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Rodrigues elisabeth Monteiro (Traducteur)
EAN : 9782367322438
256 pages
Editions Chandeigne (20/01/2023)
4.23/5   15 notes
Résumé :
Un recueil de nouvelles dans lesquelles l'auteur interroge les différentes composantes de la société post-coloniale en brossant le portrait sensible et tendre des habitants du Mozambique.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Célèbre auteur mozambicain né de parents portugais, Mia Couto confirme ses talents de nouvelliste avec ce recueil de 26 textes courts dans lesquels l'humour le dispute à l'ironie.
Sur des sujets aussi sérieux que le Covid 19, La place des femmes dans la société africaine, le terrorisme islamique, la famille déchirée, la vieillesse ou la douleur de la mort, Mia Couto insuffle dans ses écrits une poésie empreinte de tendresse et de facétie.
Ainsi le récit hilarant d'un vieil africain qui prend l'agent masqué venu l'informer d'une pandémie pour un voleur ou celui émouvant d'une jeune femme qui pleure toujours la mort de sa maman à sa naissance.
Toute la sagesse et la fantaisie des contes africains sont dans cet épatant recueil.
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Un enchantement ! D'une traite ou à petites doses, ce recueil de nouvelles de Mia Couto, qui marque, pour l'écrivain mozambicain, le retour à un genre dans lequel il excelle, se savoure avec délectation. Sous les yeux d'un vieil homme, isolé dans sa masure en pleine cambrousse, l'assistant des services de santé venu lui imposer un improbable confinement devient un gentil voleur. Plus loin, un braconnier, « chasseur d'éléphants invisibles » qui donne son titre au recueil, essaye de convaincre la brigade de santé venue à sa rencontre que la seule réalité qui vaille est celle des rêves, faute d'école ou d'hôpital dans sa région déserte, mais finit par lui réclamer du gel hydroalcoolique… Ailleurs encore, dans un territoire minier, un des employés de cette industrie se fait, grâce à son baratin plein d'astuces, embaucher pour observer les migrations d'oiseaux… qui ne traversent plus sa région depuis bien longtemps ! Artisan ciseleur d'un réalisme magique à la patine d'Afrique, Mia Couto met ainsi tout son talent de conteur à évoquer les terres et les hommes (souvent des femmes, d'ailleurs, soumises à l'alcoolisme et aux brutalité de leur entourage masculin) de son Mozambique, un pays où traditions et modernité entrent sans cesse en collision. Et c'est avec une écriture parfois mélancolique (quand il s'agit de violence ou de terrorisme), mais le plus souvent emportée par un élan d'allégresse, de tendresse ou d'humour, que le grand Mia décrit cette oscillation entre rêve et réalité. Un régal, ce recueil, puisqu'on vous le dit !
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Une forme de pensée liée à ses origines, un attachement aux choses essentielles, une présence constante de poésie, de rêve et de délicatesse, une grande dose d'humour et une forme d'ironie originale, voilà quelques éléments pour présenter ce recueil de 25 nouvelles que l'on déguste à petites doses comme une friandise.
Il est facile de lire ce recueil en vacances, à raison d'un ou deux récits par jour !
Pour moi, ce fut la découverte de l'écriture originale de Mia Couto. Un petit livre précieux, un peu de bonheur et de poésie à emporter avec soi…
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critiques presse (2)
Actualitte
14 juin 2023
Pourtant, chacune est plus qu’un roman, car Mia Couto, en quelques mots, esquisse le roman qui précède sa première phrase et laisse entrevoir tous les romans qui poursuivent chaque point final.
Lire la critique sur le site : Actualitte
LeMonde
06 février 2023
Vu du Mozambique, où l’écrivain est né en 1955 de parents portugais, et où il vit toujours, certaines restrictions dues à la pandémie de Covid-19 ne s’apparentaient pas seulement à une remise en cause des libertés : elles étaient totalement absurdes. On le comprend dès la première nouvelle de son recueil Le Chasseur d’éléphants invisibles.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Quand mon tour est arrivé, le scientifique m'a demandé ma profession. J'ai menti. je ne pouvais pas dire aux blancs que j'étais mineur. Que pourrais-je connaître des oiseaux puisque je vivais avec les taupes ? J'ai divagué sur les oiseaux de notre pays. Et j'ai inventé des noms qui n'existent dans aucune langue: xinguitira, mururukweru, mbalalaia, xitutuine, ntinituwe. Et alors que je nommais déjà le cinquantième oiseau, l'Européen a levé le bras.
- Aucun de ces oiseaux indigènes ne nous intéresse, a dit l'étranger.
J'ai été déçu par le désintérêt envers notre faune si colorée, si chantante, et surtout, si charnue.
- Il n'y a que les oiseaux migratoires qui nous intéressent, a déclaré le scientifique.
J'ai eu envie de dire qu'ici, dans notre village, personne ne migre si ce n'est dans la terre. Je m'en suis tenu à préciser que les oiseaux qui venaient de loin pour nous rendre visite étaient ce qui abondait le plus dans notre village. J'ai esquissé des nuages avec mon index et j'ai affirmé:
- Les oiseaux internationaux aiment beaucoup notre ciel.
- Il n'y a pas d'oiseaux internationaux, a corrigé le scientifique. Et il a répété que ce qui l'intéresse, ce sont les oiseaux européens qui traversent la Méditerranée.
Ça franchement, ça m'a rendu triste. Pourquoi cette discrimination ? Les oiseaux ne se distinguent pas par leur origine ou leur nationalité. Certains sont bons à manger. D'autres ont des os, des plumes et guère beaucoup plus. Mais je n'ai pas laissé mes sentiments remonter à la surface. Je suis un mineur, il y a longtemps que je m'enterre en mon for intérieur. Avec conviction, j'ai annoncé que les oiseaux européens étaient nos préférés. Je ne leur ai pas dit que les mines, avec leurs fumées bruyantes et leurs explosions spectaculaires, avaient depuis longtemps fait fuir tous les volatiles de notre région. Comme disait mon grand-père, ce sont les oiseaux qui fabriquent le ciel. Et notre ciel avait cessé d'exister.
(pp.35-36)
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Il jette un œil alentour et, comme il ne trouve rien à voler, I'intrus finit par s'expliquer. II dit qu'il vient des services de santé. Et je souris. C'est un jeune voleur, il ne sait pas mentir. Il dit que ses chefs sont préoccupés par une maladie grave qui se propage rapidement. Je fais semblant d'y croire.
Il y a soixante ans en arrière, je suis presque mort de la variole. Quelqu'un est-il venu me rendre visite ? Mon épouse est morte de la tuberculose, quelqu'un est-il venu nous voir ? Le paludisme m'a pris mon fils unique, c'est moi qui l'ai enterré tout seul. Mes voisins sont morts du sida, personne ne s'en est jamais occupé. Ma défunte femme disait que c'était notre faute parce que nous avions choisi de vívre loin des endroits où se trouvent les hôpitaux. Elle, la pauvre, ne savait pas que c'était l'inverse : ce sont les hôpitaux qui s'installent loin des pauvres. C'est une de leurs habitudes aux hôpitaux. Je ne leur jette pas la pierre. Je leur ressemble, aux hôpitaux, c'est moi qui abrite et soigne mes maladies.
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Et il confia : une autre brigade était déjà venue auparavant avec l'ordre de fermer l'école. Fermer est une façon de parler. Comment peut-on fermer ce qui n'a ni murs ni porte ? Maintenant, sous l'anacardier feuillu, restaient les longs bancs, une planche peinte en noir et des morceaux de manioc sec qui servaient de craie. Tout désolé, vide et solitaire. Mais c'est comme ça, c'est la vie qui commande. L'école a une similitude avec le monde des virus. Elle paraît vide. Mais il y en a qui la peuplent. Qui sait, dans quelques mois, quand ils la rouvriront, leurs petites-filles ne retourneront pas en classe ? La place des jeunes filles est à la maison. Elles, oui, elles resteraient à la maison. Maintenant et toujours. Pour ne pas qu'elles attrapent la maladie de rêver. Ni de choses visibles et, encore moins, de créatures invisibles.
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Ce fut alors que l'archéologue Nicolau promit solennellement : si la fouille donnait des résultats, le chef, c'est-à-dire les chefs, ou mieux encore, le village au complet, serait dûment rétribué.
Le lendemain tous les villageois, y compris le chef de nuit, s'employèrent à approfondir le trou. L'archéologue freinait les élans, recommandant mille précautions: les réminiscences des anciens rois sont délicates. Soudain, comme par miracle, le fond du trou se remplit d'eau. On entendit le murmure sourd d'un fleuve souterrain assaillant le vide. Quelqu'un murmura : on lui a coupé une veine, vous allez voir.
Ezequiel Nicolau était l'image de la désolation. Autant d'efforts pour rien. Et il s'effondra sous le poids de la tristesse. Il se souvint alors des paroles de sa vieille mère : il y a des moments où Dieu enseigne combien le genou a besoin du sol. Quand il releva le visage, il vit, étonné, comme les villageois faisaient la fête. Ce qu'ils cherchaient était là, au fond de ce trou. Le roi, notre roi !, criaient-ils. Et tous imitèrent le geste de l'archéologue : ils s'agenouillèrent et rendirent gráce à Dieu.
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Il y a soixante ans en arrière, je suis presque mort de la variole. Quelqu'un est-il venu me rendre visite ? Mon épouse est morte de la tuberculose, quelqu'un est-il venu nous voir? Le paludisme m'a pris mon fils unique, c'est moi qui l'ai enterré tout seul. Mes voisins sont morts du sida, personne ne s'en est jamais occupé. Ma défunte femme disait que c'était notre faute parce que nous avions choisi de vivre loin des endroits où se trouvent les hôpitaux. Elle, la pauvre, ne savait pas que c'était l'inverse: ce sont les hôpitaux qui s'installent loin des pauvres. C'est une de leurs habitudes, aux hôpitaux. Je ne leur jette pas la pierre. Je leur ressemble, aux hôpitaux, c'est moi qui abrite et soigne mes maladies.
(pp.10-11)
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Vidéo de Mia Couto
Dimanche 2 octobre 2022 Clôture du FIG 2022 et annonces du FIG 2023 avec François-Xavier FAUVELLE, président 2022, Merieme CHADID, grand témoin 2022, Mia COUTO, président du Salon du Livre 2022, Bruno TOUSSAINT, maire de Saint-Dié-des-Vosges et Thibaut SARDIER, président de l'ADFIG
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