Parée d'une couverture magnifique qui invite au voyage, "
La princesse de Zanzibar" a des allures de conte, on se sent propulsé dans l'atmosphère feutrée d'un genre des mille et une nuits.
Mais c'est bien d'un livre interdit à Oman et au Koweït et d'un auteur censuré dans son pays, le Soudan, et exilé en France, dont je vous parle, et si certains se sont sentis offensés, d'autres s'en réjouissent !
Nous sommes bien en terre d'Afrique, côte est, sous sultanat.
A Zanzibar pour être précise, au 19eme siècle, siècle des colonisateurs européens profitant du bon vivre, des croupes félines et surtout des richesses ! (of course)
Les effluves des marchés délivrent leurs parfums exotiques, les couleurs resplendissent jusque dans les harems , le sultan exulte de toute sa puissance mortifère au beau milieu de ses concubines et de son adorable favori, mais en toile de fond, les indigènes colonisés goûtent, eux, à l'amertume de l'esclavage.
Une femme pourtant gardera sa liberté, avec une verve subversive et une réputation de sorcière en magie noire, elle chante et danse frénétiquement, aucun négrier n'ose s'en approcher. Elle s'appelle Uhuru et fascine la princesse du Zanzibar, Latifa, fille du sultan.
Serait-elle annonciatrice d'un vent de liberté et de révolte ?
Sous fond de légendes ancestrales, de philosophies millénaires, de croyances cosmopolites et de sorcelleries immémoriales,
Abdelaziz Baraka Sakin, armé de son ironie corrosive à l'égard des oppresseurs , retrace l'histoire d'un peuple africain avili par un sultanat qui a défait les portugais , qui lui-même sera encerclé par l'arrivée des anglais, ces blancs au coeur noir venus s'emparer d'une ile stratégique déjà bien meurtrie.
Et pourtant, c'est bien l'espoir de délivrance qui prime par le prisme de l'amour entre une princesse orientale qui rêve d'émancipation et son esclave noir, eunuque ,qui a défaut d'être à la recherche du temps perdu, sera en quête de son membre disparu.
C'est avec une bouffée de provocation que Baraka Sakin construit, avec aplomb, ce récit anticonformiste distillant cette absolue soif de liberté, il nous invite à nous interroger sur le prix de celle-ci, quand, des destins brisés, émergent tantôt des esprits vengeurs, tantôt le spectre de la communion. Que deviennent alors les ideaux ?
La sagesse et la combativité pour la liberté, représentées par la voix de deux femmes et d'un subordonné castré est un pied de nez fabuleux à tous les fondamentaux barbares d'aujourd'hui.
Une forte résonance pour toutes celles et ceux qui se battent toujours et encore pour gagner le droit d'exister.
Baraka Sakin nous mène tout du long par le bout du nez en nous ballotant de la poésie tribale au phrasé décapant bourré d'humour.
Irrevencieux à souhait, il nous offre un souffle de vie effervescent et éclatant bien loin des sentiers battus des terres qui refusent l'émancipation et censurent les pensées libératrices.
Redoutable !