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EAN : 9782021512922
60 pages
Seuil (02/09/2022)
3.96/5   27 notes
Résumé :
Étrange obsession française : parier sur une énergie devenue marginale dans le monde, plus coûteuse que les énergies renouvelables, et créant des risques incommensurables. Mais le nucléaire n’est pas seulement le signe de la faillite de la classe dirigeante du pays. Il exprime une vision du monde dépassée, rêvant d’une croissance sans limite et permettant de maintenir un ordre inégal et autoritaire. Face au climat, il nous faut repasser par la raison : les voies de ... >Voir plus
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ATOME OR NOR AT HOME ?

Il ne surprendra évidemment personne - du moins chez les gens suivant de près les débats relatifs à l'écologie en France - de voir Hervé Kempf affirmer que «Le nucléaire n'est pas bon pour le climat». En effet, Hervé Kempf, dont les talents de journaliste et d'essayiste ne sont plus à démontrer avec des titres volontiers polémiques tels que «La guerre secrète des OGM» (2003), «Comment les riches détruisent la planète» (notons que ce titre date "déjà" de 2007 tandis que ce n'est, pour aller vite, qu'aujourd'hui que le fait est non seulement démontré mais aussi acquis que les 1% les plus riches de la planète sont aussi ceux qui, et de très loin sur les 99% "restants", la détruisent le plus), ou encore le très emporté «Que crève le capitalisme» (2020), Hervé Kempf, donc, est tombé dans la marmite écologiste assez tôt, et plus précisément avec le drame de Tchernobyl (rappelons que l'explosion du tristement célèbre réacteur 4 de la centrale alors soviétique date de 1986).

Aussi, il ne faut surtout pas s'étonner de ce que le cofondateur et actuel rédacteur en chef du webzine écolo "Reporterre" ne soit guère enthousiasmé à l'idée d'un retour en force du nucléaire civil sur notre sol français. Par ailleurs, sans aller jusqu'à le soupçonner de collapsologie primaire, Hervé Kempf est indubitablement de ceux qui pense que le Capitalisme doit passer le relai à d'autres formes de relations économiques et sociales, que le productivisme est en train de jeter ses derniers feux, que la terre dans son entier doit être le centre de nos préoccupations - et pas nos petites, indigestes et indigentes, mortifères et polluantes fuites en avant consuméristes, industrielles, égoïstes et mortellement polluantes.

Bien évidemment, quiconque ne partageant pas ou très peu cette vision du monde (à venir ?) risque de se retrouver, très vite, en opposition à la philosophie et aux démonstrations d'Hervé Kempf.

Ceci étant, résumons les propos qu'Hervé Kempf nous présente dans ce "libelle" (c'est le nom de la collection aux éditions Seuil et ce n'est pas innocent).

En premier lieu, il rappelle une évidence qui, à l'exception de quelques rares négationniste du réel, fait aujourd'hui consensus : que l'urgence climatique est le combat écologique numéro 1 (non que les autres ne soient pas de première importance, mais qu'avec des températures, un climat général devenant totalement fous, c'est l'idée même de vie sur terre qui est remise en jeu). Que les (sur)activités humaines de ces deux derniers siècles en sont une des causes prépondérantes. Qu'au coeur de ces activités, ce sont nos rejets de gaz à effet de serre, au premier rang desquels le CO2, que l'on peut accuser de provoquer ce bouleversement climatique à la fois général et parfaitement inédit à une échelle de temps aussi réduite.

Il faut donc IMPÉRATIVEMENT diminuer drastiquement ces rejets.

Hervé Kempf rappelle quelles sont les trois pistes majeures, en matière de production d'énergie (l'utilisation de la triplice pétrole-gaz-charbon étant la source prédominante en ce domaine) :

- Les énergies dites "renouvelables" (Kempf pense, à ce propos, le solaire bien plus efficace que l'éolien, même s'il est loin de l'éliminer)
- Les économies d'énergies (via de meilleurs rendements, via l'habitat, via la technologie, etc)
- le nucléaire !

Car Kempf ne le nie pas : si l'on prend le seul décompte de la production nucléaire elle-même, le moins que l'on puisse en dire, c'est qu'elle est très peu dispensatrice de gaz à effet de serre. C'est d'ailleurs à ce titre que notre actuel président, devenu nucléophile avec le temps, a imposé, via un "lobbying de dingue" que l'Europe mette le nucléaire au rang des "énergies durables (avec le gaz, ce qui est au moins aussi délirant)... On croit rêver !

Car le nucléaire n'est ni vert, ni durable et c'est ce qu'Hervé Kempf explique dans les quelques cinquante pages de ce rapide opuscule, véritable vade mecum de la pensée anti-nucléaire.

Il rappelle ainsi que si sa production est assurément peu polluante, il n'en est rien, évidemment, de la construction des centrales - gageons que c'est, hélas, le problème de toutes nos productions - mais que c'est encore bien plus problématique en terme de "retraitement" des déchets, dont nous ne savons, en réalité, que faire, si ce n'est que de les envoyer très loin - en Russie, par exemple !!! -, que c'est encore plus problématique en terme de démantèlement et que la question va se poser cruellement les prochaines années, l'immense majorité de nos actuelle centrales n'en ayant plus que pour une décennies, deux tout au plus, d'exploitation.
Le nucléaire, ce sont aussi des problématiques de sécurité (dans absolument tous ses aspects), de coûts économiques, sociaux énormes et à n'en plus finir, lesquels tendent à devenir sérieusement problématiques dans un monde instable, un monde où la guerre peut - on le voit bien depuis six mois - ressurgir n'importe où, y compris à quelques encablures de notre "douce France", un monde où des faillites d'État (et les conséquences internes innombrables) ne sont jamais de l'ordre de l'improbable, et même, sans aller jusque-là, un monde où la "voilure" de l'État est plus à la réduction et au désengagement qu'à la générosité sans fin, etc.

(Pour mémoire, et même si Hervé Kempf ne la mentionne pas, il faut savoir que la minuscule centrale de Brennilis, sise au coeur de la Bretagne finistérienne, attend depuis 36 ans son hypothétique démantèlement, tandis que, si elle a bien été bombardée de radioactivité, elle n'a pour ainsi dire jamais produit le moindre mégawatt !!! Cela laisse songeur quant à notre capacité technique et technologique à nous débarrasser sans mal de monstres comme celles qui ont été mise en service depuis...)

Il y a, aussi, le risque non négligeable d'accident... Vous savez, celui qui ne devait pourtant JAMAIS advenir, comme c'était le cas à Fukushima. Il y a aussi cette manière vraiment propre au nucléaire et à ses défenseurs de systématiquement minimiser les dégâts, les coûts humains, environnementaux et économiques de ces deux exemples, quand bien même de nombreuses preuves du contraire auraient été avancées ou que, pour le cas notoire et désastreux de Tchernobyl, cette catastrophe n'a jamais pu être documentée à hauteur du désastre (même si de nombreux études converge vers un passif infiniment plus dramatique que celui annoncé par les nucléocrates) car, faut-il le rappeler, celle-ci eu lieu dans les moments même de la fin de l'Empire soviétique et du véritable chaos social qui en découla.

Il y a enfin que l'énergie nucléaire civile, de part son lien direct avec le nucléaire militaire, ne peut, ne pourra jamais être une énergie comme les autres, en terme de recherche, en terme de géopolitique, en terme de stratégie, en terme de démocratie (alors même que les énergies carbonées ne sont pas des phares en la matière). C'est donc tout autant dans des termes strictement politique que seulement environnementaux et techniques qu'il faut aborder le nucléaire. Faire l'économie de cette réflexion, c'est se promettre des lendemains capable de déchanter pitoyablement.

Le Nucléaire, c'est aussi, assurément, l'énergie la plus en phase avec le capitalisme financiarisé, vertical, autoritaire. C'est, à lui seul, l'idée que l'on peut se faire d'un certain projet de société, lequel demeure forcément du côté de la surexploitation des ressources, de la croissance quasi sans fin, d'un monde où surproduction et consumérisme effréné prime tout, etc. C'est, bien entendu, un point de vue que l'on peut tenir. Ce n'est, vous l'aurez compris, pas celui d'Hervé Kempf... ni le mien.

C'est donc un peu tout cela, et bien d'autres détails d'importance, qu'Hervé Kempf rappelle dans ce Libelle. Ce n'est bien entendu pas l'ouvrage le plus complet sur le sujet (même s'il dispose tout de même d'un petit appareil de sources documentaires), mais il résume fort bien la position des opposant au retour du nucléaire dans notre "mixe énergétique", tel que semble le vouloir l'actuel président de la République.

Un petit opuscule très utile, à défaut de faire découvrir des faits véritablement nouveaux.
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On peut être d'accord ou non avec l'auteur, Hervé Kempf, mais au moins il ne cache pas d'où il vient ni ses opinions. Pour lui, le nucléaire ne propose pas un ratio bénéfice-risque valable. Trop cher, trop aléatoire, trop dangereux.
Malgré toutes les assurances des promoteurs de cette technologie (et on apprend qu'ils sont partout, surtout parmi nos dirigeants), on ne peut se rassurer en se disant qu'un accident est hautement improbable. Il est possible. Et même fortement. Surtout au vu des conditions actuelles de manque de moyens et de la volonté de prolonger des centrales pas prévues pour durer autant. le passage traitant de ce thème m'a fortement marqué et grandement inquiété.
Les comparaisons avec les autres énergies, renouvelables, tiennent la route. Mais je ne connais pas assez le sujet pour juger.
Par contre, je peux dire qu'en tant que lecteur, j'ai apprécié la lecture de cet ouvrage, clair et simple, précis et convaincant. C'est effectivement un essai partisan, mais argumenté et porteur d'informations respectables. Un bon choix pour moi.
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L'énergie nucléaire est devenue marginale dans le monde, plus coûteuse que les énergies renouvelables, incommensurablement plus dangereuse, pourtant la France s'obstine à persévérer dans cette impasse avérée, au nom du mantra des nucléaristes selon lequel le nucléaire ne produisant pas de CO2 serait bon pour le climat. En quelques dizaines de pages denses et documentées, Hervé Kempf, rédacteur en chef du site d'information Reporterre, démonte la propagande de ces lobbyistes.
(...)
Indispensable contribution au débat monopolisé par des décideurs aveugles et sourds. Ferme réponse aux assertions pleines d'aplomb matraquées à longueur d'antenne, d'articles ou de bandes dessinées.

Article complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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« … le réchauffement climatique risque fort d'accroître les tensions internationales, surtout si les pays ne font pas le choix de la sobriété, mais veulent maintenir une économie de croissance : il faut dans ce cas se situer dans une « perspective où la raréfaction accélérée des ressources nécessaires aux sociétés industrielles (pétrole, gaz, minerais…) viendrait à raidir les relations internationales », observait dès 2011 le sociologue Pierre Jacquiot. En fait, l'atome suppose la paix et une société très stable. « Construire une centrale, observent les jeunes chercheurs Bérengère Bossard et Aurélien gabriel Cohen, c'est faire le pari que rien de grave n'arrivera à cet endroit penfant au moins des décennies. »Un pari que le changement climatique rend hasardeux, voire irresponsable. » (p.27)
« le nucléaire, en fait, est antithétique aux principes d'une société démocratique. Par son imbrication avec la bombe, on l'a vu, mais aussi parce que c'est une technologie massive, centralisée (le terme de « centrales nucléaires » l'exprime bien), qui implique des structures de contrôle verticales et policières en raison même du danger qu'elle représente. » (p.50)
En une petite soixantaine de pages, Hervé Kempf répond à la propagande du lobby pronucléaire en France et des « experts intouchables » comme Jean-Marc Jancovici, une propagande devenue si massive qu'elle en arrive aujourd'hui à retourner les esprits de beaucoup d'anti-nucléaires ! Il montre, au fil d'une argumentation rigoureuse, à quel point l'énergie atomique reste, même et surtout au coeur de la crise de pénurie électrique actuelle, la pire des solutions, aussi bien sur le plan économique que sur celui des pratiques politiques, et pourquoi la conserver et en augmenter l'envergure représenterait une aventure pleine de dangers (avec, en outre, un délai d'une quinzaine d'années pour, qu'éventuellement, les nouveaux prototypes de centrales fonctionnent ; qui a dit que l'on pouvait attendre cette échéance-là ?), quand il devient urgent de développer éolien et solaire, à l'instar d'autres pays européens, voire d'autres sources d'énergies renouvelables. Un petit guide utile pour contrer l'offensive des pronucléaires, au moment même où les menaces autour de Zaporidja en Ukraine devraient nous inciter à relativiser la bonne parole de l'atome salvateur à la française !
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Nucléaire ou sobriété, il faut choisir.

Contrairement à ce que prétendent les nucléaristes, la question de l'énergie nucléaire du point de vue du climat n'est pas que scientifique, elle est tout autant politique. Et ce n'est pas un hasard si le choix du nucléaire est majoritairement fait par des dictatures ou des pays très autoritaires (Chine, Russie, Biélorussie, Turquie...). Pas un hasard non plus si, en France, le nucléaire est essentiellement soutenu par des partis de droite ou d'extrême-droite. D'abord, il y a un lien consubstantiel entre nucléaire civil et arme atomique, comme l'a rappelé le président de la République française en décembre 2020 : «Opposer nucléaire civil et nucléaire militaire en terme de production, comme en terme de recherche, n'a pas de sens dans un pays comme le nôtre. La filière vit de ses complémentarités et elle doit être pensée dans ses complémentarités.» Ensuite, un débat ouvert ne donne pas l'avantage à l'énergie nucléaire, qui ne peut s'imposer qu'en limitant l'information. Comme l'observe La Parisienne Libérée, «le nucléaire est par essence militaire et le rapport de cette industrie au secret définit la nature même du régime politique dans lequel il nous oblige à vivre». En France, les décisions sont imposées sans discussion, comme l'a déploré la Commission nationale du débat public, écrivant : «L'énergie nucléaire est-elle nécessaire à la transition énergétique ? C'est un débat dont le public n'a jamais pu se saisir.»
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Dans le monde hypertechnologisé que façonne le capitalisme dans son inextinguible volonté de croissance, l'imprévu catastrophique se produit de plus en plus souvent : une pandémie bouleverse le monde depuis 2019, le réchauffement climatique favorise des mégafeux en Australie et des sécheresses à répétition dans le monde, une guerre dévastatrice se déroule sur le territoire européen…
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Il est stupéfiant que les nucléaristes et avec eux la majorité des politiques raisonnent comme si un accident grave ne pouvait jamais se produire en France.
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