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Véronique Mougin (Collaborateur)
EAN : 9782266192804
256 pages
Pocket (04/02/2010)
4.27/5   73 notes
Résumé :
En France, chaque année, des milliers d'enfants sont abusés sexuellement. Trois fois sur quatre par un membre de leur famille. Presque toujours, l'enfant et son entourage se taisent.
Elle-même victime de cette loi du silence qui a brisé sa vie, Isabelle Aubry raconte le calvaire de son enfance piétinée dans ce témoignage bouleversant.

« Dans le lit de mon père,- j'ai laissé mon enfance, mon équilibre, ma santé, mes études. Beaucoup d'enfants ... >Voir plus
Que lire après La première fois, j'avais six ans...Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Plusieurs raisons ont motivé mon intérêt pour ce livre :

1/ Je suis une lectrice assidue de témoignages et autres récits de vies sur différentes thématiques sociétales, et l'inceste fait partie de mes centres d'intérêt.

2/ Sans que je ne sois directement concernée, je dénonce chaque fois que possible les violences faites aux enfants en général et les abus sexuels (dont l'inceste familial) en particulier. En tant que femme, mère, militante de gauche je ne peux que m'insurger contre le laxisme et l'hypocrisie ambiants et faire tout mon possible pour, modestement, faire entendre ma voix de citoyenne et faire avancer le débat sur ces questions, et surtout contribuer à la mise en actes des promesses récurrentes faites par nos gouvernants. C'est sans doute un voeu pieux, mais je continue d'avoir bon espoir que ça change !

3/ Car, à la faveur de ce livre, j'ai découvert que l'auteure était la présidente-fondatrice de l'Association internationale des victimes de l'inceste (AIVI) créée en 2000, appelée aujourd'hui Face à l'inceste. Pour avoir travaillé longtemps dans le milieu associatif, je me sens de fait solidaire de ce type de combat et de militantisme. Et je ne peux que saluer l'altruisme dont elle a fait preuve, transcendant ainsi son propre vécu pour aider les autres victimes.

4/ Et enfin car, malgré les obstacles et la réponse judiciaire insuffisante consécutive à sa plainte, Isabelle Aubry s'est bon an, mal an, reconstruite. on voit-là combien le concept de résilience si cher à B. Cyrulnik trouve toute sa signification.

Que dire de ce petit livre (249 pages) absolument choquant et bouleversant ?

Sans aucune fioriture formelle, voire avec une certaine provocation dans la description des scènes et du choix du vocabulaire volontairement cru, Isabelle Aubry nous fait entrer de plain-pied dans ce qui aura été sa réalité de vie de l'âge de six ans à quatorze ans, confrontée qu'elle a été aux abus et viols sexuels perpétrés par un père manipulateur, pervers et incestueux.

On serait tentés de dire : "rien de nouveau sous le soleil" tant hélas, on le sait, c'est une pratique par trop courante dans notre pays. Mais, non. Ici, l'ignominie "de base" (si tant est qu'il puisse y avoir des niveaux dans l'ignominie dans ces cas-là) est à son comble quand, non content d'abuser de sa fille dans l'intimité de son foyer, le père dévoyé utilise et partage son jouet sexuel avec les hommes et les femmes (bien sous tous rapports et évoluant dans les beaux quartiers) avec lesquels il partouze joyeusement et très (trop) régulièrement, alors que sa fille n'a que douze ans !

Franchement, lors de la lecture, c'est très difficile de visualiser les scènes telles que décrites par l'auteure... et c'est vraiment difficile de parvenir à continuer sans être très en colère ou pleurer. Certes, elle les décrit avec ses mots d'adulte, et avec le recul de l'âge et de son expérience depuis, mais c'est absolument insupportable dès lors que l'on sait qu'elle n'était, à l'époque des faits, qu'une enfant (entre 12 et 14 ans) même si "elle paraissait plus" (la belle excuse !). Quand on est une maman, c'est proprement inimaginable et totalement révoltant.

En fait, ce livre raconte l'histoire personnelle d'Isabelle, son vécu familial (des parents qui se séparent, une mère absente et égoïste, un père qui réclame la garde), la façon dont elle a vécu l'inceste (et le reste !) ou tenté d'en faire abstraction tant elle était en quête d'affection et de reconnaissance d'un père...

Elle raconte comment, à un moment donné, elle n'a plus eu comme alternative que celle de dénoncer son père pour se sauver... et là, c'est une autre histoire qui s'écrit : celle d'un combat pour faire entendre sa voix de victime, pour faire reconnaître les viols alors que la justice ne lui concède que des abus (ce n'est pas la même cour de justice qui juge, ce qui fait toute une différence), pour tenter de reconstruire sa vie d'adolescente, malgré une mère toujours aux abonnés absents, un beau-père qui, lui aussi, abusera d'elle, une image de soi complètement détruite, des tendances suicidaires... et un père qui resurgira bien trop tôt dans sa vie.

Une histoire personnelle très douloureuse, mais néanmoins exemplaire - s'il était besoin - pour montrer et tenter de faire comprendre aux citoyens lambda que nous sommes toutes ces notions totalement abstraites si non vécues de "dissociation traumatique", de "consentement" : ne rien dire signifie-t-il que l'on est consentante ?, de "faut-il dénoncer, porter plainte ou se taire et subir le non-dit" pour préserver l'équilibre familial ? de séquelles liées au "stress post-traumatique" et à ses nombreuses conséquences (échec scolaire, vie sexuelle, familiale perturbée, comportements suicidaires ou à risques)... toutes ces notions dont on parle aujourd'hui, et pour lesquelles les associations représentatives se battent, pour exiger des parlementaires et pouvoirs publics l'imprescriptibilité des crimes sexuels commis sur des mineurs.

A travers l'histoire d'Isabelle, on s'interroge aussi sur l'attitude maternelle (quid de sa responsabilité avant, pendant, après ?) et pourquoi, plus généralement, les mères (qui manifestement ne veulent ni voir ni entendre) ne sont pas ou peu inquiétées par la justice.

On s'interroge sur l'incohérence d'une décision de justice qui octroie des "circonstances atténuantes" au père-prédateur alors même que le dossier est particulièrement lourd, considérant de facto que la fillette ne pouvait être - à 12 ans - que consentante (c'est bien ignorer le phénomène d'emprise totale) ; justice qui, à la fois, assigne au père une interdiction d'approcher sa victime, mais l'autorise à vivre à moins de 800 m de chez elle ? On se demande aussi pourquoi son droit de visite et d'accueil de sa seconde fille est maintenu...

On s'interroge sur le fait que ni la police, ni la justice ne se soit intéressée de près ou de loin aux partouzeurs patentés (hormis un médecin) qui, de fait, abusaient d'une mineure, et dont pourtant ils possédaient les coordonnées. C'est dire combien le problème est, dans notre pays, systémique !

On s'interroge enfin sur la solitude d'Isabelle, après sa dénonciation et le procès, et au cours de sa vie d'adulte, sur la difficulté pour elle d'obtenir une prise en charge psychiatrique et sociale adéquate (sans doute les choses ont-elles évoluées à ce jour). Elle se retrouve dans la nature, livrée à elle-même et à ses démons, sans ressources, sans logement... avec tous les risques qui vont avec.

En résumé, un petit livre qu'il faut avoir lu pour qui s'intéresse à ces questions, mais aussi un livre difficile à lire et à digérer...



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Je suis une liseuse de témoignages, c'est un style qui me plaît, et j'aime le côté réaliste de ces ouvrages.

Le livre d'Isabelle Aubry est bien écrit, elle rapporte son histoire avec force et conviction, mais aussi de la colère certainement découlant d'émotions intenses... mais cela donne par moments une certaine gêne en tant que lecteur, un drôle de sentiment... des passages violents dans les mots et dans le ton et pas forcément dans le contenu. Une impression qu'elle est sur la défensive, se sent incomprise, qu'elle en veut à beaucoup de monde, ce qui peut se comprendre, mais qui, je le redis encore une fois, donne un sentiment étrange voire gênant et qui surprend sur certains passages.

Du reste ce livre se lit bien, a un côté captivant, et traite d'un sujet bien souvent encore tabou et qui mérite qu'on s'y attarde!! Elle a eu le courage de faire de son histoire un livre... fort en caractère et qui ne laisse pas de marbre tant les impressions peuvent changer d'un chapitre à l'autre (dans le + comme dans le - !)

Si vous aimez les témoignages, les thèmes forts, il vous plaira sûrement!
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Ce livre est bouleversant, dans un récit cru et violent. Peut être même que cette violence est en deçà de la réalité. Un témoignage fort qu'il faut découvrir pour entendre les silences de tous ces enfants meurtris.
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C'est un plaidoyer pour toutes ces personnes-là. Rien n'est fait, que des promesses, c'est en contradiction avec ce qui se passe.
C'est la victime qui est montré du doigt. Elle explique dans le détail ces scènes d'inceste, voire même de viol ex : va en boite de nuit échangiste avec son père et à 12 ans subi des relations jusqu'à 10, 15 fois par soirée.
Ou cette scène difficile chez le médecin homme !qui doit vérifier si elle a été violée…A peine plus âgé qu'elle.
Les incestes ne sont pas considérés comme des viols.
Très dur et réaliste.
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Un témoignage tellement poignant .. Une preuve que la justice n'a jamais été la priorité en France .. Je ne comprends toujours pas comment un père peut faire cela à sa fille ?! Comment on peut faire subir cela à un enfant, que ce soit le notre ou non ? Je ne comprends pas, ça me dégoute, ça me rend malade .. Un témoignage qui m'a donc beaucoup touché ..
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
En France, chaque année, des milliers d'enfants sont abusés sexuellement. Trois fois sur quatre par un membre de leur famille. Presque toujours, l'enfant et son entourage se taisent.

Victime de cette loi du silence qui a brisé sa vie, Isabelle Aubry raconte son calvaire. « Dans le lit de mon père, j'ai laissé mon enfance, mon équilibre, ma santé, mes études. Beaucoup d'enfants endurent aujourd'hui le cauchemar que j'ai supporté. C'est pour eux que j'ai décidé de raconter mon histoire. »

Le courage, la force de caractère et la détermination d'Isabelle Aubry lui ont permis, petit à petit, de se reconstruire. Elle est aujourd'hui une mère, une épouse et une combattante hors pair. Elle a créé l'Association Internationale des Victimes de l'Inceste et se bat pour que chaque victime réussisse à survivre, pour que chaque bourreau soit reconnu coupable.

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Oui, j’ai tout pour être heureuse aujourd’hui. Sauf que je ne le suis pas. Je ne peux pas l’être, parce que l’inceste a détruit ma vie. Certes,
j’ai pu me reconstruire. Désormais, je ne suis plus seulement une victime de mon père : je suis devenue moi-même, Isabelle, une militante, une
maman, une épouse.
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Aujourd’hui encore, je ne peux pas refaire certains gestes que mon père m’a appris.
Je ne peux plus ni danser le rock, ni jouer aux échecs, ni cuisiner de bons petits plats. Ranger et nettoyer m’angoisse terriblement. Tenir une
maison m’est très, très difficile.
Aujourd’hui encore, je redeviens, dans mes songes, la gamine fracassée que je fus.
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Survivre à l’inceste est possible, je le sais, c’est extraordinairement compliqué, très fragile,
parfois agréable. Mais guérir est impossible.
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Mais je suis déjà morte, moi. Le sens de ma vie est parti il y a bien longtemps, avec l’eau du bain où je barbotais avec mon
père.
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Videos de Isabelle Aubry (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Isabelle Aubry
Consacrée au soutien des victimes, cette table ronde permet de discuter d’outils concrets pour aider et recueillir la parole des victimes d’inceste.
Elle fait suite à la diffusion des six épisodes de notre podcast “Ou peut-être une nuit” qui interroge les mécanismes de construction du silence autour de l’inceste et des violences intra-familiales. Sont présentes Isabelle Aubry, fondatrice de l'Association internationale des victimes de l'inceste, Muriel Salmona, psychiatre et présidente de l'association Mémoire traumatique et victimologie, et Eva Thomas, première femme à avoir parlé publiquement de l'inceste qu'elle avait subi, défenseuse des droits des femmes et des enfants.
Toutes les ressources sont à retrouver sur le site de Louie Media. https://louiemedia.com/injustices-2/o...
La série “Ou peut-être une nuit” a bénéficié du soutien de la Fondation Kering. La Fondation lutte depuis 2008 contre les violences faites aux femmes. Elle a permis la création l’année dernière d’une nouvelle unité pour les victimes d’inceste à La Maison des Femmes de Saint-Denis.
+ Lire la suite
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