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EAN : 9782919067312
218 pages
éditions Vagabonde, 2021 (04/02/1921)
3.75/5   2 notes
Résumé :
« Quand il écrit sur lui-même, / il écrit sur un autre. / Dans ce qu’il écrit, / il a disparu. »
De son « Opus incertum » à « Éventuellement », qui clôt ce recueil, Hans Magnus
Enzensberger fait de l’acte poétique l’expression du sens mystérieux des aspects de
l’existence, associant continûment de sombres éclats à des visions familières, mêlant les
images des orages et des éclaircies, des aubes et des nuits jusqu’à leur point de
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Une précieuse incursion dans la facette la moins connue de l'art acéré du grand penseur allemand contemporain : celle de sa poésie joueuse et malicieuse, ironique et incisive.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2021/03/14/note-de-lecture-poemes-1980-2014-hans-magnus-enzensberger/

Autre reflet d'une vie et d'une pensée foncièrement multiformes, la poésie de Hans Magnus Enzensberger, même lorsqu'elle prend les atours du bucolique, du lyrique et de l'intime, demeure toute de narration et de spéculation. Comme dans les poèmes de « Mausolée », pendant poétique et quasiment épique de « La structure des révolutions scientifiques » (1962) de Thomas S. Kuhn, avec ses évocations fiévreuses et caustiques des grandes figures du progrès en sciences, qui précédaient ceux de ce volume, chaque poème ou presque est doté d'une ou de plusieurs intentions : là où toutefois le risque de l'essai en vers aurait peut-être piégé d'autres auteurs moins avertis ou moins talentueux, c'est ici une malice sans fin qui se déploie, utilisant pour carburant les matériaux les plus inattendus, souvenirs d'enfance et comptines célébrissimes, fables détournées et relectures de classiques allemands ou étrangers, anecdotes mythologiques et saynètes historiques, clins d'oeil enfuis aux anciens camarades du Gruppe 47 et signes annonciateurs des guerres civiles moléculaires, ou encore percées géographiques soudaines et faits divers feutrés. Au-delà de leur beauté et de leur pertinence propres, ces poèmes proposent aussi une heureuse perspective sur la manière dont se forgent les concepts chez le penseur allemand, et sur son art bien particulier d'entrechoquer le scientifique et l'imaginaire, les données objectivées et la spéculation intellectuelle expérimentale, pour produire son regard si acéré sur l'histoire moderne et contemporaine, sur la manière dont la science néglige son rôle politique (avec toujours cette secrète et étonnante convergence avec le travail d'un Kim Stanley Robinson, dans un tout autre domaine apparent), ou sur la manière dont les figures héroïques – victimes notamment de cette médiocrité qui le hante – ont perdu une trop importante partie de leur puissance combattante face au capitalisme tardif, plus que jamais dévastateur dans son refus de prendre réellement en compte ses propres effets pervers.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Destinataire inconnu — Retour à l'expéditeur



Merci beaucoup pour les nuages.
Merci beaucoup pour le Clavier bien tempéré
et pourquoi pas, pour les bottes d'hiver bien chaudes.
Merci beaucoup pour mon cerveau insolite
et toutes sortes d'autres organes cachés,
pour l'air, et naturellement pour le bordeaux.
De tout cœur merci pour mon briquet, qui ne me lâche pas !
et pour les désirs, les regrets, les sempiternels regrets.
Merci pour les Quatre Saisons,
le nombre «e» et la caféine,
et naturellement pour les fraises sur l'assiette,
peintes par Chardin, ainsi que pour le sommeil,
pour le sommeil tout particulièrement
et, avant que je n'oublie,
pour le début et la fin
et les quelques minutes de l'entre-deux,
et grand merci aussi, si vous voulez,
pour les rats taupiers dehors, dans le jardin.

/traduction de l’allemand de Patrick Charbonneau
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Une question d’âge

La vieille dame appuyée sur sa canne,
que n’a-t-elle enduré !
Les mesures d’aide à l’emploi,
les bombes incendiaires, les calculs des points de retraite,
la « soumission à l’exécution forcée »
(pas si horrible que cela en a l’air,
a dit le notaire en quittant son pince-nez),
sans parler des nombreux baptêmes,
enterrements et dégâts des eaux.

Oh ! Le clignement qu’elle nous adresse
de ses yeux bleu pervenche !
Et son sourire charmant,
d’où vient-il donc ?
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Ceux d'avant



Ils se sont détournés,
tôt ou tard,
l'un après l'autre.
Ils ont détourné les yeux,
imperceptiblement,
puis ce fut
un geste infime
de la main gauche
que nous ne sûmes
interpréter.

Un revers de main,
un salut ironique :
«À vous de voir,
nous laissons tomber.»
Mais qu'était-ce ?

C'est seulement lorsque
nous vîmes le coussin lissé,
la tasse vide, la chemise
sur le dossier de la chaise,
la clé pendue au crochet,
que notre aigreur monta.

«Qu'as-tu?»
Pas de réponse.
Un départ sans reproche
ni regard.
Ils n'ont pas même
éteint la lumière
dans le couloir.

Puis ils se sont
envolés, évanouis
comme avions
dans le ciel,
ou bien éloignés à pied,
dans la neige, sombres,
par les passerelles de rondins,
dans un nuage de poussière .

Nous ne saurons pas
ce qu’ils sont devenus.

/traduction de l’allemand de Patrick Charbonneau
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Le kiosque

Au prochain coin de rue
les trois sœurs entre deux âges
dans leur baraque.
En confiance, elles proposent
à une gentille clientèle
meurtre poison guerre
pour le petit déjeuner.

Beau temps aujourd’hui. Des clodos
qui mangent des biscuits pour chiens.
Dans leurs villas, des propriétaires
étouffant sous leurs tanagras,
et d’autres créatures qui,
ponctuelles, au lever du soleil,
disparaissent dans des banques,

bizarres comme le mammouth
aux défenses recourbées
et la mante religieuse.
Elles ne me gênent pas.
Moi aussi j’aime acheter
chez les Parques.
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Nuremberg 1935
Le soleil de septembre jetait alors de longues,
de très longues ombres sur la prairie de la Wöhrd.
J’avais six ans, mais ma silhouette s’étirait tant que je pris peur.
Impossible pour moi de sauter par-dessus.
Et soudain, elle n’était plus là.
Mon âme, nul ne voulait me l’acheter.
L’air sentait le feuillage et le foin.
Qu’il était loin, l’automne 39.
Insouciante,
la paix s’attardait en chemin.
De la ville ne montait aucune colonne
de fumée. Il faisait froid
à l’ombre des hautes tours.
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Vidéo de Hans Magnus Enzensberger
Hammerstein ou l'intransigeance Marque-page 26-02-2010
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