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EAN : 9782953390971
550 pages
NAWA (01/05/2011)
4.58/5   12 notes
Résumé :
Voilà. On l'attendait, certains la craignait, beaucoup la redoutaient tant ils savaient que plus elle se faisait attendre, plus implacable elle serait. Il aura fallu dix ans au bas mot pour pouvoir lire enfin, une réponse à la schizophrénie islamophobe qui s'est emparée de la France et qui ne cesse de prendre de l'ampleur à l'approche des nouvelles élections présidentielles. Traitant le sujet de front, l'auteur livre ici son premier essai où il décrit l'inanité du m... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Pour le moment , c'est un plaisir de lire , beaucoup d'eclaircissement au sujet de l'histoire de la laïcité
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
La traduction française habituelle du terme arabe (dîn) est "religion", mais il faut souligner que l'idée occidentale commune et usuelle de religion ne se retrouve pas dans la signification du terme arabe (dîn), mais plutôt dans un autre terme, celui de madhab. Le terme madhab, utilisé spécialement dans les sciences théologiques renvoie en effet à toutes les différentes écoles de pensée ou doctrines de jurisprudence de l'islam. Mais étymologiquement, il signifie aussi opinion, idée où croyance, or on ne dit jamais madhab al-Islam, pour signifier religion musulmane, mais plutôt dîn al Islam. Car le terme dîn recouvre une réalité beaucoup plus large, qui ne renvoie absolument pas à l'idée de religion dans le sens qui lui est généralement attribué dans l'Occident sécularisé, et notamment dans la France laïque.
Même un adepte de la sécularisation de l'islam comme Abderrahim Lamchichi, est obligé de le reconnaître : " Dîn, qui ne regroupe pas exactement le concept occidental de religion (en latin : religio), se définit par trois éléments : le contenu de la foi (iman), la pratique de l'islam et tous les commandements de la loi (Shari'a)". (Abderrahim Lamchichi, femmes et Islam, L'Harmattan, 2006, p. 280.)
Le champ de définition du terme (dîn) étant en effet plus vaste, les experts de la langue arabe et du Coran ont établi la liste de certaines de ses significations qui peuvent renvoyer à : obéissance, soumission, loi, us et coutume, conviction, culte, religion, façon de vivre, code de vie, état, rétribution, jugement, autorité, règle, gouvernement, pouvoir...
Mais paradoxalement, après avoir, semble-t-il, assez bien compris la portée du terme (dîn), Lamchichi retombe dans le conformisme de l'idéologie occidentale en stigmatisant la bonne définition de l'islam : " Pour les islamistes, l'islam est un tout qui mêle tout a la fois la communauté religieuse et la vie temporelle (Din wa Dunya), la religion et le gouvernement politique de la cité (Din wa Dawla) [...] pour les islamistes comtenporains l'islam est a la fois din (culte et vie spirituelle) dunya (domaine de la vie matérielle et sociale) et dawla (Etat, gouvernement politique). Autrement dit, le principe de l'Unicité divine (Tawhid) implique une confusion des ordres (spirituel et temporel, religieux et politique) et un rejet de la laïcité".
(Ibid).
La question est de savoir si lui aussi, se considère parmi les "islamistes" puisqu'il a pourtant défini de manière exacte et compris comme eux le sens du mot dîn en Islam, qui comporte en lui-même l'absence de distinction entre temporel et sacré. Car en effet, dans le Coran, le terme dîn se réfère à toutes ces significations politiques et temporelles. Elles peuvent se répartir comme :
– Le commandement, la royauté et l'autorité qui n'appartiennent qu'à Allah.
– L'obéissance, la soumission et l'allégeance à son autorité et à son commandement.
– Le système de vie établi par cette autorité, c'est à dire toutes les lois et les règles qui régissent la vie, spirituelle, culturelle et sociale.
– La rétribution et le jugement : la récompense attribuée par cette autorité (Allah) à ceux qui suivent ce mode de vie (L'islam) et qui s'y soumettent, et le châtiment infligé à ceux qui y désobéissent et se rebellent.
Ces quatre grandes différentes significations existent dans plusieurs versets, par exemple : [ Nous te révélons ce livre en toute vérité. Adore donc Allah et voue lui un culte (dîn) sans partage ]. Sourate 39, Verset 2.
"Dîn" est traduit ici par "culte" car c'est ce sens qui est visé dans le verset. [ Souverain du jour de la rétribution (dîn)]. Sourate 1, Verset 4. Dans ce verset également, "dîn" signifie l'idée de rétribution (rendre des comptes). Dans un autre verset : [ Aujourd'hui, j'ai parachevé pour vous votre religion (dîn), et j'ai accompli sur vous mon bienfait ]. Sourate 5, Verset 3. Dans ce verset, la traduction du terme "dîn" par religion peut-être réductrice selon le sens que l'on donne à religion.
Ibn 'Abbas explique dîn dans ce dernier verset par "système de vie imposé par l'islam", c'est-à-dire les autorisations, les obligations et les interdictions.
Limâm Souyouti interprète ce verset de la même façon en s'appuyant sur le fait qu'après ce verset, plus aucune autre révélation ne concerna les questions relatives au licite et à l'illicite. Ibn Kathir, éminent exégète du Coran, comprend de la même manière le code de vie qui régit l'existence du musulman, les lois et les règles dictées par l'islam. Cependant il étend le sens du mot dîn à tout ce qu'englobe la religion comme culte et comme doctrine. Dans un autre verset, il est dit : Joseph commença par les sacs des autres avant celui de son frère, il en retira la coupe. Ainsi suggérâmes-Nous cet artifice à Joseph sans lequel il ne pouvait retenir son frère près de lui selon la loi (dîn) du roi, à moins qu'Allah ne l'eût voulu. Nous élevons au rang qui Nous voulons. Et au-dessus de tout homme détestant la science, il n'y a plus docte que lui. Sourate 12, Verset 76.
L'érudit At-Tabari explique ici le terme (dîn) par jugement (hukm) : ainsi on comprend (dîn) dans le sens du verset comme une pratique judiciaire en conformité avec les sources législatives issues d'une autorité politique (dans le verset : l'autorité représentant le roi d'Égypte). Ce verset est l'une des preuves les plus probantes que le terme (religion) en Islam peut lui-même désigner l'idée d'autorité politique. C'est pourquoi l'imam Jamaldine Al Qassimi dit dans "Mahasin atrawil" en commentant ce dernier verset : "...cela prouve la possibilité d'appeler tous les codes de lois des autres traditions non musulmanes, "religion" (dîn) : et les versets sur cela son nombreux". Dès lors, ce qu'il faut absolument retenir de cette dernière analyse du terme (dîn), c'est que dans la vision théologique et philosophique musulmane, le bouddhisme où le judaïsme peuvent être appelés dîn (religion) car ils véhiculent évidemment des dogmes et des spiritualités accompagnés de rites et de cultes. Mais l'islam considère aussi comme des religions (dîn), la démocratie, le nationalisme ou le communisme par exemple, puisqu'ils son vecteurs de principes idéo-philosophiques ayant trait au pouvoir temporel avec un système politique et juridique à appliquer. Cette définition du terme religion en Islam rejoint donc les définitions les plus pertinentes que les anthropologues et sociologues lui ont données, celles que nous avons vues dans notre toute première partie. Pour rappeler ces différentes définitions, lisons encore une fois, comment l'un des pères de la sociologie moderne, le français Émile Durkheim définit lui aussi la religion : " C'est par leur forme et non par leur contenu qu'on reconnaît les phénomènes religieux...on appelle phénomènes religieux les croyances obligatoires ainsi que les pratiques relatives aux objets donnés dans ces croyances".
Cette définition correspond exactement à la définition du mot dîn dans les sciences sociales islamiques, dans les deux cas elle ne s'arrête pas à une définition réductrice liant croyance, foi et spiritualité.
L'islam est donc un dîn, une religion, car il possède un dogme, une croyance, un culte, des rites, une spiritualité, un droit, des lois, des jugements, une morale, un système de vie et une éthique de conduite. Il a donc une vision du monde, de l'homme, de sa société et du pouvoir, de l'ordre terrestre et de l'ordre céleste.
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La traditionnelle politique laïque envers l’Islam

Un des autres éléments permettant de mettre à jour le cynisme de la laïcité française et la réalité de son application, est d’étudier les liens institutionnels entre l’Etat français et l’Islam. Il faut débuter par une compréhension historique, car ce rappel nous permettra ensuite de mieux saisir la nature des relations et des politiques publiques françaises envers l’Islam.

La première relation notable et pertinente, car révélatrice de la future attitude française, est celle qui s’est manifestée en Égypte lors de l’expédition napoléonienne. Après les victoires militaires contre les mamelouks et la prise du Caire, Napoléon s’attache à organiser l’Égypte pour assurer une domination française sur le pays ainsi que sur sa population foncièrement hostile. Bonaparte sait que pour régner sur l’Égypte musulmane, il lui faut d’abord la coopération des élites pour obtenir leur soumission totale. Les premiers d’entre eux, les plus respectés par la population sont bien évidement les savants de l’Islam du fait de leur rôle politique, social et religieux. Dès lors, le grand orientaliste français Jacques Berque nous explique : « Quand Bonaparte conquiert l’Égypte, il installe immédiatement un conseil des oulémas ; les français quitteront l’Égypte, mais ce conseil leur survivra… », Ce conseil de savants complaisants et dociles, saura rédiger nombre de fatwas argumentées pour calmer le peuple du Caire et le pousser à accepter la collaboration et la soumission à l’autorité militaire française. C’est cette pratique qui sera davantage approfondie par la France en Algérie. La conquête coloniale obligera en effet la France à s’immiscer de manière plus systématique dans la gestion et le contrôle du culte musulman.
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Dans un autre verset, il est dit : « Joseph commença par les sacs des autres avant celui de son frère ; il en retira la coupe. Ainsi suggérâmes-Nous cet artifice à Joseph sans lequel il ne pouvait retenir son frère près de lui selon la loi (din) du roi, à moins qu’Allah ne l’eût voulu. Nous élevons en rang qui Nous voulons. Et au-dessus de tout homme détenant la science, il y a plus docte que lui. »[1] L’érudit at-Tabari explique ici le terme « dîn » par jugement (hukm) : ainsi on comprend dîn dans le sens du verset comme une pratique judiciaire en conformité avec des sources législatives issues d’une autorité politique (dans ce verset : l’autorité représentant le roi d’Égypte).

Ce verset est l’une des preuves les plus probantes que le terme « religion » en Islam peut lui-même désigner l’idée d’autorité politique. C’est pourquoi l’imam Jamaldin Al Qassimi dit dans « Mahasin at-Tawil » en commençant ce dernier verset : « … cela prouve la possibilités d’appeler tous les codes de lois des autres traditions non musulmans, ‘’religion’’ (din) : et les versets sur cela sont nombreux. »

Dès lors, ce qu’il faut absolument retenir de cette dernière analyse du terme dîn, c’est que dans la vision théologique et philosophique musulmane, le bouddhisme ou le judaïsme peuvent être appelés dîn (religion) car ils véhiculent évidemment des dogmes et des spiritualités accompagnés de rites et de cultes. Mais l’islam considère aussi comme des religions (din), la démocratie, le nationalisme ou le communisme par exemple, puisqu’ils sont vecteurs de principes idéo-philosophiques ayant trait au pouvoir temporel avec un système politique et juridique à appliquer.

[1] Sourate 12, verset 76. (p. 199)
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Cette opposition Nationalisme/Islam est d'ailleurs si flagrante que ceux qui combattent l'islam civilisationnel, cherchent par tous les moyens à promouvoir les idéologies nationalistes dans le monde arabo-musulman, ce qui a l'avantage de démembrer l'esprit communautaire de la oumma, désislamiser ces peuples et de leur faire adopter une idéologie séculière laïque. Les historiens ont déjà longuement expliqué la politique impérialiste anglaise vis-à-vis du nationalisme arabe anti-turc et son rôle dans la fin du Califat.
D'ailleurs il suffit de lire encore Christopher Chiclet dans《La Turquie interpelle l'Europe》:
"Par conséquent la réaction nationaliste apparaît comme le rempart le plus solide contre la montée de l'islam dans la mesure où elle est capable de rassembler nationalistes ethniques, étatistes libéraux et sociaux démocrates"... pour comprendre que ceci est encore d'actualité.
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Vidéo de  Aïssam Aït Yahya
Aïssam Aït Yahya : "Sécularisation de la foi musulmane". Avec base le livre publié aux Editions Nawa : "Les origines chrétiennes d'une laïcité musulmane - L'Irja ou le chaînon manquant".
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