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EAN : 9789973580658
348 pages
Elyzad (20/03/2014)
3.4/5   5 notes
Résumé :
L'oasis enclavée entre le roc, le désert et les marais salants, jaillit au cœur de la steppe brasillant sous un soleil féroce.Ilôt de luxuriance où le narrateur, un instituteur à la retraite, se propose de vivre le temps qu'il lui reste. Avec les « fils » de l'oasis, il partage le miel des dattes, le thé âcre et sirupeux, les rites et les pèlerinages... Monde minuscule,ancré dans ses traditions immémoriales. Pourquoi est-il amené à raconter de Nadir, magnat de l'hôt... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Ouvrir ce petit livre est déjà un régal : de taille maniable, composé de feuillets de papier de qualité à l'impression aérée et très nette, enveloppée d'une couverture à rabats cartonnée illustrée avec élégance de palmiers colorés (Merci à Nebras Charfi pour cette composition) : la beauté, la couleur, l'élégance, le souci du lecteur avertissent déjà qu'un texte lui aussi soigné et délicatement sensuel nous attend : les éditions Elyzad, décidément, ne déçoivent jamais par leur présentation. Et quand on découvre le contenu...l'impression d'exigence et de soin se confirme !

Le narrateur de cette histoire est un instituteur retraité qui, à l'hiver de ses jours, revient s'installer dans l'oasis où il a autrefois été nommé. Au lieu de laisser les jours s'égrener paisiblement, le voilà sollicité par un de ses anciens élèves, Nadir, devenu Si Nadir (respect exprimé par Sidi, Seigneur), petit homme rond qui, devenu un puissant homme d'affaires dans l'hôtellerie, sollicite les talents d'écrivain de son môallem (maître) pour raconter sa vie.

Reprenant les termes de Victor Hugo en en inversant le sens, le narrateur se lance dans l'entreprise : « Quand je vous parle de moi je vous parle de vous » (Préface des Contemplations). C'est donc la vie de l'instituteur qui se dévoile au fil de la narration, appuyée sur le récit de Nadir qu'il reçoit par bribes sur des cassettes. Nous entendons le dictaphone et la voix du maître en un récit à la trame dense et parfois complexe. Les phrases s'enroulent en longues volutes, se répandent puis se resserrent, calligraphie compliquée, aérienne et légère comme le vol de l'épervier qui griffe le ciel, aiguë, griffue et élégante comme un firman persan. le vocabulaire arabe s'insinue dans le discours, le précise, le modèle et nous entraîne vers des lieux perdus, réminiscence d'une sorte de paradis perdu. Bien sûr, il y a le parti-pris de célébrer le désert, ses traditions, ses beautés, dans un souffle orientaliste qui rappelle les grands peintres de l'Orient du XIXème siècle, Delacroix est même cité pour que rien ne nous échappe. Bien sûr, la vie frugale, modeste et dure est magnifiée par la plume de l'écrivain et il n'excelle jamais autant que lorsqu'il célèbre la magie du désert, laissant sciemment de côté l'obscurantisme de traditions ancestrales, la violence faite aux femmes, l'âpreté de la vie sous la tente et dans l'oasis. Mais il se dégage une telle puissance poétique, une telle beauté des mots et des images suggérées que le livre nous laisse muet, ébloui, regrettant déjà que le récit s'achève.

Il ne s'agit pourtant pas d'une écriture désincarnée, éthérée et purement cérébrale. Tout au contraire, la palette de l'auteur nous inonde de couleurs, de lumières, de parfums, d'érotisme voire de récits suggestifs ou crus au moment où le corps découvre le plaisir et s'en réjouit passionnément, naturellement. Les femmes ne sont pas les dernières dans ce registre qui affirment qu' « un bâton a besoin d'un tambour pour retentir », tandis que l'homme fait du sexe féminin une évocation ...gourmande en le comparant à une mangue, ou sacrée en y voyant des « glyphes intimes » ! L'écriture se fait ciselée, travaillée, en de longs développements enrichis parfois d'allitérations qui donnent envie de les lire à voix haute, comme un poème dans le désert : « le vol véloce de l' épervier », « caravanes englouties au fond le l'antique lac Triton, contrée de contes », « le cercle du clan, se bouclant comme un bouclier » etc...

Finalement l'histoire semble n'être qu'un prétexte à l'évocation de l'oasis, du désert, symboles éternels de la vie et de la mort : « L'amble lent de la chamelle manifeste que la vérité, sujette aux métamorphoses, est soeur de l'illusion et que le destin de toute chose créée, fût-ce le granit, finit en poussière. Et que l'on n'écrit pas des livres, mais des palimpsestes, ruines sur ruines, décombres sur décombres, la mort, sans cesse dénonçant l'absurdité de l'éternité, gommant les lignes de fuite de la vie. L'orgueil du sable est de se vouloir réceptacle de passage, non d'ancrage. Ici, où le pèlerin vacille sur son esquif qui tangue sur les crêtes friables de la patrie des nomades, sempiternels voyageurs porteurs de tentes, coureurs de steppes. »

Les amours impossibles de Nadir et de la jeune Rima, bédouine donc inaccessible, sa fuite en France, sa vie de gigolo suivie d'une réussite extraordinaire, tout cela n'est qu'un prétexte pour le narrateur à se souvenir de sa propre vie et à exalter le monde du désert.
Un beau livre, puissant et délicat à la fois. Merci aux éditions Elizad pour cette belle découverte.

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Survivant, toujours ressuscitée, s'extirpant vaille que vaille des profondeurs arides, telle la pierre gravée des sarcophages enfouis en de secrètes cryptes. Talisman pour traverser les ténèbres, pèlerin de l'envers de l'existence. Poignante, telle la palpitation d'une étincelle de vie prise au piège des assoiffées de la mort.
L'oasis.
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Un très beau texte poétique qui mêle passé, présent et futur. Avec une belle langue poétique, Ali Bécheur nous raconte l'évolution d'un village en Tunisie. de belles pages décrivent la nature et, en particulier, le changement des saisons et la lumière si caractéristique dans les oasis, à travers les feuilles de dattiers. Il nous raconte la vie et l'accession de Nadir, qui va devenir un magnat du tourisme de masse, mais comment et grâce à qui, est il devenu ce qu'il est ? C'est ce que va découvrir et raconter le narrateur, puisque Nadir lui commande une auto biographie. de Tozeur à Paris, Ali Becheur nous parle de l'évolution d'un pays, des traditions au modernisme. A noter à nouveau de la qualité du livre objet : j'apprécie beaucoup les couvertures, verdoyante et lumineuse pour ce roman, la couverture à rabais qui permet de protéger les pages et une typographie qui facilite la lecture. Merci Evelyne d'avoir fait voyager ce livre et vive les livres voyageurs.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Instruit désormais que le plaisir est affaire d’archéologue, le voilà parti à la recherche de trésors enfouis, errant à travers un continent de monts et de merveilles, de découverte en découverte, émerveillé que nous la peau frémissante qu’il explore béent des abysses de l’être, où le désir, cette méduse, noue son écheveau de filaments brûlants, entrelaçant les pulsions, les manques et les rêves.
Ce corps qu’il explore, c’est l’oasis
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Notre temps est justice, enchaîna Tijani. Le gadous donne a chacun son dû avec exactitude, à telle enseigne qu’en des temps très anciens, le sultan, soucieux d’établir la concorde au sein de son peuple qu’il savait ennemi de l’iniquité et prompt à brandir l’étendard de la révolte afin qu’on ne pût en modifier le débit, fit enchâsser une pièce d’or à son effigie au fond de la jarre, percée d’un trou calibré de telle façon qu’elle mis à se vider le temps pour un orant de psalmodier la fatiha, sourate qui ouvre le Coran.
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Les yeux embrumés de nuit, je franchis le seuil du logis encore emmitouflé dans le creux des songes, traverse le patio où le figuier se tord, dénudé.
Je l’aperçois.
L’épervier, pharaon céleste dont les cercles amples esquissent la coupole du ciel. Comme chaque matin en tournée d’inspection. Calligraphiant sa sombre signature sur l’aveuglante blancheur de l’aurore.
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L’oasis n’est pas un lieu, c’est un Te Deum. Les palmiers mugissent à voix rauque, les arbres fruitiers couronnés de flocons fuchsia, les jonchées de coquelicots, de campanules, de bourrache velue à fleurs bleues scintillent parmi les mauves, les orties, les trèfles et les chardons hérissés d’épines.
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Ecrivant la biographie du satrape – j’en étais à l’orée de sa troisième vie -, j’avais découvert chemin faisant le vertige de la plume glissant sur le papier, patinage que l’on peut dire à bon droit artistique
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Videos de Ali Bécheur (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Ali Bécheur
[Mots d'auteurs] "De la nécessité d'écrire", Ali Becheur : -Tunis Blues -Le Paradis des femmes -Chems Palace -Les lendemains d'hier Un grand merci à Lucie Eple pour cette interview ! #interview #auteur #littérature
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