Je l'ai toujours dit, si on arrive à se faire haïr, on sait que le boulot est bien fait
Un jeune Allemand fluet a couru vers la scène en s'écriant.
-Bukowski,gros salopard,espèce de porc,vieux dégueulasse,je te hais!
Ce genre de réaction m'aide toujours à me détendre,ça libère la poésie de toute prétention au sacré.Ce jeune Allemand fluet avait de nombreux homologues en Amérique.
Pendant qu'il continuait de me hurler dessus,je l'ai regardé en vidant un autre verre de vin.Je l'ai toujours dit, si on arrive à se faire haïr, on sait que le boulot est bien fait.
On a bu tout le vin blanc qu’il y avait à bord, puis tout le vin rouge. Lisa s’est endormie et j’ai bu toute la bière.
Ce putain de tonneau n'avait qu'un défaut:il était vide.
Les gens aiment prendre des photos. Je n’ai rien contre. J’ai l’impression que ça capture juste le processus de mort, que ça le fige pendant un petit instant et que, oui, ça peut être marrant.
A l'intérieur, ils m'ont de nouveau coincé. Une fille d'une chaîne d'information autrichienne ; des tables, des projecteurs. Je me suis assis. Ils veulent toujours plus que les simples poèmes, ce qui ne rime à rien, puisque les poèmes disent l'essentiel ; trop d'écrivains renient leur machine à écrire pour devenir profs ou gourous.
On a trouvé un compartiment de première classe et on y est entrés. Grâce à l’oncle Bernard, un bon voyage de quatorze heures nous attendait. Une fois installés, on a appris qu’il n’y avait pas de wagon-restaurant ou de voiture-bar ni même de minibar dans ce train ; il n’était pas prévu de lui attacher une autre voiture, on allait donc se retrouver sans bouffe, sans eau et sans alcool pendant quatorze heures.
Les interviews du matin étaient toujours les plus dures, entre la gueule de bois et les tentatives pour faire descendre la bière. Non, je ne sais vraiment pas pourquoi je suis écrivain. Non, mes livres n’ont aucun message particulier à ma connaissance. Céline ? Oh, bien sûr. Pourquoi pas ? Si j’aime les femmes ? Eh bien, en général, je préférerais les baiser que d’avoir à vivre avec elles. Qu’est-ce qui importe selon moi ? Le bon vin, une bonne plomberie et la grasse matinée à volonté. Est-ce que je vous dérange vraiment ? Bien sûr que oui.
Comme me l'avait seriné mon père pendant toute mon enfance : " Tu n'as aucune volonté, aucune ambition, t'es incapable de te bouger les fesses ! Henry, qu'est-ce que tu vas devenir ? " Il disait toujours ça juste avant le dîner. Ce qui ne m'aidait pas vraiment à digérer.
Mais moi je me disais que si je me convertissais, si j'avais la foi, je serais obligé de laisser tomber le Diable et il se retrouverait tout seul dans les flammes, ce ne serait pas gentil de ma part parce que dans les épreuves sportives j'ai tendances à soutenir le perdant et dans les épreuves spirituelles je souffre de la même maladie, car je ne suis pas un homme de réflexion je fonctionne au sentiments et mes sentiments vont aux estropiés, aux torturés, aux damnés, aux égarés, non par compassion mais par fraternité, parce que je suis l'un des leurs, perdu, paumé, indécent, minable, apeuré, lâche, injuste, avec des brefs éclairs de gentillesse; salement atteint et conscient de l'être, cette lucidité ne m'est d'aucun secours, au lieu de me guérir elle me plombe.