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4,42

sur 5469 notes
Un superbe roman de Dostoïevski .
Certes, un peu long....
Mais il faut prendre son temps, et ce temps est finalement nécessaire pour entrer parfaitement dans la psychologie des personnages, tous un peu torturés...comme l'auteur est capable de les inventer.
Plus facile à lire que Les Frères Karamazov, mais tout aussi impressionnant par la force de l'écriture et la profondeur des personnages.
On connait le meurtrier depuis le début, mais l'intrigue n'est pas là .
Elle est dans la description minutieuse du mental du meurtrier, des causes de ce meurtre et de la façon dont l'enquête policière sera résolue.
Plusieurs autres personnages gravitent autour du meurtrier, chacun a un rôle dans l'histoire et dans cette société Russe de la fin du XIX siècle .

Je recommande bien évidement .
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Voilà une lecture dont je ressors mitigée tellement j'ai eu du mal à en venir à bout de ce pavé... Je sens que je vais faire grincer des dents, tant pis, ce ne sont pas mes dents et je suis ici pour donner mon avis, ce qui n'engage que moi.

Ayant fait, dernièrement, une superbe découverte avec les romans noirs et puisque les critiques dithyrambiques de ce livre le cataloguaient dans les noirs de chez noir et autres thrillers psychologiques, j'ai décidé de franchir le pas et de me pencher sur ce pavé littéraire.

"Crime et châtiment", pour ceux qui reviennent de Mars, c'est une "odyssée" sur le thème du salut par la souffrance.

Le roman dépeint l'assassinat d'une vieille prêteuse sur gage et de sa soeur cadette par Raskolnikov, un ancien étudiant de Saint-Pétersbourg, et de ses conséquences émotionnelles, mentales et physiques sur le meurtrier.

Raskolnikov avait une théorie particulière : selon lui, il existe des êtres supérieurs pour lesquels la notion de mal habituelle ne s'applique pas.

Cette élite est au-dessus des gens inférieurs et si pour atteindre un objectif noble, une de ces personnes se voit obligée de commettre un crime, elle peut le faire et a même le droit de passer outre les lois et les scrupules. Est-ce qu'on accuse Napoléon d'être un criminel ? Que nenni ! On lui élève même des statues.

Et puis, la fin ne justifie pas t-elle les moyens lorsqu'il s'agit d'améliorer la justice sociale ?

Tuer cette vieille usurière afin de lui voler son argent pour faire le bien, selon lui, c'est moralement tolérable. Son plan de bataille foirera puisque, surpris par la soeur de sa victime, il lui donnera aussi l'extrême onction par la hache.

Commettre un crime est une chose, l'assumer en est une autre et Raskolnikov n'assume pas. Il est rongé par les remords et la culpabilité, torturé par des dilemmes moraux et sa raison commence à défaillir, le rendant paranoïaque.

Fièvre, délire, visions, sa plongée dans l'enfer va aller crescendo. Notre homme arrivera même à rejeter sa mère et sa soeur.

L'atmosphère du livre est oppressante, étouffante, dérangeante. Tout cela est représentatif de ce que notre criminel ressent lorsqu'il est bouffé par la culpabilité.

Enfermé dans sa petite chambre, la chaleur plombant la ville, tout cela ne l'aide pas, plongé qu'il est dans son huis-clos lugubre. Il en est de même pour la ville de Saint-Pétersbourg : superbe et cruelle, certaines de ses rues suintant de misère qui grouille dans les taudis.

Ici, nous sommes aux côtés du criminel, on s'attache, non pas à la résolution du crime, mais à la manière dont Raskolnikov va pouvoir vivre avec son crime sur la conscience. Croyez-moi, ça le ronge comme de l'acide, surtout que notre homme a échoué dans son projet de vie.

Comment vous faire part de mon ressenti de lecture ? Pas facile... Parce que je ne sais pas trop où ça a coincé chez moi.

Le "message" du livre m'a bien plu, il m'a parlé, je l'ai compris; les personnages étaient tous bien travaillés, torturés; la misère noire dépeinte Dostoïevski était plus que réaliste et on peut dire qu'il a eu un regard acide sur la société russe de son époque.

Son écriture n'est pas plate mais plutôt frénétique, un peu folle, enflammée, les mots sont puissants, tout est décrit avec force et justesse. Bref, un grand auteur, cet homme.

Malgré tout, j'ai failli très souvent piquer du nez sur les pages durant ma lecture... Arrêtez de faire grincer vos dents, ce n'est pas bon pour l'émail ! de plus, cela me fait râler de ne pas avoir su entrer dans le livre pour l'apprécier, parce qu'il avait tout pour me plaire.

Tenez, les personnages, par exemple... Que du bon : ils sont tous taillés sur mesure, profonds, torturés.

Marmeladov, fonctionnaire désespéré et au chômage, un alcoolo qui en a été réduit à accepter que sa fille Sonia se prostitue afin d'aider sa famille. Marmeladov qui, entre autre, mourra en laissant sa famille dans la misère totale.

Sa fille Sonia, justement, qui a dû vendre son corps et ses charmes pour aider sa famille et qui se dévoue ensuite corps et âme pour notre meurtrier. Magnifique.

Le juge d'instruction, qui utilise des méthodes psychologiques et qui joue avec Raskalnikov au jeu du chat et de la souris. Il est aussi terrible et tout aussi patient que le félin lorsqu'il serre une proie dans ses griffes. Un personnage terrible et bien travaillé.

Svidrigaïlov, qui a sombré dans le côté obscur de la force (représentant la part sombre de Raskolonikov) qui ne trouvera pas la voie de la rédemption; Loujine, un être machiavélique, cruel, bref, un personnage horrible mais superbement bien travaillé, comme tous les autres.

Rien à dire de plus sur les autres personnages, ils tous fascinants, excessifs, outranciers, travaillés. "What'else ?" me direz vous.

"Crime et châtiment" est une oeuvre majeure, phénoménale, dans laquelle l'auteur décrit avec force et justesse ce que peut être la nature humaine dans ce quelle a de plus terrible. C'est une peinture au vitriol de la misère et de la lâcheté, sans parler de la condition humaine.

Malheureusement, je suis passée à côté. Dommage... J'aurais peut-être dû fractionner la lecture de cette oeuvre car je manquais de concentration.

En tout cas, je m'en serais voulue de ne pas vous en parler avec emphase parce que ce n'est pas la faute du livre si je suis passée outre. Tout était bien fait, bien écrit, travaillé, et tout s'emboîtait à la perfection. Il avait tout ce qu'il fallait dans le récit, la psychologie, les personnages, la trame de fond. Voilà pourquoi je lui accorde ses 4 étoiles et que je ne le descend pas en flamme.

Ce n'est pas parce que je l'ai loupé mon rencart avec lui que vous devez passer outre. Je compte revenir vers lui, plus tard, en fractionnant ma lecture.

Lien : http://the-cannibal-lecteur...
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« Crime et châtiment » est le cheminement intellectuel de Rodion Raskolnikov, étudiant à Saint Pétersbourg, tombé dans la pauvreté, qui commet un double crime : l'assassinat d'une usurière et de sa soeur. Fiodor Dostoievski y trouve le prétexte pour développer certaines théories qui avaient cours en Russie à la fin du 19ème siècle et certaines réflexions nées de son séjour au bagne.

Son crime, Raskolnikov l'a pensé, prémédité, tout du moins l'assassinat de la vieille prêteuse sur gage. En l'éliminant il est persuadé de rendre service à l'humanité. Partant de là ce n'est pas un crime mais un acte de bienfaisance commis par un être supérieur. Par contre l'assassinat de la soeur de la vieille n'était pas prévu. Incident qui va jeter Raskolnikov dans le trouble.

C'est un Rodion malade que nous rencontrons au début du roman. Mal logé, mal nourri, sans revenu, vêtu de guenilles il décide de vendre ses derniers biens pour quelques kopecks. Comme tous les habitants de son quartier il survit plus qu'il ne vit. Fiodor Dostoievski dessine une remarquable peinture de la société, de ce peuple mal-né, plongé dès la naissance dans la pauvreté sans espoir d'en sortir. Même les classes moyennes peinent à mener une vie tranquille. Ne voulant pas dépendre de sa mère et de sa soeur Rodion traîne sa culpabilité d'avoir abandonné ses études tout en refusant à qui que ce soit de l'aider, et principalement à sa mère et sa soeur. C'est le portrait de la déchéance humaine qui est fait à travers lui. Après son acte, dont il ne tirera aucun bénéfice, il sombre pendant des jours dans un état émotionnel et psychologique chaotique.

Ce chef-d'oeuvre de Dostoievski est un roman psychologique intense. Il décrit l'esprit tourmenté de son héros. Car Raskolnikov est persuadé d'être un homme exceptionnel, au même titre que Napoléon qu'il admire. Ainsi il croit à une théorie qui veut que les lois ne soient pas les mêmes pour ceux de son type. Son intelligence et son destin en font un être au-dessus des autres. En conséquence son geste n'est pas un crime, ses motivations le plaçant au-dessus des lois du commun des mortels. Son entourage, le déroulé de l'enquête, la maladie, l'évolution de sa relation avec ses proches, la rencontre avec Sonia, une jeune femme nécessiteuse qui se sacrifie pour sa famille, autant d'éléments qui vont mener Raskolnikov vers la rédemption.

La qualité des descriptions des personnages, de leur psychisme, des conditions de vie, des paysages, des atmosphères, autant de points forts de l'écriture de Dostoievski qui font, avec la qualité de la traduction de D. Ergaz (pour l'édition que j'ai lue), l'intérêt de ce roman. Construit en 6 parties, jouant des rebondissements (on dirait des cliffhangers), l'oeuvre se lit facilement et avec grand plaisir, malgré un petit ralentissement dans les parties 4 et 5.

La personnalité complexe de Raskolnikov nous entraine dans une réflexion sur la condition humaine, sur la conscience morale et le poids de la conséquence de nos actes. En révolte contre la société dans tous ses aspects, Raskolnikov finira par accepter son châtiment pour retrouver le chemin du monde des hommes, notamment grâce à Sonia, l'ange qui le mènera vers la rédemption.
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C'est assurément un tout grand titre de la littérature, que je n'avais encore jamais lu. Ce n'était pas faute de rencontrer souvent des références au personnage de Raskolnikov. Et voilà, cette impardonnable omission est réparée.

Pourtant, il s'agit d'une oeuvre de longue haleine. le meurtre de la vieille usurière qui fonde le roman n'intervient dans la version d'Actes sud que passée la cent-vingtième page. Et c'est du reste dommage qu'à lire le quatrième de couverture, tout suspense soit ôté au lecteur.

Qu'à cela ne tienne, Dostoïevski manie son art avec un tel brio que je n'ai pas vu les longueurs du texte. C'est une lecture beaucoup plus abordable que Les frères Karamasov ou Les Possédés (ou les démons).

Véritablement un chef-d'oeuvre.
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Je me lance pour ma première critique sur Babelio !
Et par quel livre je commence…

Crime et châtiment est tout simplement un chef d'oeuvre que j'ai mis du temps à lire pour en savourer chaque chapitre.

L'histoire peut sembler simple de prime abord : un jeune homme, Raskolnikoff, qui a arrêté ses études faute d'argent et qui prémédite le crime d'une vieille prêteuse sur gages, mais rien ne se passe comme il l'avait prévu…

La qualité d'écriture de Dostoïevski est incroyable, elle est fluide et surtout elle retranscrit d'une façon magistrale les pensées de Raskolnikoff. Tout au long de votre lecture, vous vous trouvez à l'intérieur de sa tête, vous partagez avec lui ses sentiments, ses émotions et ses états d'âmes comme sa paranoïa, sa peur, sa colère.

La misère et la pauvreté sont également extrêmement bien retranscrites.

Ainsi, cette qualité d'écriture permet de visualiser parfaitement les scènes, de s'y projeter et de vibrer avec les personnages.

Le côté psychologique de ce livre est également magistral, le personnage de Raskolnikoff est d'une grande complexité. On se rend compte très rapidement qu'il n'a pas tué la vieille pour l'argent que c'était simplement un prétexte. Dans certains passages, son orgueil est prédominant, il se pense d'une intelligence supérieure, à contrario, dans d'autres passages, il se sent misérable, il trouve ses réactions absurdes. Ce fort contraste permet de montrer la désillusion de Raskolnikoff vis-à-vis de ses rêves de grandeur : il pensait être un être supérieur qui pourrait tuer de sang froid en vue de devenir quelqu'un de grand, au final, il est rongé par la culpabilité, par la peur d'être découvert et devient un être misérable.

Nous suivons ainsi Raskolnikoff jusqu'à la rédemption de son crime, jusqu'à la renaissance de son être.

Je ne vais pas rentrer dans les détails pour vous laisser le plaisir de découvrir ce livre, comme j'ai eu plaisir de le découvrir.

Pour moi, ce livre doit être lu au moins une fois dans sa vie, certains passages vous marquerons et vous ne vous ennuierez à aucune moment!
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Quelle claque! Ca faisait longtemps que je ne m'étais pas prise une aussi grande claque littéraire!

J'avais très peur de m'attaquer à ce monument classique de la littérature russe, et pourtant je gardais un bon souvenir du "joueur". J'ai trouvé le début triste et glauque et puis je me suis laissée embarquer par ma lecture.

J'ai en effet été conquise par le style de l'auteur, sa manière de nous faire vivre intensément dans la tête de Raskolnikov, de nous faire nous attacher à lui malgré son crime. Et malgré la misère (matérielle et psychologique) décrite dans l'oeuvre, j'ai trouvé certains passages lumineux.

J'ai été particulièrement marquée par la première rencontre entre Raskolnikov et Porphiri (un vrai duel psychologique) et j'ai beaucoup aimé le personnage du fidèle ami Razoumikhine.

En conclusion, je dirais que c'est une lecture exigeante du fait qu'elle m'a demandé de la concentration, mais pourtant très juste et magnifique. Juste lisez-le!
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Tourmenté, solitaire, taciturne et irascible, le jeune Rodion Raskolnikov a été contraint d'abandonner ses études de droit par manque d'argent. Mais au lieu d'essayer de les financer en donnant des cours ou en acceptant des traductions, il préfère s'enfermer dans la minuscule mansarde qui lui sert de chambre, à broyer du noir et à élaborer de sombres théories sur l'humanité. Ses réflexions le mènent à penser que les hommes peuvent être rangés dans deux catégories: celle du "troupeau", de la masse qui obéit et se contente de peu et celle des Grands Hommes voués à un destin d'exception. Et, si par malheur, un de ces grands hommes serait empêché d'accomplir son destin par la misère, rien ne s'oppose à ce qu'il commette un crime pour sortir de sa mauvaise passe. Supprimer un être vil et malfaisant et s'emparer de ses biens serait même grandement profitable à la bonne marche du monde.
Fort de ses convictions, Raskolnikov met au point le projet d'assassiner Aliona Ivanovna, une vieille usurière pingre et mauvaise. Après moult réflexions et atermoiements, il se rend donc chez elle, la tue à coups de hache, se voit obliger d'occire sa soeur rentrée prématurément et s'enfuit en emportant une bourse et quelques objets. Cependant, une fois son forfait accompli, pour Raskolnikov, le choc est rude entre la théorie et la réalité. Malade physiquement et mentalement, le jeune homme assume difficilement son acte. Et ni son ami Razoumikhine, ni sa soeur, ni sa mère, malgré toute leur affection ne peuvent le secourir. D'autant que Porphyre Petrovitch, le juge chargé de l'affaire joue au chat et à la souris avec lui, le menant de la paranoïa aux portes de la folie.Son salut viendra-t-il de Sofia Semionavna, timide jeune fille, obligée de se prostituer pour nourrir sa famille?


Ah! La littérature russe! Elle intimide, elle peut même effrayer le plus téméraire des lecteurs...Et pourtant, qu'il est plaisant et facile de lire DOSTOÏEVSKI et de suivre Raskolnikov dans les rues de Saint-Pétersbourg. On y ressent l'âme russe telle qu'on se l'imagine, le ton est mélodramatique, les sentiments sont exacerbés, la gestuelle outrée. Les femmes pratiquent l'abnégation et le sacrifice comme un art de vivre. Elles ne s'inquiètent pas, elles deviennent folles, réellement folles. Elles ne pleurent pas, elles sanglotent, crient, hurlent même.
Raskolnikov, sombre et tourmenté, est un être orgueilleux, sûr de sa valeur et de son bon droit, mais qui va faire la découverte de sa condition d'homme ordinaire. Il n'est pas sympathique, il énerve, fait fulminer le lecteur et l'on se demande comment il réussit à s'attacher si fidèlement Dounia ou Sofia, jeunes filles bonnes et dévouées. A force d'amour, la soeur vertueuse et surtout l'amie pervertie par la misère sauront amener Raskolnikov a accepté son châtiment.
Car, outre une réflexion philosophique sur le Bien et le Mal, le crime, la culpabilité et la rédemption, Crime et châtiment est aussi une peinture de la Pétersbourg tsariste avec la misère pour toile de fond, les quartiers populaires, les logements insalubres, l'alcoolisme, la maladie qui sont l'apanage des classes populaires des bas-fonds de la ville.
Une belle expérience, riche et intéressante à lire sans hésitation.
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Ce chef d'oeuvre littéraire n'est pas forcément aisé de prime abord, cependant au fur et à mesure de la progression dans les pages de cette histoire, on se sent à l'aise et on comprend toute l'envergure du talent de cet auteur. J'ai partagé la vie de Raskolnikov durant quelques jours, son meurtre, ses considérations mentales, les personnes importantes autour de lui, son cheminement et j'ai aimé l'écriture, la structure de l'oeuvre, la chronologie parfaite, le « sans faute » de Dostoïevski. Tout est réuni dans cet écrit pour sortir « grandi » d'une lecture. Un roman qu'il faut avoir lu dans une vie.
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Faire une critique (même modeste) d'un tel monument de la littérature, c'est intimidant. Et pourtant, l'écriture de Dostoïevski m'a toujours parue emprunte d'une grande modestie.

Il y a deux types de crimes. Les petits, que commettent les Loujine, les Marmeladov, qui ruinent et détruisent ceux qui les entourent par leurs agissements égoïstes. Ceux-là sont propres devant la loi, et ne répondront jamais devant les hommes de leurs actes.
Et il y a les grands comme celui que commet Raskolnikov, trancher brutalement une vie à coup de hache.

Puis-je commettre un grand crime dans le but de faire le bien, d'utiliser mon butin pour soigner les terribles conséquences de multiples petits crimes ? Non, répond Dostoïevski avec sa terrible dureté. Et quel que soit le crime que tu commets, une seule chose te mettra sur le chemin de la rédemption : le remord.

Tous les grands thèmes dostoievskiens s'entrecroisent : la petite fille violée, le sacrifice christique, la bonté inutile. Mais une chose est en revanche totalement atypique : le roman finit bien ! Raskolnikov est au bagne. Mais il finit par pleurer et demander pardon à Sonia. Brusquement, la vie lui paraît soudain plus heureuse, et ses camarades de misères deviennent amicaux avec lui.

C'est qu'il a fait ce que l'auteur (et pas que) semble considérer comme le plus difficile : reconnaître ses torts. Grand par son intelligence et son orgueil, Raskolnikov l'est aussi par le fait qu'il avoue ses crimes. Pas seulement son grand crime, son double meurtre. Mais également tous ses « petits crimes » : ce n'est pas qu'à Sonia qu'il demande pardon, à travers elle c'est à tous ceux de son entourage à qui il a fait du tort et qu'il a repoussé. Sa mère, sa soeur, son ami Razoumikhine... le sacrifice de Sonia n'a pas été vain : elle l'a conduit à vouloir se racheter. le christianisme de Dostoïevsky apparaît là dans toute sa profondeur et sa spiritualité.

Une oeuvre d'une richesse exceptionnelle, sur laquelle peuvent se développer tant de points de vus qu'il serait dur de les lister.
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1/ J'avais peur de lire «Crime et Châtiment »... Trop noir. Eh bien oui, c'est vraiment effrayant. Dostoïevski va au dernier étage de l'âme humaine, celui où l'on tue. Il pose ce dilemme scabreux : pourquoi ne pas tuer pour apporter un bien? Raskolnikov est obsédé par l'idée de tuer une vieille usurière qui n'est à ses yeux, pas humaine. Pire il veut faire de ce meurtre une sorte d'exercice gratuit qui prouverait qu'on peut améliorer le monde en se dégageant des interdits moraux… C'est la tragédie du nihilisme de reposer cette question, la morale avait définitivement dit non, la raison dit peut être si…
Avant l'acte, le rêve prémonitoire, du cheval battu à mort est à la limite du soutenable. On sait que Nietzche, qui fut témoin d'une scène semblable, sombra dans la démence, après s'être jeté au cou du cheval… Dans ce rêve il y a ce qui est resté humain dans Raskolnikov, d'autres scènes montrent qu'il n'est pas un monstre, qu'il a un coeur. C'est son intelligence qui est sa pire ennemie, qui le fait réfléchir à faux. La raison humaine est trop fragile, insuffisante à soutenir l'homme.
Au moment du meurtre, évidemment, rien ne se déroule comme prévu, tout devient bestial et absurde. La conclusion de l'acte : oui, tuer l'autre, c'est se tuer soi-même! Selon Jung l'inconscient est justement le lieu qu'on partage avec les autres, les tuer c'est se tuer. Les morales l'enseignent depuis toujours mais ne peuvent l'expliquer et c'est là la faille où s'engouffre le nihilisme.
La forme du récit est géniale, on est dans la tête de Raskolnikov, mais il y aussi la vision objective, en quelque sorte transcendante, du romancier qui le décrit de l'extérieur. Cette mise en abime donne vraiment l'impression que paradoxalement, la conscience est un point aveugle.
2 / le parallèle avec Hamlet est frappant et même éclairant sur la pièce de Shakespeare. Paranoïa, solitude, impuissance, courage et faiblesse. La solitude de Raskolnikov, inconsciente d'elle-même, est totale, il faut dire déréliction.
Seule, coupée des autres hommes, la pensée devient folle. Vouloir le bien des hommes ce n'est pas les aimer, loin de là… L'individu, même supérieur, n'est pas un recours au malheur de la société. Il ne fait pas le poids. Raskolnikov est prisonnier de cette idée. Comme Hamlet il doit réparer quelque chose de pourri, mais le mal ne répare pas le mal!
3/ Progressivement on s'aperçoit d'une manière souterraine, exactement comme Raskolnikov en prend conscience, que c'est Sonia qui est le personnage principal de «Crime et châtiment». Son image de rédemptrice est amorcée par le récit de son père : pour nourrir ses demi-frères et soeur, elle se prostitue, toute jeune qu'elle est. Elle semble condamnée, parfois son père la vole pour boire, elle n'a personne sauf cette Lizaveta, quasi idiote, avec qui elle partage la Foi en Dieu…
Et pourtant…Toutes les scènes avec Sonia sont de pures merveilles et arrachent des larmes.
Il y a un passage d'une intensité bouleversante, où la prostituée lit, dans l'Evangile, à l'assassin, la résurrection de Lazare… A couper le souffle... La voix est donnée aux humbles, aux humiliés, la Foi peut leur garder l'Espérance. Sonia manifeste une force d'âme surhumaine.
Raskolnikov arrive à sentir que sa vie est parallèle à celle de Sonia. Ce contraste entre eux, en fait, structure le roman.
Elle, elle réussit à apporter quelque chose aux hommes, même aux plus vils, son père, ou les clients ou les aliénés comme lui Raskolnikov. Elle, elle peut transgresser la morale. Elle, elle est des gens supérieurs dont Raskolnikov fait une théorie absurde de ce qu'elle ne permet en rien de les distinguer. Elle, elle a le pouvoir de le sauver, lui qu'elle ne comprend absolument pas (rationnellement) mais complètement humainement, quand bien même il a assassiné son amie Lizaveta. Elle, elle est son double auréolée qui porte ses péchés. Raskolnikov croyait qu'il fallait d'abord arracher le mal... Elle, elle fait d'abord le bien, naturellement, sans calcul… Et alors, le mal tombe de lui-même.
Elle, elle peut le guérir et l'encourage à expier, à souffrir. La souffrance échappe à la raison, Raskolnikov ainsi pourra redevenir humain.
Le personnage de Sonia est une lumière dans les ténèbres du monde. Cette vision de Dostoïevski des femmes ne me semble nullement conventionnelle, la compassion n'est ce pas l'essence de la féminité?
Alors? Apologie du christianisme? Je ne dirai pas cela, c'est plutôt une formidable confrontation avec le nihilisme, violente, impitoyable, tragique : l'Amour contre la Raison… On ne sait l'issue.

«Chère Sonia Semionovna, tu es notre mère douce et secourable», disaient ces galériens, ces êtres grossiers et endurcis, à la frêle petite créature. Elle souriait en leur rendant leur salut à tous. Ils aimaient ce sourire.
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