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Critiques de Yu Hua (176)
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Vivre !

J’ai terminé Vivre ! à la faveur d’un week-end à la montagne, et il est clair que son atmosphère me hantera longtemps. C’était ma troisième lecture de cet auteur, et c’était encore une très grosse claque. En refermant ce livre, je n’avais pas d’autre envie que d’en ouvrir un autre de Yu Hua, pour rester dans son univers et son style si simple, direct et fluide.

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Il est impossible de ne pas penser à Brothers, tant on retrouve de nombreux échos, une façon semblable d’aborder les personnages et le récit. On a même parfois l’impression que les deux histoires se passent dans le même village, traversé par plusieurs décennies de métamorphoses politiques.

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Les turpitudes de la Chine rurale du 20ème siècle sont données à voir à hauteur d’homme. Ici, la violence surgit au détour d’une phrase, un destin bascule le temps d’une course à l’épicerie, le sort d’une famille entière se joue sur un coup de dé. C’est toute la fragilité des existences sous le joug des totalitarismes qui s’écrit dans ces pages. Notamment certaines, désarmantes, sur les enrôlements de force et la vie dans les tranchées.

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Considéré comme un classique en Chine, cet extraordinaire roman m’aura arraché quelques larmes. Le seul reproche que je peux lui adresser est de ne faire que 250 pages, ce qui est bien trop court… Mais la très belle fin douce-amère ne peut que laisser une splendide impression : celle d’avoir pris une leçon. Et on referme le livre avec la sensation d’avoir été traversé par les personnages comme par des météores.
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La Chine en dix mots

Après la publication de Brothers, Yu Hua avait le sentiment qu'il avait encore des choses à dire sur la Chine des cinquante dernières années et son essai La Chine en dix mots est une sorte de complément au roman.



Si tous les chapitres (un par mot) ne m'ont pas intéressée de la même manière, j'ai particulièrement apprécié les anecdotes de jeunesse de l'auteur. Par exemple, il raconte comment la lecture de la dame aux camélias, roman passé sous le manteau, l'a marqué à une époque où les livres, à l'exception de ceux de Mao, étaient interdits. Ou comment il est devenu dentiste (ou plutôt arracheur de dents), un travail assigné par l'État et exécuté après une brève formation reçue sur le tas. Je retiens surtout que les personnages et les évènements de Brothers qui peuvent paraitre extravagants aux yeux des Occidentaux sont en fait très proches de la réalité.
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Brothers

Cette critique va être difficile à rédiger tellement ce roman m'a marqué ! Cette épopée se déroulant sur un demi-siècle retraçant l'évolution de la Chine à vitesse grand V ( Yu Hua parle avec raison du fait que ce qu'a vécu la Chine en moins d'un siècle correspond à l'évolution en Europe du Moyen-Age jusqu'au 20ème siècle ) à-travers l'histoire de deux frères : Li Gangtou et Song Gang. Ce roman m'a fait passé par toutes les émotions possibles et je n'arrivais pas à m'en détacher ! Les pages glissaient devant mes yeux embués de larmes, remplis d'excitation ou scintillants de bonheur. Ce roman se dévore et l'on voudrait qu'il ne se termine jamais! Que dire de plus , Le style nous happe et nous sommes plongés au plus profond du bourg des Liu pour vivre une expérience intense. I m'est vraiment difficile d'en parler mais tout est abordé avec brio! La révolution culturelle est décrite avec une précision et une horreur glaçante. Les personnages sont incroyables, la psychologie est folle, l'histoire est dingue.... Que dire de plus à part foncez !!!!!!
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Brothers

Le premier mot qui me vient à l’esprit lorsque je pense à Brothers est : foisonnant. C’est un roman qui étonne, intrigue, fait sourire mais aussi pleurer, intérèsse et touche. Nous sommes emportés par la verve de M Yu Hua, dans un conte rocambolesque à travers la Chine des années 60 jusqu’à nos jours. Ce conte nous narre la vie de Li Guangtou, personnage hors normes du bourg des Liu : de sa première renommée locale que lui a apporté son arrestation pour flagrant délit de voyeurisme dans les toilettes publiques, à sa renommée internationale de multi-millionnaire excentrique, Li Guangtou nous en fait voir de toutes les couleurs. Et quelles couleurs !



Maladroit d’esprit mais droit de coeur, ce héros aux contours d’enfant mal dégrossi taillade les codes à grands coups de haches, giflant un pauvre bougre ou pleurant à chaudes larmes selon son humeur. Loin de toute pudeur, il provoque, joue, marchande, s’amuse, se moquant bien de ce que l’on peut penser de lui. Bref, il vit sa vie, sans se soucier le moins du monde du quand-dira-t-on. Et quand il aime, c’est toute la Terre qui peut s’effondrer. Ainsi de son frère aîné, Song Gang, véritable complémentaire de Li Guangtou. Song Gand est grand et élancé, Li Guangtou est petit et râblé ; Song Gand est timide et doux, Li Guangtou est tonitruant et violent ; Song Gand n’a aucune ambition, Li Guangtou veut conquérir la lune. Ces deux personnages ne semblent rien partager et pourtant...



Devenus frères à la suite d’un deuxième mariage, Song Gang et Li Guangtou évoluent toutes leurs vies sur des chemins qui, bien qu’ils ne se croisent jamais, s’enroulent comme deux brins d'ADN. Malgré les affres de la vie - et quels affres ! des atrocités de la Chine de Mao à la folie du capitalisme, ces deux-là n’auront de cesse de mordre la poussière -, ils restent essentiellement vrais à eux-mêmes et, par-dessus tout, à leurs liens de fraternité. C'est une trame que ne peuvent briser les maladies, les amours, les décès, les tromperies, les joies et les souffrances de la vie. Qu’un principe désuet entraîne Li Guangtou à ne plus parler à son grand frère ou qu’une trop grande culpabilité sépare Song Gang de son petit frère, la rupture n’est jamais consommée.



Or c’est précisément l’invulnérabilité de cette fraternité qui est l’essence de Brothers. Cet amour absolu colore les épreuves que chacun traverse, de subtilités invisibles autrement. Telle la falaise qui fait jaillir les embruns des vagues de l’océan, le foyer intangible qui relie Song Gang à Li Guangtou fait éclore les détails dans toute(s) leur(s) définition(s) de “détails”. M Yu Hua peut, dès lors, transmettre une vision personnelle de la Chine en s’en tenant simplement à des descriptions factuelles. Aucun jugement ne transparaît du texte, qui nous emporte au large tout en nous laissant la savoureuse illusion de tenir la barre.



Brothers nous fait ainsi redécouvrir l’imaginaire des contes à travers un récit pourtant bien ancré dans la réalité contemporaine. Et c’est bon ! Plus de barrières, plus de bien-pensance : voici venir Li Guangtou, du bourg des Liu !
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Vivre !

Dans le cadre du challenge ABC, ce livre pris à la bibliothèque pour le Y du nom de l'auteur a été une belle découverte pour moi.

L'histoire de Fugui et de sa famille qui va devoir traverser toutes les révolutions chinoises de la seconde moitié du 20è siècle.

Guerre civile, Révolution, Grand bon en avant, Grandes marmites communales et la Révolution culturelle vont lessiver cette famille pour ne laisser vivre que Fugui, ce fils prodigue qui va perdre la fortune de sa famille au jeu et qui se traîne au final dans son champ à travailler avec un bœuf vieux comme lui.

Des personnages attachants pour lesquels j'ai éprouvé beaucoup d'empathie.

A lire !

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Le septième jour

Le narrateur, Yang Fei, vient de mourir. Trop pauvre pour acquérir une sépulture, il ne peut se faire incinérer. Il erre alors dans un entre-deux où il rencontre des défunts coincés comme lui dans ces limbes, et retourne parfois sur des lieux évoquant des épisodes de sa vie.



Directement expulsé du ventre de sa mère sur les rails d'un train en marche, il fut recueilli par un jeune employé de gare qui n'hésita pas à sacrifier sa vie sentimentale pour préserver l'inaltérable et tendre relation l'unissant à ce fils adoptif.



Après ses études, employé d'une grande entreprise, Yang Fei contracta une union inespérée mais brève avec une beauté intelligente et ambitieuse qui malgré son affection pour lui, ne put se résoudre à la médiocrité sociale à laquelle la condamnait son insignifiant époux.



Il ne se remaria jamais, menant une existence sans éclat mais sereine, jusqu'à ce que son père tombe malade. Il quitta alors son travail et vendit son appartement pour s'en occuper. Peu de temps avant la mort de Yang Fei, afin de libérer son fils de la charge qu'il représentait pour lui, son père disparut.



Ceux dont il fait connaissance dans l'antichambre de l'au-delà représentent, comme lui, le "petit peuple" d'une Chine gangrenée par la misère et la corruption. Gagnée par la modernité consumériste, la société chinoise en subit les corollaires, les inégalités croissantes rendant encore plus précaire l'existence des moins nantis. Les destins pathétiques des personnages en illustrent les effets concrets. Un fiancé se voit contraint de vendre un rein à un réseau clandestin de trafic d'organes pour pouvoir payer une sépulture à sa fiancée. Acculée par les dettes pour avoir nourri à crédit des années durant une kyrielle d'employés municipaux ou d'entreprises ayant fait faillite, une famille de restaurateurs meurt dans l'incendie de son établissement, qu'elle n'avait plus les moyens d'entretenir. Certains défunts sont sans sépulture car leur mort a été dissimulée par les autorités. Ainsi ce couple enseveli dans les décombres d'un immeuble détruit dans le cadre d'une politique du logement consistant à vider de leurs occupants des bâtisses considérées comme trop vétustes pour en céder les terrains à des promoteurs aux dents longues. Ainsi ces vingt-sept bébés dont les cadavres ont été jetés avec les déchets de l'hôpital où leurs mères avaient subi des avortements forcés...

...

Les épisodes évoqués en une macabre succession, inspirés pour beaucoup de faits réels -morts causées par des affaissements de terrain ou des accidents de la circulation, provoquées par l'incendie d'un centre commercial ou une explosion...- donnent le sentiment que ces citoyens côtoient la mort en permanence, qu'elle peut surgir à chaque coin de rue. Il règne à l'inverse au sein des limbes où erre Yang Fei une paix et un esprit de fraternité témoignant d'un abandon de la violence du monde des vivants.



Sans doute convient-il de saluer l'évidente volonté de Yu Hua de pointer l'absurdité inique d'un système. J'ai apprécié la limpidité de son écriture, qui rend la lecture agréable, et j'ai trouvé certains passages très touchants, notamment ceux qui mettent en scène le lien qui unit Yang Fei à son père. Mais je n'ai pas vraiment été emportée, dans l'ensemble, par ce récit qui, constitué d'une accumulation d'anecdotes, en perd en profondeur et en acquiert une structure un peu confuse.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Le septième jour

Le parcours de Yang Fei dans l'autre monde lui permet de retrouver des personnages de son histoire. C'est également l'occasion pour lui de faire une retour sur l'ensemble de sa vie.

L'écriture est légère et l'histoire singulière. Un roman qui se lit facilement et d'un seul jet mais avec un très grand plaisir. La poésie de l'auteur transparaît tout au long du livre.

La lecture est parfois très prenante, poignante, émouvante.



Une très belle découverte !
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Le septième jour

Un roman d’une beauté prégnante où les êtres cheminent vers la douceur en convoquant pour mieux s’en déprendre leur vie de souffrance et d’offenses, dans une Chine d’aujourd’hui au pouvoir arrogant et cruel.



Voilà le dernier paragraphe de la quatrième de couverture d’un roman contemporain chinois, Le septième jour, paru aux éditions Actes Sud en 2014.



L’argument n’est pas vraiment chinois au premier abord : un homme vient de mourir et pendant sept jours il déambule dans l’outre-monde à la recherche de son père adoptif ; ce faisant, il retrouve des personnes qu’il a croisées durant son existence et qui lui racontent leur vie passée.



Sept jours, le temps de la création divine, bien sûr, le temps pour notre mort qui s’appelle Yang Fei de rejoindre définitivement la cohorte des morts sans sépulture car seules les personnes à qui leur famille peut offrir une tombe peuvent prétendre reposer en paix après leur incinération, les autres errent dans les lieux de leur passé ou dans des environnements champêtres idylliques où peu à peu leur corps se décompose. Voilà ce qui est vraiment chinois dans ce roman : l’importance de l’argent dans la vie comme dans la mort.



On entre de plain-pied dans un monde étrange, voici les premières lignes du roman :



Par un épais brouillard, je suis sorti de la maison que je louais, et j’ai divagué dans la ville irréelle et chaotique. Je devais me rendre dans cet endroit qu’on appelle le funérarium, et qu’on appelait jadis le crématorium. On m’y avait convoqué, avec obligation de me présenter là-bas avant 9 heures du matin, ma crémation étant prévue pour 9h30.



Avouez que cela peut déstabiliser le lecteur occidental.



Très vite on comprend que le narrateur est mort et que le roman sera vécu selon son point de vue de nouvel entrant dans l’outre-monde : on peut être surpris par le fait qu’il doive remettre en place un œil ou une mâchoire pour se rendre présentable mais ce n’est qu’un détail parmi d’autres dans cette vision exotique des fantômes chinois.



Les distinctions entre les riches et les pauvres se perpétuent chez les morts, les VIP attendent leur crémation sur de confortables fauteuils pendant que les pauvres patientent sur des chaises en plastique. Yang Fei, notre passeur chinois contemporain, va nous promener dans un enfer où les pauvres sont pressurés, grugés, abusés par les puissants. Le petit restaurateur chez lequel l’explosion fatale au narrateur a eu lieu, se trouvait au bord de la faillite parce que ses clients fonctionnaires ne payaient pas, remettant à la fin de l’année la note aux entreprises obligées de passer par leurs exigences pour pouvoir travailler. La corruption se retrouve partout : scandales du lait coupé avec du talc, morts de nourrissons, expulsions devant la flambée immobilière, collusion de la police et du pouvoir, ventes de reins pour pouvoir survivre. Même les pauvres n’échappent pas à une forme de corruption, les petits fonctionnaires transmettant leur charge à leurs enfants.



Au milieu de tout cela, une histoire d’amour, celle des voisins de Yang Fei, la jolie Liu Mei dite Souricette et son amoureux Wu Chao. Souricette s’est suicidée parce que son ami lui a menti en lui offrant une imitation du portable dont elle rêvait. Souricette avait envie de tant de choses, des millions de Souricettes chinoises, pauvres et exploitées rêvent derrière la petite créature pathétique.



L’histoire dérisoire se déploie et tout à coup nous nous trouvons dans le chant cinquième de l’Enfer de la Divine Comédie, « Et voilà que des cris plaintifs commencent à se faire entendre, voilà que de grands sanglots frappent mon oreille », Francesca de Rimini et son amant se désolent dans le deuxième cercle de l’enfer. « Francesca, tes tourments me font pleurer de tristesse et de pitié », dit Dante, et Yang Fei ressent la même étreinte par-delà les siècles et les océans.



Oui, il y a beaucoup de poésie dans ce roman mais il faut attendre avant de se laisser saisir par l’étrangeté de ce monde, l’absolue et poétique irréductibilité de ce monde.



Des larmes perlent des orbites vides de Li Yuezhen. (…) Les larmes coulent le long de ses joues semblables à de la pierre, et tombent sur l’herbe. Puis un sourire se dessine dans ses orbites vides. Elle lève la tête et regarde autour d’elle les bébés qui chantent comme des rossignols. (…) Dans son cœur glacé jaillit un feu ardent. Un des bébés glisse par inadvertance d’une feuille, il rampe en pleurant jusqu’à Li Yuezhen, qui le prend dans ses bras et le berce doucement avant de le reposer sur la large feuille.



Vous avancerez dans ce voyage au pays de la Chine contemporaine en sept jours, autant que pour la création divine, en compagnie d’un voyageur de l’au-delà qui vous fera découvrir l’enfer des vivants et les regrets des morts.


Lien : http://nicole-giroud.fr
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Vivre !

Ce que j'aime avec la littérature chinoise c'est la volonté d'aller à l'essentiel. Une petite fenêtre s'ouvre sur une civilisation qui a connu de nombreux épisodes historiques et politiques difficiles, cruels.



Ce que j'aime avec Yu Hua c'est la puissance des sentiments de ses personnages, ses histoires hors du commun.



Ce que j'aime avec ce roman c'est sa construction. Nous avons un récit dans un récit. Un grand-père raconte son histoire, l'histoire de sa famille, l'histoire de son village, l'histoire de son pays. Malgré les épreuves, il reste volontaire, humble, optimiste.



Texte très puissant qui ne peut laisser indifférent.
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Brothers

Un vrai pavé de 700 pages mais croyez-moi, qui se lit à un rythme haletant une fois bien installé dans l’histoire !



Bothers nous fait suivre la vie de deux demi-frères que tout oppose : l’un est honnête, timide et doit, l’autre est un vaurien pervers et amoral.



Dès les premières pages, l’auteur annonce la couleur : le style est débridé, effréné, le ton exagéré et drôle. Mais surtout -et là ça choque de prime abord- très cru ! En effet, dans les premiers chapitres, il n’est question que de libido, de fesses et de …poteaux électriques ! (ceux qui l’ont lu comprendront) Tout ça rend la lecture un brin choquante (le gamin a à peine 10 ans) et nombreux seront ceux à vouloir reposer ce livre. Mais s’arrêter là serait une grave erreur car l’histoire est véritablement prenante, et au final Brothers est un petit bijou.


Lien : http://avideslectures.over-b..
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Brothers

Alors oui, on pourra reprocher à ce livre sa longueur (1000 pages quand même..), l'utilisation ad nauseam de subtilités consistant à revenir systématiquement sur chacun des personnages lorsqu'une situation se présente, on pourra également ne pas voir dans l'histoire personnelle de Sang gang un éclair aussi persistant que dans celle de Li Guangtou mais nom de Dieu, ce livre est absolument nécessaire pour qui veut comprendre la mutation absolue et révolutionnaire de la Chine actuelle, passant en à peine 20 ans, d'un moyen-âge socialiste épouvantable à un capitalisme libérale extrême non moins terrible !

Ce bouquin est formidable et son auteur, Yu Hua, un sacré écrivain. Capable d'embrasser dans une même phrase le comique chinois des films de sabre à la noirceur la plus absolue des drames classiques de la littérature chinoise. Très bon bouquin qui mérite vraiment de s'y pencher.
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Brothers

De la Révolution Culturelle à nos jours, deux frères cherchent leur voie dans le bourg des Liu. Song Gang, l'aîné, doit veiller sur Li Guangtou à la mort de leurs parents.

Je les suis entre rires et larmes, envoûté par les portraits truculents des personnes qu'ils côtoient.
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La Ville introuvable

Après "Brothers" en 2008, d'où nous étions sortis ébahis par le balayage historique de la Chine et les itinéraires tumultueux de deux frères dans un pays aux prises avec des bouleversements scellant l'avenir du pays pour quelques décennies, encore aujourd'hui. Le roman dont il est question aujourd'hui parle de la période qui précède Brothers, chaos intérieur dont on a peine à imaginer qu'il puisse se dérouler il y a à peine plus d'un siècle. La campagne chinoise vit au rythme d'activités séculaires marqués par des traditions quasi moyenâgeuses. Les mariages arrangés dès l'enfance sont un règle. Placer une jeune fille dès l'enfance dans une famille plus à l'aise matériellement la protègera des difficultés et de la misère, se mettre au service d'un riche propriétaire vous assurera la subsistance et la protection contre le brigandage qui sévit. Les autorités de police n'ont que peu de pouvoir, faute de moyens et de relais administratifs, loin des centres de décisions et la corruption est une maladie endémique, encore présente bien que sévèrement réprimé.

Le personnage principal est un riche propriétaire doublé d'un artisan du bois. Il tombe amoureux d'une femme de passage, est confiant, se fait berner, puis se retrouve avec un enfant, la mère disparaissant sans plus d'explication. Il part en quête de cette femme, en vain. La suite est une description de la vie dans une petite ville du sud de la Chine, notre homme ayant traversé le pays vers une ville imaginaire, fait souche dans une autre. Les scènes de la vie sociale et de brigandage parsèment ce texte teinté de poésie éthérée et de cruauté terrifiante entremêlées.

La puissance d'évocation est d'autant plus étonnante que nous nous trouvons projetés dans un monde aux confins d'une Chine imaginaire, lointaine contrée mystérieuse il y a peu, si présente aujourd'hui par tous les objets qui nous entourent.

C'est une étrange sensation que celle-là.

A lire
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La Ville introuvable

La ville introuvable est un grand livre d'aventures. Les personnages sont à la hauteur de leurs épopées et les visages de véritables Héros se dessinent au fil des pages. Lin Xiangfu d'abord, humble, valeureux et profondément empathique. Xiaomei ensuite, courageuse, résiliente et incroyablement amoureuse. Tous deux m'ont embarquée dans cette Chine du début du XXème en proie à la terreur des massacres, des pillages et autres horreurs perpétrées par des bandes de brigands.



Avec ce livre, il est question de voyage : pour le personnage principal, bien sûr, en quête de cette fameuse ville introuvable, pour Xiaomei, à la recherche d'un foyer, mais aussi pour le lecteur qui peut s'imprégner de l'ambiance, du climat, des odeurs de nourriture avec beaucoup de facilité grâce à l'écriture immersive et vivante de l'auteur.



Il est aussi et surtout question d'amour car que serait un bon livre d'aventures sans une bonne dose d'amour ? Amour passionné, fraternel, filial... Dans ce roman, l'amour est en tout cas toujours définitif, un amour qu'on ne peut oublier, un amour qui guide un peu, beaucoup, passionnément.



Si j'ai globalement tout aimé de ce livre, j'ai parfois eu du mal à m'y retrouver dans les noms des uns et des autres et je me dis qu'un petit glossaire/lexique des personnages aurait pu être bienvenu... mais rien de rédhibitoire dans la compréhension de ce beau roman.



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Brothers

Même bien informé de l'importance et de la rapidité des changements économiques et sociaux que la Chine a connus entre 1960 et 2006, il me paraissait illusoire d'en ressentir la fulgurance.

C'est pourtant ce à quoi j'ai le sentiment d'être quelque peu parvenu grâce à la lecture de « Brothers » qui m'a fait vivre l'infortune ou le succès, des actions menées par les personnages du roman pour s'adapter au cours de l' Histoire.

Ce roman est captivant : je n'ai pas décroché de la lecture de ses 717 ,pages . YU HUA. L'auteur, a l'habileté de mettre en scène des protagonistes dotés chacun d'un caractère emblématique tel que celui d'un « loser », d'un  «  battant » (voir la quatrième de couverture du livre) ...il y en a d'autres, bien sûr. YU HUA les embarque dans des situations burlesques, qu'ils en soient ou non les instigateurs, et dont ils sortiront gagnant ou perdant …jusqu'au prochain épisode.

Si « Brothers » se présente comme un roman d'action tragi-comique ( il se passe toujours quelque chose  « dans notre bourg des Liu » ! ) , c'est en fait, un cours de rattrapage (1) d' Histoire contemporaine et d’ethnologie  que nous dispense YU HUA avec un humour débridé. En recourant à la caricature l'auteur nous conduit à l'essentiel : nous faire connaître et ressentir la brutalité de l'évolution de la Chine qu'a vécue sa population, passant à toute vitesse d'une société fondamentalement rurale, à celle ou prévaut la lutte des classes marquée par les exactions de la révolution culturelle, puis au matérialisme affairiste et consumériste (d'ailleurs sans remise en cause du dogme du matérialisme dialectique).



Le Chinois du futur ?

Amateur de B.D . je rêve de la réalisation d'une trilogie couvrant la période 1960-2006, ce qui m'a incité à parodier le titre de l'œuvre de Riad Sattouf (en le mettant à la sauce aigre douce  bien sûr!).



Je n'ai pas de scrupule non plus à souhaiter une suite, ou plutôt un ajout à « Brothers » couvrant la période dite du Zéro Covid initiée, paraît il par la fuite d'un pangolin à Wu Han. On y aurait vu un Li Guangtou à la manœuvre tout en étant confiné !



(1) Des notes de fin de livre viennent efficacement combler nos lacunes.
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Brothers

Ne vous laissez pas impressionner par les quelques 700 pages de ce roman et le côté parfois un peu cru, voire même vulgaire du récit.



La lecture n'est certes pas toujours facile car y sont abordés des thèmes très difficiles comme la Révolution culturelle et ses conséquences sur la population, mais le récit est passionnant et dresse un portrait très réaliste de l'époque.



Je vous le recommande !
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Un amour classique

Si vous aimez les écrits qui vous baladent, vous allez adorer celui ci. Ce sont des montagnes russes de sentiments parfois contraires. Un instant on est dans le bisounours et puis après , la réalité rattrape, et on l'impression d’être en enfer. On est dérangé par la banalisation de certaines scènes et puis surpris qu'on les attendent l'instant d'après. Je suis tentée de relire un autre livre de cet auteur.
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Vivre !

On n'a pas souvent l'occasion de rire en lisant l'histoire de cette famille paysanne Chinoise sous le régime de Mao Zedong (Tsé-toung). On a appris les grands événements de cette époque, la guerre sino-japonaise, la guerre civile, le grand bond en avant, la révolution culturelle et les dizaines de millions de morts qui en ont résulté. On revisite dans ce roman cette partie de l'histoire de la Chine, vue à travers les yeux d'un paysan. On vit avec lui et sa famille les souffrances qui ont été celles de tant de Chinois, et l'impacte n'en est que plus réelle, plus brutale. Le livre est court et l'histoire nous absorbe immédiatement. Le personnage central qui nous apparait d'abord comme antipathique va très vite devenir très attachant après la ruine de sa famille dont il est responsable. Les pages défilent aussi rapidement que les années s'écoulent, avec leurs apports de souffrances pour cette famille, mais parfois de joies aussi. Cette vision de cette partie de l'histoire Chinoise a déjà été traité de nombreuses fois, notamment à travers des auteurs comme Pearl Buck ou Mo Yan (pour ne parler que de ce que je connais) mais ce n'est certainement pas une perte de temps que de se replonger avec Yu Hua dans cette partie de l'histoire, d'autant qu'on ne lit la dernière page que peu de temps après avoir lu la première tant les pages se tournent sans même qu'on s'en rende compte.
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Brothers

Brothers est livre en deux parties. La première d'environ 300 pages sur cette famille chinoise recomposée au moment de la révolution culturelle, Hua est un grand écrivain là où il met de la sensibilité dans ses idées et dans ses personnages. Très réussie.

Le livre aurait pu, aurait dû s'arrêter là.

La seconde, de plus de 600 pages, une BOUFFONNERIE interminable, sans queue ni tête et surtout sans aucun intérêt. INUTILE. Dommage.
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La Chine en dix mots

Yu Hua, enfant privé de livres et de lecture pendant la Révolution Culturelle, à l'exception du "petit livre rouge", est devenu aujourd'hui un écrivain reconnu. Son expérience de vie, qui est celle de nombreux chinois (même si tous ne sont pas devenus écrivains) l'a fait passé d'un univers de fanatisme, de répression, de vénération du président Mao, d'un monde manichéen où tout est simple à un monde où tout est permis et où chacun rêve seulement de s'enrichir.



Il nous en parle à partir de 10 chapitres et 10 mots : peuple, leader, lecture, écriture, Lu Xun, disparités, révolution, gens de peu, faux, embrouille. Il mêle intelligemment et agréablement souvenirs personnels et commentaires sur la société contemporaine, dans un essai très agréable à lire et très très instructif sur la Chine.

Yu Hua veut comprendre comment en 40 ans un pays a pu connaître de tels bouleversements. Et en fait, il y voit des similitudes et des continuités : ainsi les objectifs d'enrichissement et de productivité sont menées comme les projets de développement du Grand Bond en Avant par un pouvoir politique omnipotent et indifférent aux conséquences sociales et environnementales. Le récit des expulsions de familles entières qui sont tout simplement mises à la rue du jour au lendemain, qui rentrent le soir dans ce qui étaient chez elles pour trouver des bulldozers, est absoluement édifiant. Il s'étonne de l'étonnement des occidentaux qui ne comprennent pas que le développement économique soit possible dans une société non démocratique.



Certains passages sont émouvants comme dans le chapitre intitulité "lecture" lorsqu'il parle du manque de livre à l'époque où tout écrit qui n'était pas de Mao, Marx, Engels ou Lu Xun était une "herbe vénéneuse". Des ouvrages interdits circulaient sous le manteau dans des versions souvent tronquées dont il n'a pu découvrir la fin que bien des années plus tard.



Des souvenirs d'enfance poignants également lorsqu'il explique que le seul spectacle auquel il assistait était celui des exécutions publiques et nous explique la trace que cette violence a laissé dans son esprit et son œuvre ou lorsqu'il raconte les vexations et les humiliations auxquels il a pu participé en tant que petit Garde Rouge à l'encontre de quelques malheureux accusés de ne pas suffisamment respecter le président Mao et sa pensée.





Les chapitres "disparités" "gens de peu" "embrouille" et "faux" sont particulièrement intéressants pour la compréhension d'une société chinoise complexe : "disparités" décrit l'incroyable écart de vie entre les différents éléments de la société chinoise, les "gens de peu" sont ceux qui se sont enrichis de manière incroyable à partir de rien, d'une idée, d'un sens aigu des affaires et du sentiment que tout est permis. Le "faux" et "l'embrouille" sont deux termes et deux attitudes devenus célèbres. Le faux, c'est la contrefaçon porté au rang d'art et de style de vie : pas seulement la contrefaçon de produits divers pour s'enrichir sur les marchés internationaux en s'affranchissant du respect des règles mais aussi une contestation par le peuple, une volonté de prendre en main sa situation comme lorsqu'un quelconque bourg, furieux de ne pas figurer sur le trajet de la flamme olympique, décide d'organiser un faux parcours qui passe dans ses rues. L'embrouille va de la simple blague, à ce qui serait qualifié ailleurs d'escroquerie, à la façon dont l'état "embrouille" le peuple et dont celui-ci le lui rend en retour.



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