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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Lorsque j'étais adolescente, il y avait un programme à la télévision qui réunissait assez facilement ma famille. de fait, parents et enfants trouvaient un égal plaisir à se repaître des enquêtes du lieutenant Columbo. C'était une série policière d'un genre assez nouveau pour l'époque. Contrairement à l'habitude, on savait dès le début qui était le coupable et quel était son mode opératoire.

Tout le génie de l'intrigue consistait donc, non pas à démasquer le coupable, mais à savoir comment ce diable d'inspecteur fouineur avec son air con-con inoffensif parviendrait à faire ployer le sang-froid du criminel qui semblait avoir réalisé le crime parfait.

Toujours avec ses airs de ne pas y toucher, par des maladresses calculées, par des questions anodines, par des détails apparemment sans lien avec l'affaire, par une rassurante bonhommie, par un art de faire croire qu'il tombe facilement dans le panneau, le roublard petit lieutenant de police jouait d'estoc et de taille dans la psychologie de son suspect jusqu'à l'excéder, jusqu'à l'exaspérer, jusqu'à lui faire cracher la boulette par inadvertance, jusqu'à le pousser dans ses derniers retranchements et le faire basculer de l'excès de confiance à l'angoisse de savoir son crime révélé au grand jour.

Eh bien cette série policière d'un genre nouveau (lors de sa création à la fin des années 1960), s'inspirait totalement de la technique narrative d'un roman cent ans plus âgé ; vous avez deviné je suppose : Crime Et Châtiment.

Effectivement, ici, Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski ne cherche à aucun moment à nous dissimuler l'identité du criminel. Il essaie même très patiemment de nous faire pénétrer dans l'intimité de sa psychologie, de son quotidien, de son environnement physique et social, de ses pensées et de ses motivations, dans ses doutes et ses frayeurs d'avant ou d'après crime.

Le lieutenant Columbo de Crime Et Châtiment s'appelle Porphyre Petrovitch. (Il ne me semble pas que l'on nous donne son nom de famille, seulement qu'il est un cousin de Razoumikhine, autre personnage important du roman. Peut-être l'auteur a-t-il jugé préférable de ne pas embrouiller son lecteur en désignant deux personnages clés sous un même patronyme. En ceci, Dostoïevski diffère de William Faulkner qui lui n'eût certainement pas reculé devant la jouissance de baptiser d'un même nom quatorze Razoumikhine et dix-sept Raskolnikov différents !)

Pas d'erreur possible, avec Crime Et Châtiment, vous êtes dans du Dostoïevski pur jus, première pression à froid. du Dostoïevski typique, torturé, illuminé, proche de la folie, entre mystique et politique, mais, ce qui en fait son grand succès auprès des lecteurs, son approche un peu plus aisée que pour ses quatre autres grands romans, c'est qu'il se double d'une enquête policière, qu'on pourrait même catégoriser de thriller psychologique, ce qui le rend plus prenant, plus captivant que d'autres titres comme L'Idiot ou Les Possédés pour le néophyte qui découvre les grandes tragédies romanesques russes du XIXe siècle.

S'il ne fait pas de doute qu'avec ce roman Dostoïevski signe un roman policier, il ne semble pas non plus faire beaucoup discussion sur le fait qu'il s'agisse également d'un roman social et, d'une certaine manière, politique et philosophique.

Je pense qu'il serait une erreur que de s'attarder trop sur le protagoniste principal, Raskolnikov, pour comprendre l'essence et les motivations de l'auteur à s'embarquer dans un projet tel que Crime Et Châtiment. Je crois que le sujet principal est contenu dans le titre : le crime en général et le châtiment en général, pas l'histoire particulière d'un quelconque Raskolnikov, aussi intéressant et complexe soit-il.

Certes, le criminel, cela semble être lui et lui seul, mais quand j'y réfléchis plus attentivement, j'en vois au moins quatre des criminels — criminels à des degrés divers — quatre criminels, donc, et quatre châtiments distincts.

Le premier criminel auquel je pense, c'est l'ivrogne Marmeladov, coupable de faire sombrer sa famille dans la misère la plus noire, coupable de sucer comme un parasite le moindre rouble de ses proches pour s'aller mettre minable, pour se vautrer dans l'alcool, l'alcool, toujours l'alcool jusqu'à l'écoeurement, jusqu'à la déchéance, jusqu'à la honte.

La seconde criminelle, c'est sa femme, Catherine Ivanovna, elle qui utilise ses enfants pour les tâches les plus avilissantes et même, la plus avilissante de toutes, obliger la fille de son mari, Sophie, à se prostituer. le criminel, c'est aussi ce très trouble et très obscur Svidrigaïlov, dont on nous fait entendre qu'il n'est probablement pas pour rien dans le décès brutal de sa femme.

C'est trois-là, augmentés de Raskolnikov bien évidemment, représentent quatre facettes différentes du crime en général. On pourrait encore leur adjoindre les fourbes desseins de Loujine mais je n'insiste pas car ces quatre-là présentent de réelles similitudes.

La première d'entre-elles, c'est le sentiment de culpabilité. Il existe la loi, il existe le crime avéré ou la honte publique, mais il existe pire encore que tout ça, il existe le propre sentiment de culpabilité, un fardeau qui pèse des tonnes et qui vient de nous-même, une chape de plomb qui vous enfonce chaque jour un peu plus, jusqu'aux genoux, jusqu'au ventre, jusqu'au cou, un sentiment qui vous fait ployer mieux que n'importe quelle loi, mieux que n'importe quel doigt inquisiteur de la justice, mieux que l'oeil réprobateur de n'importe quelle divinité, jusqu'à vous aplatir, jusqu'à vous broyer de l'intérieur, jusqu'à vous faire rendre gorge, jusqu'à vous faire implorer grâce.

Marmeladov se fait honte au dernier degré d'avoir sombré si bas ; Catherine Ivanovna ne sait plus où se mettre quand elle pense à ce qu'endure Sophie ; Svidrigaïlov a l'argent qui lui brûle les doigts, cet argent qu'il détient de son épouse morte, Svidrigaïlov voudrait avoir l'air léger, détaché mais même en rêve la culpabilité le ronge, le corrode.

Raskolnikov est extraordinairement plus complexe. Il navigue entre remords et regrets, d'être allé si loin et d'être allé si peu loin, lui qui se voyait la carrure taillée pour les grandes oeuvres politiques, le voilà criminel aux abois, par manque de feu, par manque de force, par manque d'ambition réelle, mais surtout sous l'accablement exercé par le poids de la culpabilité, notamment vis-à-vis de sa mère et de sa soeur.

Dostoïevski nous entraine avec son Raskolnikov sur le terrain idéologique, le socialisme, le nihilisme, le progrès social, le projet révolutionnaire, des terrains sur lesquels il nous remmènera souvent, dans beaucoup de ses romans, un peu comme s'il devait régler des comptes avec le Dostoïevski qu'il a été, le jeune homme politiquement engagé qui fut déporté au bagne durant quatre années et qui, au moment où il écrit ses romans, ne croit probablement plus en grand-chose.

Ne subsiste que la culpabilité, l'impasse, comme dans Les Possédés, et la soif de rédemption qu'elle suscite. L'heure est alors venue de payer l'addition pour avoir cru pouvoir s'extraire de sa condition. L'heure est venue de subir le châtiment, ce qui me permet de trouver une transition commode pour aborder le second point commun des personnages sus-mentionnés, c'est qu'il ne semble exister que deux issues possibles, deux alternatives et deux seulement : le châtiment suprême, d'une certaine façon le soulagement le plus facile, le plus immédiat, et l'autre, le difficile, le dur à gagner, celui de s'humilier à la face du monde et de chercher son salut dans les canons de la religion, de faire sa conversion de Saul en Paul. Et au terme de ce châtiment, peut-être, une faible lueur : la rédemption...

On pourrait encore disserter durant bien des heures sur les motivations et les significations de cette oeuvre buissonnante, foisonnante mais remarquablement bien construite, où l'on retombe sur ses pieds, on l'on va là où l'auteur a décidé de nous conduire.

Sans être une fan absolue, j'avoue prendre beaucoup de plaisir à cette lecture (voir le P.S.) qui porte le sceau des grands chefs-d'oeuvres puisqu'elle ouvre plus de portes chez son lecteur à la clôture du roman qu'elle n'en a ouverte au départ par sa seule intrigue. Alors, une nouvelle fois, chapeau Dostoïevski.

Ceci dit, ce que j'exprime ici n'est qu'un avis, un misérable petit avis, qui ne représente pas grand-chose et qui ne prend de sens, si sens il y a, qu'en regard des autres, des très nombreux autres qui jalonnent les pourtours de Babelio.

P. S. : deux chapitres me paraissent particulièrement exceptionnels quant à leur intensité d'écriture. Il s'agit tout d'abord du double meurtre au chapitre VII de la première partie, et ensuite de la rencontre suffocante entre Dounia et Svidrigaïlov au chapitre V de la sixième partie. Assurément, deux morceaux d'anthologie.
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En fin psychologue, Fiodor Dostoievski livre un roman qui rend compte des réalités du temps où il s'écrit.
L'histoire se passe dans les rues crasseuses, polluées et mal famées de St-Pétersbourg. La misère, l'alcoolisme, les maladies, la débauche, la dépravation et la condition de la femme créent une atmosphère étouffante et désolante.

C'est noir, sombre et l'angoisse est toujours latente. La répétition, l'exagération et l'exacerbation des sentiments est une constante dans l'écriture de Dostoievski, avec quelques crescendos dignes des tragédies grecques.

Les embrouilles familiales à la russe sont décrites de manières cynique, drôle et avec beaucoup d'esprit. Vanité, amour-propre blessé, pièges, manipulations, les Russes ont des grandes idées en général, grandes comme leur pays et ils sont extrêmement enclins au fantastique et au désordonné.
La question du genre humain et de ces vices infâmes est ici appuyée par une situation désespérée qui pousse notre héros à envisager de commettre des actes illicites, qui lui répugnent mais qui le mettront en lutte avec sa conscience.

L'action est narrée avec beaucoup de réalisme et d'acuité. On ressent le frisson de la culpabilité, les spasmes glacés de la peur d'être découvert, la puissante force qui pousse à l'aveu, tant est lourd le poids de la culpabilité.

Les descriptions de délire et de terreur panique sont très imagées et visuelles, pénétrant le lecteur d'un sentiment malsain. L'angoisse des personnages est omniprésente, contagieuse, leur agitation grandissante ainsi que les crises nerveuses, rythment le tourbillon de leur état d'esprit.

En tant qu'explorateur de l'âme humaine, les thématiques chères à l'auteur russe tournent autour de la moralité, de la justice, de la maudite existence, et du pardon.
De belles graines sous forme de questions philosophiques nous poursuivent une fois les presque mille pages digérées:
« Celui qui a commis un crime et a conscience de sa faute, a déjà reçu sa punition ? »
L'influence de la société sur les actes des citoyens absoudrait ces derniers de leurs crimes ?

L'amour peut-il régénérer un homme ?



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Dostoïevski, c'est l'auteur dont je connais le nom depuis ma jeunesse et dont je me suis toujours promis de lire quelques une de ses oeuvres sans que je le fasse…
Dostoïevski, c'est l'auteur qui a créé Raskolnikov, un nom que je connais depuis ma jeunesse et que j'associais à des représentations fort personnelles….
Et voilà, enfin, après plusieurs décennies passées à me jurer que j'allais me lancer dans la découverte de cet auteur, voilà, c'est fait….
Il a fallu le challenge BBC de Gwen et une lecture commune pour que ce projet fort ancien aboutisse enfin !
Et oui, je n'en reviens pas moi-même ! C'est fait ! J'ai lu Crime et Châtiment !
Je reconnais que je n'ai pas été déçue du voyage….la lecture a été à la hauteur de mes attentes et de mes espérances….
La plongée dans la psychologie de Raskolnikov a été un grand moment, il faut le dire…. L'auteur a su nous emmener très loin dans ce domaine sans que cela devienne étouffant ou contraignant. Suivre le personnages principal dans ses émotions, ses hésitations, sa culpabilité, ses questionnements est un moment littéraire vraiment fort. Ici, impossible de faire une lecture superficielle…
J'avoue qu'à ma grande surprise, je me suis prise de sympathie pour Raskolnikov, même si à la base, il n'avait rien pour me plaire… Evidemment, la faute à l'auteur qui nous emmène très loin dans s psyché…
En conclusion, je ressors enchantée de cette lecture, et promis, je n'attendrais plus aussi longtemps avant de lire une autre oeuvre de Dostoïevski.


Challenge ABC 2021/2022
Challenge BBC
Challenge Pavés 2021
Challenge Mauvais Genres 2021
Challenge Multi-Défis 2021
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Petersbourg, 1866.
D'abord le CRIME (s) : Rodia Raskolnikov, étudiant, tue et vole une vieille usurière et sa soeur, par idéalisme mais aussi pour sortir de la misère. Il a de la chance ne ne pas être repéré.
Puis le CHATIMENT : les 600 pages restantes, il se pose tellement de questions sur son crime qu'il en devient presque fou.
Malgré les 200 pages de trop à la fin, à mon avis, c'est un superbe roman, écrit d'une plume magistrale.
.
Les personnages du roman sont hauts en couleurs. la mère de Rodia se fait du soucis, sa soeur et son ami semblent être les seuls à avoir les pieds sur terre, Je ne vous dévoile pas les autres personnages, sauf un peu Svidrigaïlov, un fou pervers assassin et violeur, ainsi que Porphyre, le juge d'instruction qui semble jouer au chat et à la souris avec Rodia, et, comme le décrit si bien Nastasia- B. dans sa critique, nous fait penser à l'inspecteur Colombo. Nous avons aussi la famille Marmeladov, qui nous rapproche de l'Assommoir d'Emile Zola, écrit à peu près à la même époque.
Rodia, doté d'un immense orgueil, ne comprend pas que, pour le service rendu ( "tuer un poux qui pratique une usure exorbitante" ) , il doive être châtié alors que Mahomet et Napoléon qui ont versé bien plus de sang, ont été honorés et adulés.
Dostoïevski touche là un problème philosophique et existentiel comparable à celui induit par Louis Ferdinand Céline quand son anti-héros est étonné d'être glorifié à Paris au retour des tranchées.
.
Fiodor Dostoïevski est mon écrivain Russe préféré, l'âme russe....Ah ! L'âme russe est torturée, malmenée, triturée, analysée...Et pourtant pas libérée, sous sa plume.

Rodia, c'est la souffrance si bien comprise par Stefan Zweig, c'est un peu Fiodor par son côté idéaliste, ses errances, la prison...
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Découverte tardive d'un monument de la littérature : il n'est jamais trop tard! Autour d'un événement banal, l'assassinat de deux femmes par un étudiant indigent et perturbé, Dostoïevski rédige un roman dense, riche et profus.
Chronique sociale de la Russie tsariste, qui permet à l'auteur de critiquer ouvertement le socialisme :
Pour eux [les socialistes], l'humanité n'évolue pas suivant une loi historique et vivante qui amène finalement une société normale, mais au contraire, c'est un système social, sorti de quelque cerveau matérialiste, qui organise toute l'humanité et en fera rapidement une communauté de justes et purs.
Il souligne également la précarité, l'alcoolisme, la piètre condition des femmes en cette fin de dix-neuvième siècle.

C'est aussi le portrait d'un personnage complexe, décrit par son ami comme :

Sombre, triste, altier et fier ; dans les derniers temps et peut-être même avant, impressionnable et hypocondriaque . Généreux et bon. Il n'aime pas exprimer ses propres sentiments… Terriblement refermé. Tout l'ennuie ; il demeure étendu sans rien faire ; il ne s'intéresse à rien de ce qui intéresse les autres . il a une très haute opinion de lui-même, et, semble-t-il, non sans raison…

La détresse le conduit à commettre l'irréparable, et il entraine malgré lui dans son sillage sa famille et ses amis.

Tous les personnages souffrent dans ce roman : de maladie, de traitrise, d'indigence.. Et malgré tout, le lecteur a plus d'opportunité de cogiter que de se morfondre. C'est une lecture lente, parce que tout est matière à s'arrêter pour réfléchir.

Le roman fait alterner des dialogues qui sont très théâtraux et les longs passages analytiques.
La traduction de l'édition présente laisse à désirer (гимназия n'es pas le gymnase mais le lycée, on comprend donc mieux qu'une jeune fille le quitte avant la fin de ses études!) et mes connaissances en russe ne sont pas suffisamment précises pour déjouer tous les pièges…

Enfin, et grâce à Nastasia-B, le petit inspecteur Porphyre Petrovich, plus rusé que ballot, s'est définitivement incarné sous les traits d'un future conducteur d'une 403 vintage!

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Le début du roman de Dostoïevski est étrange, un peu démentiel, un
étudiant, Raskolnikov, un intellectuel fier de sa condition, un être supérieur, pense qu'il est au dessus des lois qui sont faites pour les petites gens. Avec cette idée folle, il s'apprête à tuer une vieille usurière pour la dépouiller mais rendre aussi service à la société. Il ne pense pas commettre un crime ! Enfin quoi, y a-t-il des crimes qui n'en sont pas ?
Mais la réalité va être bien différente notre assassin n'assume pas ! Obsédé, il perd le sommeil, déambule, revient sur les lieux du crime, son esprit vagabonde, il ressasse et délire. Petit à petit il lui vient l'idée de se dénoncer et c'est Sonia la douce, la pure qui va lui donner ce courage et finalement le sauver.

Une profonde et très forte description de l'âme humaine, de ce criminel repentant nous entraine dans les tourments physiques et psychiques de la déraison et du délire de Raskolnikov. Dostoïevski nous harcèle avec cette analyse détaillée, troublante, qui nous « étripe » et nous happe dans l'âme du criminel, c'est la grande force de Dostoïevski. Son écriture est saccadée, les mots forts et choquants s'adaptent aux personnages qu'ils habillent à merveille tels les miséreux, les ivrognes, l'obsédé Raskolnikov et les coeurs purs comme Sonia.
Dostoïevski aborde les thèmes de culpabilité, châtiment et rédemption par la souffrance, il nous renvoie face à nous même.
J'ai aimé la force de ce roman, même si j'ai déploré, à mon humble avis, quelques longueurs.



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Malgré le côté mélo de jeunes filles pauvres mais jolies, propres et instruites secourues par de riches veufs, j'ai bien aimé en arrière plan les scènes de tous les jours à Petersbourg, intéressé également par l'évocation d'unions libres et d'émancipation des femmes.

C'est aussi l'histoire du jeune désaxé Raskolnikov, étudiant en droit défendant la thèse que certaines personnes supérieures à la loi peuvent impunément faire couler le sang et en face de lui, le caustique juge d'instruction Porfiri Pètrovitch qui met une pression à rendre fou le criminel, voir le lecteur lui-même!

Un peu longuet, j'ai préféré Anna Karénine.
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Tourmenté, solitaire, taciturne et irascible, le jeune Rodion Raskolnikov a été contraint d'abandonner ses études de droit par manque d'argent. Mais au lieu d'essayer de les financer en donnant des cours ou en acceptant des traductions, il préfère s'enfermer dans la minuscule mansarde qui lui sert de chambre, à broyer du noir et à élaborer de sombres théories sur l'humanité. Ses réflexions le mènent à penser que les hommes peuvent être rangés dans deux catégories: celle du "troupeau", de la masse qui obéit et se contente de peu et celle des Grands Hommes voués à un destin d'exception. Et, si par malheur, un de ces grands hommes serait empêché d'accomplir son destin par la misère, rien ne s'oppose à ce qu'il commette un crime pour sortir de sa mauvaise passe. Supprimer un être vil et malfaisant et s'emparer de ses biens serait même grandement profitable à la bonne marche du monde.
Fort de ses convictions, Raskolnikov met au point le projet d'assassiner Aliona Ivanovna, une vieille usurière pingre et mauvaise. Après moult réflexions et atermoiements, il se rend donc chez elle, la tue à coups de hache, se voit obliger d'occire sa soeur rentrée prématurément et s'enfuit en emportant une bourse et quelques objets. Cependant, une fois son forfait accompli, pour Raskolnikov, le choc est rude entre la théorie et la réalité. Malade physiquement et mentalement, le jeune homme assume difficilement son acte. Et ni son ami Razoumikhine, ni sa soeur, ni sa mère, malgré toute leur affection ne peuvent le secourir. D'autant que Porphyre Petrovitch, le juge chargé de l'affaire joue au chat et à la souris avec lui, le menant de la paranoïa aux portes de la folie.Son salut viendra-t-il de Sofia Semionavna, timide jeune fille, obligée de se prostituer pour nourrir sa famille?


Ah! La littérature russe! Elle intimide, elle peut même effrayer le plus téméraire des lecteurs...Et pourtant, qu'il est plaisant et facile de lire DOSTOÏEVSKI et de suivre Raskolnikov dans les rues de Saint-Pétersbourg. On y ressent l'âme russe telle qu'on se l'imagine, le ton est mélodramatique, les sentiments sont exacerbés, la gestuelle outrée. Les femmes pratiquent l'abnégation et le sacrifice comme un art de vivre. Elles ne s'inquiètent pas, elles deviennent folles, réellement folles. Elles ne pleurent pas, elles sanglotent, crient, hurlent même.
Raskolnikov, sombre et tourmenté, est un être orgueilleux, sûr de sa valeur et de son bon droit, mais qui va faire la découverte de sa condition d'homme ordinaire. Il n'est pas sympathique, il énerve, fait fulminer le lecteur et l'on se demande comment il réussit à s'attacher si fidèlement Dounia ou Sofia, jeunes filles bonnes et dévouées. A force d'amour, la soeur vertueuse et surtout l'amie pervertie par la misère sauront amener Raskolnikov a accepté son châtiment.
Car, outre une réflexion philosophique sur le Bien et le Mal, le crime, la culpabilité et la rédemption, Crime et châtiment est aussi une peinture de la Pétersbourg tsariste avec la misère pour toile de fond, les quartiers populaires, les logements insalubres, l'alcoolisme, la maladie qui sont l'apanage des classes populaires des bas-fonds de la ville.
Une belle expérience, riche et intéressante à lire sans hésitation.
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En lisant Dostoïevski, on s'attaque à un monument de la littérature, c'est impressionnant, volumineux, écrit petit, sauf qu'on ne regrette pas une seule seconde de s'être lancé dans cette lecture.

À St Pétersbourg, Rodia Raskolnikov a interrompu ses études faute de moyens financiers. Il donne parfois des leçons, vit seul, quasi reclus. Pour survivre, il met en gage les objets qu'il possède chez une vieille usurière. En allant vendre son dernier bien, la montre de son défunt père, il rencontre dans un café Marméladov, un fonctionnaire alcoolique et pauvre, dont la fille se prostitue, celui-ci lui tient un long discours sur la responsabilité, la lâcheté humaine et le Jugement Dernier. En ramenant celui-ci chez lui, Raskolnikov rencontre toute la famille. Bientôt sa mère lui annonce sa venue, avec sa soeur et le prochain mariage de celle-ci, Raskolnikov enrage et sort se promener. Se lamentant sur son sort, il rêve de tuer la vieille usurière, il ferait un bien meilleur usage qu'elle de cet argent, et ce serait la solution à tous ses problèmes. Durant cette errance, convaincu du bien fondé de sa démarche, il interprète toutes les conversations entendues comme des signes du destin l'encourageant à tuer l'usurière. Tout est prémédité, il passe en revue les moindres détails du meurtre, rien n'est laissé au hasard. le lendemain, après avoir passé sa journée à dormir, Raskolnikov va chez la vieille sauf que rien ne se passe comme prévu, non seulement il tue la vieille mais aussi sa soeur, une femme honnête. Raskolnikov passe le plus clair du roman malade, en proie au délire, soigné par son ami Rasoumikine, sa logeuse. Très rapidement, les policiers remontent jusqu'à lui et attendent le bon moment pour le faire passer aux aveux. Un véritable jeu du chat et de la souris, une guerre des nerfs, s'engage entre les deux camps.

Il est difficile de résumer ce roman si dense sans dévoiler ce qui fait son intérêt, voir peu à peu l'étau se resserrer autour de Raskolnikov. Dostoïevski aborde ici des questions éthiques fondamentales : que se passe-t-il dans un esprit criminel ? Qu'est-ce-qui le distingue des autres ? Il y a-t-il une justification, le mobile du crime peut-il être une noble intention ? Quels rôles jouent à la fois la conscience, l'ordre moral, la justice et la peur du châtiment ? Une forme de rédemption est-elle possible ? Dostoïevski va même plus loin en posant la question de la nécessité et de la légitimité du meurtre, entre le crime commis par un meurtrier et pour lui, la guerre, crime collectif légitimé par l'Etat.

Je ne m'attendais pas à passer un si bon moment de lecture, même si j'ai parfois confondu certains personnages, je revenais un peu en arrière et hop tout revenait dans l'ordre ! Avec la satisfaction en prime d'avoir lu un pavé et un grand classique !!

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CONFESSION
Quoi? Seulement trois étoiles pour ce chef-d'oeuvre ?
Je me dois de faire un aveu. Je me suis montré vaniteux en lisant "Crime et châtiment". Qui ne connaît ces fameuses listes: les 100 livres qu'il faut avoir lu dans sa vie, les incontournables de la littérature etc.
Et bien, je me suis fait piéger et je dois le confesser, je pense bien avoir lu ce Dostoïevski avant tout pour pouvoir me dire et dire, voilà, moi, je l'ai lu.
Et je le regrette, ce n'est pas bien. Ce ne sont pas de bonnes raisons.
Mais j'ai appris et j'espère ne plus me laisser guider de la sorte dans mes choix de lectures.
Désormais, je lirai ce que je sens, ce qui me fait envie quand ça me fait envie. Et j'arrêterai de dénigrer et de snober les lecteurs que je croise avec un livre de Guillaume Musso ou Marc Levy entre les mains. Je les cite eux puisqu'ils sont de gros vendeurs et considérés je pense comme juste d'agréables lectures d'été. Et bien merde! C'est déjà très bien !

Bref, qu'ai-je pensé de "Crime et châtiment"?
Le crime peut-il dans certaines circonstances se comprendre, se justifier ? Y a-t-il pire que la condamnation par la justice ?
Je me suis perdu quelquefois, les personnages sont multiples, complexes... mais rien que pour l'épilogue avec Sonia qui est juste exceptionnel .... Mais chuut...

Je dirai qu'au delà de mon mea culpa, je suis très content de l'avoir lu évidemment mais je me fais la promesse d'éviter de la ramener en disant: "Quoi, tu n'as jamais lu Crime et châtiment de Dostoïevski ? Mais quel manque à ta culture."
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