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EAN : 9782246460824
443 pages
Grasset (22/05/1992)
4.27/5   15 notes
Résumé :
En 1828, à Nuremberg, la police recueille un adolescent hagard, qui parle comme un enfant de deux ans. La beauté du garçon intrigue cependant les autorités... En fait ce vagabond n'est autre que le prince héritier de la couronne de Bade. Un bouleversant thriller historique paru en 1908.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
D'aussi loin que je me souvienne, Gaspard Hauser m'a toujours évoqué un poème de Paul Verlaine, chanté par Georges Moustaki.

Immédiatement le cas Gaspard Hauser est troublant et même douloureux. Il arrive de nulle part, il ne parle pas, est très craintif mais sait écrire son nom. Et moi, il m'a tout de suite fait mal. Car, qu'y a-t-il de plus terrible que de n'être personne, de ne pouvoir dire d'où on vient, de qui on est l'enfant ? Ça semble impossible, mais il est vrai que l'histoire commence en mai 1828, Gaspard a environ quatorze ans.

Cette histoire est d'autant plus triste qu'elle est vraie. Gaspard (Kaspar en allemand) à tout de suite été une curiosité pour les gens, qui défilaient pour le voir et se moquer mais parfois aussi le maltraiter.
Le professeur Daumer décide de le prendre sous son aile pour le protéger, l'étudier et comprendre qui il est, et aussi l'aider à se retrouver lui-même.

L'apprentissage de Gaspard commence et c'est beau, comme tout ce qu'on vit sans y penser semble éblouissant quand il faut le faire découvrir à quelqu'un qui s'ouvre tardivement à la vie. Car Daumer à l'intention de l'ouvrir au monde, à la nature, à la moindre parcelle de vie, au moindre frémissement, pour le sortir de cette cave où il a grandi privé de tout. Mais alors, il se sent subitement tellement ignorant.
"Mais de l'objet au mot, le chemin était long. le mot se dérobait et il fallait le rattraper ; et bien souvent, une fois qu'on l'avait atteint, il ne renfermait absolument rien [...] Daumer était souvent effrayé par sa propre insuffisance."

Gaspard doit tout apprendre. La religion, évidemment à l'époque est quasi obligatoire. Mais lui, n'aime pas la messe, avec ce prêtre qui vocifère, ces ecclésiastiques à la religion menaçante et punitive. Il ne comprend pas tout sur Dieu. Il voudrait des explications mais il n'y en a pas. Gaspard est un esprit carré. Pour lui tout doit être expliqué, mais les voies du Seigneur sont impénétrables, non ? Car "On n'a pas le droit de sonder les points obscurs de la foi."

Gaspard semble être une âme pure et lumineuse, à tel point que les oiseaux n'en ont pas peur. Et là, j'ai trouvé que ça faisait un peu trop Blanche-Neige et perdait de sa crédibilité.
Cependant, Gaspard fait des rêves récurrents, et là serait peut-être la clé de son passé. Certains pensent qu'il est de haute naissance, d'autres que c'est un imposteur absolument pas amnésique. Et Daumer s'ingénie à l'aider tout en essuyant les moqueries et humiliations venant de toute part, car il s'est pris de passion pour cet enfant.

Seulement au bout d'un moment, il s'avère que la vie de Gaspard est menacée, et il devra déménager, encore et encore. Et que dire de la stupidité ambiante, de la cruauté dont il est victime, de la part des autres enfants mais aussi de beaucoup d'adultes, et dont il faudra le protéger ? La vie de Gaspard Hauser semble avoir été un long chemin de croix. J'ai ressenti une infinie tristesse à cette lecture.

Et vraiment, j'ai trouvé ce livre infernal à lire car trop lent, lent, lent, pendant au moins le premier tiers… J'ai cru mourir d'ennui, passés les moments captivants du début. À mon goût, l'auteur s'est beaucoup trop noyé dans les détails. Pourtant l'écriture est belle.

Malgré tout, vers la fin de la première partie, l'auteur est parvenu à attiser ma curiosité. Mais qui était donc Gaspard Hauser ? D'où venait-il réellement, de quelle famille, était-il un riche héritier qu'on avait voulu faire disparaître, et de fait, était-il en danger ? Car bien des mystères planent autour de lui, autant que des dangers semble-t-il alors que des personnages bizarres s'intéressent à lui. de Nuremberg à Ansbach, il est trimballé de maison en maison, car personne ne veut le garder trop longtemps, il sera confronté à la méchanceté, la duplicité, la mesquinerie, le mépris et l'hypocrisie des bien-pensants, et la petitesse de bien des gens. Heureusement, certaines bonnes âmes existaient pour croire en sa candeur.

Ce roman qui nous raconte la vie de Kaspar Hauser, nous démontre aussi que la nature humaine malheureusement est bien souvent peu reluisante, car toute sa vie il a été confronté à la perfidie ambiante et à la sécheresse des coeurs.
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On compare ce Gaspard Hauser de Wassermann à des oeuvres de Dickens. Je suis tout à fait de cet avis. Transposé en Allemagne.
Le personnage de Gaspard (Kaspar) Hauser est extrêmement connu hors chez nous. Je ne comprends pas comment il est possible qu'en francophonie on ne nous ait jamais parlé d'un tel héros. Ce livre est fascinant. Son début est magistral. On comprend, on ressent, cette non-vie de cloîtré-enfermé, qui ne connaît rien du monde, qui ne perçoit que peu, et qui n'est pas malheureux, se contenant de vivre, sans savoir(s), sans réelles émotions... Ou comme un animal, disons. Un être pur, longtemps pur, jusqu'à ce qu'il soit libéré. Pour s'enfermer dans le monde des hommes, dans le monde du mensonge, des bassesses, des faiblesses humaines. Devenir un homme, cela semble si triste, dans ce livre. L'évolution de cet adolescent, devenant adulte mais jamais normal et la façon dont il sera traité par tout un entourage à la fois curieux, hostile, parfois bon est véritablement une masse d'émotions, d'informations psychologique, sociologique d'importance. D'où l'incompréhension qu'on nous "oublie" cet oeuvre dans notre parcours éducatif.
Grand plaisir à lire, beaucoup de choses apprises... L'homme est une drôle de bête, définitivement. Gaspard Hauser ou la paresse du coeur est un grand livre.
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Si vous avez l'occasion de prendre l'autoroute en Allemagne et de passer près d'Ansbach (à proximité de Nürnberg en Bavière), vous verrez sur le bord de la route un panneau signalant que cette ville est celle de Gaspard Hauser. Cela montre bien l'importance du personnage, dont la notoriété dépassa largement cette région. Qui fut-il ? Pour l'apprendre, je vous invite à lire sans plus attendre le roman que lui consacra l'écrivain allemand Jakob Wassermann.

Il convient tout d'abord de dire quelques mots sur Jakob Wassermann. Je ne connaissais pas du tout cet écrivain. Or, en faisant quelques recherches, je me suis rendu compte qu'il fit partie des écrivains de langue allemande les plus lus de son époque. Né en 1873 en Allemagne, et mort en 1934 en Autriche, celui qui fut l'auteur d'une vingtaine de romans était ami avec Rainer Maria Rilke et Thomas Mann. D'origine juive, il dénonça la montée des nazis qui brûlèrent ses ouvrages. Son premier grand succès fut le roman que je vous présente aujourd'hui (paru en 1908), mais la célébrité du romancier ne s'affirma vraiment que vers la fin des années 20, avec la parution d'un autre titre, L'Affaire Maurizius. Saluons au passage l'initiative d'Archipoche qui ressort quatre de ses livres en 2023.

Venons-en maintenant à Gaspard Hauser, surnommé l'orphelin le plus célèbre d'Europe. Il fit son apparition dans les rues de Nürnberg en 1828. Sachant à peine parler, craignant la lumière du jour et de se tenir debout, il avait pourtant une quinzaine d'années, ne savait qu'écrire son nom et dire qu'il voulait être cavalier comme son père. Rapidement, son origine intrigue et elle est à la base de nombreuses supputations ; selon l'une d'entre elles, il aurait été enfermé pour des raisons de succession, mais il serait en fait l'héritier putatif de la couronne de Bade. Dans son livre, Jakob Wassermann nous décrit les cinq dernières années de la vie de l'orphelin qui s'éteignit en 1833.

Après avoir été recueilli, il est mis en prison… On s'interroge sur son histoire, qui ne semble pas crédible. Il est finalement libéré, et recueilli, tout d'abord chez le docteur Dauner, puis chez plusieurs autres personnes de la société bourgeoise de Nürnberg puis d'Ansbach. Son enfermement physique est remplacé par un enfermement moral. Il est victime de la sécheresse du coeur des personnes qui l'hébergent, chacun suivant ses propres principes, l'utilisant à ses propres fins, n'écoutant jamais le jeune homme en quête d'identité et d'écoute.

Parallèlement à cela, il semble au coeur d'un plan visant à le supprimer, ce qui renforce encore le mystère… le président de la cour d'appel d'Ansbach, Feuerbach, protecteur du jeune homme, sera le premier à émettre des hypothèses sur l'origine princière de Gaspard. Même s'il est attaché à lui, on sent dans son témoignage, qu'il n'est également pour lui qu'un instrument.
Wassermann est un grand romancier qui nous tient en haleine dans ce très beau livre. Il nous fait percevoir précisément les peurs, les souffrances, les espoirs, la naïveté également de Gaspard Hauser.

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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Les flocons de neige qui tombaient heurtaient légèrement les vitres comme de légers coups frappés par une main. Dans l'autre chambre il entendait la respiration régulière de Stanhope endormi et le souffle de cet autre homme lui était pénible et semblait un chuchotement menaçant : prends garde, prends garde.
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Il vit une petite tête, un corps petit et blanc, toute une minuscule créature.
Il voulut s'enfuir et s'effondra sur la dernière marche. De nouveau il entendit la porte de la maison, Quandt apparut avec la sage-femme, mais déjà la voisine s'avançait vers lui rayonnante : " Une petite fille, Monsieur l'Instituteur. " " Ah, voyez ! " s'écria Quandt d'une voix fière, comme s'il avait accompli quelque chose de remarquable. Un léger vagissement prouva la présence de la nouvelle citoyenne.
Puis la bonne passa en chantant et Gaspard vit qu'elle portait une cuvette pleine de sang.
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C'était un visage étrange, inhumain, douloureux, rappelant celui d'une statue. Plus bas, des vers :

Oh grand homme que fais-tu de moi ?
Tu me suis et ma trace est aveugle
A l'instant où tu me vois je me transforme.

Le pauvre enfant a fui le cachot
Il n'a plus ni manteau, ni couronne, ni épée
Et le cheval blanc court sans cavalier.

Le dessin avait été exécuté de nuit. Gaspard avait eu cette vision dans un rêve, était sauté du lit et avait dessiné à la clarté de la lune. Les vers s'étaient pressés sur ses lèvres le lendemain à son réveil et il les avait écrits sans chercher à les comprendre. Mais aujourd'hui, en les relisant, ils le frappaient et il les répéta tout bas à plusieurs reprises.
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Un événement aussi peu banal aurait, certes, éveillé la méfiance d'un enfant ou même d'un imbécile. Mais lui qui avait connu tant de visages faux et qui les avait démasqués, lui pour qui le monde n'était pas autre chose que n'est pour l'hirondelle le nid détruit en son absence par des mains criminelles, il saisit avec confiance cette main inconnue qui se tendait vers lui, cette main rigide, froide et muette.
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Gaspard se plaignit ; pour la première fois, il pouvait se plaindre ! Pourtant dès l'instant que l'on reconnaissait et que l'on admettait l'injustice dont il était victime, il se réconciliait avec les hommes. Jusqu'à ce jour, il avait haï l'univers ; maintenant le ciel s'éclairait et un bras protecteur apparaissait.
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Video de Jakob Wassermann (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jakob Wassermann
10 mars 2010 :
Mot de l'éditeur : Léonard Maurizius, homme de lettres élégant et frivole, est accusé d'avoir assassiné son épouse. Au terme d'un procès tumultueux, le meurtrier présumé est condamné à la prison à vie par le procureur Andergast. Il croupit en prison depuis plus de dix-huit ans lorsque Etzel Andergast, enfant unique du redoutable procureur, féru de justice et d'absolu, et convaincu de l'innocence de Maurizius, demande à son père de reprendre le dossier «Maurizius». Face à son refus, Etzel part en campagne pour obtenir la révision du procès. Tournant le dos à sa famille et à ses valeurs traditionnalistes, Etzel traque l'homme qui pourrait connaître la vérité et se cache sous une fausse identité à Berlin. Fondé sur une célèbre erreur judiciaire, ce chef-d'oeuvre, à la fois lucide et romantique, a la grandeur d'une tragédie grecque. Porté par les implications morales et philosophiques de la crise européenne et allemande du début du siècle dernier, L'Affaire Maurizius témoigne des questions qui hantent l'oeuvre de Jakob Wassermann : la quête d'ouverture, souvent refusée, et l'affirmation d'une double identité presque toujours suspecte.
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