Ce tome comprend les épisodes 854 à 860 de la série "Detective Comics", parus en 2009/2010. Ils sont tous consacrés à Batwoman, écrits par
Greg Rucka et illustrés par
J.H. Williams III, avec une mise en couleurs de Dave Stewart. Il se décompose en 2 histoires.
Elegy (épisodes 854 à 857) - Batwoman opère à Gotham et elle enquête par la manière forte sur la Religion du Crime. Elle reçoit l'assentiment de Batman pour mener à bien cette mission sur son territoire. À partir de sa base d'opérations, elle travaille avec son père qui lui sert de tacticien. En enquêtant, elle finit par se retrouver face à face avec la nouvelle Madame de la religion du Crime : Alice. Elle croise également plusieurs membres d'une tribu d'individus garous aux des animaux totémiques très divers.
Go (épisodes 858 à 860) - Dans cette partie, Kate Kane essaye d'accepter la découverte terrible de la première partie, et c'est également l'occasion pour elle de se remémorer plusieurs moments clefs de sa vie : 20 ans, 7 ans et 4 ans auparavant.
Cette version de Batwoman est apparue pour la première fois dans l'épisode 11 (juillet 2006) de la série 52 (dans 52 1, en anglais), sous la plume de
Greg Rucka, puis de manière anecdotique dans la maxisérie "Countdown to final crisis". Ensuite
Greg Rucka l'a intégrée dans Five Books of Blood (2007, en anglais), et dans Revelations (2008/2009, en anglais).
J.H. Williams (l'illustrateur) est essentiellement connu pour la série Promethea d'
Alan Moore et Desolation Jones de
Warren Ellis. Ses illustrations pour la première partie relèvent de l'extraordinaire. Il alterne 2 styles différents suivant que la scène s'attache aux pas de Batwoman ou de Kate Kane.
Pour les séquences consacrées à Batwoman, la composition des pages, et des doubles pages est très sophistiquée avec des cases en forme d'éclairs ou de triangles qui s'emboîtent les unes dans les autres pour accentuer l'impression de mouvement, ou l'impact des coups portés. L'encrage est assez soutenu pour donner plus de densité aux personnages, plus de noirceur surtout pour les combats. Lors de ces scènes,
J.H. Williams III se rapproche des techniques utilisées par
Alex Ross pour donner de la texture à chaque surface, à chaque matériau et en particulier à la combinaison en cuir de Batwoman. Ses illustrations sont rehaussées par une mise en couleurs exceptionnelle de Dave Stewart qui pioche dans toute la palette chromatique pour des juxtapositions de teintes vives et colorées parfois osées, ou au contraire pour des teintes pastel d'une grande sensibilité. La méchante de service ressemble à une lolita gothique japonaise avec une préférence pour les couleurs pastel. Chaque page et chaque case sont d'une incroyable richesse. Ces épisodes ne peuvent pas se lire comme une bande dessinée traditionnelle, la virtuosité de l'illustrateur est telle que le regard s'arrête de lui-même pour contempler ces images ahurissantes et séduisantes.
Pour les séquences consacrées à Kate Kane,
J.H. Williams III utilise un style plus classique, détaillé, précis, méticuleux, sans être obsessionnel. À nouveau, chaque case est gorgée de des détails nécessaires et très spécifiques. La mise en page redevient plus sage, à base de rectangle. Les couleurs de Dave Stewart sont moins éparpillées et plus contenues.
La deuxième partie "Go" conserve la même différence de style entre les scènes consacrées à Batwoman et celles consacrées au passé de Kate Kane. Sauf que pour ces dernières, le lecteur à l'impression de voir resurgir le style que
David Mazzuchelli a employé pour Batman Year One, classique, sobre, efficient, magnifique d'évidence.
Rien que pour cette leçon d'art graphique, ce tome mérite ses 5 étoiles.
Pour la partie "Elegy",
Greg Rucka ressort encore une fois sa Religion du Crime qui correspond à un concept peu abouti et encore moins crédible. Voilà une bande d'allumés qui se réclament d'une Bible du Crime, qui attendent la réalisation d'une prophétie dans laquelle Kate Kane est censée jouer un grand rôle, et qui ne valent pas tripette comme criminels. Heureusement que les illustrations pallient la simplicité du scénario ! Je préfère également ne pas évoquer la présence de ces créatures garous diverses que rien ne vient expliquer ou justifier. Par contre, les relations entre Kate Kane et son mentor sonnent juste, ainsi que celles qu'elle entretient avec ses relations amoureuses.
Pour la partie "Go",
Greg Rucka se retrouve en terrain plus familier à décrire l'évolution de Kate Kane de son enfance jusqu'à sa décision de prendre l'identité de Batwoman. Là il est nettement meilleur et plus convaincant en établissant les motivations et l'éducation de son héroïne qui n'a rien de banal. Certes il utilise le cliché du traumatisme infantile pour expliquer sa vocation, mais sa description du développement affectif et psychologique de Kate Kane a emporté mon empathie et ma sympathie en quelques pages.
En fin de volume se trouvent les magnifiques couvertures variantes de
J.G. Jones,
Adam Hughes, Jock et
Alex Ross.
Je recommande chaudement ce tome pour ses illustrations exceptionnelles et pour le scénario de la deuxième partie qui fait exister Kate Kane comme une personne à part entière.