" Meurtre à la bibliothèque", voici un contexte qui devrait accrocher la cible ado lectrice.
Peut-être empruntera t-elle même ironiquement ce roman dans un établissement de prêt?
Imaginez, à peine sorti des rayons et entrouvert, le livre entamera sa mission d'inspiration, l'intrigue policière commencera ici et maintenant.
Un détail vendeur.
Pas d'enfants ou ados enquêteurs sur ce coup, l'auteur Frank Andriat aura à priori confiance en la maturité et la curiosité croissante des lecteurs ados, ils se prendront tout aussi bien d'intérêt pour l'enquête d'un commissaire à la retraite. De quoi se rapprocher des romans policiers adultes à petits pas, des polars.
C'est l'épouse de ce retraité qui fera le lien avec le lieu du crime, elle est bibliothécaire et sur les dents.
Une exposition importante.
L'auteur mettra aussi le projecteur sur un nouvel employé qui ne semble pas faire l'affaire.
Sera t-il le meurtrier, la victime?
Sinon pourquoi en parler?
Il est probable à la façon dont le personnage est décrit qu'il finisse avec une arme blanche entre les omoplates avant la moitié du livre, il porte sérieusement toute l'équipe sur les nerfs par son incompétence.
Un détail nous intrigue cependant, l'auteur se laisse aller sans doute volontairement à des facilités sur la présence d'un élément masculin dans une équipe féminine, avec son lot de sexisme et de clichés. On ne peut ne pas supposer que l'auteur souhaite par la suite nous surprendre. Ou pas.
Doit on se fier aux apparences ou à son instinct?
Nous passerons en revue le reste de l'équipe avec moins animosité et passons au crible un détail qui pourrait nous indiquer le chasseur et le chassé. La femme du commissaire? La fille de son ex-collègue, jeune agent de la bibliothèque?
Quand et dans quel rayon va s'exécuter le meurtre annoncé en 1ère de couverture?
Quelle arme?
L'arme blanche, le pistolet, le poison, une étagère haute et trop chargée?
L'impatience nous met sur les dents nous même.
Et voici que Damien l'ex-commissaire commence lui aussi à s'échauffer suite aux contradictions de son épouse Judith qui s'enferme des heures dans un local avec cet employé qui multiplie les retards. Et mon dieu, ils rient à travers la porte, ils rient à gorge déployés.
La jalousie est un mobile classique pour un roman policier.
Nous n'avons pas vérifier les statistiques auprès des retraités sur Google, peut-être serions-nous surpris?
L'attente du crime est presque agréable car nous sommes corrélativement dans la mise en place d'un événement culturel, avec la pression qui monte, nous nous sentons familier du terrain décrit, l'effervescence, l'accueil d'un auteur à la bibliothèque, un vrai en chair et en os, le discours du maire, la lecture d'extraits devant le public.
Et puis enfin, Bam, notre attente sera récompensée ( les amateurs de policiers sont de chouettes charognards), un invité partira les pieds devant.
C'est certain, on aura rarement clôturé une animation avec des cris et des pleurs.
Au moins, la police sera sur place, à la retraite ou non.
C'est triste à dire mais la suite de l'enquête restera divertissante et l'on reviendra sur un autre idée reçue car non, l'emploi en bibliothèque n'est pas un long fleuve tranquille, les deux officiers de police vont enfin cesser de bailler aux corneilles et revenir dans leur partie.
Que personne ne sorte, que personne ne rentre, l'assassin est peut-être encore sur les lieux du crime!
Le ton et le déroulement de l'enquête sont crédibles, Frank Andriat jongle habilement avec plusieurs personnages, se mettant probablement dans le rôle de chacun comme pour une pièce de théâtre, cela jouera grandement pour aller plus loin et savoir comment l'auteur transformera une soirée ordinaire en cauchemar sans rendre la chose surréaliste.
Et jusqu'au bout, cela tiendra debout.
Jeunes lecteurs ados, nous n'en dévoilerons pas d'avantage.
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Son père est une star à la police. Il a résolu bien des affaires grâce à sa perspicacité, à sa persévérance et à son amour du détail. Les malfrats ne le piègent pas. Il va chercher ce qui peut les confondre jusque dans leurs poubelles et, pire qu’un rottweiler, il ne lâche jamais une enquête quand il l’a commencée, quitte à y passer quelques nuits blanches. Arthur, c’est un passionné : je le connais depuis plus de vingt ans et nous avons vécu d’intenses moments ensemble : découvrir des cadavres et pister ceux qui les ont envoyés de vie à trépas, cela crée des liens indissolubles. J’ai connu Amélie bébé : elle est pour Arthur une étoile tombée du ciel et les collègues et moi le charrions souvent à ce propos.
— Laisse aussi ta femme s’en occuper, bon sang ! Tu es trop possessif !
— Ma fille, c’est ma lumière et ma femme trouve assez de moments pour être avec elle. Je vous rappelle que mon boulot m’éloigne, souvent et à toute heure, de la maison, les gars !
Il soutient Amélie dans tout ce qu’elle entreprend. Elle écrit depuis son adolescence et, plusieurs fois, Arthur nous a fait une lecture émue de ses textes au commissariat. Il l’imagine sans peine défendre ses chefs-d’œuvre dans les médias. Arthur est touchant. Son boulot parfois très rude de policier n’a pas
L’univers des écrivains où prétention et ego gonflés à bloc me paraissent très courants m’a toujours interpellé. Un commissaire de police ne fréquente pas le même monde qu’une bibliothécaire dirigeante et, plusieurs fois, Judith et moi nous sommes gentiment chamaillés à ce propos. Aussi talentueux soit-il, Norbert Juillet ne s’adonne qu’à une activité qui lui plaît et, selon moi, il n’a pas davantage droit aux honneurs qu’un plombier richissime (je l’espère avec ferveur, celui-là !) ou qu’un pâtissier qui réussit une religieuse ou un saint-honoré. Ce genre de réflexion fait bondir Judith.
Elle parlait de lui comme d’une édition rare. Il était efficace, fin lecteur et collectionneur, ce qui le rendait précieux pour certaines recherches. La rumeur racontait qu’il aimait aussi toucher à l’écriture, mais personne n’avait réussi à en apprendre plus, c’était son jardin secret.
Les crimes, je le rappelle, sont, dans la plupart des cas, l’œuvre de proches. L’important, pour avancer, est de fermer des portes et d’être particulièrement attentif aux détails. Qui avait intérêt à ce que Jérôme meure ? Qui lui en voulait ? Qui aurait pu avoir un mobile pour le tuer ? Que raconte la manière dont il a été tué ? Que révèlent les éléments qui se trouvent sur la scène de crime ? L’argent, le manuscrit, ce message de menaces imprimé sur du papier utilisé par la municipalité…
Un meurtre, même sans préméditation et avec des circonstances atténuantes, cela envoie pour quelques années à l’ombre. Et un flic qui rejoint des taulards n’est en général pas très bien reçu. J’espère que le juge se montrera clément et qu’Arthur survivra à ses années de détention.
Livre-toi- Frank Andriat - 11 juin 2013
Ker Editions