1936 - Guerre civile d'Espagne
« A côté de l'amitié, de la solidarité et de l'effort commun, il y a l'égoïsme, la lâcheté et surtout la trahison » (
Claude de Frayssinet – traducteur,
p. 13). Cette ellipse donne le ton au livre qui a pour toile de fond la guerre civile, sans parler de tactiques ou de stratégies militaires.
Les nombreux protagonistes sont de parfaits inconnus, aux biographies parfois très détaillées et aux traits physiques inventés. de temps à autre, quelques noms connus sont cités mais
Max Aub ne se veut pas historien, il écrit une fresque historique en six volumes (celui-ci est le deuxième) et se place clairement du côté Républicain. Après la guerre civile, alors que les nationalistes de Franco ont gagné, la vindicte du dictateur le fera rechercher au-delà de la frontière.
Max Aub sera interné dans le camp de concentration du Vernet par le gouvernement de Vichy où il écrira l'étrange et passionnant «
Manuscrit Corbeau ».
Le 18 juillet 1936, le coup d'Etat manqué du général Mola face au gouvernement républicain regroupant socialistes, anarchistes et communistes, signe le début de la guerre civile. le Frente Popular compte un nombre important de mouvements de gauche en lutte constante et depuis des années, contre les nationalistes, militaires, haut clergé et riches propriétaires terriens. Peu ou pas de cohésion entre les différentes factions sauf leurs animosités réciproques.
Le livre de
Max Aub comprend trois parties :
La première se passe à Valence où un groupe de jeunes communistes, étudiants et ouvriers, a mis sur pied une troupe théâtrale. La déclaration de guerre civile va les confronter à leurs idéaux, à leur conscience, à leurs parents, à leur engagement politique. L'un part au front, l'autre se heurte mortellement aux idées paternelles, un couple se trouve et doit se quitter, tous ont des discussions acharnées sur ce qu'il convient ou non de faire. La ville est en plein chaos, les nouvelles d'assassinats et de tueries défilent à un rythme effréné. Bientôt, ce sera leur tour. Les habitants se préparent, ils s'arment et souvent agissent sur ordre de leurs partis respectifs qui ont leur propre police et leurs propres tribunaux plutôt expéditifs.
La deuxième partie se passe à Burgos et est un court volet sur l'esprit nationaliste et sur la Phalange.
La troisième partie se passe à Madrid, au cours de la première semaine de novembre 1936, lorsque les Regulares Indigenas de Franco tentent, sans succès, d'occuper la capitale. le 7 novembre, arrivent en renfort pour les Républicains, les Brigades internationales. La troupe théâtrale de Valence a fait le déplacement en espérant jouer pour ceux du front. Les acteurs ont répété « le siège de Numance » de
Cervantès où il est question d'un peuple qui résiste désespérément face aux Romains !
Max Aub a vécu les premiers mois de la guerre civile parmi ces jeunes qui espéraient un changement radical des conditions de vie de leurs parents et un autre avenir pour eux. Toutes les idées s'affrontent, progressistes ou non, réalistes ou non, anticléricales ou plaçant Dieu au centre du débat, philosophiques et artistiques. Ce qui intéresse l'auteur, c'est de donner la parole au peuple, c'est de faire vivre au jour le jour ces équipes de défense, par quartiers ou par corporations, c'est de révéler des natures humaines fortes et inventives que le quotidien laborieux gardait dans l'ombre. le peuple a peur, il côtoie la mort, il attend, il sait qu'il va devoir défendre chèrement sa liberté, sa ville et malgré tout, il garde espoir. Cet espoir maintient la vigilance et la détermination.
Il faut voir ces quatre cents coiffeurs madrilènes creuser des tranchées, élever des murets, s'entraîner vaille que vaille avec un fusil pour trois et dix cartouches par personne, ratiboiser les troupes marocaines solidement entraînées. le mot d'ordre des assiégés est le célèbre NO PASARAN répété avec force pour la victoire, forcément pour la victoire.
Pourquoi ce titre « le labyrinthe magique » ? Parce que « l'Homme est un noyau tellement compliqué que nous ne pourrons jamais prévoir toutes ses réactions. Loué soit-il pour cela. Parce que, sinon, il n'y aurait pas de progrès possible car nous atteindrions une limite » p. 423.
Lecture exigeante, riche en réflexions, creuset inépuisable de sujets de dissertations ou d'épreuves Bac philo.