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3,95

sur 7445 notes
un roman qui fait réflechir,
on est vraiment pris du début à la fin
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En 3 mots… Matrice, chambre, passé
Impressions de lecture… J'ai lu ce livre (ma première lecture d'une oeuvre de Margaret Atwood) peu de temps après "Lire Lolita à Téhéran" de Azar Nafisi et je n'ai pu m'empêcher de trouver des points communs entre les deux, ce dont j'ai déjà parlé dans un précédent billet (ici). Dans cette dystopie aux accents de revendications féministes, la république de Gilead, frappée par une dénatalité galopante, asservit les femmes fertiles, comme Defred, l'héroïne et narratrice, afin de donner des enfants aux hauts dignitaires mariés. Sur fond de fanatisme religieux et d'oppression, ces femmes se résument à leur matrice et deviennent les esclaves d'hommes qu'elles n'ont pas choisis. Chacune est dépossédée de son nom, baptisée d'un nouveau patronyme marquant son appartenance et placée dans la maison de l'homme auquel elle a été attribuée. Elle y vit aux côtés de l'épouse de ce dernier et doit se livrer régulièrement à une cérémonie d'accouplement, en présence de la dite épouse, dans l'espoir d'être fécondée et de porter la grossesse à terme. Vêtue de rouge, voilée, elle vit comme une captive dans une austérité monacale. Elle peut sortir de la maison, mais ces incursions sont contrôlées et elle est privée de toutes les libertés et de toutes les formes d'émancipation dont jouissaient auparavant les femmes. Car Defred a connu une vie semblable à la nôtre avant l'avènement de cette nouvelle société. Elle avait un mari, une petite fille, elle travaillait, pouvait dépenser son argent, lire, s'exprimer, se maquiller et circuler comme bon lui semblait.

Disons-le tout de suite, ce roman d'anticipation est très convaincant et profondément effrayant. Les trente ans écoulés depuis son écriture ne lui ont pas fait perdre de sa force, bien au contraire. Certains de ces thèmes sont d'actualité et pourraient très bien constituer un avenir plus ou moins proche. Effrayant par sa dimension d'anticipation mais aussi par la puissance de son écriture. L'auteur nous fait pénétrer dans les pensées et les ressentis de l'héroïne. Par exemple, quand Defred sort voilée et qu'elle se sent résumée, dans son rapport à l'autre et au monde, à un regard au champ visuel réduit, ou bien quand elle est concentrée à l'intérieur d'elle-même, guettant les prémices des menstruations qui sont signes « d'échec ». Car Defred devient elle-même obsédée par cette idée de procréer, par ce vide à remplir (p.127-128). La réflexion sur le corps est captivante, ce corps asservi, caché, privé de sensualité. Ici, une des armes d'oppression du gouvernement, d'annihilation de l'individu, de déshumanisation, passe par l'élimination des stimuli sensoriels (d'ailleurs Azar Nafisi évoque aussi cette privation dans Lire Lolita à Téhéran, p.286 notamment, lire le billet sur cette oeuvre, ici). Au début de la cinquième partie, intitulée « Sieste », Defred s'ennuie, elle voudrait occuper ses mains, fumer une cigarette, elle voudrait être comme ces cochons dont elle a entendu dire qu'on leur donnait un ballon pour les occuper, « Je voudrais bien avoir un ballon de cochon » (p.120) pense-t-elle.

Au-delà de l'aspect féministe et féminin, le livre est aussi une grande réflexion sur le conditionnement, l'asservissement des individus à une organisation du pouvoir et de la société. Car Defred voudrait se révolter, mais elle est aussi tentée de baisser les bras et de rentrer pleinement dans ce moule qu'on lui impose. Elle est parfois gagnée par le désespoir et l'envie d'en finir. Moïra, son amie, sert d'ailleurs de contraste, elle est celle qui a osé se libérer alors que Defred et ses autres camarades étaient en train de perdre « le goût de la liberté » (p.225). Car oui, Defred a connu autre chose et elle se sent comme « une réfugiée du passé » (p.379), la formule est évocatrice, elle est exilée, déracinée et elle ressasse ses souvenirs, sa vie d'avant. Malgré le fait que le récit nous fasse partager l'intériorité de Defred, il y a dans tout le livre quelque chose de très cinématographique, car l'image y tient une part importante, les costumes très graphiques des servantes, les cérémonies qui sont des mises en scène, les détails visuels, les descriptions etc. le roman a d'ailleurs été porté au cinéma, par Volker Schlöndorff en 1990 et adapté en série tv en 2017 par Bruce Miller, mais je n'ai vu ni l'un ni l'autre. le thème de l'image, de la vue, prend une place importante dans le roman. le Mur en est une des expressions, ce Mur en ville sur lequel sont pendus des opposants au régime, spectacle macabre qui entretient la terreur et dont pourtant Defred ne peut détacher ses yeux et qu'elle retourne voir, jour après jour.

La construction est très bonne, elle invite le lecteur à assembler petit à petit le puzzle, ce qui tient notre attention en éveil et nous fait entrer pleinement dans l'histoire. Même si le rythme ne m'a pas toujours convaincue, il y a quand même des moments où on est emporté par l'envie de connaître la suite. La temporalité du récit est très intéressante, à la narration au présent, se mêlent des souvenirs et des projections. Travail sur la temporalité qui trouve son point d'orgue dans la dernière section du livre : les « notes historiques ». Ce qui est un futur pour nous, le récit de Defred raconté au présent, devient le passé d'autres personnes (qui se situent donc dans un futur encore plus éloigné pour nous). Une réalité de la marche du temps : notre présent deviendra un passé, et même un passé lointain, il constituera un jour le sujet de recherche des archéologues et historiens du futur. Cette section dissèque de manière plus didactique la structure et les principes de la république Gileadienne en lui donnant la petite patine des objets d'étude universitaire. L'histoire (avec un petit h) de Defred entre alors dans l'Histoire (avec un grand H). le recul de l'Histoire met une certaine distance entre notre propre vie et les éléments du passé, mais cette distance semble abolie dans l'oeuvre de fiction. La littérature et l'imaginaire tissent un rapport très immédiat, tant intellectuel qu'émotionnel, entre notre esprit et l'oeuvre de fiction. Face à l'Histoire, dont les drames et les horreurs semblent voués à se répéter, la littérature (porteuse de témoignages, de reconstitution, de réflexion sur l'âme humaine, d'anticipation, de nouveaux mondes possibles) ne joue-t-elle pas un rôle déterminant « si nous voulons permettre à nos formation sociales de produire des sujets capables de se donner des valeurs épanouissantes et réfléchies ? », je reprends là les mots d'Yves Citton. Citation tirée (p.231) de son formidable ouvrage Lire, interpréter, actualiser. Pourquoi les études littéraires ? aux éditions Amsterdam, qui démontre de manière passionnante et convaincante le pouvoir impérissable et les forces motrices des grandes oeuvres littéraires.

Lien : http://quelscaracteres.eklab..
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L'histoire : Un partie dominant profite de la fécondité en berne pour grignoter les libertés. Une voie royale pour une nouvelle dictature... Nous suivons la vie de Defred dont l'unique fonction est de louer son ventre pour couver la progéniture de son commandant.

Et alors ? Pas mal, pas mal du tout.... Alors je mets juste en garde les lecteurs quant à la quatrième de couverture qui (encore une fois) peut se révéler trompeuse avec elle va tout tenter pour recouvrer sa liberté. J'étais aux trois-quarts du livre (pourtant loin d'être ennuyeux) que je n'avais pas vu l'ombre d'une fuite. le roman n'est pas haletant, c'est une dystopie dans toute sa sombre splendeur, un terreau à réflexion. Notre héroïne presque résignée est coincée dans une prison où les barreaux sont faits d'ennui où tout le temps lui est offert pour penser à sa vie d'avant et comment a t-elle fait pour ne pas voir tout ça arriver ?

Le roman a été écrit en 1985 et nous dépose dans un futur hypothétique aux Etats-Unis où des fanatiques religieux sont aux commandes. Peut-être que comme moi, vous aurez du mal à vous représenter ce futur où on ne trouve aucune trace de la révolution Internet ou encore de notre tendance à l'hyperconnectabilité.  Ici, c'est retour à l'âge de pierre, société archaïque où tout est contrôlé par les Yeux et chaque pas de travers condamné de façon expéditive par pendaison. Je préfère parler de futur parallèle qui met en avant les dangers liberticides qui nous guettent à chaque coin de notre société : l'interprétation sans filtre des textes religieux ou encore la censure à outrance.
Lien : http://www.uncourantdairlitt..
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Je n'avais jamais lu ce roman, j'ai voulu le lire avant d'avoir l'occasion de visionner la série qui en a été tirée.
Pendant la quasi totalité du livre, j'ai pris une claque magistrale. C'est un ouvrage qui, par le biais de la fiction, aborde la plupart des problématiques de la condition féminine. J'aime beaucoup l'écriture; en général, je n'aime pas trop que le récit s'adresse au lecteur, mais le style autobiographique fait que ça passe très bien. Et puis il y a la fin...je ne vais pas spoiler donc je n'en dirai rien de plus sauf qu'elle m'a vraiment laissée sur ma faim, la rupture entre la première partie du roman et la seconde (heureusement courte) m'a totalement déroutée...et je me demande bien comment cela sera montré dans la série. A lire malgré tout tellement le propos est intéressant et bien traité.
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La servante écarlate est un livre intéressant par les réflexions qu'il provoque.
Il donne "froid dans le dos" à l'évocation de cette société où les "femmes-Servantes" deviennent objet de procréation ; manipulées par les "femmes-Tantes" ; surveillées par les "femmes-Martha" ; jugées par les "femmes-Épouses"...
C'est une société imaginaire qui fait peur, où les libertés individuelles auraient été anéanties pour le "bien" de la communauté... Mais comment ne pas s'interroger sur nos sociétés actuelles, où l'on peut avoir tendance à manipuler nos libertés pour nous faire croire à plus d'égalité et de libre arbitre ?!
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Découvrez une ambiance lourde et torturée dans la Servante écarlate, classique de la littérature anglophone !
Il dénonce la fragilité de la liberté à travers le regard d'une femme prête à tout pour la retrouver.

FB: La bouquinerie de livres neufs
Lien : https://labouquineriesoulac...
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Une dystopie marquante d'autant plus par cette actualité. Dès que l'on plonge dans l'abîme Gealdien, une phrase, un mot nous ramène à la surface et à notre réalité : mur, terrorisme, ordre.
Un livre à lire absolument et pour ne rien gâcher au plaisir, la plume nous transporte.
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Magaret Atwood nous livre ici une vision pessimiste du monde où le nucléaire a détruit notre planète et où le pouvoir est devenu autoritaire. Pourtant plus dystopique que féministe, ce livre dresse un portrait noir de la femme "fonctionnelle" lorsqu'elle peut engendrer dans un monde où la fertilité (en lien avec l'environnement et les contraceptions) n'assure plus le maintien de la population caucasienne. Dans cette oeuvre la femme est devenue paradoxalement le centre d'intérêt d'une société typiquement patriarcale. Ce livre publié en 1985 nous alerte sur nos propres sociétés, notre rapport à l'environnement, et la place de la femme mais aussi de l'amour et de la liberté.
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Un classique qui mérite de porter ce nom. Margaret Atwood construit son récit de manière habile puisque nous lisons le témoignage de Defred, Servante (c'est-à-dire femme qui assure la reproduction) chez un commandant du régime de la République de Gilead. Ce nouveau régime a remplacé la république américaine et se base sur le sectarisme religieux.
On suit donc le fonctionnement de ce régime à travers les yeux de cette femme, enfermée dans les carcans qu'on lui impose.
La vraie trouvaille est d'avoir situé le récit à un moment où les personnes ont connu le changement de régime et peuvent encore se souvenir de leur vie d'avant. La fin, quant à elle, est surprenante, l'auteure ayant vraiment pensé à tout pour nous faire amener à notre propre questionnement.
Car là est tout l'enjeu du roman.
Bravo Madame Atwood!
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Roman dur à lire par son sujet difficile, ce pilier de la cause féministe a été écrit dans les années 80 et a toujours un sale goût d'actualité.
La raisonnance est flagrante dans notre monde réel où un Donald Trump a réussi à se hisser au sommet et où les replis identitaires foisonnent.
Cette lecture me semble importante afin de réaliser les dérives possibles de tous les comportements négatifs en -ismes qui nous pourrissent la vie.

J'ai aussi commencé l'excellente série adaptée et diffusée en ce moment, The handmaid's tale. Très travaillée visuellement et dialoguement, elle tape là où ça fait mal à tel point que je n'arrive pas à la bingewatcher : il me faut du temps entre les épisodes pour digérer.

Je voulais lire depuis un bon moment ce roman important et je me suis enfin décidé à l'annonce d'un live YT sur la chaine de Opalyne (https://www.babelio.com/monprofil.php?id_user=425709) dimanche 2 juillet 2017 au soir. Nombre de booktubeuses qui ont déjà parlé de ce livre étaient présentes pour animer et modérer ce live.
Lien : https://www.instagram.com/my..
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