Le « Tifaifai » du titre signifie « patchwork », représentant la composition de ce recueil qui regroupe en fait d'autres recueils et textes de l'autrice : « Humeurs », recueil de 1980, «
Tergiversations et rêveries de l'écriture orale », de 1998, «
Poèmes en archipel » regroupe des
poèmes publiés dans différents ouvrages, «
Poèmes du quotidien » sont pour la plupart des inédits et la dernière section « Patchwork » rassemble des « pièces éparses » de l'autrice recomposées par
Thanh-Vân Ton That, qui a rédigé la préface de cet ouvrage, et qui est une spécialiste de la poésie dite exotique.
La poésie de
Flora Devatine est clairement autobiographique par l'évocation du souvenir, une certaine nostalgie associée à l'enfance, l'épreuve de l'exil (de son île natale Tahiti à la métropole puis retour), la réflexion sur soi face aux difficultés de la vie, aussi bien métaphysiques que pragmatiques, une dimension qui complète et élargit le propos réside dans l'expérience sensible de la nature et de la culture tahitienne, et l'interrogation sur une écriture polynésienne.
J'ai beaucoup apprécié « Humeurs » qui forme un tout homogène, recueil complètement autobiographique mais dont le sous-texte invite à une lecture métaphorique qui tend à l'universel.
« Tergiversations » est en fait un seul poème présenté uniquement en extraits et porte sur l'image et le statut de l'écriture pour un enfant de culture orale, les difficultés en même temps que les envies d'expression et de création d'une écriture polynésienne. J'ai trouvé ce poème très intéressant tant dans la forme que dans le fond et ai regretté qu'il ne soit pas donné en intégralité car j'ai eu le sentiment de ne pas toujours comprendre le lien d'une partie à une autre. L'écriture en est très vivante par des voix d'enfants ainsi que par des inventaires à la
Prévert notamment.
«
Poèmes en archipel » a pour caractéristiques des écrits très sensoriels et des réflexions sur l'écriture et l'identité tant culturelle qu'humaine. Leur lecture n'est pas toujours facile du fait des nombreux mots tahitiens. Cela crée un dépaysement certain mais pour un.e novice total.e, il est nécessaire de se référer sans cesse au glossaire de fin d'ouvrage et cela nuit à la fluidité. Cependant, une fois les notions comprises, ces
poèmes sont très agréables et je ne doute pas que des gens connaissant la langue apprécieront pleinement.
Je pense pouvoir dire que l'autrice a atteint ici son but de créer une écriture polynésienne.
«
Poèmes du quotidien » nous plonge dans la poésie et le pragmatisme du quotidien, ceux de la faune, de la flore, des lieux de vie, du corps etc. Une écriture très sensorielle là encore.
De manière générale, une écriture agréable, jouant souvent sur les mots et beaucoup sur les sonorités. Quelques vers, strophes voire
poèmes m'ont réellement parlé et touchée.
Une jolie découverte.