Comme chaque livre de JC Bailly que j'ai lu, celui-ci est une merveille. Au sens concret du reste, je suis émerveillé par ces apparitions délicates et précises où chaque mot (le texte est une sorte d'abécédaire qui va tisser la question du langage avec des motifs comme la "Fumée", les "Fleurs", l'eau, etc) fait surgir, éclore, une réflexion et une sensation. Car là où le cheminement de Bailly est vraiment merveilleux (oui, insister) c'est sa capacité à frayer sa voie entre l'essai et la poésie. A lire ces textes assez brefs, l'intelligence apparait (un sens est élaboré) mais sans renoncer à s'entremêler à une écriture sensuelle, ondulante, je ne sais comment dire. Enfin, c'est un livre à la fois simple et profond dont on finirait presque par souligner chaque phrase et corner chaque page.
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Chaque livre est composé de lignes et se ferme sur elles comme une boîte. Dans l’empilement infini des boîtes à lignes, la bibliothèque écrit et suspend le rêve d’une ligne continue qui est comme un murmure : non le bruit des pages tournées par les lecteurs, assez semblable à celui du pas avançant sur un lit de feuilles, mais venant se poser sur lui comme une matière diffuse, la poudre ou le pollen de toutes les voix qui se sont tues et qui parlent, de toutes les boîtes qui se sont refermées et qui s’ouvrent.
Les savants qui allaient herborisant dans les contrées les plus lointaines et les plus sauvages sont comme des fils d’Adam, et les « paradis » qu’ils rencontraient n’étaient pas seulement des paysages inviolés, c’était aussi des espaces où ce qui n’avait pas encore reçu de nom devait en avoir un. Ramener des plantes ou des graines, c’était aussi ramener des noms nouveaux, c’était en quelque sorte polleniser le langage.
(Le parfum)
Au sein du clavier baudelairien des correspondances, c'est lui la plus tenace mais la plus insaisissable réponse, car telle est la difficulté et le charme, la charis du parfum : d'exister comme un nuage invisible et sans bords, de détenir son pouvoir d'une sorte de dissolution progressive de ce pouvoir, d'écouler par bouffées une limite indécise en laquelle l'illimité n'est pas perçu comme un lointain mais comme un brouillage ou comme un effacement. le parfum, destiné avant tout au corps, est le contraire d'un corps, pur en aller sans forme et sans limite.
Lecture de Jean-Christophe Bailly : une création originale à partir d'une série de créations littéraires originales inspirées par les collections de la BIS.
Ce cycle est proposé par la Maison des écrivains et de la littérature (Mel) en partenariat avec la BIS. Un mois avant la restitution, l'écrivain est invité à choisir un élément dans les fonds de la BIS. Lors de la rencontre publique, « le livre en question » est dévoilé. Saison 4 : Chaque saison donne lieu à la publication d'un livre aux éditions de la Sorbonne "Des écrivains à la bibliothèque de la Sorbonne", saison 1 : Pierre Bergounioux, Marianne Alphant, Arlette Farge et Eugène Durif paru en septembre 2018. Saison 2 : Jacques Rebotier, Marie Cosnay, Claudine Galea et Fanny Taillandier, à paraître septembre 2019. Saison 3 : Christian Prigent, Hubert Haddad, Laure Murat, Mona Ozouf
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