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EAN : 9782830916676
168 pages
Labor et Fides (12/09/2018)
4.12/5   4 notes
Résumé :
De 2010 à 2017, Bachar Salloum a écrit à Philippe, son ami suisse. Depuis Damas d’abord, alors que la guerre débute, on suit le quotidien de cette famille ballottée par des événements de plus en plus terribles, au son des cris et des éclats d’obus. Puis vient le temps de l’exil, en Jordanie d’abord, en Suède ensuite, réfugiés. Pendant ces sept années de correspondance, Bachar – qui écrit dans un magnifique français littéraire rappelant Flaubert ou Hugo – évoque ses ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Correspondance de l'auteur à un ami, Philippe, rencontré peu avant les événements qui ont commencé à déchirer la Syrie en 2011, ces lettres content par le menu la cascade de faits qui ont amené Bachar Alkazaz à vouloir dès la fin 2012 fuir son pays afin de sauver sa famille, son épouse et leurs cinq enfants.

« 20 juillet 2012 Damas
Hier, j'ai fait la queue pendant 2 heures pour chercher du pain.
Le soir, je suis allé chez mes parents habitant à 5 minutes de chez moi, les rues quasi désertes et d'un calme méchant diffusaient une mauvaise odeur de peur. Les poubelles débordent. Elles n'ont pas été ramassées depuis au moins cinq jours. Les mouches, les guêpes et les gros chats y partagent leurs repas sous une chaleur intense qui dure depuis une longue semaine. »

Il prend très vite la mesure du danger à demeurer en Syrie, « car la mort commençait à se cacher à tous les coins de rue, et surtout écoeuré et révolté par ces deux jours où j'avais été arrêté pour avoir osé un jour répondre, avec beaucoup de civilité à une insulte d'un chien d'al-Assad. Alors, j'ai pris la décision de partir, de quitter la Belle Syrie, je ne supportais plus de la voir gémir entre la main d'un ogre. » p 74

Grâce à l'aide matérielle reçue de certains amis, l'auteur va pouvoir installer les siens pendant quelques mois à Amman, en Jordanie voisine, pour préparer minutieusement sa fuite vers la liberté, en passant par Istanboul, la Grèce afin d'atteindre l'Eldorado suédois, terre d'accueil pour lui et les siens.

Parfaitement bilingue, amoureux de la littérature française, de Flaubert et Maupassant, l'auteur s'exprime dans une langue littéraire souple, aisée et imagée en un récit de plus en plus haletant et poignant, où il nous fait partager ses interrogations, ses émotions ; on y sent sa farouche volonté de s'en sortir à tout prix.

Ayant eu la chance d'échapper aux griffes des passeurs qui transforment la Méditerranée en cimetière, il nous détaille son périple angoissant pour gagner la Suède, s'y installer, s'y intégrer, ses efforts quasi surhumains pour apprendre rapidement la langue et pouvoir obtenir les diplômes lui permettant d'exercer son métier d'enseignant et faire vivre dignement les siens, dont deux enfants en bas âge et une épouse violemment déstabilisée par ce changement si radical d'existence.

Ces lettres de plus en plus chaleureuses envers son ami Philippe, retracent ce parcours du combattant mené tambour battant par un homme au courage indomptable, qui force la sympathie du lecteur !

C'est un récit poignant, sans concession, qu'il nous livre jusqu'en 2018, de ses efforts colossaux pour parvenir à son but tout en exprimant dans l'urgence les interrogations douloureuses sur l'avenir chaotique du monde qui va être laissé aux enfants !
« ici, maintenant, je ne peux oublier une seule minute la chance que j'ai d'avoir les enfants dans ce pays. Ils auront toujours leurs racines dans le sol syrien et des ailes pour voler vers de nouveaux horizons en Europe » p142.
Que ce voeu d'espoir puisse se réaliser au mieux pour lui et toutes ces familles chassées de leur pays par la nécessité  et accueillies (ou pas, ou mal et à reculons) dans cette Europe, malade et frileuse, Terre Promise pour tous ces déracinés sans autre choix que s'adapter pour survivre, se construire une autre vie, en dépit de tout, loin de leurs racines !

« Je suis en train de faire l'expérience de l'exil, mais je n'ai pas la moindre envie de faire la rencontre du vide. J'aurais tellement eu envie de me trouver dans un pays, où la double culture, la double identité, ainsi que la double émotion puissent sortir et s'exprimer » octobre 2017 - p 160

Témoignage bouleversant que nous nous devons de méditer, enfermés que nous sommes dans nos confortables certitudes de nantis occidentaux, préservés de la violence impitoyable et destructrice qui lamine le Moyen-Orient !
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
27 octobre 2012
lundi passé, la veille de notre départ, nous avons été informés que non seulement les routes menant à la frontière jordanienne représentaient un danger réel ; mais qu'un point de contrôle du régime syrien juste avant le poste interdisait le passage aux personnes n'ayant pas de cachets jordaniens déjà inscrits sur leurs passeports . Nous avons été également informés par quelqu'un qui a vécu l'expérience que des hommes de renseignements généraux lui ont demandé un pourboire de 10000 livres syriennes par personne (environ 130 dollars américains) pour le laisser sortir. Quel luxe ! Il faut payer pour fuir la mort ! Pour te dire à quel point les hommes du régime sont corrompus. Quand je pense que le sort des Syriens, de cette nation, de ses richesses humaines et intellectuelles, de son patrimoine et de l'avenir de ses enfants se trouve dans les mains d'hommes pareils. Imagines-tu à quel point il est douloureux de quitter notre maison, nos parents notre passé, de devoir déchirer tant de photos et de souvenirs, de se lancer dans un pays qui n'est plus le nôtre ?
Nous avons toujours dans le cœur ce pays qui saigne. Je sais que les violences ne viennent pas que de l'armée du régime , mais aussi de l'opposition armée, mais il est un responsable qui peut et doit faire quelque chose pour sauver son pays et son peuple même s'il doit partir.
En réalité, on ne gouverne pas la Syrie, on pense la posséder.
page 48
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26 février 2013
Quant aux nouvelles parvenues de Damas, elles refusent de s'améliorer. Une des autre explosions qui ont secoué la ville jeudi passé ont eu lieu à 200 m de chez mes parents. Ils nous disent avoir eu simplement une vitre cassée, je souhaiterais tant les croire ! Je connais le quartier par cœur. Et je te dis être persuadé que le régime est derrière cet attentat. Ni l'ambassade de Russie, ni le siège du parti, ni encore le centre de sécurité, où, si tu veux tout savoir, moi-même j'avais été arrêté pendant une semaine n'ont été touchés ! Seulement des passants et les enfants de l'école où j'emmenais Ayham et Sami quand ils étaient en primaire.... De plus, n'est-il pas étonnant de voir qu'une charge explosive ait pu passer les points de contrôle, tellement bien équipés et déployés tous les 200 m dans les rues de Damas ? Mais combien de vérités ont été enterrées de cette façon ! En tout cas, la Syrie est en train de tourner très mal. Il s'y enterre aussi bien des corps humains que des vérités.

Page 63
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10 août 2013
[…]
Les enfants retournent à l'école dans deux semaines. On aura passé l'été à la maison. Mais nous ne devons pas nous plaindre. Tant de Syriens n'ont plus de maison pour goûter au luxe de s'y ennuyer.
p.68
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Comment faire pour ne pas se ranger du côté aveugle d'un moi collectif ethnique ou communautaire?
Le plus beau que possède la Syrie (l'harmonie) risque de voler en éclats.
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