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EAN : 9782020565684
276 pages
Seuil (14/09/2002)
4/5   1 notes
Résumé :
Poursuivant le travail intérieur de La Ligne et l’Ombre, Silvia baron Supervielle propose ici une réflexion sur la naissance même de l’écriture et l’exigence impérieuse de la littérature. A partir de l’expérience de son exil, à partir de certains éléments autobiographiques réduits ici à leur épure, l’auteur analyse le geste de l’écriture, la création artistique, la désignation poétique, mais aussi les sentiments les plus violents, la passion, le désir, le deuil. Nou... >Voir plus
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
29 - Visage-paysage
     
... Lèverais-je la main du cahier du souvenir, il reviendrait sur moi.
     
Je ne lève pas la main, ni la tête, je ne vais pas vers le miroir : je le guide sur les feuilles du cahier avec mes lettres lentes. J’ai le visage croisé de lettres, corrigé de mots, effacé de départs. J’ai les yeux si pleins d’images qu’ils ne sont plus capables de se fixer, d’observer par exemple la Seine et ses longs bateaux dans la lumière qui change de saison. Mon visage est ébloui. Il n’est plus uniquement mien. Il fait partie des images. Il s’est détaché de mon portrait pour se tourner vers une autre sorte de paysage. À force d’aller à sa recherche, pour se confondre avec lui, mon visage est sorti de son masque.
     
Lentement, il s’est détaché, en apprenant à voler. Il vole à une grande vitesse et plane longuement. En plein vol, dans les cimes, il reprend le mouvement de ses ailes. Il est devenu un paysage qui émigre d’un continent à l’autre. S’il ne peut pas discerner toutes les choses qui se présentent devant lui, il les entrevoit, les comprend et les entend. Lorsque mon visage se détache de moi, le temps ne bouge plus. Visage-paysage et visage aimé se mêlent l’un à l’autre. Visions par-delà la main. Terres par-delà la mer.
     
Cahier III, p. 147-148
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17 - L’abandon
     
L’absence est un élément de l’écriture. Un grand fardeau vide se soulève sur les blancs. Cette existence ralentit le voyage. On ignore ce qu’elle attend de la main du voyageur. Ce qui baptise les mots, goutte à goutte, perd sa couleur et contraint les lettres à ne pas se former et le son à ne pas retentir. Avant même que l’encre ne se verse, l’absence est écrite, comme s’écrit en musique la note qui manque, dans la voix le mot qui se tait, dans la gorge la larme ravalée. Comme, au moment de la mort, s’écrit le silence qui ne coule plus dans le corps.
     
Après quoi, ressuscitée, la main retrouve l’illusion de repartir vers les régions fondues dans la terre et le ciel. Le voyageur redevient la main qui mène à des contrées voilées de poussière et d’or, peuplées de chevaux et d’étoiles. Plaines sans frontières, chemins sans hommes, lumières au ras de l’herbe, sauvés de l’abandon.
     
     
Cahier II, p. 89
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Le cri des oiseaux exprime la joie du premier soleil : branches et tiges le rattrapent, s'accrochent à ses jeunes bras. Plantes et arbustes s'entremêlent, les mauvaises herbes poussant avec les bonnes, des lianes formant des chaînes de couleurs ténues, épineuses, odorantes. Départager un peu le bon du mauvais. Arroser lorsque le soleil se retire.
Quelle toute puissance ! Je ne sais que faire de cette vie qui éclate. Je ne sais que faire du bleu du ciel, des oiseaux qui chantent, du chèvrefeuille. Tout cela recèle une vie glorieuse, dont les racines et les pousses ne sont pas liées à moi : une vie que je n'ai jamais eue. Face à ce printemps féroce revenu, je me demande si je pourrais une fois, avant le grand départ, me confondre avec la nature. Plus elle croît, en entraînant ses ombres, plus elle me laisse au bord. Non pas qu'elle ne me communique pas ses humeurs, mais aucune branche ne serre ma ceinture, aucun parfum ne devient mon souffle, aucune fleur, l'aurais-je désirée, ne prend la forme de ma bouche. La nature, comme la peinture, n'a pas besoin de moi.
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Vidéo de Silvia Baron Supervielle
« Une anthologie de femmes-poètes ! - Eh oui, pourquoi pas ? […] On a dit du XIXe siècle que ce fut le siècle de la vapeur. le XXe siècle sera le siècle de la femme. - Dans les sciences, dans les arts, dans les affaires et jusque dans la politique, la femme jouera un rôle de plus en plus important. Mais c'est dans les lettres surtout, - et particulièrement dans la poésie, - qu'elle est appelée à tenir une place considérable. En nos temps d'émancipation féminine, alors que, pour conquérir sa liberté, la femme accepte résolument de travailler, - quel travail saurait mieux lui convenir que le travail littéraire ?! […] Poète par essence, elle s'exprimera aussi facilement en vers qu'en prose. Plus facilement même, car elle n'aura point à se préoccuper d'inventer des intrigues, de se créer un genre, de se faire le champion d'une idée quelconque ; - non, il lui suffira d'aimer, de souffrir, de vivre. Sa sensibilité, voilà le meilleur de son imagination. Elle chantera ses joies et ses peines, elle écoutera battre son coeur, et tout ce qu'elle sentira, elle saura le dire avec facilité qui est bien une des caractéristiques du talent féminin. […] Et puis, au moment où la femme va devenir, dans les lettres comme dans la vie sociale, la rivale de l'homme, ne convient-il pas de dresser le bilan, d'inventorier - si l'on peut dire, - son trésor poétique. Les temps sont arrivés où chacun va réclamer le bénéfice de son apport personnel. […] » (Alphonse Séché [1876-1964])
« Il n'y a pas de poésie féminine. Il y a la poésie. Certains et certaines y excellent, d'autres non. On ne peut donc parler d'un avenir spécial de telle poésie, masculine ou féminine. La poésie a toujours tout l'avenir. Il naîtra toujours de grands poètes, hommes ou femmes […]. Où ? Quand ? Cela gît sur les genoux des dieux, et nul ne peut prophétiser là-dessus. […]. » (Fernand Gregh [1873-1960])
0:00 - Silvia Baron Supervielle 0:38 - Annie Salager 1:28 - Vénus Khoury-Ghata 2:13 - Colette Nys-Mazure 2:44 - Françoise Thieck 3:10 - Josée Lapeyrère 4:42 - Jeanine Baude 5:36 - Générique
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Références bibliographiques : Couleurs femmes, poèmes de 57 femmes, Paris, co-édition le Castor Astral/Le Nouvel Athanor, 2010. Françoise Chandernagor, Quand les femmes parlent d'amour, Paris, Cherche midi, 2016.
Images d'illustration : Silvia Baron Supervielle : https://thalim.cnrs.fr/manifestations-culturelles/article/gestes-et-poesie-rencontre-avec-silvia-baron-supervielle Annie Salager : https://poussiere-virtuelle.com/wp-content/uploads/2017/04/Annie-Salager.jpg Vénus Khoury-Ghata : https://i0.wp.com/arablit.org/wp-content/uploads/2020/08/khoury-ghata-cat2.jpg?ssl=1 Colette Nys-Mazure : https://www.tga.fr/colette-nys-mazure-poete-chretienne-et-libre.html Josée Lapeyrère : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/2/2c/Josée_Lapeyrère.jpg Jeanine Baude : http://editionsws.cluster011.ovh.net/wp-content/uploads/2015/05/DSCN5542.jpg
Bande sonore originale : Arthur Vyncke - Uncertainty Uncertainty by Arthur Vyncke is li
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