AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782246837121
216 pages
Grasset (10/01/2024)
3.39/5   9 notes
Résumé :
« Et la voici, Eve Melville, sculptée d’un seul pan de glaise, pas un pli, pas une ride, pas un mot plus haut que l’autre, qui se redresse au milieu de Halsey Street, au milieu des voisins à leurs fenêtres et des enfants réunis sur la route vide, qui nous regarde un à un et qui murmure ma maison est noire »

Un matin d’août 2016, un cri déchire le cœur de Brooklyn : la maison d’Eve Melville a été peinte en noir pendant la nuit. Eve la tient de son ... >Voir plus
Que lire après Eve Melville, CantiqueVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Août 2016, à Brooklyn, Eve Melville découvre sa maison peinte en noir. Maison de briques rouges, héritée du père de son père qui la tenait de Salomon Melville.

Fils d'esclave, lui-même esclave, Salomon a fui la plantation d'indigo par le underground railroad, ces chemins secrets qui permettaient aux esclaves de fuir le sud et de trouver la liberté au nord. C'est sur les docks de New-York, puis en gravissant tous les échelons de la police de la ville qu'il a accompli sa vie. Et acheté cette maison qu'il a léguée à sa descendance.

Eve Melville est le protecteur de ces lieux, elle entretient leur mémoire, comme s'il s'agissait de celle toujours vivante de l'aïeul disparu, du père et du grand-père qui ne sont plus.

Mais surtout de ces générations d'hommes qui se sont libérés du joug de l'esclavage et qu'il ne faut jamais oublier.

Eve Melville au ventre vide qui se désespère de ne pas avoir eu de descendance pour perpétuer le souvenir de ceux qui ne sont plus, des épreuves traversées, de la liberté chèrement acquise et qu'il faut sauvegarder, fut-ce au prix de sa vie.

Eve Melville et Hannah, l'amour interdit, et Peter Stephenson et les artistes maudits des années sida, dans le New-York des années 80 et des chambres d'hôtel à l'abandon.

Eve Melville et Maria, le soutien inconditionnel, la compagne de chaque jour.

Étrange roman qui nous parle des murs d'une maison comme de la chair et des os des humains, qui nous dévoile ses secrets, ses tourments, ses espoirs et ses attentes. Cri d'une peuple libéré qui ne peut accepter aucun retour arrière et aucun oubli.

Car peindre cette maison en noir, est-ce pour rayer du quartier ceux qui l'ont crée, pour faire fuir ceux qui en sont l'âme et le symbole vivant. de 1845 à Savanah en Géorgie jusqu'en 2026 à New-York, la longue histoire des esclaves se dessine sous nos yeux.
L'esclavage, le Vietnam, le 11 septembre, la transformation des quartiers de New York, Eve Melville a tout connu, tout traversé, tout subit, tout accepté. Mais aujourd'hui Eve Melville est en colère, Eve devient folle, Eve se révolte.

Si Eve et Salomon Melville sont des personnages à part entière, la maison du 629 Halsey street occupe elle aussi toute sa place.

La structure, l'écriture de ce texte sont assez troublantes et pourtant on s'y fait très vite. Phrase coupée au milieu qui se poursuit au paragraphe suivant, comme un souffle que l'on garde, que l'on retient et que l'on ne veut pas perdre. Une histoire sans fin qui se déroule d'un côté à l'autre du pays, du sud au nord, du passé au présent. Ce présent qui chamboule tout et serait prêt à gommer du quartier tout ce qui lui rappelle certaines époques. Succession de phrases de mots, énumération pour dire et être sûr que l'on entende le message.

https://domiclire.wordpress.com/2024/02/18/eve-melville-cantique-justine-bo/
Lien : https://domiclire.wordpress...
Commenter  J’apprécie          80
Justine Bo, Justine Bourdais de son vrai nom, née à Cherbourg en 1989, est une réalisatrice et romancière. Justine Bo fait une année de Prépa littéraire, puis entre à Sciences Po Paris en 2008. Elle séjourne dans les territoires palestiniens à l'été 2010, comme bénévole dans une école de musique de Ramallah, puis fait un stage à l'ambassade de France à Damas en Syrie en septembre 2010 pour sa troisième année du collège universitaire de Sciences Po. Elle y reste un an, alors qu'en mars 2011 le « Printemps arabe » atteint la Syrie. Elle tire de cette expérience son premier roman Fils de Sham (2013). En 2014, elle s'installe à New York pour étudier le cinéma. En parallèle, elle travaille pour un magazine en ligne et réalise des documentaires. Son nouveau roman Eve Melville, Cantique vient de paraître.
1845. Solomon, enfant Noir déjà esclave dans une plantation de Géorgie, s'enfuit et remonte vers le Nord, parcours qui l'amène à Brooklyn en 1861 où après plusieurs années il obtiendra des papiers à son nom, Melville. Devenu un homme libre, il exerce mille et un métiers avant de finir policier et quand vient l'heure de la retraite, il s'achète une maison « une maison qui n'en fait pas trop, qui ne se pavane pas, sans bow-window aguichant la rue » avant de repartir mourir en Géorgie. Dans cette maison de Brooklyn se succèderont son fils Moses et son petit-fils Samuel.
Nous sommes maintenant en 2016 et Eve Melville, arrière-petite-fille de Solomon, infirmière dans la police, découvre que sa maison a été repeinte en noir durant la nuit ! Un coup bas des promoteurs qui rachètent les maisons du coin mais butent sur Eve qui refuse de céder l'héritage familial durement acquis. Dès lors, un long combat s'engage entre elle et eux, une résistance qui la conduit à la folie… ?
Enfin de la très grande littérature ! Ce n'est pas tous les jours qu'on peut lire un tel livre.
Un roman plutôt court mais qui n'empêche pas Justine Bo de nous faire revivre plus d'un siècle d'histoire des Etats-Unis, la douloureuse époque de l'esclavage, la guerre du Vietnam, l'attentat contre les Twin Towers, le Sida, les drogues, l'élection de Trump… Tout cela en toile de fond.
Le coeur du roman reste néanmoins cette maison au 629 Halsey Street. Un lieu de mémoire pour Eve, et les souvenirs de revenir en masse, une demeure acquise au prix du sang et de la sueur, transmise de génération en génération. le combat qu'elle entame contre les promoteurs prend des allures de va-tout, pour des raisons personnelles familiales mais plus largement comme une résistance désespérée contre un certain capitalisme envahissant détruisant son passé, sa raison d'être. Magnifique.
Pourtant le meilleur est encore ailleurs : ce style ! le texte est une succession de petits paragraphes sans lettre majuscule à leur entame car l'écrivaine n'utilise que très peu les points de ponctuation sans que le lecteur s'essouffle pour autant à la lire. Les tournures de phrases ne manquent pas de grâce et d'originalité (« Ses plumes comme dans un rêve se soulevaient légères, prises dans un air qui de terrestre n'avait plus rien. »). L'emploi de l'anaphore (« Comment Eve Melville est devenue folle, il faut que je vous le dise ») scande la dernière partie du récit comme une prière, une incantation, un cantique.
Du très grand art pour un roman que vous devez absolument lire car ne ressemblant à aucun autre.
Commenter  J’apprécie          20
Ce livre est un petit trésor de richesses multiples, tant au niveau du style choisi, de la narration que des personnages, Salomon et Eve, décrits avec virtuosité et humour - alors que les sujets traités ne sont pas forcément toujours très gais. du Sud des Etats Unis à Brooklyn, c'est une valse rapide qui vous entraîne dans une belle puissance pour vous conter une histoire familiale bien particulière en touchant du doigt les failles de la société américaine. A l'origine fut l'esclavage !
Commenter  J’apprécie          60
Brooklyn. Août 2016. Eve Melville découvre que sa maison, celle de son arrière grand-père Solomon a été peinte en noir pendant la nuit. Elle sombre alors dans une sorte de transe, de folie…

C'est un roman déroutant, une belle écriture poétique, un roman comme un long poème entrecoupé de paragraphes au style plus “classique”. Une écriture parfois discontinue, sans point final aux phrases. Une alternance de styles qui donne un rythme au roman.

J'ai apprécié la première partie du récit, l'histoire de Solomon, sa naissance dans les champs d'indigo d'une mère esclave qu'il ne connaît pas, sa fuite, son parcours, son ascension jusqu'à l'acquisition de cette fameuse maison.

Mais ensuite je me suis perdue dans la suite des sujets abordés, je n'ai pas réussi à rester “accrochée”. Peut-être y a-t-il trop de thèmes ? pas suffisamment exploités peut-être ? Bref, je ne suis pas convaincue, je suis restée à l'extérieur, ça arrive…

Merci à Babelio et aux éditions Grasset.
Commenter  J’apprécie          10
Un cri qui déchire la nuit de Brooklyn, celui d'Eve Melville, dont on a repeint la maison en noir. Ève s'indigne, se rebelle, se bat, ose, chavire dans la folie. Ève est l'arrière-petite-fille de Salomon, esclave qui a fui pour arriver à New-York. L'histoire de cet homme est racontée condensée dans le premier chapitre, qui m'a (comme le reste du roman) totalement emporté. Une vie résumée en quelques pages, sans qu'elle ne soit survolée mais au contraire en s'ancrant dans les petits détails du réel, dans la souffrance et le courage de cet homme. le roman continue en un long poème, ou un cantique. Suivant Ève dans sa révolte contre la gentrification de son quartier, évoquant sa vie par touches, de même que toute l'histoire des États-Unis, la guerre du Vietnam, les années sida, l'arrivée au pouvoir de Trump. Ce personnage au bord de la folie restera je pense longtemps en mémoire. Sublime !
Commenter  J’apprécie          10


critiques presse (3)
LeMonde
18 mars 2024
La romancière donne voix à une vieille dame en lutte contre des promoteurs immobiliers.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Bibliobs
22 février 2024
Justine Bo remonte aux racines d'un pays dont le péché originel n'est autre que l'esclavage.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LeFigaro
26 janvier 2024
Un poème, une incantation qui appelle une langue céleste, un langage divin. La prose magnifique de Justine Bo. Dans son dernier roman, l’auteur se fait aède. Les phrases y sont comme des vers. Elle réveille les fantômes et les vieux démons des États-Unis.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (1) Ajouter une citation
ici tous les humains sont les bienvenus, tous les humains sont nos amis, tous nous vivons ensemble ainsi que toujours nous avons vécu, nous sommes un tout et nous sommes heureux, nous sommes une communauté, un pays, un Etat, qui toujours fut grand et toujours le sera, Make America great again disent-ils, faites que l’Amérique redevienne grande, des idioties, je vous le dis, jamais nous n’avons cessé d’être grands, c’est vous qui nous rêvez petits
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Justine Bo (12) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Justine Bo
« Et la voici, Eve Melville, sculptée d'un seul pan de glaise, pas un pli, pas une ride, pas un mot plus haut que l'autre, qui se redresse au milieu de Halsey Street, au milieu des voisins à leurs fenêtres et des enfants réunis sur la route vide, qui nous regarde un à un et qui murmure
ma maison est noire »
Un matin d'août 2016, un cri déchire le coeur de Brooklyn : la maison d'Eve Melville a été peinte en noir pendant la nuit. Eve la tient de son arrière-grand-père, Solomon Melville, né esclave en Géorgie. Ce stigmate sur sa façade avive le souvenir. L'héroïne tranquille devient inquiétante, s'accroche à sa propriété comme à sa mémoire et se révolte contre les promoteurs qui défigurent le paysage de son enfance.
Entre l'affranchissement de Solomon et la furie d'Eve, ce roman entrechoque les mythologies américaines : la torture dans les plantations d'indigo, les spectres du Vietnam, l'apparition du sida et les émeutes qui secouèrent Brooklyn à l'aube des années 1990.
Dans une langue incantatoire, magnifique, puissante, ce cantique pour Eve Melville remonte aux racines d'un pays qui rejoue sans cesse ses batailles.
Née en 1989, Justine Bo est écrivain. "Eve Melville, Cantique" est son septième roman.
+ Lire la suite
autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (42) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (2 - littérature francophone )

Françoise Sagan : "Le miroir ***"

brisé
fendu
égaré
perdu

20 questions
3674 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , littérature française , littérature francophoneCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..