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EAN : 9782818041833
160 pages
P.O.L. (02/02/2017)
3.73/5   164 notes
Résumé :
L'écrivain évoque la mort de son père, les circonstances de celle-ci, le parcours obligé des obsèques et des tâches administratives afférentes, la pudeur d'un homme à la fois sociable et secret, les liens qui l'unissaient à son fils. Le portrait d'un homme, mais aussi d'une génération dans les campagnes françaises, celle de travailleurs sociaux, militants politiques ou associatifs, à une époque.
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Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
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"Mon père, sans être un héros, était-il pour autant un antihéros ? Un perdant éternel ? Comme s'il n'y avait pas d'alternative. Je n'arrive pas à le voir comme un parfait loser. Parce qu'il ne s'est jamais relâché. Il s'est toujours accroché, il est resté en mouvement." (p. 108)

Phrase épurée d'une grande tendresse et émotion d'un fils envers un père...à l'image de ce récit...sobre et poignant...Curieusement... ce n'est pas un texte larmoyant ou triste... car l'auteur va sur les chemins des moments heureux partagés avec ce père atypique...qui aimait les gens, la nature, la marche dans ses montagnes et ses forêts...un faux solitaire aux mille curiosités et engagements... Un portrait tout en nuances... Un homme qui a vécu moult expériences... s'est élevé "socialement, même si il n'est pas parvenu à partir de son Jura natal...

"A cette époque, il commençait à être considéré comme un original, surtout
dans sa famille. Ce qu'il avait de particulier pour eux, sans doute un fond
revêche, rebelle, qui s'est traduit par une nécessité de marquer une différence et de s'entourer de personnes nouvelles. Un besoin d'émancipation qui a trouvé toutes sortes d'échos dans la société du moment (p. 35)

Un court texte émouvant offert par un ami jurassien... Je précise cela... car en plus d'un hommage d'un fils à un père...qui vient de mourir, peu avant la prise de retraite... la vie de l'auteur et celle de son père...dans les montagnes et bois du Jura...sont largement évoquées....

Un livre très sobre d'un fils devant préparer les obsèques de son père... il doit vider, trier l'appartement paternel... A l'occasion de tous ces préparatifs, il évoque ce père si discret et engagé, à la fois , taiseux et sociable , à la fois...une personnalité chaleureuse aux multiples contradictions..!...

"Ce que je voulais dire c'est que c'était un endroit qu'il (père de l'auteur) aimait, que c'était une forêt où il se sentait bien, et précisément pour son côté sombre et rude et inhospitalier. Je voulais dire que c'était une forêt qui lui ressemblait, et qu'elle était à son image, de type solitaire, un peu sauvage. (p. 41)

Mort du père par accident dans l'un de ses lieux préférés...Chute quelque peu mystérieuse entre un bois et des falaises... endroit que le père connaissait par coeur...! Un récit très apprécié à la tendresse "rugueuse" !...
Premier livre que je lis de ce jeune écrivain... Merci à l'ami jurassien de me l'avoir fait découvrir !!

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J'avais lu Polichinelle à sa sortie, comme beaucoup d'autres jurassiens. J'avoue. Il m'était tombé des mains. Lorsque j'ai vu L'Homme des bois sur la liste d'une LC à laquelle je participe, je me suis dit "oh, non !" Prenant mon courage à deux mains, j'ai fait le choix de commencer par lui, comme pour clore d'emblée tout débat intérieur, toute hésitation, m'en débarrasser en quelque sorte. Et je n'ai pas pu le lâcher !

Pierric Bailly a écrit ce livre suite à la mort accidentelle de son père : Il y a quelques années dans le Jura, le corps d'un homme d'une soixantaine d'années a été retrouvé après quelques jours dans la forêt de Revigny.

"C'est sur les flancs du premier plateau qu'il a dégringolé (...) de cette forêt sombre et pentue au sol meuble, de cette petite falaise, de la source du ruisseau, de la dalle de roche calcaire où son corps était étalé, sur le dos."

Une mort accidentelle qui laisse l'auteur en proie à des questions insolubles : Est-il mort sur le coup ? Que faisait-il avec ses chaussures de ville ? Était-il vraiment parti en quête de champignons ? L'idée du suicide que certains murmurent. Non, ce n'est pas possible... Et pourtant, comment ne pas se laisser envahir par de telles pensées ?

Alors, il fait et refait sans cesse le parcours de son père en forêt, dans les endroits qu'il aimait arpenter, essaie de trouver le lieu exact d'où il a pu tomber..., se remémore sa vie, ses engagements comme ses renoncements, tout en essayant peu à peu de débarrasser sa maison, trier ses affaires (celles à garder, donner ou ne pas toucher...).

Il y a la cérémonie, ce discours à préparer, ce père à honorer et cette mémoire à préserver. Alors les souvenirs des moments partagés refont surface. Ceux de l'enfance, de l'adolescence et ces derniers moments. Deux taiseux, deux hommes qui n'ont pas toujours su se dire qu'ils s'aimaient.

Pierric Bailly nous livre un portrait de son père, fort et sans complaisance : avec tendresse et bienveillance, il met en lumière ses failles, mais aussi ses qualités, ses aspirations et ses rêves inaboutis.

Il y a ce beau moment, très symbolique, où il emprunte un des tunnels de la voie verte, celui le moins fréquenté, en terre battue avec l'eau qui ruisselle des pierres et la lumière blafarde des néons. Il s'adresse à son père des entrailles de la terre, dans la pénombre et le froid, il lui raconte "l'après":

"Je me disais aussi que c'était l'endroit rêvé pour croiser le fantôme de mon père.
Ou simplement lui parler.
Un lieu calme, isolé, irréel, où je pouvais imaginer qu'il m'écoutait."

...jusqu'à la sortie du tunnel où la lumière du jour l'assaille et le rappelle parmi nous.

Cela sonne juste et beau. C'est parfois drôle et souvent bouleversant, car cela touche à un essentiel : peu importe l'âge ou les circonstances, on est toujours un môme lorsque l'on perd ses parents. Un môme qui se raisonne, redresse la tête et se console comme il peut...

"Je m'accrochais à cette idée qu'il était mort dans les bois comme un marin meurt en mer. La forêt qui prend l'homme. Mon père cet aventurier."
Lien : http://page39.eklablog.com/l..
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J'ai cherché des auteurs jurassiens pour mes vacances dans cette région. Celui-ci est arrivé après mon retour. Il m'a permis de revoir dans ma tête Clairvaux-les-lacs, Lons-le-Saunier avec son musée de la Vache qui rit, Arbois et d'autres lieux. L'auteur aime son Jura natal bien que le sujet premier soit le décès de son père tombé d'une falaise alors qu'il allait aux morilles (vivement le mois de mars !). Son père a le profil de beaucoup de montagnards : les balades en forêt, les champignons, les rencontres, le ski. Un type qu'on dit pourtant marginal, alors que j'en connais plein comme ça. J'ai eu beaucoup de plaisir à lire ces pages où, quelque part l'auteur aurait pu dire : « Mon père, ce héros. » Il fait partie de ces gens qui ont tenté pleins de choses sans vraiment en réussir une. Combien sommes-nous dans ce cas ? Tendre et pudique. Rien de spécial pourtant ! Est-ce l'écriture, le sujet ? Je ne me l'explique pas et ça n'a pas d'importance puisqu'il m'a parlé. le principal ? Un bon plaisir de lecture. ⭐️⭐️⭐️⭐️
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Le père du narrateur est mort : lors d'une balade en forêt de Revigny dans le Jura, il a glissé sur une vingtaine de mètres et ne s'est jamais relevé. Peut-être est-il mort sur le coup, son fils n'en aura jamais la certitude, de même qu'il ne saura jamais si c'est vraiment un accident comme tout le porte à croire.
« … Il est mort là où il vivait, tout simplement. A la façon de ces paysans qui n'ont jamais quitté leur ferme et qui s'éteignent dans la chambre où ils ont vu le jour. »
Alors, le fils retourne sur les lieux à la recherche de quelque chose qui lui dise ce qui s'est passé. Il a besoin de réponse, d'être sûr, de comprendre. Choqué par cette fin de vie trop bête, il se saisit des petits bouts de fictions qu'on lui tend, les recherche, s'en nourrit : « Pour ne pas me laisser dévaster par le doute et l'émotion, je me raccrochais aux branches de la narration. Je tissais une toile romanesque pour me retenir à ses fils. Je n'avais guère à me forcer, j'avais même l'impression que la toile se tissait à mon insu. La toile, ou plutôt les multiples amorces. C'était en fait comme une myriade de petits fils fragiles qui se balançaient sous mes yeux et que je tentais d'attraper à la volée pour me stabiliser un minimum. » Ce peut être une femme qui lui dit qu'elle a rencontré un homme dérangé dans la forêt (peut-être son père ou un fou qui l'aurait poussé ?) ou la carte postale d'une amie demandant pardon à son père pour un rendez-vous manqué le jour où il est mort (la raison du suicide?)... Des pistes, des bribes de vies, des débuts de romans, mille histoires possibles pour compléter ce qui est resté en pointillés, en blanc...
Il arpente ces lieux du haut Jura qu'il connaît bien et que son père aimait . D'une certaine façon, aller vers ces paysages, c'est tenter de retrouver celui qui n'est plus. Il prend d'ailleurs la voiture de son père, la Seat Ibiza immatriculée 39, pour parcourir les lieux, ces paysages de « sapins, scieries, grumiers ».
Une famille originaire de Lons-le-Saunier et de Clairvaux-les-Lacs : un grand-père ouvrier dans des usines de bois ou de plastique qui a fabriqué pendant trente ans des queues de casseroles en bakélite. Les petits-enfants ont tous quitté la région pour aller au bout du monde.
« Mon père a commencé à travailler à dix-sept ans, il est mort à soixante et un an », si près de la retraite diront les gens qui le connaissaient. Ouvrier, il fabriquait des couvercles de poêles. Ensuite, il s'est formé pour travailler le bois et devenir ébéniste puis tourneur sur bois avant de s'inscrire à l'école d'infirmières de Lons et travailler finalement dans un centre de soins aux toxicomanes, aidant les autres chaque jour, donnant de lui, se rendant disponible aux autres, aux « types ravagés, aux éclopés de la vie, aux fous, aux paumés, aux rebuts de la société ». Un homme ordinaire qui, dans son petit appartement d'un immeuble HLM, a laissé des traces de son passé : des tonnes de « cahiers, carnets, pochettes, chemises, dessins, classeurs, prospectus, revues, articles de journaux, comptes rendus de conférences, cours par correspondance » sans compter les quantités d'objets, créations personnelles, souvenirs du passé, bricoles de récup'. Un homme très engagé dans la vie associative et politique qui s'intéressait un peu à tout  : « Trente ans de célibat, ça laisse le temps d'essayer un paquet de trucs. »
Et, c'est ce qu'il avait fait : du théâtre, de la musique, du dessin, des mandalas, de l'anglais, de l'arabe, du japonais, des romans, de la poésie, de la lecture, du yoga - qu'il enseigne plusieurs années !- (et j'en oublie les trois quarts) : il suivait des stages, il notait, recopiait, apprenait, archivait, oubliait, curieux de tout, se cherchant encore quelque passion pour devenir un jour peut-être spécialiste de ci ou de ça, peu importait . Et puis, lassé, il passait à autre chose. « Ce n'était pas un idéologue, pas un théoricien. Ce n'était pas un littéraire ni un cinéphile, même s'il aimait lire et aller au cinéma. Il n'avait pas fait d'études. Il n'avait pas le bac. Il ne s'était pas construit de cette façon-là » (N'empêche, quand on y pense, c'est fabuleux tout ce que cet homme a fait dans sa vie. Il faudra lui dire, à Pierric Bailly, que son père, je le trouve juste incroyable, comme disent les jeunes maintenant, dans ce goût qu'il avait pour les choses de la vie, papillonnant d'un sujet à l'autre sans jamais s'arrêter, butinant ici ou là, se construisant, s'échafaudant, s'inventant, s'imaginant sans cesse autrement, nouveau, différent. Les passionnés sont des gens qui vivent longtemps. C'est un peu déplacé ce que je vais dire, mais je doute fort qu'un homme comme lui ait pu penser se suicider. Je l'imagine plutôt allant chercher des champignons, juste quelques-uns pour le repas du soir, pas la peine de changer de chaussures, trois quatre champignons pas plus: un beau un peu plus bas, un peu plus loin, les belles choses sont toujours hors d'atteinte, c'est bien connu. On tend le bras, on cale son pied comme on peut, on s'agrippe à une racine. Qui craque. Et c'est le déséquilibre. Terrible déséquilibre. Car à mon avis, il avait déjà prévu, après son repas, d'aller voir un film ou de lire une nouvelle revue sur le réchauffement de la planète ou le programme du prochain festival de jazz. Peut-être y a-t-il pensé en tombant, peut-être s'est-il dit « dommage » mais c'était trop tard. Ne m'en voulez pas de réécrire l'histoire mais c'est ainsi que je vois cela.)
Un homme qui avait aimé Ferré, Brel, Reiser, « les chansonniers, l'anarchisme, la non-violence ». (Nouvelle parenthèse : quelque chose me dit que les gens de cette génération, et j'en compte plusieurs parmi mes amis, vont terriblement nous manquer quand ils disparaîtront : ils portent encore en eux les idéaux de mai 68, ne sont pas bouffés par la société de consommation, résistent aux Facebook, Twitter et compagnie, ont échappé à bien des formatages et résistent encore ; des dinosaures presque quand j'y pense! Mais quelle bouffée d'air frais ils nous apportent avec leur anticonformisme, leur refus de la course au fric, c'est impressionnant! Je ferme la parenthèse.) «  Au début je me disais que j'allais faire une ou deux découvertes, un petit trésor, quelques secrets, mais plus j'avance dans ma tâche et plus je suis frappé par la cohérence de son personnage. Tout va dans le sens de ce que je sais de lui, de l'image que j'ai de lui. Tout est en accord avec les convictions qu'il affichait. Tout lui ressemble… le petit monde de mon père semblait avoir été envisagé précisément pour se protéger du grand monde, peut-être pas pour le combattre, disons pour s'affranchir du mieux possible des valeurs dominantes de l'époque, celle de la consommation et du capitalisme. »
L'histoire d'un homme humble, ordinaire que le narrateur ne cherche pas à transformer en héros, en surhomme, en personnage hors du commun, non, il parle de lui avec retenue, avec sobriété. Et c'est précisément cette pudeur qui m'a touchée et qui donne une telle force à son récit.
Des mots simples, des phrases brèves pour évoquer la vie d'un homme, ses amours, ses colères, ses engagements, ses occupations, ses convictions, un homme intègre qui a fait des choses à sa mesure, « à son petit niveau », qui s'en est contenté (et je ne mets rien de péjoratif derrière ce terme) et a trouvé une forme de bonheur dans ce que d'aucuns auraient peut-être jugé médiocre, insignifiant. Un homme qui appartient à une terre, à une époque, certainement un des derniers hommes de ce XXe siècle révolu.
Et puis, il y a ce fils dont la peine affleure à chaque ligne, se tisse à chaque mot, se mêle à chaque virgule et c'est aussi de son histoire qu'il s'agit, celle d'un jeune homme à la recherche d'un père parti trop tôt qu'il interroge en contemplant les paysages du Jura et en écoutant ses musiques, un père qu'il n'a pas tout à fait l'impression de connaître ( mais connaît-on les gens que l'on aime?) et à qui, peut-être, il n'a pas eu la possibilité d'en dire un peu plus parce que l'on croit toujours que l'on a le temps, que nos proches vont vivre jusqu'à cent ans et que nous-mêmes sommes éternels...
Il me vient soudain un air et quelques paroles qui me font penser à ce très beau portrait d'homme, les voici, comme elles me viennent :
Quelqu'un de bien
Le coeur à portée de main
Juste quelqu'un de bien
Sans grand destin
Un ami à qui l'on tient
Juste quelqu'un de bien
Quelqu'un de bien …

Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Après la disparition brutale de son père, 61 ans et pas encore retraité, dont le corps a été retrouvé au fond d'un fossé trois jours après sa mort, alors qu'il était parti cueillir des champignons, Pierric Bailly s'est senti le besoin de prendre la plume, pour tenter de dérouler le cheminement de la mort et également de la vie de son père.

Avec cette tendre et pudique analyse de la relation père/fils à travers les souvenirs d'enfance et d'adolescence d'un presque quadra qui vient de perdre son père de façon soudaine, cet "homme des bois "est le récit d'un deuil filial autant que la chronique d'une vie provinciale dans un Jura délaissé par ses forces vives, et ses jeunes habitants.

Pierric Bailly tisse les fils d'une enquête sur un père aussi secret que singulier , qui a été travailleur social et humaniste, et décide de partir sur les traces de l'absent et essayer de cerner la destinée d'une génération qui a connu l'effervescence d'après mai 68, et qui a voulu quitter Paris et sa folie pour aller en montagne.

Parti à la recherche de sa vérité et celle de son père , sillonnant le Jury dans la voiture de son père pour paraîre un vrai jurassien, Pierric Bailly réhabilite son papa dans un bel élan littéraire.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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critiques presse (4)
LeMonde
28 décembre 2018
Consacré au père de l’auteur, mort (sans doute) accidentellement, tombé d’une falaise lors d’une balade en forêt, L’Homme des bois est un livre modeste et superbe.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeMonde
05 mai 2017
Dans « L’Homme des bois », l’écrivain évoque Christian Bailly, mort brutalement, ses contradictions et ses engagements. Splendide.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Bibliobs
03 mars 2017
Une merveille de justesse, de loyauté et de rugueuse tendresse.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Telerama
15 février 2017
Son écriture sobre et puissante fait momentanément fusionner leurs deux trajectoires de vie, souvent restées parallèles, mais liées par un même besoin d'indépendance et de discrétion.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (40) Voir plus Ajouter une citation
Si je suis au volant de ma 307 immatriculée 69 , je suis pris pour un type qui n’est pas d’ici, et alors j’ai envie de descendre pour lui dire : mais si, je suis né là, j’ai grandi là, j’ai vécu vingt ans dans le Jura, ne me prenez pas pour un touriste, s’il vous plait, je suis des vôtres. Tandis que dans la Seat Ibiza de mon père, immatriculée 39, je suis peinard. J’ai même le droit de pester après un touriste égaré et de le klaxonner en tapant sur le volant. (p16)
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Il vénérait le livre comme objet, comme symbole, parce que des livres, il n'y en avait pas chez ses parents. Il adorait visiter les maisons d'écrivains (...)
Quand il visitait une maison d'écrivain, de même qu'un grand musée ou une exposition rétrospective, il avait toujours besoin de s'identifier, comme un adolescent face à un film de super-héros. (p. 98)
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Mon père a commencé à travailler à dix-sept ans, il est mort à soixante et un ans. Les dernières années, il ne parlait que de ça, cette putain de retraite qui se rapprochait, qui lui tendait les bras, et qui l'inquiétait sans doute un peu mais sur laquelle il n'aurait pas craché, ça non, sûrement pas. Il ne supportait plus le boulot, son chef et ses collègues en savaient quelque chose. Il est mort trois mois avant la fin.
(p. 30)
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"Moi-même, il m'a fallu quitter le Jura pour que l'endroit où je suis né et où j'ai passé les vingt premières années de ma vie m'évoque quelque œuvre de fiction. Avant ça, c'était chez moi, c'était chez moi donc cela ne se discutait pas, cela ne se comparait pas, cela ne se décrivait pas. ça n'avait pas besoin d'être raconté, ou pire, critiqué, puisqu'il n'y avait que ça. C'était le seul endroit possible, puisque c'était là que je vivais depuis toujours. C'était le seul endroit que je connaissais. C'était le centre du monde, ni plus ni moins.
Il m'a fallu prendre mes distances pour me rendre compte qu'on pouvait ne pas situer mon petit département sur une carte, et même ne pas savoir qu'il existe. Qu'on pouvait manger de la Vache qui rit sans savoir qu'elle est fabriquée à Lons-Le Saunier."
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En reprenant l’avis de décès pour le journal, après les fleurs des champs et des jardins, j’ai ajouté : Sans chiens ni curés. C’est sorti tout seul. J’ai envoyé le texte par mail, il a été publié le lendemain.
Les semaines suivantes, j’ai reçu plusieurs courriers de prêtres qui s’étaient interdit d’assister aux obsèques. J’apprenais aussi qu’on s’offusquait du fait que les chiens passent avant les curés. Je n’avais pas imaginé une seconde qu’on pourrait le prendre au premier degré.
Si un curé ou même un chien avait voulu assister à la cérémonie, je l’aurais accueilli bien volontiers, pensez-vous. Un labrador catholique. Toute l’arche de Noé. Un chamois musulman, une marmotte juive… Oh là là, mes aïeux, quelle affaire.
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