Afin de conclure ce diptyque en beauté,
Christophe Dabitch et
Jean-Denis Pendanx continuent de romancer la biographie de
René Caillé, alias Abdallahi, et les carnets de son laborieux voyage vers la ville mythique de
Tombouctou en 1827.
Alors que le tome précédent consacrait encore une partie de l'histoire aux préparatifs, ce deuxième album se concentre maintenant sur le pèlerinage éprouvant de 4500 kilomètres à pied, de cet aventurier français qui se converti initialement à l'Islam pour servir sa gloire personnelle, mais qui finira par trouver refuge dans la prière et la lecture du Coran pour survivre mentalement à la dureté de son périple.
Une odyssée au sein d'un continent africain encore vierge de toute colonisation qui fera vaciller ce Charentais fils de bagnard physiquement, en flirtant avec la mort, mais également mentalement, en l'entraînant au bord de la folie.
Une aventure qui va étaler les beautés non souillées de l'Afrique au lecteur, tout en lui ouvrant les yeux sur les négriers, et en imbibant ce premier Européen à revenir vivant de
Tombouctou, ville interdite aux Blancs, de désespoir et de détresse au fil des pages. Une traversée du désert du Sahara qui parsèmera de doutes notre pèlerin concernant l'utilité de son exploit et qui laissera les auteurs dans l'incertitude quant aux réelles motivations de cet explorateur, pionnier de la colonisation française en Afrique ou humaniste anti-esclavagiste ?
Le dessin en couleurs directes brûlantes et brillantes de
Jean-Denis Pendanx, fait transpirer cette Afrique poussiéreuse à la chaleur palpable. La désolation de
Tombouctou et la noirceur des pensées d'Abdallahi lors du retour contrastent magnifiquement avec la luminosité du désert et avec le décor final plein de quiétude, imaginé par les auteurs.
Finalement, alors que cette fin d'année permet de retrouver côte à côte le cinquième tome du "Chat du Rabbin", qui offre une réflexion subtile sur le voyage d'étrangers allant d'Alger jusqu'en Éthiopie, et le deuxième tome de cette traversée du désert qui pousse un être humain au-delà de ses limites, on finit par se dire que c'est très beau de philosopher, mais qu'il n'y a quand même rien de tel qu'un témoignage poignant tel qu'Abdallahi.