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EAN : 9782020101936
154 pages
Seuil (01/06/1988)
3.66/5   19 notes
Résumé :
Les Silences ou la Vie d'une femme
Marie Chaix
Une femme s'endort. Elle va peut-être mourir, prisonnière de ce sommeil incompréhensible qu'est le coma. La narratrice, devenue l'ombre, "la suivante" de la dormeuse, va l'accompagner tout au long d'une agonie de six semaines ; elle sera le témoin de cette mort lente, imposée par les progrès de la médecine et l'engrenage monstrueux de l'hôpital.

Durant ce dernier voyage à travers les brumes... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Un beau roman qui fait réfléchir sur la fin de vie, la vieillesse, le séjour souvent obligatoire dans un hôpital, un service de ranimation ou encore un mouroir, la solitude, les maux et infirmités. le sujet est grave et est traité avec respect et une grande mélancolie. Il me touche beaucoup, car je suis souvent allée dans les cimetières, et comme l'auteur me suis interrogée sur l'existence terrestre qu'avaient eu les défunts, me questionnant aussi sur "Les regrets éternels" qui sont souvent des formules de politesse, des convenances rendues obligatoires par la société qui juge et qui tient au sacré de toute existence éteinte car on ne doit jamais médire des morts... et pourtant... J'ai souvent songé à tous ces morts, même inconnus, me demandant qu'elles avaient été leurs aspirations, quel chemin ils avaient suivi... m'interrogeant sur leurs déceptions, leurs bonheurs furtifs, et leurs regrets éternels qu'ils ont emmenés avec eux dans la tombe. Toutes ces vies éteintes, très vite oubliées, des vies ratées parfois, des vies accidentelles, des erreurs d'aiguillage du destin, des pieds de nez à la vie.
Je suis d'autant plus sensible à ce livre que je suis d'une génération qui a connu de ces intérieurs où étaient déposés en bonne place les portraits sépias de ces hommes à moustaches, posant en uniforme de la guerre de 14 ou en vêtement civil avec montre de gousset... J'ai aussi rendu visite à ces tombeaux ornés des portraits des défunts, sur des médaillons de céramique.
Une autre époque, que ce livre déjà ancien fait ressurgir avec acuité. Je ne sais si ce livre pourra parler aux plus jeunes... j'en doute.
Ce roman, je l'avais acheté il y a quarante ans, je l'ai lu à l'époque, je l'ai retrouvé à l'occasion d'un déménagement après succession. Vieillie, il me parle peut-être plus que lors de la première lecture, car j'en suis arrivée à un moment où il est plus que temps de faire un bilan de sa vie, et je m'accapare grand nombre de réflexions qui sont celles de l'auteur.
Un roman teinté de nostalgie, sombre souvent, que je déconseille aux dépressifs ou à ceux qui sont d'éternels optimistes, et qui de se fait seraient dérangés par un tel thème, mais un texte bien écrit et que j'ai apprécié parce qu'il est en phase avec mon ressenti.
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Marie Chaix a beaucoup d'atouts. Elle écrit bien, a une grande sensibilité, est la soeur d'Anne Sylvestre, a été la secrétaire de Barbara…..
Dans ce roman autobiographique, elle nous raconte la fin de vie de sa mère se faisant le relais de tous ses souvenirs.
C'est très intense, tendre, émouvant.
Outre le portrait d'une belle femme, soumise à son mari et dévouée à ses enfants, elle transcrit parfaitement la fin de vie et les questionnements des êtres proches à la perte d'un être cher.
Publié en 1976, ce roman n'a pas vieilli. Il aurait pu avoir été écrit hier, le style est impeccable et les émotions toujours présentes
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Un roman évoquant la fin de vie d'une femme, avec ses joies, ses souffrances, sa soumission, ses désirs, ses peurs, ses secrets, Marie Chaix a su l'écrire, avec cette plume si sensible que l'on connaît.
L'auteure fait revivre, à travers les souvenirs de cette femme vieillissante qui peu à peu perd la mémoire, l'enfance, l'adolescence, les émois , la sensibilité musicale qu'elle n'a pas pu vivre intensément.
Il s'agit de la mère de Marie Chaix, qu'elle évoquait également dans le roman "Juliette, chemin des cerisiers".
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Ce roman, biographie romancée d'une mère qui a consacré sa vie à son homme et à ses enfants, m'a prise à la gorge. C'était cela être femme?
C'est comme cela vieillir, puis mourir à l'hôpital? Quelle colère éprouve la narratrice devant ce destin de femme!
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Pendant six semaines, Maris Chaix visite sa mère dans le coma, lui souhaitant une mort douce alors que l'équipe hospitalière lutte pour la ramener coûte que coûte à la vie. Les souvenirs remontent, l'histoire de cette femme qui a été petite fille, jeune fille, jeune épouse brièvement comblée, femme au foyer amoureuse soumise aux dictats de cet homme impatient, collaborationiste puis emprisonné pour cela, cette mère comblée pleinement nourrie par sa descendance, cette femme encore jeune clouée au fauteuil par un accident vasculaire, et maintenant, cette douce forme vieillissante, inerte, qui respire encore.

C'est un très beau portrait de femme, de son rapport avec sa fille Marie, un portrait des attentes, souvent déçues, de la soumission où entre un certain choix, lesquelles n'empêchent pas une obstination à mener sa barque. Marie Chaix a un style très inspiré, elle est sensible aux ambiances, aux couleurs, aux odeurs, aux cocasseries. Elle nous livre ici un livre des plus touchants, plein d ‘une grande tendresse, qui lui permet de laisser tomber la colère. Un livre- hommage à cette mère qui a eu un parcours en contradiction totale avec les choix ultérieurs de sa fille , laquelle lui conserve pourtant son amour, sa fidélité et son respect.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
"Je me souviens, disais-tu, les cerisiers étaient en fleur. C'était un beau et lumineux printemps comme il en éclate parfois en Alsace après des hivers glacials. On nous laissait jouer dehors et nous levions souvent la tête vers le ciel, guettant les battements d'ailes et les cris d'oiseaux. Nous attendions le retour des cigognes. Il y avait un nid en haut du clocher de l'église. Dès qu'un vol d'oiseaux pointait à l'horizon, loin au-dessus des prés moutonnant de pétales blancs et roses, tous les enfants du village se retrouvaient sur la place de l'église. Ils agitaient les bras, poussaient des cris joyeux pour appeler les gracieuses bêtes qui tournoyaient autour du clocher, claquant du bec et déployant leurs larges ailes bordées de noir dans un lent balancement. Le jour où l'une d'elles toucherait le nid et s'y arrêterait au terme de son voyage, appelant peut-être un compagnon de quelques claquettements perçants mais tendres, les enfants en liesse se donneraient la main pour une ronde folle.
J'avais cinq ans alors et je sens encore le parfum frais de l'air bleu et des premières jacinthes dans les minuscules jardins si propres, si clairement dessinés devant chaque maison de la place.
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Chez toutes les veuves qui vieillissent on retrouve, en bonne place, les images de ceux qui s'en sont allés avant elles.
Ils ont parfois des moustaches. On rencontre leurs portraits au-dessus des pianos, entre deux vases de Chine ou sur la dentelle d'une table de nuit. Ils y sont le plus souvent représentés dans la force de l'âge, le menton fier souligné d'un col blanc ou d'une cravate stricte. Il n'est pas rare qu'une chaîne de montre en or souligne la distinction de leur mise. Le regard sûr, parfois dominateur, exceptionnellement teinté de mélancolie, ils contemplent sérieusement et vainement du fond de leur néant cartonné le monde qu'ils ont quitté un jour semblable aux autres jours, dans la souffrance ou sans s'en apercevoir, à regret ou sereinement, conscients en tout cas d'avoir accompli leur tâche, leur devoir et leur destin, enfin d'avoir vécu. On les pleure, on les fête, on les fleurit, on les aime encore, les chers disparus, on ne les oublie pas, ils accompagnent de leur oeil tranquille la vie de leurs veuves qui s'ennuient. Ils les ont souvent fait attendre, marcher, pleurer ou souffrir, rarement fait rire, il est fréquent qu'ils aient fait la guerre, des affaires et des enfants mais aussi des infidélités. On ne leur en veut plus, on les vénère, on les aime parfois mieux morts que vivants, les chers disparus, leur image s'estompe à mesure que baisse la vue des veuves et que s'éteignent leurs jours. Ils sont légion, ils se ressemblent tous, ils ont en commun ce privilège d'être partis les premiers. La mort qui nivelle les souvenirs leur a donné cette patine chère au coeur des veuves qui s'étend tel un voile protecteur sur tous les édifices qu'a conçus leur mémoire.
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Les souvenirs de son enfance étaient ceux auxquels elle semblait le plus tenir, comme si la petite fille de 1914, enfant de la grande guerre, avait détenu sous la masse de ses cheveux bruns et derrière ses yeux d'eau tous les secrets de la femme qu'elle deviendrait. L'Alsace était son paradis perdu, la terre nostalgique où plongeaient les racines qu'elle avait coupées un jour pour suivre l'homme de sa vie.
L'âge, dit-on, lorsqu'il touche à ces confins tremblants de la vieillesse, perturbe les mécanismes de la mémoire et la rend plus sélective : les images lointaines resurgissent avec netteté alors que le passé plus immédiat a tendance à s'estomper dans cette zone de grisaille qui souvent succède à l'âge mûr et introduit à un âge que l'on dit avancé précisément parce qu'il n'avance plus. Elle n'était pas encore vieille mais la maladie en bousculant la marche de son cerveau avait accéléré le processus de l'inconscient retour à l'enfance.
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Sa vieillesse, on ne l'avait pas vue venir. Un jour, elle était encore jeune, une chose qui était peut-être un trop grand chagrin, l'avait fait trébucher puis s'évanouir pour de longs jours. La médecine appelle "coma" ce voyage silencieux entre les brumes. Puis, contre toute attente, l'endormie s'en était revenue, ouvrant les yeux sur une vie qu'elle ne reconnaissait pas : elle ne marcherait plus qu'avec une canne, ne laisserait plus courir ses mains sur un clavier... oh, d'un coup d'oeil elle ne pouvait évaluer tout ce qui désormais lui manquerait. Elle avait le temps d'y penser, elle était vieille, à présent.
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Le coma est le dernier asile, l'ultime repaire de la somnambule. A l'abri sous ses paupières closes, elle divague. Sous les branches d'un arbre en fleur elle s'envole peut-être sur la balançoire que retient son père et secoue la tête en riant pour chasser les boucles qui entrent dans sa bouche. Tout à l'heure en courant dans les jambes larges de son pantalon blanc, elle descendra avec ses enfants le sentier bordé de mimosas qui tombe sur la plage et le sable tiède. Il y a une heure, peut-être voyait-elle arriver le cabriolet au bout de l'allée, un homme en descendre, marcher vers elle et l'entourer de ses bras. Demain, sait-on, elle entrera sur la scène d'un opéra doré et, "Prendi l'annel ti donno", chantera la Somnambula de Bellini, s'endormant doucement dans ses voiles.
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Videos de Marie Chaix (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marie Chaix
Harry Mathews invité de la librairie Les Cahiers de Colette à Paris le 18 juin 1991 à l'occasion de la parution de "Cuisine de pays" aux éditions P.O.L avec dans la librairie notamment Harry Mathews, Marie Chaix, Colette Kerber, Paul Otchakovsky-Laurens, Jean Echenoz, Carine Toly... Cuisine de pays, de Harry Mathews traduit de l?américain par Marie Chaix, Martin Winckler et Jean-Noël Vuarnet; Cuisine de pays est un recueil de treize nouvelles, où les techniques ludiques de l?Oulipo jouent un grand rôle. L?humour et la gravité s?y disputent la prééminence. On y apprendra non seulement la recette de la succulente (?) farce double, mais encore les raisons de la supériorité généralement admise des violonistes russes, ou encore les étonnants procédés de traduction du Pagolak. On ressentira aussi, à la lecture de ces textes qui vont de l?érudition joueuse au désespoir tranquille, un très réel vertige."
+ Lire la suite
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