il illustre la perte de soi et de la réalité dans la drogue...Mais qui a dit que ce qui était différent était bien ?



Mon opinion sur ce livre n'est pas positive, vous pouvez vous en douter rien qu'en voyant la note. Cette lecture a été une des plus difficiles et désagréable de ma vie, mais elle n'a pas été aussi cathartique qu'avait pu l'être Voyage au bout de la nuit, qui frappe fort dans le genre désagréable et malsain.

Je vous conseillerais plutôt de regarder le film, mais ne vous fiez pas à mon avis pour décider si vous voulez lire ce livre. Comme je l'ai écrit plus haut, soit on aime, soit on déteste, c'est tout à chacun de se faire son opinion dessus. Néanmoins, soyez prévenu que le Festin Nu n'est pas une lecture facile. Si vous voulez découvrir Burroughs, commencez plutôt par Junkie, plus traditionnel.

A bon liseur...
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Et les hippopotames ont bouilli vifs dans l..

Quand je réalise ma passion pour les auteurs (et toute la période) qui touche à la « Beat Generation », je suis étonnée de n’avoir découvert et lu ce roman que très récemment. Ici ce n’est pas un nom qui est mis en avant, mais deux auteurs dont le talent et les styles se complètent pour nous donner ce texte.



Ce roman est une biographie d’un des éléments déclencheurs dans la « Beat Generation » : le meurtre de Kammerer par Lucien Carr. Ce dernier ami de Allen Ginsberg a rencontré toute la bande à l’université. Avide de connaissances et de libertés, Lucien Carr fut un personnage inspirant et novateur pour tout le groupe qui était entrain de se créer. Même si ce dernier ne fut jamais un artiste, il permit l’étincelle qui leur fallait pour que chacun se mettent à créer leurs œuvres.



Dans ce roman à quatre mains, on apprécie les différents genres qui se complètent. Chacun y décrit sa version de l’histoire et son implication autant dans le meurtre en lui-même, comme dans tout ce qui a pu faire en sorte qu’il en arrive là. Comme à chacun de ces romans, c’est la soif d’indépendance qui me touche en premier. Dans une Amérique qu’on a du mal à imaginer, d’autant plus à l’heure actuelle des choses, j’aime me plonger dans cette autre vie. Un monde où tout semblait encore possible, sans jugements, sans barrière et sans faux semblants. On ne vivait que la vie que l’on voulait vivre. Bien sûr, cela ne peut être possible, ni aujourd’hui, ni même à l’époque, mais c’est un état d’esprit qui permet cela. Une façon d’être qui aujourd’hui semble bien loin.



Dans ce roman complet et agréable, on nous présente les débuts d’un genre à part. Si particulier, la « Beat Generation » permet une ouverture sur le monde, sur les expériences et sur toutes formes de joie. Lorsque les voyages et autres envies n’étaient encore qu’à l’étape de projet, les hommes décris dans ce roman nous touchent. On comprend qu’ils ne sont que les auteurs de demain, mais on apprécie de les découvrir ici dans une autre forme d’intimité. Ce roman nous plonge dans un monde autre où l’argent n’arrêtait pas les hommes. Tout est possible alors ouvrons nous à toutes les possibilités !
Lien : https://charlitdeslivres.wor..
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Le porte-lame

Le Porte-lame c'est le nom donné à celui qui ravitaille en stocks de toutes sortes, les médecins et chirurgiens qui exercent clandestinement dans le New-york qu'avait anticipé William S. Burroughs.

Un New-York qui est devenu en 1984, suite aux émeutes pour la sécurité sociale, une ville interlope, moitié underground, moitié ghetto, et où dans les égouts rôdent tous les animaux prédateurs relâchés des zoos... Dans ce monde futur, la médecine n'est plus légale. Ceux qui veulent se faire soigner doivent passer par des réseaux clandestins, approvisionnés par ces Portes-lames, jeunes adolescents plein de vie et qui bravent tous les dangers comme des jeunes dieux qui s'amusent des basses turpitudes humaines. Et les "minorités", devenues majoritaires, sont gavées de drogues par le gouvernement, et parquées dans des ghettos "nature"...

Ce livre, livret plutôt, est écrit comme un synopsis de film. Car c'est un film, qu'aurait voulu faire Burroughs, de son Porte-Lame et son chaos d'idées de génie qui y règne. Alors il se le rêve son film, et c'est barré...

C'est un concentré de tous les thèmes chers au grand Bill : mégalopole en décrépitude, drogues gouvernementales, légales et illégales, vaines luttes intestines et décadence, sociétés undergrounds, paumés, adolescents magnifiques et insolents de vie face aux adultes décrépis et paranoïaques...

Une curiosité, un O.L.N.I. - Objet littéraire non identifié...
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Et les hippopotames ont bouilli vifs dans l..

Écrit à 4 mains en 1944, perdu, retrouvé et finalement publié en 2008, ce cours roman signe la naissance de la beat generation.

Entre désœuvrement et l’ennui les personnages errent d’un bar à un pub à une chambre, un musée avec des velléités pour essayer de s’en sortir, vite réfrénées.

Un excellent moment de lecture
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Les garçons sauvages

Il faudrait commencer par lire les trois premières parties non pas comme des chapitres mais comme des nouvelles différentes avec peu de choses en commun, sinon dans les titres : « Tio mate sourit », « Le chef sourit », « Le vieux Margis sourit ». Ou alors comme un work in progress, la recherche d’un scénario. Et puis, c’est comme si Burroughs avait trouvé l’inspiration ou des personnages intéressants ou quelque chose d’autre dans « Le vieux Margis sourit ». Tout en continuant à tâtonner, il façonne une sorte de roman, très décousu tout de même ; il s’attarde sur les personnages, en particulier Audrey, « un jeune garçon pâle et maigre au visage constellé de blessures spirituelles purulentes ».

Pourtant les « chapitres » continuent à raconter des histoires partiellement différentes sur un fond commun d’images hétéroclites, extravagantes, fantastiques, qui sont comme des souvenirs imprécis. S’il y a une logique dans tout cela, elle est éclatée. S’il y a un sens c’est peut-être la volonté d’en retrouver un, de reconstituer quelque chose à partir de ces images mélangées. Car on se dirige, dans les cent ou cinquante dernières pages du livre, vers quelque chose qui ressemble à un roman d’anticipation, déjà entrevue. Mais avant ça, on n’est nulle part, un peu au Maroc, un peu au Mexique, un peu aux Etats-Unis, un peu dans la jungle amazonienne. On est en 1920 ou en 1988, ou à l’époque des mayas.

Les images de sexe entre jeunes adolescents sont omniprésentes. Des chapitres entiers sont des narrations érotiques assez traditionnelles. Les scènes sont parfois triviales comme un film porno et parfois elles deviennent métaphoriques, la sexualité est alors sublimée. Beaucoup de violence et de drogues aussi. L’histoire oppose, à la fin des années 80 (le livre a été écrit en 69), les riches qui vivent reclus et organisent des orgies de nourritures, protégés par la police, aux garçons sauvages qui, eux, vivent dans une perpétuelle orgie sexuelle (puisqu’il existe des films gays, on peut dire que « Les garçons sauvages » est un livre gay). Des tribus nomades redevenues presque animales.

C’est comme un film de science-fiction pornographique expérimental et assez poétique, à vrai dire. Burroughs a forgé des images surréalistes appliquées à l’époque hippie. Mais ce n’est pas du tout l’image d’Epinal des hippies peace and love, gentils et inconséquents. Il n’a pas effacé la violence et la part d’ombre de l’humanité, bien au contraire, la folie et la bestialité rôdent dans chaque page.
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Le festin nu

Ce livre a révélé Burroughs comme le maître de la génération beat. L'auteur lui-même déclare son livre "brutal, obscène, répugnant." Il y écrit le monde de la drogue en homme qui subit son esclavage. De cet authentique voyage au bout de la drogue, il rapporte des visions. Il se prétend "simple appareil enregistreur", écrivant sous l'influence de la drogue, selon la méthode surréaliste de l'écriture automatique. Il rapporte ses hallucinations sans aucun plan. Ces fantasmes sont pour la plupart de nature sexuelle et sado-masochistes : viols d'adolescents, pendaisons, tortures. Tout cela rapporté avec le détachement froid d'une sorte de réalisme visionnaire.
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Le festin nu

Livre très étrange, aussi sinistre que grotesque, extrêmement particulier, loufoque, presque malade : maladie du camé, maladie du fou – les deux se conjuguent un peu –, on ne sait plus trop, plus trop où donner de la tête, comment lire le livre, et l’on croit soi-même devenir un foldingue en lisant ces scènes successives où règne une odeur constante de sperme séché, avec des silhouettes d’orgies homosexuelles extravagantes, ou des chimères en tout genre dévêtues, aliénées, torturées, nymphomanes… et tout cela dans un univers dystopique informe, qui paraît tout dévorer, tout pénétrer – le sens sexuel est de bon sens –, les personnages, les lieux… Tout est liquide, liquéfié jusqu’à la moelle ; finalement, tout n’est que substance s’achevant par où elle a commencé : elle redevient un éjaculat, de la semence. Le Festin nu est truculent dans sa manière d’aborder l’érotisme – si cru que ça peut gêner parfois –, mais cela donne des scènes qui poussent au rire, tant elles sont à force répétitives et vraiment lunaires – certes, c’est un humour particulier, absurde du genre noir et humide. Mais ce que j’ai aimé, et ce qui m’a fait tenir jusqu’à la dernière page – le premier chapitre est passablement ennuyeux –, passant au-delà de la débauche éhontée parfois assommante car cyclique – un tel vient voir un minet et finit par le sodomiser, rebelote – et de la cohérence narrative décousue, d’un univers pas facile à suivre, c’est le style de William S. Burroughs : il est pétillant, bourré de pépites, éclatant, un panache sans pareil, qui m’a rappelé à plusieurs reprises ma propre manière d’écrire – avec un retour critique plutôt salvateur, de fait. Je ne sais si c’est un défaut dû à la traduction en particulier – ou mon côté ultra maniaque en la matière –, mais plusieurs termes reviennent de manière incessante, ce qui engendre un côté parfois irritable. Aussi coloré soit le style de Burroughs, délire verbal jouissif, il est fluide et très facile à lire ; tous ces termes issus de l’argot, parfois techniques, sans qu’on y comprenne grand-chose, sont de petites sucreries pour tout ceux qui aiment acquérir du vocabulaire ou apprendre des mots rares – voire ici très rares, et je suis sûr qu’il y a même pas mal de néologismes imputables à l’auteur.
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Lettres

Cher Bill ✒



✉ J'ai été le témoin désabusé de tes amours et de tes excès. De ce festin nu bouffé à plein nez, baffré, dévoré.

Je t'ai suivi, cahin-caha.

De tes amitiés beat et béates, Ginsberg et Kerouac en tête de file, j'ai lu les lettres échangées, je me suis même permis d'y ajouter ma patte, ma touche, ma poudre aux yeux.



... Que tu te racontes de Mexico, Lima ou Tanger, je suis là.

Tu me donneras mille noms, parfois tu me tairas, tu me suspendras à trois points, mais on sait toi et moi que j'ai été l'inaliénable, celle à qui on ne renonce pas.



🌠 Tu me dois quelques trafics.

Quelques plants sur la comète.

Tu me dois Junkie.

Le Festin nu aussi.

Tu me dois tout.



✒ Cher Bill,

Pas une ligne qui ne parle de moi.

Pas de rails, métro, stylo, dodo, qui ne mènent à moi.

J'ai voyagé avec toi, de veines en déveines.

Du processus d'ecriture dont je ne saurais être exclue.

Raconte, Bill.

Raconte qui nous sommes. Toi et tes lettres qui sont "peut-être le véritable roman". Moi la muse de tes récits hallucinés...



🤍 Quel bonheur de nous retrouver ! De rire à nouveau de tes bons mots, de tes aventures rocambolesques dont je suis parfois l'héroïne.



Amitiés

Ta stupéfiante



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Junky

Je suis passée à côté de ce récit.



Je suis bien consciente que Burroughs est une figure importante de la Beat Generation mais mon dieu les "pédés" balançaient à tout bout de champs, les tournures de phrase clairement révoltantes sur les Juifs, tout ce vocabulaire met clairement sorti par les yeux et cela m'a profondément énervée. Je sais aussi que c'est une oeuvre à replacer dans le contexte de l'époque et dans son courant littéraire mais là ça ne l'a tout simplement pas fait.



Du coup j'étais très détachée avec cette lecture et aucune émotion ne s'en ait dégagé. Les tourments et pensées d'un junky, une écriture brute. le voir se détruire devant nous. On voit à quel point cette addiction tue, à quel point ils veulent décrocher, et sitôt qu'ils ont réussi comment ils replongent, les astuces pour se shooter un max sans avoir les produits habituels, les magouilles des dealers, les fausses ordonnances, les centres de désintox.



On voit l'addiction à la drogue sous toutes ses coutures et les mécanismes psychologiques qui y sont liés.
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Junky

L’auteur nous détaille avec précision la vie quotidienne d’un camé, aussi bien son état physique que moral : « on ne décide pas d’être drogué. Un matin, on se réveille malade et on est drogué. ».

La dépendance, le sevrage sont racontés d’une façon tellement réelle que l’on ressent le vécu de l’auteur :« La came est une nécessité biologique quand vous êtes accoutumé ; c’est une bouche invisible. Quand vous injectez votre came, vous êtes content, comme quand vous venez de vous tapez un bon repas. Mais avec la coke, vous voulez vous repiquer dès que les effets s’estompent. », « La came inocule la mort et laisse le corps en état de perpétuelle alerte. ».

Un roman ou l’auteur se met à nu, un grand texte sur la vie d’un junky, sur l’obsession de la prochaine seringue, l’obsession de trouver un dealer, un médecin prêt à faire une ordonnance. Il dénonce aussi le gouvernement américain et la répression très dure faite à l'égard des toxicomanes. Une œuvre d'une force incroyable.

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Le festin nu

💉💉💉💉



Ce livre est tout bonnement un bordel enchevêtré & disparate sans nom ! Oubliez tout ce que vous avez lu, le festin nu c'est entrer dans un texte hors du commun dans lequel toutes les règles sont abolies.



Est-ce un récit, un roman, un essaie, un témoignage, de l'autofiction ? Je l'ignore, c'est juste un livre comme je n'ai jamais lu, dans lequel je me suis complètement abîmée ! Burroughs s'est défoncé, shooté, seringué comme personne, et il nous livre ici sans fioritures, l’univers dans lequel il a vécu. Un vrai voyage sensoriel comme j'ai rarement vécu dans la littérature !



« Un écrivain ne peut décrire qu’une seule chose : ce que ses sens perçoivent au moment où il écrit. Je ne suis qu’un appareil d’enregistrement. Je ne prétends imposer ni histoire ni intrigue ni scénario »



Très chaotique, drôle par moments, il s'agit d'une succession de scènes hallucinantes, sans grande logique, des fragments, des bribes de vie, tout droit issus de la tête d’un camé en plein trip. L'idéal serait de se laisser porter sans chercher à comprendre, il se savoure surtout pour la truculence des personnages & le vocabulaire châtié !

Incapable de mettre ses écrits en ordre, Burroughs dût faire appel à ses amis Ginsberg & Kerouac pour l’aider, d'ailleurs le titre sera donné par ce dernier ! Longtemps interdit pour cause de “pornographie” chacun se fera son avis, Sodome & Gomorrhe a côté, c'est le club Med. J'dis ça, J'dis rien, ça reste néanmoins un grand livre, de la bonne came, comme dirait l'écrivain un soir de shoot.

En somme une galerie continuellement renouvelée, c'est délirant, gore, malsain, visqueux, décapant, glauque, dément, magnifique, attachant, halluciné, sexuel, effrayant, magique, détonnant, sordide, foisonnant, grotesque, déroutant & gerbant !

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Le festin nu

Il est étonnant de constater à quel point il en faut peu pour étancher la soif des obsédés de la pornographie, des ricaneurs lubriques, des protecteurs de la morale publique. Du titre du chef-d'œuvre de Mr Burroughs, ils seront amenés à attendre quelque chose comme des amours illicites, une sorte de Laocoon phallique, et ils seront déçus. Ce qu'ils trouveront, en revanche, est un palimpseste d'obscénité si émétique qu'aucune casuistique ne pourra justifier une accusation d'inflammation et de corruption. Ceci, Dieu nous aide, n'est pas "Fanny Hill" ou "l'amant de Lady Chatterley". C'est une image de l'enfer, et l'enfer n'est pas corrompant. L'obscénité n'est pas l'œuvre de M. Burroughs : elle est là dans le monde extérieur. Nous sommes tous assis à sourire devant un repas épouvantable qu'il nous montre, et soudain surgit ce qu'il est: un repas cannibale. La viande au bout de chaque fourchette se révèle être les tripes et le sang de nos semblables. C'est une révélation qui ne plaira à personne et risque de couper quelques appétits, mais il faut la faire, même si peu ont le courage de la faire. M. Burroughs rejoint un petit groupe d'écrivains qui sont prêts à regarder l'enfer et à relater ce qu'ils y voient.



La vision de Burroughs est celle d'un homme qui a échappé à l'agonie de la toxicomanie et regarde l'enfer avec les yeux purifiés de l'artiste qui se souvient. Son introduction est autobiographique et clinique ; il joint un long article de "The British Journal of Addiction". Certains de ses lecteurs les plus charitables, trop faibles d'estomac pour entrer dans la création artistique, considéreront l'ensemble de l'œuvre comme une thèse terrible mais nécessaire sur la nature de la vie des damnés, un morceau de didactisme inhabituellement franc. Ils auront tort, puisque Burroughs démontre que son sujet ne peut s'exprimer qu'à travers la mise en forme statique (c'est-à-dire ni didactique ni pornographique) de l'imaginaire artistique.



Le naturalisme ne suffit pas ici, ni l'euphémisme ni le périphrastique. Il y a des vols que certains qualifieront avec désinvolture de surréalistes, des fantasmes de violence qui sont apparentés à ceux d'Auden mais qui ne servent pas la rébellion d'un simple écolier. Il y a des fugues qui tirent leurs thèmes du symbolisme quotidien de la rage - les processus du sexe et de l'excrétion, développés en perversion et coprophagie. La création de mondes nouveaux et horribles est aussi nécessaire à la vision de Burroughs qu'à celle de Dante. Il n'y a pas d'artifice qui me paraisse purement fantaisiste ou gratuit ; Je ne vois pas d'autre manière d'écrire un livre comme celui-ci.



Comme dans toute œuvre littéraire importante (et ce livre l'est), on finit par admirer l'art qui est capable de transmuter un sujet aussi terrible en prétexte à une sorte de joie. C'est le mystère de l'art qui nous permet de relire Swift encore et encore et d'en ressortir non pas bouleversé mais ravi. L'art de M. Burroughs est très individuel. Il a en son temps admiré à la fois Gertrude Stein et James Joyce, mais il a développé des techniques qui semblent trahir très peu leur influence. D'ailleurs, il admire Sterne et Jane Austen.

Son souci est avant tout l'art, et il est douteux que les cris d'indignation que son livre provoque puissent le troubler.

Un livre difficile, mais qui demande à être lu.


Lien : http://holophernes.over-blog..
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Le festin nu

C'est très bien, tout ça. À jeun, c'est assez pénible à lire. J'ai rien compris au bouquin. Ceci dit, fut-il un jour question d'y comprendre quoi que ce soit…



Allez, je mets trois étoiles pour garnir le blason du grand Burroughs. De ce qu'a pu pondre la beat generation, ce livre n'est pas mon favori. C'est bien indé, pré-punk, et tout ce que vous voudrez… mais une fois passée la hype autour de l'auteur, que reste-t-il? Ah oui, un grand film de Cronenberg. Allez, finalement, rien que pour ça, je valide.
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Le festin nu

Peut-être comprendre sous l'effet de la drogue est-ce le but de William Burroughs ?

Il a écrit ce livre drogué, puis façon l'on pioche par-ci par-là ce n'est pas grave..

Le festin nu demeure cependant un classique de la littérature américaine Beat Generation..

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La machine molle

Machine molle. Ecriture dure.
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Lettres du Yage

L'intelligence de William Burroughs transparaît à chaque page de ces lettres adressées d'Amérique du Sud à Allen Gingberg. Comme dans beaucoup de correspondances, il y a des passages totalement ennuyeux mais beaucoup d'autres pleins de malice, de cynisme et de poésie même si le style est couramment cru. Il ressort de ces pages une errance ou une fuite vers la drogue et à la recherche d'expériences sexuelles, mais très maîtrisée et avec toujours beaucoup de lucidité.
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Junky

Publié en 1952, Junky est le premier roman de William Burroughs, une des principales figures de la Beat Generation avec Jack kerouac et Allen Ginsberg.



Comme son titre l'indique, le roman évoque essentiellement et de manière trés décousue, les rapports du personnage principal, William Lee, avec la drogue. De New York au Mexique en passant par la Nouvelle Orléans, William Lee est pris dans le tourbillon de la drogue et ne cotoie pratiquement plus que des camés. Son quotidien n'est fait que de recherche d'argents, de drogues, d'ordonnances et de moyens pour échapper à la police.

Les années passent et se ressemblent : la came, la desintoxication, le manque et à nouveau la came.



William Burroughs, dans ce roman sans doute en grande partie autobiographique, parvient à décrire très précisément les sensations liées à la drogue et au manque.

Un roman interéssant et bouleversant.
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Junky

Ce livre porte bien son nom puisqu'il peut paraître décrire de manière très documentaire ce que l'auteur appelle "l'équation de la drogue", le cycle infernal qui s'installe dans la recherche du lâcher prise ultime.



D'une très belle plume, qui lui est si particulière, Burroughs réussit à retranscrire et à construire à nos esprits le système de pression/dépression incessante de la drogue. Et il retranscrit surtout merveilleusement le microcosme des paumés et des drogués d'une ville américaine en plein milieu des fifties !



Loin d'être un simple documentaire sur la drogue et la vie qu'elle impose comme certains semblent le dire, Burroughs ici nous donne l'occasion d'entrer en contact profondément avec tout ce qui justement se cache derrière ce monde crasseux de a drogue. C'est donc souvent bien plus profond qu'on ne le pense si on en reste pas sur une réaction épidermique dès lecture d'un des innombrables noms de drogues ou de raclures écumants les bas fonds d'un métro étrange !
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Le festin nu



"Le Festin nu"* n'est pas un livre qui se résume, c'est une expérience qui se vit. C'est un assemblage de textes violents, absurdes et surréalistes sans lien apparent entre eux; bref, un livre à mettre entre toutes les mains. Bien évidemment, les consommateurs et consommatrices des "pépites" à la mode risqueront l'étouffement, certains auront des urticaires et des remontées acides, quand d'autres, les yeux exorbités, crieront au scandale tout en frôlant la crise d'épilepsie. Quoi?? Ça se prétend écrivain?? On ose appeler ça de la littérature??

Oui. Oui on ose. Bien sûr c'est de la littérature et pas n'importe laquelle s'il vous plaît! Ça s'appelle la "Beat Generation".



Aux téméraires, aux lecteurs qui sont déjà loin des chemins balisés, aux amateurs des uppercuts syntaxiques, aux lecteurs qui n'ont pas froid aux yeux, aux adeptes des combats corps à corps avec les livres, aux adorateurs qui se dressent fièrement en punching-ball devant les dieux écrivains, savourez ce festin et trinquez à la mémoire de l'inénarrable Burroughs, William de son prénom. Courage, on passe à table🥂



*The Naked lunch
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Junky

Je n'avais pas accroché à Burroughs, au contraire de Kerouac, Cassady ou Bukowski.

Ce livre me réconcilie totalement avec Bill.

Ce livre qui est d'une écriture lucide, implacable dans ses descriptions, mais est tout aussi imagée.

Ce livre, alors que les vécus qui y sont relatés sont plutôt terribles. est carrément drôle, putain oui. Le ton de Burroughs fonctionne sur moi.

J'ajoute que, ce livre est plus instructif que bien des livres sur la toxicomanie.

Et je termine en disant que ce livre équivaudrait presque à un stage dans une institution spécialisée.
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