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EAN : 9782905614599
138 pages
Editions Jérôme Millon (01/07/1993)
2.92/5   6 notes
Résumé :
“... La femme naturelle ! Le retour à la nature ! ces questions ont passionné toute une génération d’élite ; des hommes savants en ont discuté avec amertume ; aujourd’hui, à relire leurs mémoires, pamphlets, dissertations… on a peine à retenir quelques bâillements. L’influence morale de ces rhéteurs fut à peu près nulle. Cette précieuse attardée, parée de tout ce que la mode comporte de nouveaux inconvénients, qui déclame en son salon la perfection de la femme natur... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
On ne sort de l'esclavage que par une grande révolution

Dans sa préface « Paradoxe et vérité »,Geneviève Fraisse cite Choderlos de Laclos : « le paradoxe est le commencement d'une vérité ». Un paradoxe. le perfectionnement de l'éducation des femmes. « Un paradoxe, oui, puisque l'auteur affirme l'impossibilité de ce perfectionnement. le commencement d'une vérité, oui, puisqu'il sera développé, dans cet essai, des analyses qui touchent à l'origine de ce problème, la hiérarchie des sexes, à une réflexion sur la stratégie pour sortir de cet « esclavage », par la révolution (le mot est bien là), par la ruse, et par le courage individuel. »

L'esclavage, la politique, les mots pour le dire : « Venez apprendre comment, nées compagnes de l'homme, vous êtes devenues son esclave. »

L'auteur plus connu pour sa défense d'un certain libertinage parle ici de l'avilissement des femmes. Contre les oppositions, le noir et le blanc, il convient de prendre en compte et d'exposer les contradictions. D'en finir avec la ritournelle qui ferait de l'égalité un obstacle au désir. D'affirmer l'égale puissance de jouissance des êtres humains.

Geneviève Fraisse précise : « Alors, le double geste d'écriture de Choderlos de Laclos nous est précieux par son impertinence. Il initie une problématique propre à la pensée démocratique de l'égalité des sexes. Il indique le défi à venir, celui de croiser désir et égalité » Il faut donc tenir ensemble l'érotisme et l'égalité, j'ajoute que cela a bien à voir avec la liberté.

Je souligne les paragraphes sur le consentement et rappelle "Du consentement" et "Le refus de consentir ?"

Mais à quoi pourrait servir d'identifier l'origine de l'oppression des femmes ? La question n'a pas de réponse du coté de l'éducation mais bien du coté de la révolution… Nous sommes là bien dans le siècle et à quelques années de 1789…

Et la question de l'égalité reste un des diamants pour éclairer et tailler le futur.

« Il n'est aucun moyen de perfectionner l'éducation des femmes ». Pour Choderlos de Laclos l'éducation prétendue « ne mérite pas en effet le nom d'éducation ». Si l'on peut discuter aujourd'hui de la « compagnie » (les femmes comme compagnes des hommes) en d'autres termes – égalité et non complémentarité – il n'en reste pas moins vrai que les femmes ont bien été privées de ce que les hommes considèrent comme leur naturel (je reviendrais plus bas sur l'idée de nature), « vous êtes devenues son esclave ». Et l'auteur le dit haut et fort : « on ne sort de l'esclavage que par une grande révolution » car il comprend bien ce qu'est « l'utilité sociale de l'esclavage » : « la liberté d'un esclave serait une atteinte portée au pacte social fondé sur l'esclave ». Il me semble utile de renvoyer au livre de Carole Pateman : le contrat sexuel, et à la préface de Geneviève Fraisse : « À rebours », et à une phrase « Un ordre social libre ne peut être un ordre contractuel ».
Des êtres libres et puissant·es. Choderlos de Laclos oppose les êtres naturels et les êtres en société, celles et ceux qui « sont garrotté dans un maillot » dès la naissance, puis les évolutions lors des différents âges. Faut-il lire cela comme une recherche d'un passé mythique, comme la quête d'un possible à actualiser, comme une justification d'un futur radicalement autre ? Je laisse les historien·es faire justement ce travail d'historicisation des propos et des arguments.

Quoiqu'il en soit, l'auteur parle des faire qui ne sont pas de volonté, de ce que les femmes ont cédé « et non consenti », des travaux les plus vils et les plus pénibles dont sont chargées les femmes, des conventions reçues, des fausses lueurs, de la nécessité de s'examiner et de se connaître, de la lecture et de l'histoire…

« Mais souvent le paradoxe est le commencement de la vérité ».


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C'est en regardant le documentaire "Les Liaisons scandaleuses" sur Arte, qui porte sur "Les Liaisons dangereuses" de Choderlos de Laclos, que j'ai eu envie de lire "De l'éducation des femmes" qui y était cité à plusieurs reprises et qui a été publié à un an d'écart. Si la succession de ce roman sur le libertinage et de cet essai contre l'asservissement des femmes peut surprendre, c'est parce que les liens entre érotisme et égalité étaient, et sont encore aujourd'hui, complexes et délicats. En effet, le féminisme a été vu par certains comme un courant nourri de la frustration sexuelle des femmes, d'autres ont craint que le féminisme et sa demande d'égalité ne mène à une confusion des sexes, et d'autres enfin associent le féminisme à un appel à la sexualité débridée.

Lorsque l'Académie de Châlons-sur-Marne demande à l'auteur comment perfectionner l'éducation des femmes, celui-ci répond que c'est, en l'état, impossible. Si Choderlos de Laclos porte un regard parfois naïf sur la femme, il est néanmoins extrêmement conscient du poids que la société fait peser sur elle. Les institutions qui sont responsables de ce poids ont été mises en place dès la fondation de la civilisation avec la division des tâches, et c'est pourquoi il fonde son propos sur la comparaison de la "femme des origines" et de la "femme sociale". Son message est que la société ne peut améliorer l'éducation des femmes puisqu'elle les place en situation d'esclavage. Son ouvrage est néanmoins un appel à l'amélioration de la situation des femmes par l'éducation et la révolution.

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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Venez apprendre comment, nées compagnes de l'homme, vous êtes devenues son esclave ; comment, tombées dans cet état abject, vous êtes parvenues à vous y plaire, à le regarder comme votre état naturel ; comment enfin, dégradées de plus en plus de par une longue habitude de l'esclavage, vous en avez préféré les vices avilissants, mais commodes, aux vertus plus pénibles d'un être libre et respectable. Si ce tableau fidèlement tracé vous laisse de sang-froid, si vous pouvez le considérer sans émotion, retournez à vos occupations futiles. "Le mal est sans remède, les Vices se sont changés en moeurs". Mais si au récit de vos malheurs et de vos pertes vous rougissez de honte et de colère, si des larmes d'indignation s'échappent de vos yeux, si vous brûlez du noble désir de ressaisir vos avantages, de rentrer dans la plénitude de votre être, ne vous laissez plus abuser par de trompeuses promesses, n'attendez point le secours des hommes auteurs de vos maux : ils n'ont ni la volonté, ni la puissance de les finir, et comment pourraient-ils vouloir former des femmes devant lesquels ils seraient forcés de rougir ; apprenez qu'on ne sort de l'esclavage, que par une grande révolution.
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Déjà dans -Les liaisons dangereuses Laclos prononce un constat définitif sur les possibilités d'éducation que la société offre aux femmes. Les jeunes filles, mises au couvent dans leur enfance, n'y reçoivent aucune forme de savoir, ni théorique, ni pratique. Lorsqu'elles en sortent, leurs mères, depuis trop longtemps séparées d'elles et devenues étrangères à leurs enfants, ne se soucient pas de les éduquer. Des unes aux autres il n'y a aucune transmission de sagesse, ni communication d'expérience. (...) Dans l'état actuel des choses une femme n'a rien à attendre de personne en matière d'éducation. C'est à elle de comprendre qu'elle doit s'éduquer seule. (p. 19)
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La nature ne crée que des êtres libres ; la société ne fait que des tyrans et des esclaves ; toute société suppose un contrat, tout contrat une obligation respective. Toute obligation est une entrave qui répugne à la liberté naturelle ; aussi l’homme social ne cesse de s’agiter dans ses liens, il tend à s’y soustraire, il cherche à en rejeter le poids sur ses semblables, il ne veut retenir que le bout de la chaîne pour les diriger à son gré ; il suit de là que, si l’oppression du fort envers le faible n’est pas une loi naturelle, dans le sens où les moralistes prennent ces mots, elle n’en est pas moins une loi de la nature, ou plutôt la première vengeance que la nature abandonnée tire de l’homme social ; il suit de là que toute convention, faite entre deux sujets inégaux en force, ne produit, ne peut produire qu’un tyran et un esclave, il suit encore de là que dans l’union sociale des deux sexes, les femmes généralement plus faibles ont dû être généralement opprimées ; ici les faits viennent à l’appui des raisonnements. Parcourez l’univers connu, vous trouverez l’homme fort et tyran, la femme faible et esclave ; que si quelquefois elle a l’adresse de lier les mains à son maître et de commander à son tour, ce cas est extrêmement rare. (p. 79-80)
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«  À force de chercher de bonnes raisons, on en trouve; on les dit ; et après on y tient , non pas tant parce qu’elles sont bonnes que pour ne pas se démentir » ….
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De là l'éducation physique et l'éducation morale qui, séparées dans leur objet, se réunissent dans leur but : la perfection de l'individu pour l'avantage de l'espèce.
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Vidéo de Pierre Choderlos de Laclos
La romancière Eliette Abécassis se penche sur le réseau social le plus populaire du moment, Instagram. Comment modèle-t-il nos imaginaires, simplifie-t-il nos émotions, s'insinue-t-il même dans nos amours ? Dans un roman qui colle à son sujet, c'est à un vrai pari que se livre l'autrice : si Choderlos de Laclos vivait dans les années 2020, que s'écriraient le Valmont et la Merteuil d'aujourd'hui, pour rimer avec leurs photos et leurs stories ?
Une rencontre diffusée dans le cadre de la Foire du Livre de Bruxelles 2021.
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