Hasard et coïncidence, à peine fermé le très bon « Wild wild Siberia » (voir la critique), une rocambolesque épopée au fin fond de la Russie post-soviétique, voilà une autre aventure homérique au sens propre, mais nettement moins drôle. L'action se situe en Afghanistan, juste avant la dernière prise de Kaboul par les talibans, et on va très vitre être propulsé dans un monde aussi beau par ses paysages et son passé culturel qu'infernal par les guerres perpétuelles qui le ravagent.
Trois personnages alternent un récit à la première personne, deux étant prépondérants, le troisième marginal dans le récit, sauf à faire connaître le poète assassiné par les talibans, Bahodine Majrouh.
Charles, ancien des services secrets, a été un contact privilégié du commandant
Massoud jusqu'à son assassinat, dont il s'attribue à tort ou à raison une part de responsabilité. Devenu vigneron, prétexte à occuper sa solitude, il est sollicité par Judith, écrivaine lettrée qui connaît sa Grèce antique sur le bout des doigts, et qui veut marcher dans les pas d'Alexandre le Grand en Afghanistan, pays pourtant en train de basculer. Pas dupe mais peu soucieux des véritables motivations de la dame, Charles accepte pourtant cette mission impossible et lui servira de guide et de garde du corps, sans doute pour tenter d'en finir avec sa propre culpabilité.
La suite est la découverte immersive du pays, de son passé historique et mythologique, sans jamais être pontifiant, mais on va rapidement basculer dans le chaos avec la vague talibane qui déferle sur le pays et toutes les horreurs qui l'accompagnent. On assiste à une traque héroïque, avec les moyens du bord, on rencontre des sages, des fous, des criminels de guerre, dans des paysages admirablement décrits, avec un style remarquable, parfois très poétique.
Je connaissais peu
Jean-Pierre Perrin, mis à part "
Une guerre sans fin", très bon aussi, mais s'il s'est documenté pour ce livre, cet ancien grand reporter à « Libération » a longuement travaillé en Afghanistan et dans les pays alentours et a déjà écrit plusieurs livres autour de ce pays ou d'Alexandre le Grand, dont il est beaucoup question ici. Il ne me reste plus qu'à me procurer «
Chiens et louves », du même auteur (Série Noire 1999), dont j'ai vu que l'on disait beaucoup de bien.