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sur 1707 notes
En commençant "Retour à Killybegs", j'ai immédiatement été plongée dans l'atmosphère de mon enfance, quand tous les jours, les journaux, la radio ou la télévision annonçait que l'IRA avait frappé ou entamait un processus de paix, cette atmosphère de terreur qui entourait l'idée même de l'Irlande, de Belfast, d'armée révolutionnaire.
Car effectivement, ce livre nous fait pénétrer au coeur de l'Armée Révolutionnaire Irlandaise, cette IRA qui défrayait la chronique quotidiennement, faisant passer ses acteurs pour des dangereux fous furieux ou des héros, c'est selon, et déclenchait les répliques sanglantes des britanniques. C'est donc tout un pan de l'histoire irlandaise que l'auteur rappelle ici, la misère des années noires, le déchirement de l'Irlande en deux pays, l'édification d'une frontière et la création de l'Ulster, l'oppression britannique et la résistance irlandaise, puis plus tard les grèves de la faim et les prisons encombrées de prisonniers qui voulaient se voir reconnaître le statut de prisonniers politiques que les britanniques leur refusaient.
Et ce qui m'a frappée, c'est d'abord l'extraordinaire solidarité qui unit tous ces soldats de l'Ira, qui pousse un jeune type de 20 ans à continuer une grève de la faim jusqu'à la mort, relayé par un autre jeune type de 20 ans... La solidarité, la fraternité, et soudain au milieu de ces frères, un traître ! Un traître qui, à la veille d'être démasqué, était salué et connu de tous, chéri par sa famille, ses frères d'arme, leurs femmes et leurs enfants, et qui du jour au lendemain, devient l'Ennemi. Je n'ai pas lu les précédents livres de Sorj Chalandon, mais dans Retour à Killybegs, il décortique avec pertinence les ressorts qui transforment un patriote acharné en marionnette des britanniques. Et ce "retournement" permet de revenir sur les motivations de l'IRA, des britanniques et de déjouer tout manichéisme : il n'y a pas de bon ou de mauvais patriote, la cause de l'IRA n'est pas que juste et bonne et les britanniques ne sont pas que des enfoirés : la guerre, c'est sale et les idéaux n'y ont pas leur place...
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Ceux qui auront lu "Mon traitre" liront forcément "Retour à Killybegs", la lecture indispensable pour savoir et peut-être comprendre pourquoi Tyrone Meehan a trahi.
Dans le premier livre Antoine nous racontait son Irlande, dans celui-ci Tyrone va nous donner un autre éclairage, le sien, certaines scènes seront fascinantes car vécues par les deux hommes mais racontées cette fois par Tyrone, c'est terriblement efficace en terme d'émotions et de psychologie.
L'auteur nous offre ici un récit d'une force phénoménale en même temps qu'un cours d'histoire magistral, pour moi jusqu'à cette lecture, le conflit nord irlandais c'était l'IRA contre l'armée anglaise, les opprimés contre les oppresseurs, c'est en fait bien plus compliqué que cela.
Ce récit va décrypter le pourquoi d'une haine poussée à son paroxysme entre deux communautés, entre voisins de rue souvent, une haine tellement viscérale qu'il faut être irlandais pour la comprendre et ce quel que soit le drapeau que l'on vénère.
Ce qui fait la force de cette histoire est que tout ce qui est écrit est vrai bien que romancé, on comprend comment l'engagement commence dès l'enfance avec une rage et une haine chevillées au corps.
On comprend les règles impitoyables qui régissent les comportements et verrouillent les coeurs d'un peuple, pas seulement des combattants.
On sera stupéfait d'apprendre la "position" discutable des catholiques nord irlandais dans le conflit pendant la seconde guerre mondiale, compréhensible bien qu'indéfendable aujourd'hui.
Les descriptions des conditions inhumaines de détentions font froid dans le dos pour les gens que nous sommes aujourd'hui, même rétrospectivement, il s'agit d'une histoire vraie rappelons-le. Quand je pense que Tyrone fut libéré en janvier 1981 après 13 ans d'incarcération le jour même ou je fêtais mes 18 ans et ma majorité toute neuve à une heure d'avion de là...
Je ne vais rien dévoiler de plus, simplement dire que ce scénario n'a rien à envier aux plus brillants romans d'espionnage, que la perversité humaine n'a pas de limites, dire aussi que certaines destinées sont vraiment cruelles, quel roman, quelle histoire !
A la fin il sera compliqué d'avoir un jugement je crois, c'est un récit éprouvant psychologiquement, un récit hors norme et un livre unique.
J'avais pris une énorme claque avec "Mon traitre", j'en ai pris une autre avec "Retour à Killybegs" !
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L'IRA ? Tous des terroristes !
C'est ce que j'ai entendu durant toute ma jeunesse, et à vrai dire, je ne me suis jamais posé la question de savoir si c'était vrai. La politique m'intéresse assez peu…et ceci est un euphémisme !

Donc, au départ, je n'avais pas choisi ce roman de Sorj Chalandon pour son thème : l'histoire d'un Irlandais pur sang qui se bat pour son pays, pour sa cause, pour la liberté. Mais l'auteur m'avait émue, avait touché une corde sensible dans un autre de ses romans : « Une promesse ».
Eh bien, je l'avoue, cette fibre a encore vibré en moi à la lecture de « Retour à Killibegs ». Oui, j'ai suivi avec grand intérêt la trajectoire apparemment très droite de Tyrone, engagé dans l'IRA très jeune, emprisonné dans des conditions ignobles, populaire et admiré. Mais surtout, j'ai frémi lorsqu'il a trahi….Oui ! Il a trahi ! Mais cette trahison, je la comprenais ! « Personne n'a jamais été dans mon ventre, personne », clame le héros, personne ne pourrait jamais le comprendre. Mais moi, je dis que si ! L'auteur s'est tellement bien fondu dans son personnage qu'il a réussi ce tour de force de me faire admettre la trahison et même de me faire complètement adhérer au traître.

Je ne veux pas en dire plus. J'ai vécu une semaine dans la guerre puis dans les arrangements, les compromissions, et c'est assez. Comme le héros, « je n'en pouvais plus de cette guerre, de ces héros, de cette communauté étouffante. J'étais fatigué. Fatigué de combattre, de manifester, fatigué de prison, fatigué de clandestinité et de silence, fatigué des prières répétées depuis l'enfance, fatigué de haine, de colère et de peur, fatigué de nos peaux terreuses, de nos chaussures percées, de nos manteaux de pluie mouillés à l'intérieur. »

Fatiguée, oui, mais totalement, indéfectiblement conquise par la poésie de Sorj Chalandon, par la beauté de ses mots, le diamant de ses phrases.

Et en Irlande, oui, j'irai un jour, poursuivie par ses fantômes à l'envie si légitime de liberté…

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Dans un conflit, il y a les gentils d'un côté, les méchants de l'autre : voilà ce que je pensais quand j'étais petite.
Adolescente, je ne comprenais pas comment Bobby Sands et les neufs autres avaient pu se laisser mourir de faim. Cela m'était inconcevable.
Et puis... j'ai grandi.
Le monde m'est apparu tel qu'il est : ni noir, ni blanc, mais gris. Et bien évidemment, les hommes qui le composent aussi.
Sorj Chalandon l'a très bien compris, et le fait magistralement comprendre au lecteur à travers son portrait tout en nuance de Tyrone Meehan.
On peut être un traître et n'être ni bon ni méchant. Être humain, tout simplement.
Tyrone Meehan, le traître de Mon traître, est le narrateur de ce livre. Il nous dit : "Je veux écrire. Pas avouer, encore moins expliquer mais raconter, laisser une trace."
Tyrone raconte, mais pas de façon directe. Il raconte son enfance, il raconte sa vie, il raconte l'Irlande, il raconte son engagement. Sa trahison, il ne la raconte pas frontalement : c'est au lecteur de comprendre entre les lignes, de reconstituer le puzzle. De comprendre pourquoi.
Par petites touches, Sorj Chalandon nous révèle qui est Tyrone Meehan. Il nous en dresse un portrait subtil, un beau portrait d'homme.
J'avais adoré la lecture de Mon traître, et j'ai retrouvé dans ce Retour à Killybegs nombre d'ingrédients qui m'avaient tant plu : l'Irlande et ses hommes rudes et fiers, les amitiés viriles, les engagements des uns et des autres.
J'ai aimé retrouver l'écriture de Sorj Chalandon. Une écriture qui sait être en même temps tendre et violente, toujours aussi poétique et qui vous touche au coeur.
Je prête peut-être à l'auteur des intentions qu'il n'a pas eues, mais ce Retour à Killybegs m'a semblé venir d'un besoin profond de ne pas se contenter du premier roman, pour donner au lecteur une vision plus juste de Tyrone Meehan, pour donner au traître une occasion de s'expliquer. Comme si Sorj Chalandon ne voulait pas que le lecteur reste sur une mauvaise impression. Comme s'il voulait que le lecteur comprenne le traître dont il se fait presque l'avocat.
Dans ce roman, Tyrone Meehan apparaît encore plus humain. Il ne demande pas d'indulgence mais ne veut pas non plus d'acharnement. Son histoire m'a touchée : monsieur Chalandon, vous avez gagné !
Un roman magnifique, un portrait bouleversant.
Je vais m'empresser de lire d'autres titres de cet auteur.
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Mon traître m'avait bouleversée mais m'avait laissée sur ma faim. Cette histoire m'avait pris aux tripes et avait éveillé l'envie de connaître les vraies raisons qui ont mené le traître à commettre cet acte impardonnable.
Pour moi il était surtout question de comprendre ses motivations afin de pouvoir l'accepter.

Mais il n'y pas que cela dans Retour à Killybegs.
Sorj Chalandon veut nous expliquer le contexte, c'est donc tout un pan de l'histoire de la lutte pour l'indépendance nationaliste irlandaise qui sera décortiqué. Un pays coupé en deux, déchiré, miséreux, opprimé et face à la menace permanente de la terreur.
La résistance a un visage, des motivations, des hommes forts et courageux prêts à mourir pour la cause, prêts à subir les pires ignominies en prison, pourchassés par les anglais mais aussi par les irlandais « de l'autre côté »

Des années de lutte, de dévotion et d'espoir broyés par le temps qui passe, par les défaites, par la fatigue et par le désespoir. Une armée en déroute, un mouvement en lambeaux… On comprend les tourments et les afflictions d'une âme pure rendue grise par la contingence, la fatigue et la soif de paix.

On comprend mieux l'engrenage fatidique qui a conduit le traître à mourir seul face aux fantômes de son enfance et à ses mensonges, face à une cause trop lourde à porter.
Dans mon traître la phrase : « Personne ne naît tout à fait salaud, petit Français. le salaud, c'est parfois un gars formidable qui renonce » prend ici tout son sens.

À travers le récit poignant d'une trahison, Sorj Chalandon rend hommage aux Irlandais du Nord qui menèrent une guerre sans concession pour retrouver leur liberté et leur dignité.

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Le Retour à Killybegs pour Tyrone Meehan, c'est le retour aux sources, dans la modeste maison sans confort du père, Patraig Meehan. Là où il a reçu en héritage l'amour de l'Irlande, la violence, l'engagement pour l'indépendance de l'Irlande , coute que coute. Mais aussi les coups du père. C'est dans cette maison que la mort va le délivrer de la honte.
le 24 décembre 2006, au cours d'une conférence de presse, il s'est libéré d'un secret, il a trahi son camp depuis vingt-cinq ans en donnant des renseignements aux anglais, lui l'homme respecté et admiré de tous, l'un des leaders de l'Ira. A ses côtés, Sheila, sa femme, toujours là pour lui.

« Sa voix. Une souffrance de voix
Qu'as-tu fait, petit homme ? » Mais elle n'attend pas de réponse.

Trois ans après avoir écrit « Mon traitre » Sorj Chaalndon donne la parole à Tyronne. Retour à Killybegs est un récit sans concessions, sans apitoiements, c'est la confession douloureuse d'un colosse aux pieds d'argile. Un homme courageux en prison, un homme piégé, un homme à la vie sans répits. Vingt-cinq ans de trahison, vingt-cinq ans de nuits sans sommeil.
On comprend mieux l'engrenage fatidique qui l'a conduit à mourir seul face aux fantômes de son enfance et à ses mensonges. Qu'as-tu fait, petit homme ?
C'est un livre qui laisse des traces, bouscule, dérange, bouleverse, admirablement écrit.
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Comme chantait U2 (dont je ne suis pas fan, que les choses soient claires) : "I can't live with or without you", et voilà qui sied bien à Sorj Chalandon, qui s'exorcise ici de Denis Donaldson, son ami nord-irlandais, son traître.

Après "Mon traître", justement, où il romançait cette histoire d'amitié et de trahison entre un jeune Français naïf et romantique (Antoine), et une figure historique et respectée de l'IRA (Meehan, inspiré de Donaldson), Chalandon reprend son récit depuis le tout début, comme pour essayer de comprendre, d'expliquer -et de faire la paix avec lui-même ?
Retour à Killybegs, donc, où Tyrone Meehan voit le jour en 1925, au sein d'une famille nombreuse mais pas heureuse, la faute à la misère et à un père héroïque, alcoolique et violent. Enfui à Belfast à 15 ans, il s'acoquine rapidement avec l'IRA, est de tous les combats contre les Britanniques et les loyalistes, et devient, au fil des années, une gloire du nationalisme irlandais. Qu'il finit par trahir. Pourquoi ? Comment ?

Roman douloureux, dans lequel Sorj Chalandon se met dans la tête de Tyrone Meehan et déroule 80 ans d'histoire nord-irlandaise. On y croise des personnages réels (Tom Williams, pendu à 19 ans ; Bobby Sands, mort de faim à 27 ans), on découvre l'ignominie absolue des autorités britanniques en Ulster, et on mesure la détermination hallucinante des nationalistes. Tout ce livre est aussi une réflexion sur l'engagement.
Tyrone Meehan ne cherche pas à s'excuser, mais il nous fait part de ses certitudes et de ses regrets. Des rêves qui le portaient et de la haine qui l'animait, des coups donnés et des coups reçus, de la guerre, de la prison, de la pauvreté, de la dignité. Il n'y a pas de héros ni de zéro, il n'y a qu'un homme. Forcément, le roman prend aux tripes.
Je l'ai dévoré avec bonheur et affliction. Bonheur, parce qu'en tant que fan de Chalandon, de son écriture, de sa générosité, de la justesse des causes qu'il défend, j'ai été pleinement comblée. Affliction, parce que l'histoire est celle des vaincus, remplie de solitude, de violence, de désillusion. Toutefois, ce roman vibre aussi d'une intensité fiévreuse et rageuse, et c'est pourquoi sa lecture me semble incontournable : c'est l'hommage magnifique d'un romancier à un combattant qui incarnait l'idéalisme républicain, et qu'il considérait comme un ami.

Alors, lisez-le. Et vous ne pourrez plus vivre sans le souvenir de Tyrone Meehan.
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À travers le récit poignant d'une trahison, Sorj Chalandon rend hommage aux Irlandais du Nord qui menèrent une guerre sans concession pour retrouver leur liberté et leur dignité.

Décembre 2006, Tyrone Meehan, 81 ans, attend la mort. Il ne sait ni quand ni comment elle le frappera mais il sait avec certitude qu'elle viendra, alors autant que ce soit à Killybegs, le village de ses aïeux. Celui où son père lui enseigna la haine des anglais et que sa famille a dû fuir avec l'humiliation de la misère. Mais avant de mourir, il veut dire sa vérité afin que le silence se fasse après lui. de fait, Tyrone Meehan a été assassiné le 5 avril 2007. Sorj Chalandon dont l'Irlande du Nord est la patrie de coeur et qui connaissait très bien celui dont par respect il a changé le nom, veut lui rendre justice en lui donnant la parole. Et Tyrone Meehan de raconter sa vie: Belfast sous les bombes allemandes, son engagement dans les rangs de l'IRA, la prison, l'amour de Sheila, le combattant devenu un héros adulé de sa communauté, jusqu'à ce jour de 2005 où les anglais dénoncèrent sa trahison à leur profit. Pourquoi et qui avait-il trahi ? Terribles et douloureuses questions auxquelles Sorj Chalandon tente de trouver les réponses les plus justes.

Un roman servi par une magnifique écriture où l'intime et le politique ne cessent habilement de se croiser. Sorj Chalandon campe à merveille ce personnage qui va vaciller, reclus chez lui n'attendant stoïquement qu'une seule chose depuis la révélation de sa trahison : la mort. Son livre est un hommage vibrant à cet homme Tyrone Meehan alias Denis Donaldson à qui, malgré tout, il voue une amitié sans borne. Ce texte tout de dignité, de violence et de tendresse, laisse ouverte la voie de l'indulgence. Un très beau roman, fort et bouleversant.
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Avec ma co-lectrice Nadou38 nous n'avons pas résisté, après la lecture de Mon traître, à continuer le périple irlandais avec Retour à Killybegs.
Bien qu'il s'agisse de la suite logique, les deux volumes peuvent être lus de manière indépendante. Mon traître pose plutôt un regard extérieur, celui d'un Français sur l'Irlande, l'IRA et Tyrone Meehan, son traitre. Retour à Killybegs pose un regard intérieur, celui de Tyrone lui-même sur son Irlande, l'IRA, ses combats et…ce qui l'a amené à trahir. Deux regards dissociés et néanmoins complémentaires. J'ai malgré tout une préférence pour ce livre-ci, plus intense, plus trouble aussi.

Dès le prologue, le ton est donné :
« Maintenant que tout est découvert, ils vont parler à ma place. L'IRA, les Britanniques, ma famille, mes proches, des journalistes que je n'ai même jamais rencontrés. Certains oseront vous expliquer pourquoi et comment j'en suis venu à trahir. Des livres seront peut-être écrits sur moi, et j'enrage. N'écoutez rien de ce qu'ils prétendront. Ne vous fiez pas à mes ennemis, encore moins à mes amis. Détournez-vous de ceux qui diront m'avoir connu. Personne n'a jamais été dans mon ventre, personne. Si je parle aujourd'hui, c'est parce que je suis le seul à pouvoir dire la vérité. Parce qu'après moi, j'espère le silence. Killybegs, le 24 décembre 2006, Tyrone Meehan. »

Mais c'est avec parcimonie qu'il révèle ce qu'il a dans le ventre et cette vérité, sa vérité, comme une écharde qu'il rechigne à arracher. Chaque fois qu'on pense l'atteindre, pfiou, elle se carapate derrière une barricade. Jusqu'au dernier chapitre qui m'a laissée pantoise… Sa personnalité n'est pas aisée à cerner. Mais j'ai apprécié qu'elle ne soit pas nimbée de morale. Chacun est libre de se faire son opinion.

Ce livre puissant et émouvant retrace le parcours d'un homme coincé entre plusieurs feux. Son combat commence dès l'enfance, dans les années trente, avec son père et va se poursuivre jusqu'en 2007. Il nous plonge au coeur de l'IRA, de son organisation et du quotidien des habitants, une vie de misère, de lutte sans merci, de solidarité et d'espoir. Certains passages tout en pudeur sont bouleversants.
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Après 'Mon traître', Sorj Chalandon éprouve le besoin de revenir sur cette blessure encore à vif, cette histoire de trahison, en changeant cette fois d'angle, adoptant la position de Tyrone, "son traître". Si l'on a lu le premier ouvrage, qui pose de nombreuses questions, on est forcément curieux de savoir dans quelles conditions Tyrone Meehan s'est retrouvé 'agent double'.

Un livre FORMIDABLE... mais une lecture pas facile. J'ai éprouvé tour à tour :

- agacement, ennui : politique, religion, combat, confusion (pour moi) entre les "camps" des uns et des autres.

- admiration et indignation mêlées : conditions de détention, grève de l'hygiène des prisonniers irlandais... force des épouses, des mères, dans le combat... personnages dignes et somptueux : Sheila, Popeye, mais aussi Tyrone, oui.

Et j'ai surtout "vécu" à travers ces pages des moments intenses, bouleversants : les dernières visites (fils, épouse, 'petit Français'), la souffrance d'un Tyrone coupable/coupé en deux pendant plus de vingt ans. Et le summum de l'émotion : le premier voyage à Paris, le verre d'eau donné par Sheila en signe d'amour...

Et des phrases fortes, superbes, si sages...

J'ai entendu plusieurs fois l'auteur présenter ce livre, et préciser qu'il était fier qu'à sa question 'Et vous, qu'auriez vous fait ?' beaucoup de lecteurs avouent : 'Eh bien je ne sais pas'. Aveu d'humilité, d'humanité. C'est un des messages que veut faire passer Sorj Chalandon à travers son oeuvre, et c'est parfaitement réussi ici.
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