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3,71

sur 376 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ayant lu cet opus en Anglais , j'ai attendu que la version française sorte pour livrer mon impression .
Ellroy je l'ai découvert il y a 19 ans , et depuis je suis fidèle à cet auteur hors norme .
Cette histoire inspirée d'un pan de l'histoire américaine est à la mesure de son talent .
Entre n'importe quelles mains çela aurait abouti à un magma informe , à un livre de supermarché .
Ellroy a en lui la formule qui élève au plus haut ces compositions .
Cet opus c'est comme un opéra tragique , plein de politique , de corruption , de violence , de personnages hors normes ...
Je ne suis pas adepte des spoliers , je me contenterai de dire qu'ici les lecteurs vont retrouver des visages connus , dont on a fait la connaissance dans la bibliographie d'Ellroy .
Il les confronte à des êtres de chair et de sang , qui étaient sous le feu de l'actualité à l'époque .
Il fallait qu'il aborde la période de la 2 eme guerre mondiale , et ces çonsequences aux usa .
Son traitement du calvaire des japonais américains après Pearl Harbor s'avère sans pitié .
Ellroy n'a jamais cherché l'effet choc , comme dans 90 % de la production de thrillers .
Lui préfère miser sur une rigueur impressionnante sur le plan historique , avec un univers qu'il fait revivre avec une maestria confondante .
Il y a en lui un amour de cette époque , qu'il partage avec le lecteur tout au long de ces pages , à un point tel que l'on retrouve le bonheur de lecture de la quadrilogie qui l'a fait connaître .
Los Angeles sous sa plume c'est un monstre qui nous avale , un univers ténébreux , sans aucune règle , ou la loi du plus ignoble triomphe .
A la rigueur historique répond une connaissance exhaustive de cette ville , qu'il aime tant , et qu'il déteste en même temps .
Tout le paradoxe d'Ellroy réside dans cette ambivalence , que l'on retrouve dans chaque passage de ce nouvel opus .
Les amateurs de thrillers chocs ne trouveront peut être pas leur bonheur avec cet opus qui s'impose comme le nouveau sommet d'une bibliographie déjà exponentielle.
Un bijou ultra noir , qui met mal à l'aise , et qui est addictif , comme seul Ellroy sait le faire .
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Dans le lent écueil des émotions et des convoitises s'écoule le crépuscule de Los Angeles. Un sentiment glacé étreint la crête des collines peu propice aux vivants. Semblable à une danse lente, la pavane d'un rêve défunt, le livre de James Ellroy ondoie, déferlante régulière et rythmée.
L'Histoire étreint les protagonistes, les lamine, les essore, les embrasse et les rejette. le roman se déroule dans un court laps de temps juste avant et après l'attaque de Pearl Harbor. Les Etats-Unis vont entrer en guerre. Dans un frénétique dérèglement de tous les sens, les femmes et les hommes du récit, personnages principaux ou secondaires, imaginaires ou réels, abdiquent de leur âme ou du peu qu'il leur en reste. Ce sont des plantes vénéneuses qui s'entredévorent. Les plus fragiles et « innocents « auront leur part. Leur Part d'ombre. Ce n'est même plus survivre, c'est essayer de s'arracher au tourbillon infernal de la boite à Pandore. Ellroy l'a ouverte. En sort comme toujours : la terreur, la corruption, l'argent, le sexe, le pouvoir, les manipulations, les minorités, le racisme, la religion, la violence, la rédemption, l'amour et la mort.
L'écriture serrée, limpide, plus classique (certains trouveront plus banale ?) est toujours aussi brillante dans son intelligence et sa construction. Elle semble effectivement débarrassée du foisonnement, du tumulte, de l'outrance pour ne garder que la substance vitale. le rythme du livre est une course de loup. Une cadence soutenue, ample et silencieuse ; qui ne lâche rien.
Parlons, en autre, des phrases, des mots répétés ; parfois dans un même paragraphe. Outre le tempo linguistique, elles soulignent la réflexion des personnages, leur impuissance parfois, leur satisfaction aussi. Point de rabâchage. le staccato des mots égrenés. Une litanie obsessionnelle qui tourne à l'incantation. Car ils sont tous obsédés ; ils et elles. Obsédés par leurs amours, leurs haines, leur foi, leurs chimères, leur loi, leurs vices. Ils sont obsédés par L.A., ville des mirages.
Dans ce livre aucune distance entre l'action et le ressenti des personnages. C'est la même cadence, le même niveau d'écriture. L'immédiateté du récit vous met dans le rôle du double invisible. Vous êtes dans leur tête, dans leur coeur et dans leurs gestes.
On les retrouve tous dans la jeunesse et pour certains dans la genèse de leur existence littéraire. Celles et ceux qui sont dans les deux séries d'Ellroy : le Quatuor de Los Angeles et Underworld USA.
Dans Perfidia les trois pivots du récit sont :
Dudley Smith, figure emblématique du LAPD, Monstre parmi les monstres. En passe de devenir une sorte de légende urbaine. Les plus belles pages romantiques sont pour lui.
William H. Parker, son rival au sein du LAPD, soumit à ses tentations, son idéal et à sa rédemption impossible.
Katherine Lake : j'écrivais pour le Dahlia noir qu'elle se sauvait et se croyait sauvée. Dans Perfidia, elle commence cette ascension.
Et la pierre de soutènement :
Hideo Ashida : Jeune docteur en biologie et criminologie, japonais, travaillant au sein du LAPD en cette période qui va voir la spoliation, l'arrestation et l'internement dans des camps d'une majorité de la population japonaise de Los Angeles. Ashida peut être vu comme était Upshaw dans le Grand Nulle Part. le coeur révélateur, la figure emblématique, la symbolique à la fois accusatrice et expiatoire de tous les autres et de cette ville. Et comme Upshaw, Ellroy en fait un personnage attachant, un type malgré tout « bien ». Evidemment, il cherche à sauver sa peau au sens propre et figuré. Ellroy lui confère une forme de pureté originelle même dans ses doutes et ses trahisons.
Et puis il y a tous les autres : Claire de Haven, Buzz Meeks, Blanchard, Bleichert, Jack Webb, Ward J. Littell, etc… Convoqués pour le festin.
La grande force de James Ellroy, outre un talent – et beaucoup, beaucoup de travail – inné pour narrer une histoire, est d'insérer dans un déferlement de bassesses, des joyaux de douceur, de bonté et d'amour romantique idéalisé et passionné. C'est dans ces moments-là que je le trouve le meilleur.
J'ajoute, bien sûr, car cela va de soi avec Ellroy, que ces quatre personnages principaux ont un sentiment de supériorité issu de leur grande intelligence et lucidité ; ce qui ne les empêche pas de faillir et parfois de chuter momentanément.
Les femmes sont magnifiques, d'une justesse troublante. Ce sont des personnages féminins forts, perdus, combatifs, avec un regard sans concession sur les hommes.
Les hommes sont des vautours, des loups et des agneaux. Tous sont assujettis à cette ville pieuvre, qu'on imagine ne pouvoir s'épanouir, grandir que dans la violence, le sang et l'ordure.
Grand travail de traduction de Jean-Paul Gratias. Tout est en subtilité, finesse dans ce dernier James Ellroy. Et j'ai failli oublier l'ironie et le grotesque saupoudré tout le long de ce volumineux roman, ce qui ajoute un parfum cocasse. Cette horlogerie bien huilée vient d'une traduction qui pour moi « coule de source ».
Perfidia, premier roman de la nouvelle tétralogie de James Ellroy. Pépite incandescente dans l'orbite des nuits blanches du roman noir.

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Du laid, du très laid. Comme on l'aime chez Ellroy. Une construction méticuleuse du récit écrit comme à la mitraillette avec des phrases courtes. Et puis sa recette de toujours: faire bouillir le lecteur dans le bain le corruption et de racisme qui semblait régner au sein de la police de Los Angeles (le LAPD) du début des années 40 à la fin des années 60.

Hawaï, le 6 décembre 1941. L'armée impériale nippone détruit la base américaine de Pearl Harbor. Juste avant, à Los Angeles, la famille Watanabe est retrouvée morte dans leur maison. La mise en scène laisserait penser à un suicide collectif. Un courrier trouvé sur place, écrit en kanjis, conforte cette thèse tout en dénonçant l'attaque nippone à des milliers de km de là, mais avant qu'elle n'ait eu lieu!
Comme toujours Ellroy intègre un contexte historique très prégnant dans ses histoires. de la grande histoire jusqu'à l'anecdote: même si les dégats furent mineurs, des sous-marins japonais ont réellement fait régner la terreur sur les côtes californiennes!

De plus, Ellroy s'empare volontiers de personnages réels pour les associer aux siens.
Le tout se complaît souvent dans le côté sulfureux des personnages: homosexualité, corruption, violence, drogue et sexe. Que penser par exemple du jeune J.F. Kennedy ou de l'actrice Bette Davis en 1941? Il suffit de cocher le bon mot dans la liste ci-dessus: S.....

Au premier rang de la floppée de personnages présents dans cet ouvrage et que l'on trouvera par la suite dans "le quatuor de Los Angeles", un Irlandais à l'accent chantant, le plus redoutable et le plus corrompu des flics de LA. J'ai nommé Dudley Smith: tout en réflexion et action. Ses moyens: la connivence et la violence.

Les autres personnages gravitent autour de sa personne. Craint, admiré et haï: Dudley Liam Smith . Ellroy l'emploie dans les meilleures scènes.

Le seul bémol à ces louanges viendra de la lecture du journal de K. Lake qui, intercalé dans le flux des lignes narratives, m'a semblé moins intense que les autres. Cette jeune femme prête à tout s'englue dans des idéaux parfois contraires et l'on sombre d'ennui avec elle.

Enfin, j'ai relevé que le slogan "America first" faisait des ravages, non seulement aujourd'hui mais aussi à l'époque du récit. de très nombreux Japonais vivants à L.A. ont subi des privations de liberté, des rafles, la confiscation de leurs biens ou pire. Ellroy en fait le coeur de son intrigue: des listes arbitraires ou pas de suspects japonais sont l'un des sujets du livre.
En 1941, les services de police et les fédéraux du FBI de M. Hoover craignaient des complots japonais. Alors, tous les moyens étaient bons pour briser "la cinquième colonne" à LA.

Comme toujours, un roman d'Ellroy est instructif et dérangeant. Vivement la suite!
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Ah ! James ! Bravo ! Merci quelle Maestria ! 800 et quelques pages de pur bonheur, un sens du récit qui a fait ta notoriété, une galerie de personnages de dingues ! Tous frappés, fragiles, torturés, sur le fil, perdus, égarés entre les bassesses, la grandeur d'âme, le sens du profit, cette Amérique fracassée par le bombardement de Pearl Harbor, cette vindicte contre les japonais, ces griefs ancestraux entre les chinois et les japonais.

Et cette ville de Los Angeles, tentaculaire, semblable à un immense réseau cérébral dans lequel se croise tous les protagonistes et dans laquelle se tend des pièges, des embuscades, des rencontres amoureuses, cette ville semble être le personnage principal du roman et pourtant, le grand James nous sort des portraits de femmes magnifiques vénéneuses et sensuelles, une grande réussite.

James a grandi, mûri, il fait fi de la violence omniprésente et un peu caricaturale dans certains de ses ouvrages, il sort des phrases ciselées au laser ou au fusil à pompe Ithaca, c'est selon.

Pour ne pas finir, l'intrigue est superbe, les personnages sont superbes, c'est dans une certaine mesure le Chinatown de Polansky en livre.

C'est l'été, au lieu de lire un polar, lisez un chef d'oeuvre.

James après son oeuvre culte, nous fait le coup du rachat de la franchise Star Wars par Walt Disney, il nous sort l'épisode 8, dernier prélude en date de son quatuor de Los Angeles, sauf que lui il n'a rien vendu, il s'est offert la place de meilleur auteur de polar dans mon Panthéon.


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un pavé de 910 pages ou on retrouve les héros du quatuor de los Angeles pendant la seconde guerre mondiale alors qu'il sont beaucoup plus jeunes. une intrigue qui mélange personnages réellement excitant et personnages de fiction. et d, autres qu'on retrouvera dans le Dalhia noir, et le grand nulle part..ce qui avec la trilogie nous fera découvrir les personnages évolue sur une période de trente ans.
une intrigue plutôt noire bien mène. au climat oppressant
passionnant.👍
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Eeeeet me voilà de retour avec James Ellroy, que j'avais délaissé depuis plusieurs années sans m'en rendre compte, en dehors de ma lecture du recueil de nouvelles et d'articles Destination Morgue l'an dernier. J'ai travaillé sur Ellroy pendant de nombreuses années à l'Université, et lorsque Perfidia est sorti, j'avais besoin de faire une pause, je venais à peine d'avaler ses précédents mastodontes... Mon appréciation mitigée du roman Underworld USA et celles de certains détracteurs de Perfidia m'avaient également influencé. le principe même d'un nouveau Quatuor préquelle au Quatuor de Los Angeles et à la Trilogie Underworld USA, où l'on retrouverait moult anciens personnages ellroyiens, mais dans le contexte de la seconde guerre mondiale, à Los Angeles, me semblait à la fois génial et casse-gueule : J'avais peur qu'en mettant à nouveau en scène des personnages dont on connaissait déjà le sort, réglé dans ses autres cycles, cela tue tout suspens et fasse de l'aventure une lecture moins passionnante... Je trouvais aussi que restreindre le décor à Los Angeles après s'être aventuré aux quatre coins des US et même du globe dans la trilogie Underworld USA ne fasse effet de régression... J'avais tort, et voir l'Ellroyverse convoqué par l'auteur, qui multiplie les clins d'oeil et allusions au devenir de ses personnages, en plus de les asseoir dans un contexte tout nouveau, fut un vrai régal. Sur une bonne partie du roman, j'avais l'impression de me régaler autant que lors de ses sommets passés, le Grand Nulle Part, American Death Trip... Perfidia est plus imparfait et je le rangerais davantage aux côtés de L.A. Confidential ou American Tabloid. Nous sommes en décembre 1941, Pearl Harbor va arriver, et avec cette attaque, une hystérie japanophobe qui va s'emparer du pays, conduisant à l'internement de toute la population nippone par les américains... En parallèle, une enquête sur le meurtre maquillé en suicide collectif de la famille Watanabe, une famille de japonais, essaie tant bien que mal d'avancer...

Il y a rien de moins que 4 protagonistes : Hideo Ashida, scientifique japonais du LAPD secrètement homosexuel (), qui est le seul japonais de L.A. et du LAPD, avec sa famille, à posséder une sorte de passe-droit (mais pour combien de temps ?), faisant en sorte de se révéler indispensable, indéchiffrable, et sachant manoeuvrer parmi le réseau tentaculaire des personnages d'Ellroy. Son personnage sera sans doute récurrent tout au long de ce nouveau Quatuor, et l'on se fait d'avance une joie de lire la saga via son prisme. Il rejoint le podium des meilleurs personnages d'Ellroy. Il y a ensuite Kay Lake, mythique femme fatale du Dahlia noir, dont on suit le journal. Ces passages sont les plus rébarbatifs du roman, et je rejoins tous ses détracteurs. le personnage est d'un nombrilisme qui finit par être insupportable, et sa voix ne ressemble que trop à celle d'Ellroy en interview, comme cela peut parfois lui arriver, surtout avec les personnages féminins. Ce n'est pas pour rien qu'il a largement gommé sa présence du prochain opus, La Tempête qui vient, que j'ai hâte de dévorer. Je subodore qu'il a eu vent de l'appréciation plus que mitigée de ses passages, à la fois des lecteurs et de son éditeur américain. Mais suivre Kay Lake en 1941, plusieurs années avant le Dahlia noir, a tout de même son intérêt et son lot de surprises : Nous découvrons le début de ses relations avec Lee Blanchard et Bucky Bleichert, triangle que tous les lecteurs du Dahlia noir connaissent. Ellroy ne s'arrête pas là, et la fait côtoyer des personnages que nous n'aurions jamais imaginés : Elle vit une passion torride avec . Kay se retrouve également infiltrée dans le milieu communiste de par une mission qui lui est donnée par William H. Parker, futur capitaine du LAPD et 3e protagoniste du roman, ce qui lui donne l'occasion de rencontrer . Jamais on n'aurait imaginé ces rencontres de personnages, et l'on se retrouve un peu comme un fan de Marvel face à Ellroy qui crée de nouveaux liens entre tous ses protagonistes de ses différents romans auxquels on n'avait jamais pensé... le point de vue de Kay, qui fantasme sur tous les hommes du roman (Dudley, Parker et Ashida compris) réaffirme l'univers romantico-sexuel d'Ellroy que l'on apprécie tant. William H. Parker ensuite, est un protagoniste assez motivant et réussi : On le voit lutter avec l'alcoolisme, se frotter aux huiles qui lui sont supérieures () qui hésitent encore à le nommer chef du LAPD. Il tentera de résoudre l'affaire Watanabe avec Ashida, de démasquer les magouilles immobilières qui la cachent, de vaincre son alcoolisme, de dompter ses fantasmes à la fois pour Kay et pour une certaine Joan Conville qui le hante et qui sera apparemment de la partie dans La Tempête qui vient. Son personnage vertueux, qui s'oppose constamment à Dudley Smith, demeure étonnamment passionnant. Et enfin, 4e mais pas des moindres, Dudley Smith en personne... Un des personnages les plus mythiques de toute la geste ellroyienne, flic corrompu omniscient, omnipotent, démiurge de cette Los Angeles qui se vautre dans la fange, qui était présent dans le Grand Nulle Part, L.A. Confidential et White Jazz... Ellroy nous livre un quart du roman de son point de vue, et c'est un véritable régal, sans doute les meilleurs passages, avec l'enquête sur les Watanabe par Ashida, Parker ou Dudley lui-même. On voit pour la première fois Dudley magouiller de sa perspective, tirer constamment les ficelles, organiser des casses et autres règlements de compte qu'il va maquiller ensuite... Pour tout fan d'Ellroy, c'est un vrai cadeau, un bonheur constant. Malgré tout, on découvre un Dudley vulnérable, amoureux de Bette Davis, puis , avec une incroyable révélation digne d'un Alexandre Dumas, Ellroy en fait

Et les clins d'oeil ne s'arrêtent pas là. D'autres personnages mythiques d'Ellroy sont présents parmi les secondaires. Encore une fois, l'on a qu'une hâte, lire les tomes suivants, et rencontrer à nouveau tous ces personnages cultes, ainsi que d'autres qu'on espère revoir... (Pete Bondurant ? Kemper Boyd ? Danny Upshaw ? Ed Exley ? On y croit !!)

Ce que j'ai également particulièrement apprécié, et qui n'était pas forcément évident, est que ce nouveau Quatuor possède sa propre atmosphère, propre à l'époque dépeinte : On vit ainsi les blackouts hallucinants liés à la guerre (notamment lors d'un chapitre fameux où Ashida navigue en sous-marin dans une L.A. nocturne de mort), l'internement massif des japonais avec plusieurs descriptions là-dessus et l'assurance que cela va s'amplifier en 1942, donc dans le tome suivant... Ellroy n'est pas non plus aussi strictement cantonné à Los Angeles qu'annoncé, et l'on déborde vers la frontière, Tijuana, comme il avait pu le faire avec le Dahlia noir. Un nouvel antagoniste du nom de Carlos Madrano charrie avec lui tout un univers mexicain que l'on espère retrouver dans les tomes suivants. Les figures politiques de l'époque sont également là et on les découvre parfois : Fletcher Bowron, Fiorello de la Guardia, Franklin Delano Roosevelt et Eleanor...Ellroy a vraiment réussi son coup : Ce nouveau cycle est pour ses fans, des retrouvailles gigantesques avec toute sa galerie de personnages, déplacés dans un contexte qui lui est inhabituel et qu'il veut dénoncer, et c'est vraiment formidable de tous les retrouver. Avec évidemment comme risque que ce nouveau Quatuor soit totalement illisible pour qui n'a pas lu ses précédents romans, puisqu'il y a sans cesse des clins d'oeil sur les personnages suivis ou rencontrés.

Voilà. 910 pages de régalade, hormis quelques passages moins réussis avec Kay ou certains délires de Dudley, où en fait on reconnaît trop Ellroy lui-même (les délires relatifs à la gent canine...). Mais globalement, j'étais en pleine extase : Je n'arrêtais pas de ronchonner depuis plusieurs années concernant Ellroy, en ayant une idée fausse de ce nouveau Quatuor, me disant qu'il avait écrit ses meilleurs romans dans le passé et qu'il refaisait désormais la même chose en moins bien. Je me suis planté en beauté. Son style télégraphique-mitraillette m'a une nouvelle fois régalé, et je loue le talent de Jean-Paul Gratias, qui visiblement va arrêter après la co-traduction oeuvrée sur La Tempête qui vient. Évidemment, je vais lire un peu d'autres choses avant d'attaquer le tome suivant, mais je suis vraiment ému de m'être réconcilié avec un de mes auteurs préférés, en balayant ce qui n'était qu'idées reçues ayant la dent dure de ma part... Il devrait envoyer Dudley Smith me régler mon compte à coups de poing américain et de gants lestés de billes de plomb...
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La lecture d'un roman de James Elllroy est d'abord une expérience . Une fois que le style et le rythme particulier de l'auteur californien est acquis il faut encore assimiler un grand nombre de personnages , de premier ou de second plan mais dont chacun joue un rôle déterminant dans le récit . Ensuite il faut se laisser couler dans l'histoire pour mieux essayer de saisir toutes ses subtilités et ses détails , grands et petits qui font la richesse de ce livre .
Que l'on aime ou que l'on déteste Ellroy on ne peut rester indifférent dans ce mélange original de personnages imaginaires et réels dont les rencontres fortuites ou préméditées sont tellement crédibles comme ces petites histoires locales qui côtoient avec vraisemblance l'Histoire des manuels .
Dans ce second Quatuor de Los Angeles on retrouve avec plaisir les principaux instigateurs que l'on a tellement aimé dans L.A.Confidential ou dans American Tabloïd et l'on découvre également de nouvelles têtes savoureuses comme cet insaisissable Dr Ashida . La particularité de cet opus est de se dérouler sur 23 jours seulement – du 6 décembre au 29 décembre 1941 - et de rassembler un nombre aussi important d'événements en si peu de temps avec comme catalyseur l'attaque de Pearl Harbour par les japonais .
Marque de fabrique de l'auteur les salopards pourront vous attendrir quand les « gentils » vous décevrons au détour d'une page où leur fidélité sera mise à rude épreuve . Ellroy ne fait pas de quartier : les flics sont pourris , le pouvoir exécutif local est totalement perverti et xénophobe . L'argent et le sexe font bon ménage comme la corruption et la collusion qui règnent sans partage . Les alliances sont comme la confiance : très éphémères . Au milieu de tout ça une enquête fil rouge nous tient en haleine jusqu'au bout : l'assassinat de la famille Watanabe qui submerge miraculeusement entre les multiples meurtres plus ou moins expéditifs , les trafics divers et variés , les guerres de propagande et bien entendu la guerre en toile de fonds .
Un grand moment de littérature sans aucun doute .



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Gros pavé goûteux, saignant et velu !
Plus de 800 pages de rage rentrée, de violence parfois contenue, le plus souvent explosive, d'hommes fuyant le sommeil à coup de bourbons et d'amphétamines en vente libre. Un portrait percutant et singulièrement nauséabond de l'Amérique paranoïaque post Pearl Harbor.
L'on présente souvent Ellroy comme un polardeux. Certes. Mais sa fameuse première tétralogie le quatuor de Los Angeles (PERFIDIA est le premier volume d'un nouveau quatuor, un préquel, un prélude du premier), suivi de sa trilogie Underworld USA, livrent un portrait saisissant, cinglant des USA. Un auteur halluciné de romans historiques hallucinants.
Bien sur, PERFIDIA repose sur un intrigue policière, une enquête sur un quadruple homicide mais cette investigation sert essentiellement à Ellroy de prétexte pour camper plusieurs personnages dont l'un qui a sa préférence : Hidéo Ashida, jeune technicien de la police scientifique.
Brillant, rigoureux, et tourmenté. Il est Japonais et homosexuel. S'il arrive à cacher ses préférences sexuelles (et il fait bien), il ne peut nier ses yeux bridés, son origine ethnique. Ce qui, en ce Los Angeles hystérique de l'après bombardement de Pearl Harbor, est un poil problématique. Tonton Sam va en effet décider l'internement administratif de ses ressortissants d'origine japonaise, tous suspectés d'appartenir à une cinquième colonne mortifère. Cette politique d'ostracisme institutionnalisé fait le(a) lit(e) de magouilles immobilières poisseuses.
Ellroy a la magie des intrigues emberlificotées et des personnages (plus de 80 dans PERFIDIA) qui se tournent autour, s'entrechoquent, se pulvérisent et s'aiment aussi parfois. La jeune, jolie et rusée Miss Lake, cornaquée par le capitaine de police alcoolique Bill Parker (ayant réellement existé, et qui va finir à la tête du LAPD) va tenter d'infiltrer le milieu gauchiste d'Hollywood. Hidea Ashida essaye de sauver son cul donc, et sa famille sans trop laisser de son âme dans l'affaire, si possible...
Ellroy n'hésite pas à mêler dans son récit héros fictifs et réels. Ainsi Bette Davis, par exemple, est de la fête mais guère fêtée
Et puis... Los Angeles.
La cité des Anges (bien planqués !)
Le L.A des années 40. Décomplexée Antisémite décomplexée. Raciste décomplexée. Fasciste décomplexée. Homophobe décomplexée. Machiste décomplexée... Où l'on constate amèrement que oui, l'histoire est un éternel recommencement.
Mais, sur cette ville, sur ces êtres esseulés, plane une ombre phénoménale : celle de Dudley Smith. Incroyable caractère, personnage clé de l'oeuvre de James Ellroy. Dudley Smith, sombre Janus, provoquant des loyautés indéfectibles nonobstant les pires saloperies dont il est coupable. Il y gagne le sobriquet effrayant de Dudster. Dudley Smith qui magouille tout le temps, partout, avec tout le monde (et surtout les Chinois). Talentueux, violent, drogué et redoutablement intelligent, Smith ne s'embarrasse pas de scrupules, se déleste de l'empathie qui pourrait le freiner dans son destin. Ses digressions , ses paroles, ses pensées, riches et denses, contrastent avec le staccato, sec jusqu'à l'os, Ellroyen. Sujet, verbe, complément et c'est marre. Ce style unique, quasi incantatoire par moment, sert admirablement une intrigue complexe, noueuse et acerbe.
Ellroy est un foutu misanthrope mais il nous livre ici un héros presque positif : Hidéo Ashida et clôt son monumental pavé par une déclaration d'amour.
L'analogie avec l'escalade n'est pas incongrue. La pente est raide, on en a parfois plein les chausses mais la vue flanque le frisson et une fois le sentier parcouru on ne regrette pas les efforts consentis.
Vertigineux !
Lien : https://micmacbibliotheque.b..
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PERFIDIA de JAMES ELLROY
À la veille des frappes japonaises sur Pearl Harbour et la flotte américaine, la police de Los Angeles, le LAPD découvre quatre corps de japonais ( père, mère, fille et fils) alignés, les entrailles à l'air et un sabre posé le long de chaque corps. Tout laisse à penser qu'il s'agit d'un suicide rituel, le seppuku. Mais bien vite les indices s'accumulent dans une autre direction, celle d'un meurtre maquillé. Et compte tenu de Pearl Harbour, de la vraisemblable entrée en guerre des États Unis, la pression est mise sur la police pour que le meurtrier soit …un japonais et vite pour passer à autre chose. Dans ce contexte, sont à la manoeuvre Dudley Smith, origine irlandaise, sergent, prêt à tout pour gagner de l'argent, William Parker, alcoolo, qui vise la place du chef, et l'incomparable Hideo Ashida, as de la police scientifique, brillant mais japonais ce qui dans ces circonstances est tout sauf un atout! Ajouter à ce tableau, une lutte contre les communistes, Claire de Haven et ses copains. Pour les infiltrer, Parker va recruter Kay Lake, aux ambitions certaines et aux appétits sexuels dévorants. Dans cette période bien troublée, chacun avance ses pions au mieux de ses intérêts, les biens des japonais vont être saisis, revendus à bas prix , alors les charognards se préparent tandis que l'enquête piétine.
On retrouve dans ce premier livre du deuxième quatuor de Los Angeles beaucoup des intervenants des livres précédents d'Ellroy, de ces hommes et ces femmes dévorés d'ambitions, shootés à la benzedrine ou alcoolisés à mort, pour lesquels la vie des autres n'a que peu d'importance.
Livre époustouflant dans lequel on retrouve le style flamboyant d'Ellroy fait de phrases courtes et percutantes qui trouveront leur apogée dans le second opus, La Tempête qui Vient.
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Désormais pour lire l'oeuvre d'Ellroy, il faut prendre la peine de se débarrasser de l'emballage outrancier que l'écrivain déploie depuis un certain temps pour la promotion de ses romans. Une composition flamboyante, faite d'excès et de provocations, aussi criarde et consternante que les chemises hawaïennes dont il s'affuble. Il faut se souvenir de l'aura mystérieuse qui entourait l'auteur à l'époque où paraissait le fameux Dahlia Noir roman fondateur du premier quatuor de Los Angeles. Dans un paysage médiatique plus austère, dépourvu de web et de portables, l'emballement littéraire se concentrait principalement sur l'oeuvre au détriment de l'auteur que l'on considérait comme une espèce de monstre raciste et fasciste au fur et à mesure de sa notoriété grandissante. Perfidia doit donc être abordé comme le Dahlia Noir, en dehors du tumulte des interviews superficielles que l'on nous assène depuis quelques semaines et qui ressassent les mêmes assertions que l'auteur s'amuse à mettre en valeur dans un show parfois grotesque. Car que pourrait dire Ellroy de plus qui ne figure pas dans ses romans ? Encore faudrait-il que certains chroniqueurs qui l'abordent aient au moins pris le temps de lire ses romans ce qui est loin d'être garanti. Un selfie, une dédicace et un bon mot, c'est désormais tout ce qu'il faut pour certains d'entre eux. Et Ellroy, plus que tout autre s'en amuse en faisant sa tournée promotionnelle.

Avec Perfidia, James Ellroy rassemble les personnages qui ont hanté les romans du quatuor de Los Angeles et de la trilogie Underworld USA afin d'entamer une seconde tétralogie se situant à nouveau à Los Angeles, mais durant la période de la seconde guerre mondiale. Une espèce de préquel destiné à faire le lien avec les évènements relatés dans le Dahlia Noir. Je laisserai à d'autre le soin de compter le nombre de pages ou de dénombrer la myriade de personnages que le roman contient. Ce qui importe c'est que l'écriture aux phrases concises et incisives est toujours bien présente, mais que l'on dénote, en plus, une certaine fluidité qui n'est pas du tout coutumière chez un auteur comme James Ellroy. Cela provient probablement du fait que l'auteur a choisi, pour la première fois, une narration en temps réel, sur une durée précise égrenant chaque journée située entre le 6 et le 29 décembre 1941. Avec cette rapidité dans le déroulement de l'histoire, on perçoit ainsi l'atmosphère frénétique qui émane de chacune des pages du livre. Car outre l'aspect journalier, le fil de l'histoire s'égrène au rythme des points de vue des quatre personnages principaux que sont Dudley Smith, Hideo Ashida, William Parker et Kay Lake. de cette manière, l'auteur nous entraine au coeur d'un maelstrom de rage, de haine et de turpitude beaucoup plus intense que ce que l'on avait l'habitude de lire notamment dans le premier quatuor de Los Angeles. Les intrigues et sous intrigues s'entremêlent dans une confusion savante que l'auteur maîtrise avec le talent qui lui est coutumier. Sur fond d'émeutes raciales, de cinquième colonne perfide, d'enquêtes sabordées et de trahisons en tout genre, le tout dilué dans une crainte de bombardements destructeurs et d'invasions imminentes, vous allez découvrir une ville de Los Angeles détonante où les personnages les plus abjects monnaient déjà l'expulsion, l'expropriation et même l'internement des ressortissants américains d'origine japonaise. Car même s'il ne l'aborde pas de manière frontale, c'est ce pan méconnu et peu reluisant de l'histoire américaine que l'auteur évoque tout au long du récit (Outre Ellroy, Alan Parker avec son film Bienvenue au Paradis et David Gustavson avec son livre La Neige Tombait sur les Cèdres sont, à ma connaissance, les rares auteurs à relater ces tristes évènements). Avec ces déportations, ces internements et ces projets d'eugénisme que l'auteur expose par l'entremise d'hommes de loi, de médecins et de promoteurs véreux on ne peut s'empêcher de faire le parallèle avec les desseins funestes du régime nazi, même si les conséquences n'ont pas été aussi tragiques.

Si Ellroy a pour habitude d'inclure dans ses romans des personnages réels, c'est la première fois qu'il met en scène l'un d'entre eux, parmi les protagonistes principaux. C'est ainsi qu'il romance la vie de William Parker, l'un des plus célèbres directeurs du LAPD dont le quartier général porte, aujourd'hui encore, son nom. Comme bon nombre de ses héros, Ellroy dresse un portrait sombre et ambivalent d'un homme d'une grande intelligence et d'une clairvoyance extrême le contraignant, presque à son corps défendant, à mettre en place de sombres machinations afin de satisfaire sa soif d'ambition que l'alcool n'arrive pas à étancher. Un personnage torturé qui ne parvient pas à s'aimer tout comme son alter égo féminin, Kay Lake.

Avec Perfidia, on ne peut s'empêcher de frissonner à l'idée de recroiser le destin de l'un des personnages les plus emblématiques de l'oeuvre d'Ellroy à savoir le sergent Dudley Smith. On retrouve un flic plus jeune, mais tout aussi dangereux et violent qui effectue avec son équipe les basses oeuvres du LAPD pour le compte de cadres corrompus. Séduisant, machiavélique, on décèle chez cet homme quelques fêlures qui rendent le monstre plus présentable. En évoquant certains pans de sa jeunesse en Irlande, on peut deviner l'origine du mal qui a façonné un personnage qui recèle encore quelques brides d'humanité.

Le principal défaut de Perfidia est qu'il s'agit d'un préquel et que, de ce fait, le lecteur connaît déjà la destinée de la plupart des personnages qui hantent cette histoire ce qui dessert parfois la tension narrative de certaines péripéties du roman. D'autre part, on peine à comprendre le sens de l'apparition d'Elisabeth Short accompagnée de son véritable géniteur, dont je tairai l'identité afin de vous en laisser la surprise. Néanmoins cette surprise s'avère plutôt embarrassante. En effet, il est difficile désormais de croire que ce personnage soit absent du fameux roman le Dahlia Noir. le fait de découvrir le point de vue de Kay Lake sous la forme d'un journal consigné au musée du LAPD reste également très déconcertant et peu crédible dans la forme où il est rédigé. Là aussi on peine à comprendre l'utilité d'un tel style de narration. Il faudra peut-être attendre la suite de cette tétralogie pour entrevoir le sens de ce qui apparaît à ce jour comme des défauts mineurs.

Parce qu'il ne faut pas se leurrer, Perfidia considéré par l'auteur lui-même comme son meilleur roman prouve sans l'ombre d'un doute qu'Ellroy reste l'immense écrivain qu'il n'a d'ailleurs jamais cessé d'être n'en déplaise à ses détracteurs. Perfidia c'est un livre d'une force brute dégageant une telle intensité dramatique qu'il mettra à terre le plus blasé des lecteurs. Un véritable KO littéraire.
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