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EAN : 9782711621033
352 pages
Vrin (01/10/2014)
3.71/5   7 notes
Résumé :
Ouvrage où l'on réduit à un seul principe tout ce qui concerne l'entendement humain
Que lire après Essai sur l'origine des connaissances humainesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
D'emblée l'auteur distingue deux sortes de métaphysique. L'une vicieuse, ambitieuse prétend atteindre l'essence des choses. Elle alimente les idées vagues et l'erreur. L'autre, vertueuse, faite de retenue se tient dans les bornes de l'esprit humain. Elle alimente un esprit juste. Aussi dans ce sens il est utile de remonter à la cause des erreurs pour se rapprocher de la vérité et apercevoir la route à prendre dans le domaine de la connaissance.
Condillac critique en réalité Descartes et ce qu'il considère comme les insuffisances de sa méthode. Son but est de faire une oeuvre utile, d'étudier à fond l'esprit humain, de remonter à l'origine des idées et de fixer les bornes de la connaissance en de démarquant de ceux qui ont des maximes vagues ou bien partent de pétition de principes. La voie dans sa conception, ce sont les observations, l'expérience, suivre les progrès de l'esprit humain de la sensation à l'art le plus élevé. Voilà donc un Essai sur l'origine des connaissances humaines On peut affirmer que sa démarche représente le courant empiriste en France. Pour lui la science est un langage bien construit quand elle écarte l'illusion. Dans sa conception l'âme demeure une réalité, c'est elle qui sent. Il a de fait voulu apporter sa pierre à l'édifice pour défendre le savoir universel et l'esprit critique. Il fustige ceux qui n'ont une idée très nette de ce qu'ils pensent.
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Des matériaux de nos connoissances, & particuliérement des opérations de l’ame. des matériaux de nos connoissances, & de la distinction de l’ame & du corps.
§. 1. Soit que nous nous élevions, pour parler métaphoriquement, jusques dans les cieux ; soit que nous descendions dans les abysmes ; nous ne sortons point de nous-mêmes ; & ce n’est jamais que notre propre pensée que nous appercevons. Quelles que soient nos connoissances ; si nous voulons remonter à leur origine, nous arriverons enfin à une première pensée simple, qui a été l’objet d’une seconde, qui l’a été d’une troisième, & ainsi de suite. C’est cet ordre de pensées qu’il faut développer, si nous voulons connoître les idées que nous avons des choses.
§. 2. Il seroit inutile de demander quelle est la nature de nos pensées. La première réflexion sur soi-même peut convaincre que nous n’avons aucun moyen pour faire cette recherche. Nous sentons notre pensée ; nous la distinguons parfaitement de tout ce qui n’est point elle ; nous distinguons même toutes nos pensées les unes des autres : c’en est assez. En partant de-là, nous partons d’une chose que nous connoissons si clairement, qu’elle ne sçauroit nous engager dans aucune erreur.
§. 3. Considérons un homme au premier moment de son existence : son ame éprouve d’abord différentes sensations ; telles que la lumière, les couleurs, la douleur, le plaisir, le mouvement, le repos : voilà ses premières pensées.
§. 4. Suivons-le dans les momens où il commence à réfléchir sur ce que les sensations occasionnent en lui ; & nous le verrons se former des idées des différentes opérations de son ame, telles qu’appercevoir, imaginer : voilà ses secondes pensées. Ainsi, selon que les objets extérieurs agissent sur nous, nous recevons différentes idées par les sens ; &, selon que nous réfléchissons sur les opérations que les sensations occasionnent dans notre ame, nous acquérons toutes les idées que nous n’aurions pu recevoir des choses extérieures.
§. 5. Les sensations & les opérations de l’ame sont donc les matériaux de toutes nos connoissances : matériaux que la réflexion met en œuvre, en cherchant, par des combinaisons, les rapports qu’ils renferment. Mais tout le succès dépend des circonstances par où l’on passe. Les plus favorables sont celles qui nous offrent en plus grand nombre des objets propres à exercer notre réflexion. Les grandes circonstances, où se trouvent ceux qui sont destinés à gouverner les hommes, sont, par exemple, une occasion de se faire des vues fort étendues : & celles qui se répètent continuellement dans le grand monde donnent cette sorte d’esprit qu’on appelle naturel ; parce que, n’étant pas le fruit de l’étude, on ne sçait pas remarquer les causes qui le produisent. Concluons qu’il n’y a point d’idées qui ne soient acquises : les premières viennent immédiatement des sens ; les autres sont dues à l’expérience, & se multiplient à proportion qu’on est plus capable de réfléchir.
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Chapitre v
de la musique.
Jusqu’ici j’ai été obligé de supposer que la musique était connue des anciens : il est à propos d’en donner l’histoire, du moins en tant que cet art fait partie du langage.

§. 43. Dans l’origine des langues, la prosodie étant fort variée, toutes les inflexions de la voix lui étaient naturelles. Le hasard ne pouvait donc manquer d’y amener quelquefois des passages dont l’oreille était flattée. On les remarqua, et l’on se fit une habitude de les répéter : telle est la première idée qu’on eut de l’harmonie.

§. 44. L’ordre diatonique, c’est-à-dire, celui où les sons se succèdent par tons et demi-tons, paraît aujourd’hui si naturel, qu’on croirait qu’il a été connu le premier ; mais si nous trouvons des sons dont les rapports soient beaucoup plus sensibles, nous aurons droit d’en conclure que là succession en a été remarquée auparavant.

Puisqu’il est démontré que la progression par tierce, par quinte et par octave, tient immédiatement au principe où l’harmonie prend son origine, c’est-à-dire, à la résonnance des corps sonores, et que l’ordre diatonique s’engendre de cette progression ; c’est une conséquence que les rapports des sons doivent être bien plus sensibles dans la succession harmonique que dans l’ordre diatonique. Celui-ci en s’éloignant du principe de l’harmonie, ne peut conserver des rapports entre les sons, qu’autant qu’ils lui sont transmis par la succession qui l’engendre. Par exemple, ré, dans l’ordre diatonique, n’est lié à ut, que parce qu’ut, ré, est produit par la progression ut, sol ; et la liaison de ces deux derniers a son principe dans l’harmonie des corps sonores, dont ils font partie. L’oreille confirme ce raisonnement ; car elle sent mieux le rapport des sons ut, mi, sol, ut, que celui des sons ut, ré, mi, fa. Les intervalles harmoniques ont donc été remarqués les premiers.

Il y a encore ici des progrès à observer ; car les sons harmoniques formant des intervalles plus ou moins faciles à entonner, et ayant des rapports plus ou moins sensibles, il n’est pas naturel qu’ils aient été aperçus et saisis aussitôt les uns que les autres. Il est donc vraisemblable qu’on n’a eu cette progression entière ut, mi, sol, ut, qu’après plusieurs expériences. Celle-là connue, on en fit d’autres sur le même modèle telles que sol, si, ré, sol. Quant à l’ordre diatonique, on ne le découvrit que peu-à-peu et qu’après beaucoup de tâtonnements, puisque la génération n’en a été montrée que de nos jours1
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§. 54. Nous ne saurions connaître quel était le caractère de la musique instrumentale des anciens, je me bornerai à faire quelques conjectures sur le chant de leur déclamation.

Il s’écartait vraisemblablement de leur prononciation ordinaire à-peu-près comme notre déclamation s’éloigne de la nôtre, et se variait également selon le caractère des pièces et des scènes. Il devait être aussi simple dans la comédie que la prosodie le permettait. C’était la prononciation ordinaire qu’on n’avait altérée qu’autant qu’il avait fallu pour en apprécier les sons, et pour conduire la voix par des intervalles certains.

Dans la tragédie, le chant était plus varié et plus étendu, et principalement dans les monologues auxquels on donnait le nom de cantiques. Ce sont ordinairement les scènes les plus passionnées ; car il est naturel que le même personnage, qui se contraint dans les autres, se livre, quand il est seul, à toute l’impétuosité des sentiments qu’il éprouve. C’est pourquoi les poètes romains faisaient mettre les monologues en musique par des musiciens de profession. Quelquefois même ils leur laissaient le soin de composer la déclamation du reste de la pièce. Il n’en était pas de même chez les Grecs ; les poètes y étaient musiciens, et ne confiaient ce travail à personne.

Enfin, dans les chœurs, le chant était plus chargé que dans les autres scènes : c’étaient les endroits où le poète donnait le plus d’essor à son génie, il n’est pas douteux que le musicien ne suivît son exemple. Ces conjectures se confirment par les différentes sortes d’instruments dont on accompagnait la voix des acteurs ; car ils avaient une portée plus ou moins étendue selon le caractère des paroles.

Nous ne pouvons pas nous représenter les chœurs des anciens par ceux de nos opéras. La musique en était bien différente, puisqu’ils ne connaissaient pas la composition à plusieurs parties ; et les danses étaient peut-être encore plus éloignées de ressembler à nos ballets. « Il est facile de concevoir, dit l’abbé du Bos, qu’elles n’étaient autre chose que les gestes et les démonstrations que les personnages des chœurs faisaient pour exprimer leurs sentiments, soit qu’ils parlassent, soit qu’ils témoignassent, par un jeu muet, combien ils étaient touchés de l’événement auquel ils devaient s’intéresser. Cette déclamation obligeait souvent les chœurs à marcher sur la scène ; et comme les évolutions, que plusieurs personnes font en même temps, ne se peuvent faire sans avoir été concertées auparavant, quand on ne veut pas qu’elles dégénèrent en une foule, les anciens avaient prescrit certaines règles aux démarches des chœurs ». Sur des théâtres aussi vastes que ceux des anciens, ces évolutions pouvaient former des tableaux bien propres à exprimer les sentiments dont le chœur était pénétré.

§. 55. L’art de noter la déclamation, et de l’accompagner d’un instrument, était connu à Rome dès les premiers temps de la république. La déclamation y fut, dans les commencements, assez simple : mais par la suite, le commerce des Grecs y amena des changements. Les Romains ne purent résister aux charmes de l’harmonie et de l’expression de la langue de ce peuple. Cette nation polie devint l’école où ils se formèrent le goût pour les lettres, les arts et les sciences : et la langue Latine se conforma au caractère de la langue Grecque, autant que son génie put le permettre.

Cicéron nous apprend que les accents qu’on avait empruntés des étrangers, avaient changé, d’une manière sensible, la prononciation des Romains. Ils occasionnèrent, sans doute, de pareils changements dans la musique des pièces dramatiques : l’un est une suite naturelle de l’autre. En effet, Horace et cet orateur remarquent que les instruments qu’on employait au théâtre de leur temps, avaient une portée bien plus étendue que ceux dont on s’était servi auparavant ; que l’acteur, pour les suivre, était obligé de déclamer sur un plus grand nombre de tons, et que le chant était devenu si pétulant qu’on n’en pouvait observer la mesure qu’en s’agitant d’une manière violente. Je renvoie à ces passages, tels que les rapporte l’abbé du Bos, afin qu’on juge si l’on peut les entendre d’une simple déclamation
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§. 45. Les premiers progrès de cet art ont donc été le fruit d’une longue expérience. On en a multiplié les principes, tant qu’on n’en a pas connu les véritables. M. Rameau, est le premier qui ait vu l’origine de toute l’harmonie dans la résonnance des corps sonores et qui ait rappelé la théorie de cet art à un seul principe. Les Grecs, dont on vante si fort la musique, ne connaissaient point, non plus que les Romains, la composition à plusieurs parties. Il est cependant vraisemblable qu’ils ont de bonne heure pratiqué quelques accords, soit que le hasard les leur eût fait remarquer à la rencontre de deux voix, soit qu’en pinçant en même temps deux cordes d’un instrument, ils en eussent senti l’harmonie.

§. 46. Les progrès de la musique ayant été aussi lents, on fut longtemps avant de songer à la séparer des paroles : elle eut paru tout-à-fait dénuée d’expression. D’ailleurs la prosodie s’étant saisie de tous les tons que la voix peut former, et ayant seule fourni l’occasion de remarquer leur harmonie ; il était naturel de ne regarder la musique que comme un art qui pouvait donner plus d’agrément ou plus de force au discours. Voilà l’origine du préjugé des anciens qui ne voulaient pas qu’on la séparât des paroles. Elle fut, à-peu-près, à l’égard de ceux chez qui elle prit naissance, ce qu’est la déclamation par rapport à nous : elle apprenait à régler la voix, au lieu qu’auparavant on la conduisait au hasard. Il devait paraître aussi ridicule de séparer le chant des paroles, qu’il le serait aujourd’hui de séparer de nos vers les sons de notre déclamation.

§. 47. Cependant la musique se perfectionna : peu-à-peu elle parvint à égaler l’expression des paroles : ensuite elle tenta de la surpasser. C’est alors qu’on put s’apercevoir qu’elle était par elle-même susceptible de beaucoup d’expression. Il ne devait donc plus paraître ridicule de la séparer des paroles. L’expression que les sons avaient dans la prosodie qui participait du chant, celle qu’ils avaient dans la déclamation qui était chantante, préparaient celle qu’ils devaient avoir lorsqu’ils seraient entendus seuls. Deux raisons assurèrent même le succès à ceux qui, avec quelque talent, s’essayèrent dans ce nouveau genre de musique. La première, c’est que sans doute ils choisissaient les passages auxquels, par l’usage de la déclamation, on était accoutumé d’attacher une certaine expression, ou que du moins ils en imaginaient de semblables. La seconde, c’est l’étonnement que, dans sa nouveauté, cette musique ne pouvait manquer de produire. Plus on était surpris, plus on devait se livrer à l’impression qu’elle pouvait occasionner. Aussi vit-on ceux qui étaient moins difficiles à émouvoir, passer successivement, par la force des sons, de la joie à la tristesse, ou même à la fureur. A cette vue, d’autres qui n’auraient point été remués, le furent presque également Les effets de cette musique devinrent le sujet des conversations, et l’imagination s’échauffait au seul récit qu’on en entendait faire. Chacun voulait en juger par soi-même ; et les hommes, aimant communément à voir confirmer les choses extraordinaires, venaient entendre cette musique avec les dispositions les plus favorables. Elle répéta donc souvent les mêmes miracles.
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Chapitre vii
Quelle est la prosodie la plus parfaite.
§. 62. Chacun sera, sans doute, tenté de décider en faveur de la prosodie de sa langue : pour nous précautionner contre ce préjugé, tâchons de nous faire des idées exactes.

La prosodie la plus parfaite est celle qui, par son harmonie, est la plus propre à exprimer toutes sortes de caractères. Or, trois choses concourent à l’harmonie, la qualité des sons, les intervalles par où ils se succèdent, et le mouvement. Il faut donc qu’une langue ait des sons doux, moins doux, durs même, en un mot de toutes les espèces ; qu’elle ait des accents qui déterminent la voix à s’élever et à s’abaisser ; enfin que, par l’inégalité de ses syllabes, elle puisse exprimer toutes sortes de mouvements.

Pour produire l’harmonie, les chutes ne doivent pas se placer indifféremment. Il y a des moments où elle doit être suspendue ; il y en a d’autres où elle doit finir par un repos sensible. Par conséquent, dans une langue dont la prosodie est parfaite, la succession des sons doit être subordonnée à la chute de chaque période, en sorte que les cadences soient plus ou moins précipitées, et que l’oreille ne trouve un repos qui ne laisse rien à désirer, que quand l’esprit est entièrement satisfait.

§. 63. On reconnaîtra combien la prosodie des Romains approchait plus que la nôtre de ce point de perfection, si l’on considère l’étonnement avec lequel Cicéron parle des effets du nombre oratoire. Il représente le peuple ravi en admiration, à la chute des périodes harmonieuses ; et, pour montrer que le nombre en est l’unique cause, il change l’ordre des mots d’une période qui avait eu de grands applaudissements, et il assure qu’on en sent aussitôt disparaître l’harmonie. La dernière construction ne conservait plus, dans le mélange des longues et des brèves, ni dans celui des accents, l’ordre nécessaire pour la satisfaction de l’oreille6. Notre langue a de la douceur et de la rondeur, mais il faut quelque chose de plus pour l’harmonie. Je ne vois pas que, dans les différents tours qu’elle autorise, nos orateurs aient jamais rien trouvé de semblable à ces cadences qui frappaient si vivement les Romains.

§. 64. Une autre raison qui confirme la supériorité de la prosodie latine sur la nôtre, c’est le goût des Romains pour l’harmonie, et la délicatesse du peuple même à cet égard. Les comédiens ne pouvaient faire, dans un vers, une syllabe plus longue ou plus brève qu’il ne fallait, qu’aussitôt toute l’assemblée, dont le peuple faisait partie, ne s’élevât contre cette mauvaise prononciation.

Nous ne pouvons lire de pareils faits sans quelque surprise ; parce que nous ne remarquons rien parmi nous qui puisse les confirmer. C’est qu’aujourd’hui la prononciation des gens du monde est si simple que ceux qui la choquent légèrement ne peuvent être relevés que par peu de personnes, parce qu’il y en a peu qui se la soient rendue familière. Chez les Romains, elle était si caractérisée, le nombre en était si sensible que les oreilles les moins fines y étaient exercées : ainsi ce qui altérait l’harmonie ne pouvait manquer de les offenser.
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