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3,44

sur 1264 notes
Privée… de tout, mais privée quand même, la vie très privée de Mr Sim mise en scène par Jonathan Coe livre une singulière métaphore de cette « Ultra Moderne Solitude » évoquée déjà, en chanson, à la fin des années quatre-vingt (mais si... tu sais, un barde hexagonal avec plein de cheveux... ça va te revenir).

Avec pour seuls compagnons de route une dépression rampante et un GPS à la voix féminine troublante, Maxwell Sim entreprend un impossible périple automobile à travers l'Angleterre, prétexte pour J. Coe à une satire sociale sarcastique autour des fêlures et naufrages de son anti-héros en perte de repères. Comme une politesse du désespoir, son humour tout en retenue pousse la réflexion jusqu'à l'ironie, y compris dans l'ultime page du roman qui s'achève sur un double épilogue original et pour le moins déroutant.

Pas précisément comique, quoi qu'en aient pensé certains lecteurs, mais habile et touchant, très certainement.


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Gros coup de coeur pour le dernier roman de Jonathan Coe, un auteur dont les précédents livres, en dépit du succès remporté, ne m'avaient pas encore conquis ("Testament à l'anglaise" m'avait beaucoup déçu)
Son héros est un anti-héros. Maxwell Sim, la quarantaine bien entamée, a perdu son boulot, sa femme, sa fille et sa mère (en ce qui concerne sa mère, la perte est définitive puisqu'elle est morte). Il n'a plus guère de contact avec son père parti vivre en Australie où s'ouvre - avant de se clore - le roman.
Entretemps, Maxwell Sim reviendra en Grande-Bretagne et profitera d'un long périple à travers l'île pour revisiter les lieux de sa vie, draguer sans succès une jeunette rencontére dans l'avion, renouer avec son ex-femme, élucider quelques questions irrésolues ... et tomber amoureux de la voix de son GPS.

Comme dans les précédents livres de Jonathan Coe, on retrouve l'humour pince-sans-rire de cet auteur typiquement britannique, dans la veine des meilleurs Lodge, Boyd ou McEwan.
Mais cet humour est mobilisé au service d'une analyse psychologique d'une grande subtilité.
La métaphore qu'illustre le livre est celle des 1001 collisions automobiles qui, à chaque instant, sont évitées. Pourquoi, nous dit le héros, les voitures qui se croisent sur la route ne se percutent-elles pas ? pourquoi, faut-il lire au premier degré, le monde n'est-il pas plus chaotique qu'il ne l'est ? pourquoi, faut-il comprendre au second degré, rate-t-on de quelques minutes, de quelques centimètres, les rencontres qu'on aurait pu faire.
Milan Kundera au début de "L'insoutenable légèreté de l'être" insistait sur la masse des hasards qui avaient conduit Tomas à rencontrer Teresa. Jonathan Coe renverse cette situation : le père de Maxwell Sim ratera par deux fois, à 40 ans d'intervalle, le rendez-vous qui aurait pu/dû changer le sens de sa vie.
Notre vie est-elle condamnée à être ballotée par le hasard ? Avons-nous un destin que tôt ou tard nous finirons par rencontrer ? Tomas et Teresa chez Kundera incarnaient ces deux facettes : Tomas rencontrait Teresa par hasard alors que Teresa rencontrait Tomas parce c'était écrit. Maxwell Sim incarne, à lui seul, ces deux facettes ... jusqu'à ce que, par une ultime pirouette, Jonathan Coe, ne nous rappelle le pouvoir démiurgique du romancier ...
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Depuis son divorce, Maxwell Sim est seul et déprimé. Sa femme et sa fille sont parties à l'autre bout du pays, il est brouillé avec son meilleur ami et il n'a plus la force d'aller au travail. Après un voyage à Sidney où réside son père, il rentre en Angleterre en meilleure forme, prêt à conquérir sa jeune voisine d'avion et à reprendre une activité professionnelle. Mais son plan de séduction tourne court et il ne lui reste plus qu'à accepter une proposition de travail plutôt originale. Il s'agit de traverser l'Angleterre jusqu'au bout du bout pour promouvoir une toute nouvelle brosse à dents écologique. Au volant d'une Toyota hybride dernier cri, Maxwell Sim entame un voyage en solitaire avec pour seule compagnie la voix très sexy de son GPS.

Elle est bel et bien privée la vie de Maxwell Sim, loser-né dépressif. Privée d'amour, privée de bonheur, privée de joie, privée d'amis, privée d'un peu de chaleur humaine...Maxwell Sim est seul dans un monde ultra-connecté où l'on peut être retrouvé n'importe où sur la planète, où l'on peut avoir des centaines d'amis sur Facebook, où l'on peut se créer un faux profil pour bavarder anonymement avec son ex-femme...où l'on peut tomber amoureux d'un GPS. Dans son périple vers les îles Shetland, le voyageur de commerce traverse le pays mais aussi sa vie, de rencontres improbables en retour vers le passé, de rendez-vous manqués en révélations fracassantes. Moral en berne, idées fixes, comportements absurdes, cet anti-héros fracasse son mal-être contre une modernité qui le dépasse. Et pourtant, malgré la tristesse de son personnage, Jonathan Coe réussit à le rendre attachant et touchant. Car, pour s'adapter à la société, nouer des relations véritables et sincères, il faut s'aimer un peu et pour s'aimer il faut avoir été désiré et aimé. Pour Maxwell Sim, les racines du mal sont peut-être moins dans sa difficulté à appréhender un monde qui va trop vite que dans l'héritage familial et les secrets de sa conception.
Quelques longueurs et une fin peu convaincante (quoique surprenante) font baisser la note de ce roman doux-amer, teinté de désespoir mais sauvé par la touche d'humour anglais de son auteur. Pas le meilleur Coe.
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6e livre de Jonathan Coe. 6e réussite...... 6e plaisir ! Toujours un style et une histoire qui mêlent désespoir et euphorie, humour noir et déstabilisant ici pour ce recueil.
Un livre surprenant autour d'un personnage qu'on pourrait qualifier de looser, enfant non désiré, pas aimé, méprisé par son ex femme et sa fille, un travail inintéressant.... Avec une histoire pareille on pourrait s'interroger sur l'intérêt à lire ce livre ! Jonathan Coe a un style unique, griffant, grinçant, drôle, parfois tendre.... Un vrai bonheur.
Bon allez hop ! le 7e livre de cet auteur m'attend !


Challenge objet 2020
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"On aurait dit que la lecture était devenue une obsession,chez elle. Elle dévorait régulièrement deux ou trois livres par semaine; des romans surtout;des romans " littéraires" ou "sérieux" comme on dit ( je crois) . " C'est pas un peu répétitif, au bout d'un moment? Ils se mélangent pas tous dans ta tête?" je lui ai demandé une fois. Mais elle m'a répondu que je parlais sans savoir. " Tu es le genre de personne qui ne verra jamais un livre changer sa vie" disait-elle. " Pourquoi veux-tu qu'un livre change ma vie? Ce qui change ta vie, c'est la réalité, c'est se marier , avoir des enfants. -Moi, je te parle d'élargir son horizon, d'élever son niveau de conscience ." C'était un point sur lequel nous ne serions jamais d'accord. Une ou deux fois, j'avais tenté plus sérieusement de m'y mettre, mais je n'ai jamais vraiment compris où elle voulait en venir. Je me souviens lui avoir demandé de me conseiller des livres, des livres susceptibles de changer ma vie. Elle m'a dit d'essayer le roman américain contemporain. " Quoi, par exemple?- Essaie un des Rabbit" m'a-t-elle dit, et quelques heures plus tard je suis rentré de la librairie en lui montrant ce que j'avais acheté. " Tu plaisantes?"elle m'a lancé. C'était Les Garennes de Watership Down.
( Un sacré bon bouquin, du reste, si vous voulez savoir. de là à dire qu'il a changé ma vie, non.)"

J'ai trouvé ce roman peut être moins brillant que la trilogie Testament à l'anglaise, Bienvenue au club et le Cercle fermé,que j'avais beaucoup aimée, mais plein de finesse et d'humour. Et je reconnais volontiers que Jonathan Coe a quand même un don pour donner de l'épaisseur et rendre attachant un personnage aussi terne que son Mr Sim! On se demande où il va le mener dans cette épopée burlesque dans laquelle il joue sa vie. Et c'est pour moi la principale force de ce roman, grâce à la toute fin, cette amusante et réelle démonstration de ce que sont pour nous, lecteurs, les personnages de romans. On vit avec eux un moment, et on regrette de les lâcher , surtout de cette façon!!!


Dans un entretien au Monde des livres, Jonathan Coe parle de Mr Sim et de son problème avec la " virtualité", et j'ai trouvé ce qu'il disait intéressant ..:

"-Il y a pourtant ce passage où Sim se crée une fausse identité pour parler avec son ex-femme sur Internet, et constate avec effroi qu'elle aime davantage son double inventé que lui-même...

-Le problème de Sim, c'est qu'il ne lit pas. Je le (lui) répète tout au long du livre : s'il lisait, la notion de réalité virtuelle lui serait familière. Ce que je veux dire, c'est que nous ne devrions pas nous alarmer de cette vie dématérialisée dans laquelle nous baignons. Après tout, le principe n'est en rien nouveau. L'écrivain que je suis est parfois plus proche de ses personnages que de ses « proches » justement. le seul danger, c'est l'addiction. Mais cela non plus n'est pas neuf. Je me rappelle ma grand-mère dévorant les volumes de la célèbre collection sentimentale « Mills & Boon » : elle pouvait en consommer jusqu'à trois ou quatre par semaine. Elle était aussi droguée de lecture que je le suis d'écriture. Actuellement, cela fait dix-huit mois que je n'écris pas et cela me rend fou d'être redevenu « normal ». C'est dire à quel point je suis accro !"





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Maxwell Sim est plutôt dépressif. Il faut dire que son parcours n'est pas folichon. Enfant non désiré par ses parents, il est devenu, à l'âge adulte, un représentant de commerce terne, abandonné par sa femme et sa fille.
Un voyage en Australie à la rencontre de son père – cadeau d'adieu de sa charmante femme – lui permet de faire le point. A son retour, il accepte une proposition qui le lance sur les routes écossaises au volant d'une Toyota hybride, guidé par la voix suave et féminine de son navigateur dont il… tombe amoureux.

Car le problème de Mr Sim, c'est la solitude. Pendant sa longue route, il ne cesse de s'interroger sur les possibilités de rencontres (il tente sans succès de séduire) pour conclure que, dans un monde ultra connecté, les occasions de relations vraies se font rares. Mais Mr Sim est peut-être trop dans la réalité et pas assez conceptuel, la preuve : il n'aime pas lire.
Beaucoup d'humour (anglais), de la part d'un auteur que je découvre avec plaisir, dans cette réflexion très sérieuse sur notre rapport au monde.
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Personne n'a envie de vivre la vie de Mr Sim ! Personne ne veut se retrouver dans sa situation : un divorce non accepté, une solitude subie, une profonde dépression, des rapports parentaux au point mort, un père pour le moins bizarre, une amitié détruite…Et pourtant…j'ai ri ! Eh oui, je me suis amusée, j'ai totalement adhéré à la manière de raconter cette histoire, très « humour anglais ».
A vrai dire, cet amusement a cédé le pas vers la moitié du livre à une réflexion plus profonde. Oui, il se cache quelque chose de pas net, dans la vie de Mr Sim. Et cette…non, ces découvertes m'ont donné l'âme d'une psychologue, le temps d'un road-movie.
La fin, par contre, m'a déplu (je ne vais pas la dévoiler, évidemment !) par son côté décalé, « à côté de la plaque », sans aucun lien avec le reste, comme si l'auteur avait voulu ABSOLUMENT trouver un dénouement original.
Mais oublions ce côté fabriqué, artificiel, pour ne retenir que la jubilation ressentie face à ce narrateur si loufoque en prise aux difficultés de la vie. Ca fait du bien !
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Si la crise, basse et lourde, pèse comme un couvercle sur votre esprit gémissant en proie aux longs ennuis (merci Baudelaire), si le dernier Sollers vous a provoqué des migraines ophtalmiques, si le dernier Delphine de Vigan vous a impulsivement précipité dans l'impérieux bouillonnement des soldes, si vous pensez que le dernier Marc Levy ne vaut pas un triple A, alors, éteignez télévision, ordinateur, GPS et téléphone et ouvrez grand la dernière livraison de Jonathan Coe.
Suivez les extras aventures ordinaires de Monsieur Sim. Prononcez «sim» comme la carte SIM de votre mobile. Mr Sim, Maxwell Sim,
c'est, tenez-vous bien, tous à la fois et tout à la fois : Mr Hulot (non pas le Nicolas mais le Mr Hulot de Tati), Laurel et Hardy, les Monty Python et Donald Crowhurst.
Donald Crowhurst ? Un homme d'affaire anglais qui participa à une course autour du monde à la voile en 1969, le Sunday Golden Globe Race. Il est l'acteur de la plus grande escroquerie de la navigation de compétition. Il écrivit un faux journal de bord qui prétendait avoir effectué le tour du monde alors qu'il avait à peine entamé le parcours. Devant cette supercherie qui le plaçait premier de la course, il paniqua, sombra dans la folie et se suicida (histoire vraie relatée dans le livre « L'étrange voyage de Donald Crowhurst»).
Hum, hum, pas gai tout ça me direz-vous !
Et pourtant...et pourtant...
Cet émouvant et attachant personnage, tout droit sorti de l'imaginaire de Jonathan Coe, vit, plus vrai que nature, la vie sans mode d'emploi. Ou plutôt, ou peut-être lit-il le mode d'emploi (mais en existe t-il vraiment un ? si oui, faites moi signe !) à l'envers et contre tous, en sautant des pages, dans le désordre ou bien dans une langue étrangère. Mr Sim ne sait pas s'il doit reculer ou avancer, tourner à droite ou à gauche...bref, la vie comme un indécis voyage solitaire au long-cours...
«Les voitures, c'est comme les gens. On va, on vient dans le grouillement du quotidien, on passe à deux doigts les uns des autres, mais le vrai contact est très rare. Tous ces ratages de peu, tous ces possibles irréalisés, c'est effrayant quand on y pense. Mieux vaut éviter soigneusement d'y penser.» nous confie Mr Sim. La vie comme une interminable et monotone autoroute...où personne ne se croise vraiment. Où tout le monde se croise sans vraiment se voir.
Hum, hum, pas gai tout ça me direz-vous !
Et pourtant...et pourtant...
Mr Sim se sent seul. «Il y a quarante ans, Donald Crowhurst avait apparemment pu se cacher au coeur de l'océan l'Atlantique, grain de poussière dans l'océan, entouré par l'infini de la haute mer et dérobé aux yeux de tous les habitants de la planète. de nos jours, une quantité de satellites en orbite étaient braqués sur nous en permanence et pouvaient établir nos coordonnées avec une rapidité et une précision inimaginables. L'intimité ça n'existait plus. Nous n'étions plus jamais seuls.»
Alors le Mr Sim il tombe facilement amoureux : d'une inconnue voisine de table dans un restaurant, de la douce et rassurante voix féminine de son GPS. GPS qu'il va surnommer Emma en hommage à Jane Eyre.
Mr Sim : sa femme le quitte avec sa fille, il est VRP en brosses à dents, sa mère est morte depuis longtemps, son père inexistant vit en Australie et pour achever le tout il n'a pas d'ami.
Hum, hum, pas gai tout ça me direz-vous !
Et pourtant...et pourtant...
Prenez la route au côté de Mr Sim pour un voyage désorganisé de Londres aux îles Shetland au nord de l'Ecosse. Vous n'avez pas fini de vous dérider !
Ce roman est hilarant. Lu à gorge déployée ! Les seconds rôles sont de première classe : Emma la dame du GPS, Poppy l'ange gardienne des maris volages, Trevor le collègue vendeur de brosses à dents et
j'en passe...Du grand Jonathan Coe ! Je me suis surpris à rire en lisant. Et que dire de mes proches qui commençaient à s'inquiéter !
Jonathan Coe nous dépeint un monde désanchanté, nous brosse dru et dur une société anglaise déliquescente, nous observe drôlement en mordant là où ça fait mal mais sans blessure, nous regarde de travers en rigolant mais sans nous pointer du doigt, nous pousse dans nos derniers retranchements mais sans nous juger.
Une magistrale (auto)dérision !
Une fin (d)étonnante...Préparez vos mouchoirs !
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Sa femme l'ayant quitté et partie vivre avec leur fille dans le nord de l'Angleterre, Maxwell Sim a lâché son boulot de vendeur pour cause de dépression. Dépression dont il a du mal à sortir malgré le séjour à Sydney, où réside son père, que lui a offert son épouse en guise de cadeau de rupture ? Ou pour l'engager à rétablir des liens avec ce père qui lui a toujours été très lointain ? Mais le seul élément marquant de ce voyage c'est cette femme chinoise si proche de sa fille dont il envie la complicité…et sa rencontre avec Popy qui le met sur la voie d'un navigateur, Donald Crowhurst, mort fou au milieu de l'océan après avoir rédigé un faux carnet de bord lors de la Golden globe race…auquel il va finir par s'identifier, lui-même parti pour une course sans retour…

Rentré à Londres et sans perspective d'avenir, désespérément seul, il scrute son courrier et sa boite mail et finit par tomber sur un message de son unique ami, lui proposant un rendez-vous et un emploi ! Partir dans les Iles Shetland faire la promotion d'une brosse à dent révolutionnaire, écologique et ergonomique au volant d'une voiture hybride équipée d'un GPS dont la voix l'envoûte au point qu'il en tombe amoureux ! Et le voilà sur les routes, mais le voyage ne va pas du tout se dérouler comme prévu et c'est sur les traces de son passé qu'il va remonter vers le nord et comprendre au fil de ses rencontres et visites le mystère de sa naissance…pas vraiment désirée.

A mesure qu'il remonte le temps et poursuit sa course folle dialoguant avec Emma, son GPS, il s'enfonce dans la folie et termine sa trajectoire dans un champ de neige…perdu au milieu de nulle part. Choc bénéfique qui lui permettra de faire la paix avec lui-même et d'aller au bout de son parcours.
Très beau texte de Jonathan Coe dont la gravité est atténuée par ce regard plein d'humour et d'humanité qu'il porte sur notre société et ses personnages. Je l'ai relu après avoir vu le film de Michel Leclerc et je l'ai encore plus apprécié. A (re)découvrir !
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En imaginant les pérégrinations aléatoires et drolatiques d'un Anglais très moyen, Jonathan Coe fait étinceler son humour ravageur dans la satire sociale caustique et réjouissante
de notre société postmoderne. Désenchanté et irrésistible.


Une fois de plus Jonathan Coe réussit à nous étonner. Avec son talent de raconteur d'histoire, il nous embarque dans la vie de Maxwell Sim, 48 ans. Domicilié à Watford, Angleterre, responsable du service après-vente d'un grand magasin, puis commercial dans le domaine des brosses à dents écologiques, il cultive la banalité au quotidien. Timoré, indécis, sans ambition, il vient d'être abandonné par sa femme et sa fille « en état d'ermite involontaire ». Même s'il compte plus de soixante-dix amis sur Facebook, Max conjugue la solitude à tous les temps ! Débarquant à Sidney où il va tenter de renouer avec son père, il est tout à coup fasciné par la tranquille complicité d'une Chinoise et de sa fille dînant dans un restaurant. Cette sérénité aperçue agira comme un déclic inconscient et inversera la spirale de l'échec. Vont se succéder alors en cascades d'improbables rencontres… Max est ensuite envoyé aux Iles Shelland par sa société : une mission présentée comme une croisade au service de l'hygiène bucco-dentaire du futur. Une quête du Graal qui va vite virer à la sauce Monty Python. de Sarbucks en pause panini tomate-mozzarella, il progresse vers le Nord, de plus en plus déprimé. Drame du VRP seul au volant, il tombe amoureux de la voix sensuelle de son GPS, seule confidente de souvenirs d'enfance et de réflexions sur sa vie de couple qui lui viennent à l'esprit au fil des kilomètres. Peu à peu, en remontant dans son passé familial, il trouve la clé, la terrible révélation de son adaptation au monde et de ses difficultés relationnelles. Jusqu'à ce qu'il parvienne à s'accepter lui-même.

Coe met le doigt sur tous les leurres d'une société de l'hyper-communication : la finance virtuelle, la grandiloquence trompeuse du marketing, la précarité de l'emploi, la mondialisation qui semble abolir la distance, l'uniformisation des modes de vie et l'imposture des médias. En motif récurrent et emblématique, il cite l'exemple de Donald Crowhurst, navigateur amateur britannique qui a prétendu faire le tour du monde à la voile en falsifiant son journal de bord, en 1968, à l'époque d'avant le satellite.

On sait que Jonathan Coe excelle à imbriquer récits gigognes, mémoires, journaux intimes, lettres oubliées puis retrouvées, digressions enchâssées les unes dans les autres. Autant d'éclairages qui enrichissent un peu plus les personnalités et permettent la progression de l'intrigue. C'est ainsi que l'auteur de la pluie avant qu'elle tombe impose sa singularité. Mais dans ce dernier roman, c'est l'admirateur et biographe de B.S.Johnson qui laisse transparaître en filigrane l'influence de celui qui a poussé très loin l'interrogation et l'expérimentation sur les rapports entre la fiction et le réel. Jouant avec le vrai et le faux Coe continue d'explorer de nouvelles pistes. Avec délectation.




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