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Thomas Bernhard et son légendaire cynisme. Je ne sais pas si ce choix était le plus judicieux pour passer le cap de la Saint-Sylvestre mais il est certain qu'il en valait le détour. Pour vous resituer le contexte, ce récit rapporte le long monologue d'un critique d'art, Reger, du point de vue de son interlocuteur, Atzbacher, le narrateur. Assis devant le tableau de L'homme à la barbe blanche du Tintoret, Reger déverse sans discontinuer son aigreur et sa déception des grands maîtres du Musée d'art ancien de Vienne, où se déroule la rencontre, mais aussi d'un grand nombre de penseurs, écrivains, philosophes, etc. Il s'épanche aussi sur le gardien de musée et sa famille, les professeurs d'histoire de l'art, le musée, sa propre femme, les hôtels où il aime se rendre, les toilettes de Vienne, son appartement, et tout ce qui fait son quotidien. Il s'exprime dans un incessant va-et-vient de répétitions et de rabâchements qui ennuiera probablement certains lecteurs mais qui pour ma part, m'a invité à poursuivre la lecture, à creuser encore et encore la rancune du protagoniste.

J'ai lu ce roman en trois temps qui n'ont rien à voir avec sa structure. La première phase a été pour moi jubilatoire : cette mauvaise foi ridicule et assumée de Reger envers tous les grands philosophes que je n'ai pas lu, cette déconstruction des grands penseurs européens sur lesquels je n'ai finalement aucun avis, est tellement saugrenue qu'elle m'a bien fait rire. Ensuite, les vacances de Noël et l'effervescence familiale aidant j'ai eu beaucoup de mal à reprendre ma lecture. Je n'ai pas pu y consacrer les longues plages horaires et la concentration que le style de l'auteur nécessite, j'ai partiellement décroché. J'ai repris le livre début janvier, plus au calme, j'ai pu retrouver le fil de la narration et comprendre l'origine du cynisme de Reger qui s'avère ne pas être gratuit. Une tristesse et un désespoir sans fond ont laissé place à la jubilation première. Ce texte est magnifique et sans réponse. Mais était-ce bien nécessaire de débuter 2016 par tant de vanité avouée ?
Lien : https://synchroniciteetseren..
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Komödie

Thomas Bernhard, victime permanente des verdicts ratés. On l'a décrit pessimiste (il l'est), sinistre (il ne l'est pas), haïsseur de la Terre entière et en particulier de l'Autriche ; Il aime peut-être trop l'amour pour aimer les choses terrestres.
En 1984, sa compagne ("La Tante", de trente-cinq ans son ainée) vient de mourir. Il écrit Maitres anciens, qu'il sous-titre "Comédie". Mais Bernhard n'est pas un écrivain. Il déteste la littérature. Il ne se dit pas romancier, metteur en scène, faiseur de théâtre, ni même narrateur. Il écrit. Quand on lui demande ce qu'il est, il dit qu'il écrit, voilà ce que disait Bernhard.
Poseur de bombes, personne n'échappe à son ire sardonique. Ni le Greco, ni Beethoven, ni Klimt, ni Stifter. On se les gâche tous quoi qu'il arrive. On les kitschifie, quand ils ne sont pas kitsch par eux-même, et c'est notre faute.

Seulement, Bernhard, même quand il est narrateur, n'est que passif. Dans Maîtres anciens, c'est un monologue de Reger, dans la salle Bordonne du Musée des Arts anciens de Vienne. Qui observe L'Homme à la barbe blanche du Tintoret. le personnage, veuf depuis peu (ja) tire à boulets rouges sur tout l'art de ces maîtres anciens. Atzbacher (le narrateur, très peu nommé) relate l'enfer personnel de Reger, qui exprime son obsession pour son fauteuil de la salle Bordonne du Musée des Arts anciens de Vienne, et pour ce qu'il déteste chez le Tintoret, chez les amateurs d'art, les artistes, et globalement chez tous les habitants de ce monde.

Malgré ce qu'on pourrait bien imaginer, ou mal lire, Reger / Bernhard propose des solutions. Sur l'intelligence de l'observation. Ne pas regarder les tableaux de trop près, ne pas lire trop fort, ne pas écouter trop profondément, ne pas aimer trop fort, au risque de tout se gâcher.
C'est tout un art. L'admiration étant le propre de l'imbécile, la frontière est ténue entre le critique d'art moribond et l'amant abstrayant.

C'est donc purement un objet livresque intellectuel. Mais cérébral. Mais sensoriel. Donc jamais quoi que ce soit de tangible. Ce serait du gâchis. D'où la Comédie. le rire point dans l'exagération, dans l'extrêmisme de Eger, dans le dynamitage de toutes les institutions.
Il se trouve que tantôt nous sommes des artistes de la parole, tantôt des artistes du silence, et nous perfectionnons cet art au plus haut point, c'est ce qu'a dit Eger.

Quant au style de Bernhard, ça ne ressemble à rien d'autre. C'est un flux ininterrompu et répétitif de désamorçages d'intrigues, d'idées esthétiques et de paradigmes possibles, tout en n'apportant aucune réponse définitive. A la rigueur, on peut rapprocher Bernhard de la tradition très autrichienne des écrivains qui méprisent leur pays (la Cacanie - comme le caca, oui - de Musil ; la Ronde obscène de Schnitzler ; le Monde d'hier de Zweig).

Thomas Bernhard est un écrivain à points d'ancrage. On voit apparaitre des motifs en permanence, et quand vient une idée, elle est prolongée, enfoncée dans la gorge jusqu'à la nausée, puis annihilée, explosée.

Thomas Bernhard répète à l'envie les mêmes motifs, c'est cela qu'a dit Gepeoh ce jour-là, assis dans son canapé de la rue R******. La philosophie, l'art et l'autrichien est dégoûtant, c'est un pays apathique, pire que tous les pires pays d'Europe, un pays catholico-national-socialiste en décrépitude, a dit Eger dans le fauteuil de la salle Bordonne du Musée des Arts anciens de Vienne, a écrit Artzbacher, arrêtant Eger dans son flux de parole, c'est cela qu'a écrit Bernhard, veuf, installé tristement dans sa ferme de haute-Autriche, or il n'est pas un temps à être lyrique, a relaté Gepeoh depuis son canapé, tout en ignorant que ce flux inexistant en la forme n'est probablement qu'un amusement de plus pour l'humour si singulier et trompeur de Bernhard.

Il n'y a rien, strictement rien qui nous sauvera. La musique, l'amour, la mesure. le jeu peut-être. La comédie. C'est cela qu'a voulu dire Bernhard. Pas négativiste. Désespéré. Dans l'attente de sa mort, la mort d'un tubard.
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Je viens de terminer la lecture de “Maîtres anciens” de Thomas Bernhard et j'ai été fasciné sinon envoûté par ce roman et par la figure de son héros, Reger. Voilà un étrange personnage, un critique d'art octogénaire, qui se rend tous les deux jours au Musée d'art ancien de Vienne pour y observer, des heures durant, toujours sur la même banquette, le tableau “L'homme à la barbe blanche” de Tintoret. Encore un personnage atrabilaire, logorrhéique et désespérément solitaire, comme seul Thomas Bernhard en a le secret; il déverse sa haine sur la société et l'Etat autrichiens. Celui-ci se rend compte, mais un peu tard, alors que son épouse vient de mourir, qu'il n'y a pas que l'art dans la vie mais également l'amour.
Lien : http://schabrieres.wordpress..
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On fait connaissance du protagoniste à travers le gardien du Musée des arts anciens qui narre à sa place, qui utilise ses mots pour raconter son histoire et ses perceptions. Ce qui a pour effet de se sentir en face d'un être, d'un état, tout à fait impersonnel.

« Mes parents ont empêché tout ce qui était moi et faisait partie de moi. Dans un mécanisme d'oppression constante, ils ont manqué me tuer à force de protection. Il fallait que mes parents fussent morts pour que je pusse vivre, quand mes parents sont morts, j'ai revécu. »

Un personnage central (une société ?) bourru, sclérosé et qui ne voit que les morceaux manquants.

Pas étonnants que ce dernier, cet homme devenu vieux avant le temps, se fige pendant des heures devant le portrait statique "un homme à la barbe blanche" du peintre Titien. Pour moi c'est clair comme eau de fontaine, il s'agit de son propre miroir. Un homme empli de colère et de violence aveugle contre lui-même.
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Ce roman, sous-titré comédie, se passe dans le musée d'art ancien de Vienne. le narrateur arrivé avant son ami, vieux critique musical avec qui il a rendez-vous, l'observe à son insu. Avec des sarcasmes violents et exacerbés, c'est de cette situation que l'auteur fait naître et se développer, jusqu'au cocasse et au grotesque, une réflexion et une satire sur l'art et la vie, sur les milieux artistiques, sur les artistes et les gens cultivés.
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Une diatribe, un pamphlet. le style répétitif et le propos qui tourne en rond - je n'ai pas accroché. « Un comique né de l'exagération, une exagération qui fait surgir les vérités qui ne sont pas bonnes à dire, font ici la joie du lecteur » - dixit la quatrième de couverture. Oui, mais qu'est-ce que c'est long…

Tout y passe, les toilettes de Vienne, le Prater, Mahler, Heidegger, les maîtres anciens et les maîtres modernes, le Jugendstil, l'Etat, l'Eglise, le gouvernement, le parlement, la femme de ménage, les soi-disant classes inférieures, l'Autrichien, l'Allemand. Cependant Schopenhauer et Novalis trouvent grâce à ses yeux.

« Peindre ne serait-ce qu'un menton remarquable ou un genou effectivement réussi, aucun de ces soi-disant maîtres anciens n'y est arrivé non plus. Le Greco n'a jamais su peindre ne serait-ce qu'une seule main, les mains du Greco ont toujours l'air de lavettes sales et mouillées [ ] Et en plus, c'est déprimant de ne jamais voir ici, dans ce Musée d'art ancien, qu'un art qu'il faut bien qualifier d'art étatique, d'art étatique habsbourgeois-catholique, ennemi de l'esprit ». P215

Moi j'ai une petite pensée pour Alain Soral.
Sur un réseau germanophone, Maîtres anciens bénéficie d'une très bonne note. Pour ma part, je suis passé à côté.
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génial; une écriture de la détestation qui se retourne contre(sur)lui même
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Du cynisme et une mauvaise foi comique, c'est ce qui ressort de ce monologue autistique de 250 pages. Pas De chapitre, pas de paragraphe. Difficile de s'arrêter, et quand on le fait, difficile de reprendre. Pour autant, les pages que j'ai cornées pour y avoir lu une sentence percutante se comptent par dizaines. Sans conteste un OVNI dans ma bibliothèque !
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Profitant de la fin d'un des tomes de Madame de Sevigné, je viens de lire Maître anciens, de Thomas Bernhard. de lui, j'ai vu trois ou quatre pièces de théâtre, et n'en ai aimé (c'est un euphémisme) aucune – je parle des textes, non des mises en scène. Mais, me disent des amis en qui j'ai confiance, férus de bonne littérature, et dont je partage ordinairement les goûts, il faut lire ses romans, et d'abord Maîtres anciens. Je l'ai donc lu, avec grand peine et grand ennui. Indépendamment de la traduction, maladroite, le style est lourdingue, volontairement lourdingue, ce qui ne le rachète en rien. C'est « écrit dans un style épouvantable qui, de plus, est grammaticalement au-dessous de toute critique », comme Bernhard l'écrit d'un autre ; c'est « l'auteur le plus ennuyeux et le plus hypocrite qu'il y ait dans la littérature allemande. » En outre, son perpétuel ressassement de méchancetés à propos de tout et sur tous, ses perpétuelles vitupérations de vieillard aigri, dénuées de toute nuance, sa pensée perpétuellement grossière et schématique me sont insupportables. Je ne comprends pas sa notoriété, sinon pour des raisons qui n'ont rien à voir avec la littérature. Qu'on porte ceci à mon débit…
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