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sur 307 notes
"Tu verras". Une expression serinée par le narrateur mais qui parle pourtant d'un futur qui ne sera pas. Car contre toute attente, Clément est mort. Il avait 12 ans. Son père nous dit la douleur qui l'habite, ses regrets, son impossibilité à continuer quand ce qui donnait sens à sa vie disparaît. Divorcé, il vivait seul avec son fils qu'il ne savait pas toujours comprendre. Toujours prompt à le reprendre, à pointer du doigt ses défaillances, le père s'escrime désormais à retrouver ces petits riens, à replonger dans le flot de ses souvenirs, coupable de ne pas avoir assez montré son amour.

Malgré les apparences, Tu verras n'est pas un récit autobiographique. L'auteur s'est juste appuyé sur une expérience personnelle où il a failli perdre son enfant, renversé par une voiture. Une expérience forte qui rejaillit dans ce roman poignant où l'auteur a mis toutes ses peurs et ses propres interrogations.

Ecrit à la première personne du singulier, Tu verras est conduit par le père, narrateur de sa propre vie, de ses propres sentiments. Dès les premières pages, le lecteur plonge dans la douleur qui l'habite. Aucun parent n'est prêt à perdre des enfants si jeunes et pourtant Colin doit faire face à cette absence. Chaque geste, chaque objet, chaque son est prétexte à le renvoyer à Clément : un emballage qui traîne dans la voiture, une musique qui passe à la radio,...
Le quotidien n'est que douleur. La vie n'est que douleur. Une douleur et un vide constant que Colin tente de remplir à l'aide de ses souvenirs. Alternant entre le quotidien qui rattrape violemment le père et les souvenirs et anecdotes filiales qui affluent, la narration nous plonge véritablement dans l'horreur du deuil.
Nicolas Fargues traduit la torture de voir l'avenir de son fils s'effacer. Clément ne connaîtra pas l'amour, ni la joie des baisers, ni ces milliers de petites choses qui font les petits bonheurs d'une vie. Clément ne comprendra pas les fameux "Tu verras" quand tu seras plus grand de son père.

Mais au-delà de l'aspect émotionnel de la mort et du deuil, l'auteur se penche particulièrement sur le rôle d'un père, sur l'amour et l'éducation que nous donnons à nos enfants. Au fil des moments avec son fils qu'il se remémore, le narrateur s'interroge sur la manière dont il a élevé son fils, sur ses propres réactions, sur la vision idyllique que nous avons de la parentalité qui s'avère bien différente de la manière dont nous l'appliquons. Colin se montrait détaché vis à vis de son fils : il ne gardait pas ses dessins, ne le prenait jamais en photo. Il avait une attitude assez dure envers Clément qu'il n'hésitait pas à alourdir de sarcasmes pour mieux dénoncer cette façon ridicule qu'il avait de suivre ses copains, de s'habiller comme eux, d'écouter la même musique ridicule. Un père sans souplesse donc qui a, d'une certaine façon, oublié sa propre jeunesse.
Colin se sent coupable et ne s'épargne pas dans les descriptions. Il a oublié ses principes personnels, s'est compromis avec des femmes qu'il n'aimait finalement pas, incapable de donner la priorité à son fils. Il observe la société d'aujourd'hui avec ses nouveaux codes, ses familles recomposées, les jeunes amantes qui n'assument pas les enfants d'une première union, les pères qui tentent de rester jeunes et ne sont que des vieux cons dépassés par leur époque, et les enfants dans tout ça qui doivent faire avec et s'émancipent en secret du poids des parents.

Je n'avais jamais lu Nicolas Fargues. Je suis rentrée dans ce roman avec circonspection, sujette d'apriori un peu "parisien". Et pourtant, ce roman m'a totalement emballé. Scotché même. L'auteur évoque avec une grande force et surtout avec justesse des sentiments pour lesquels le lecteur ne peut ressentir que de l'empathie. L'émotion est présente dans chaque ligne. On vibre à l'unisson du narrateur et on aimerait tant que sa douleur s'allège.
Je n'ai pas d'enfants et la perspective d'en avoir reste pour le moment très lointaine mais ce roman m'a totalement renvoyé à cette position. C'est quoi être parent ? Comment doit-on envisager le quotidien à leur côté ? Que voulons-nous transmettre à nos enfants ? Comment leur montrer notre amour tout en les éduquant de manière juste ? Des questions certainement universelles mais dont les réponses ne sont pas si évidentes. L'auteur ne donne pas de réponses : elles sont à trouver en chacun de nous.

Tu verras est une véritable plongée dans le gouffre du deuil, de toute la douleur dont on ne sait que faire. Une douleur qu'on peut choisir d'affronter ou pas. On peut décider d'arrêter notre propre vie, fuir dans des paradis artificiels pour mieux oublier ou partir à l'autre bout du monde comme Colin. Une fuite qui ne résout rien mais permet peut-être d'avancer. Un peu.
C'est aussi un portrait sans concession des relations d'un père avec son fils, tous deux ancrés dans une époque qui les sépare malgré eux. En analysant la complexité des rapports avec ses conflits de générations, ses incompréhensions, ses silences, Fargues dénonce aussi le poids de la société d'aujourd'hui qui, avec ses conventions, ses évolutions, ses petites compromissions quotidiennes, finit par fausser les rapports entre personnes.

Tu verras est véritablement un roman très puissant qui parlera aux parents comme aux autres. Un roman bouleversant sans tabous, sans pathos dont je regretterais uniquement l'épisode final en Afrique qui ne m'a pas complètement convaincue. L'absence d'un véritable dénouement m' a laissé une impression un peu flottante et presque interrogative sur le sens à donner aux derniers faits.
Un bémol qui ne doit pourtant pas vous empêcher de plonger dans cette histoire !
Lien : http://legrenierdechoco.over..
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J'ai lu de nombreuses critiques élogieuses sur ce livre et appréciant le style de Nicolas Fargues, je ne pouvais pas rater ce dernier roman.
Le thème de la perte d'un enfant ne peut évidemment que nous concerner et nous émouvoir en tant que parents; mais Nicolas Fargues reste très pudique sur ce deuil et garde un oeil très ouvert sur les choses qui l'entourent. le sujet principal est l'éducation difficile des adolescents, l'ingérence inévitable de tout parent puis la culpabilité face à sa façon de vivre (divorce, nouvelles rencontres) et enfin celle face à cette perte cruelle.
En tant que parent, il est difficile de ne pas sortir ce fameux "Tu verras", ces leçons de morale parce que nous voulons le meilleur pour notre enfant. Mais il est si difficile de donner des leçons quand notre propre vie n'est pas un modèle. Un enfant ne put pas sortir indemne d'un divorce. Bien sûr, personne ne peut donner de conseils sur l'éducation et malheureusement les parents reproduisent souvent ce qu'ils ont vécu dans leur propre relation parents-enfant.
Tous ces discours paraissent désormais futiles à Colin qui reste seul face à cette peine. Il sait qu'il a perdu sa plus grande réalisation.
" Cette impression que, quels que soient mes regrets et mes frustrations personnels, quels que soient mes rêves inaccomplis, c' était lui et personne d'autre qui donnait du sens et du goût à mes journées. Que je n'avais pas besoin d'aller chercher plus loin que lui pour me trouver moi-même que mon bonheur, comme on dit, c'était de le voir heureux."
Alors, on peut être un peu surpris par ce voyage en Afrique et la rencontre avec Monsieur Fofana, mais j'y vois la symbolique de chercher une autre raison à cette vie foutue en l'air, un moyen comme un autre de retrouver des forces pour continuer.
Beaucoup de choses restent en suspens dans cette histoire, comme les motifs de l'accident ou le devenir de Colin mais l'importance du livre est dans l'introspection, le chemin parcouru pour assimiler le pire.
Cette fois encore, j'ai beaucoup apprécié le style de l'auteur qui précise les choses, qui détaille son environnement et qui avance progressivement dans la compréhension d'une situation. Il y a bien sûr beaucoup d'émotions mais aussi un réalisme assez cru et moderne.
Lien : http://surlaroutedejostein.o..
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La découverte de cet auteur fut une révélation. le sujet du livre est d'une tristesse infinie et pourtant aucun misérabilisme à l'horizon, seulement un père qui se souvient des moments partagés avec son fils lors de sa petite enfance comme dans la période plus complexe de son adolescence.

Ce père, ni meilleur ni pire qu'un autre, revoit ses constantes récriminations face à ce fils rebelle, sorti de l'enfance sans être totalement entré dans l'âge adulte. L'envie de le protéger des pièges de la vie, comme tout parent responsable, le pousse à le saturer de critiques. Il est conscient que l'expérience personnelle est la seule méthode d'apprentissage, si dangereuse qu'il lui devient insupportable de voir son garçon lui échapper.

Inlassablement, il repasse en boucle, les choses qu'il n'a pas eues le courage de dire ou qu'il a dites de la mauvaise façon, celles qu'il n'a pas pris le temps de faire alors que l'amour qu'il porte à son fils est immense. Comment continuer à vivre des choses banales, quand son enfant n'est plus là ? Toutes ces pensées sont mises sur le papier dans un roman sans chapitres, à l'image de l'existence qui file sans interruption jusqu'à son terme. Ce texte bouleversant sur la relation père-fils, aborde un sujet rarement évoqué en littérature, contrairement à la relation mère-enfant, ce qui le rend d'autant plus attachant. Il dévoile un homme, avec ses faiblesses, ses remords, ses regrets face au gouffre de l'absence.

Tout au long du récit, j'ai ressenti au plus profond de moi le désespoir indicible de ce père amputé d'une partie de lui-même, peut-être la meilleure. Même si je n'ai pas vraiment adhéré à son voyage en Afrique, j'ai éprouvé une extrême empathie pour son immense désarroi, son envie de se retrouver en phase avec Clément en écoutant la musique qu'il aimait tant, même si elle lui "cassait" les oreilles avant... Perdre un enfant, quel que soit son âge, n'a rien de naturel. Les parents ne peut pas accepter l'intolérable, ce qui défie la logique de la vie.

Chacun vit comme s'il était éternel, comme si les malheurs n'arrivaient qu'aux autres, conscients de l'illusion savamment entretenue, mais trop faibles pour résister. Profiter de chaque instant que la vie veut bien nous accorder avec ceux que l'on aime, nos proches, famille et amis. Se détourner des gens toxiques qui empoisonnent notre temps comme notre énergie. Voilà des recommandations dont chacun d'entre nous a conscience sans toujours les mettre en pratique à cause de barrières invisibles que nous nous imposons à nous-mêmes.

Non, ce texte n'est pas un coup de coeur pour moi, bien que terriblement humain, mais un coup au coeur, certainement !
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Un père se souvient.

De tous ces petits riens, ponctuant sa relation difficile avec son fils, ces petits riens qui agacent, énervent, irritent parfois au point de lancer, sans vraiment réfléchir, des mots qui blessent... et qui ne peuvent être rattrapés.

Ensuite vient la descente douloureuse, de n'avoir pas su regarder autrement ce fils, adolescent rebelle, qui n'avait d'autres buts que d'exister. Simplement. A sa façon.

Car désormais, il est trop tard.

Ce livre est empli de sensibilité. C'est un constat, brut, douloureux, une remise en question, de ces questions lourdes qui n'en finissent pas...

Magnifiquement écrit.

4ème couverture :

Mon père me criait de remonter mon jean au-dessus de mes fesses, de cesser d'écouter des chansons vulgaires sur mon iPod, de rapprocher mes coudes à table et de ne pas faire la tête chaque fois qu'il voulait m'emmener au musée. Il ajoutait toujours: "Plus tard, tu comprendras que c'est pour ton bien que je te disais ça, tu verras".

Lien : https://unefeuilleetdesmots...
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C'est un livre poignant, et j'avoue qu'après avoir lu «Le soleil à mes pieds» de Delphine Bertholon et La servante écarlate de Margarett Antwood j'avais besoin d'un livre un peu plus «feel good» et pour le coup avec celui-là ce n'était pas vraiment le cas.. Mais c'est un très bon livre c'est indéniable, il fait sortir beaucoup d'émotions. Il questionne la difficulté d'être parent, de vivre pour soi-même après avoir été père ou mère. Je comprends pourquoi ce livre a reçu beaucoup de prix, l'écriture est très bonne, le récit dans son ensemble est cohérent. Mais ce n'est pas un livre que je vous conseille si vous cherchez quelque chose de léger par exemple. Certains passages sont durs je trouve, mais c'est aussi ce qui fait la force de ce roman. Encore une fois je découvre un auteur, et je ne suis pas déçue par cette lecture. Il se lit très vite, je l'ai fini il me semble en deux jours.
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La douleur de la perte de son fils pour un père.
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Un bon roman sur un sujet difficile. Je ne garde bizarrement pas beaucoup de souvenirs de ce roman, qu'il faudrait peut-être que je relise.
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C'est donc un roman très différent d'autres livres du même auteur, voire douloureux. On pense lire l'histoire des relations par toujours faciles entre un père et son fils ado. C'est en partie le cas... mais le fils vient de mourir.
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J'ai découvert cet auteur au hasard dans la médiathèque. Pour une première je ne suis pas déçue. Histoire émouvante. Je vais découvrir ses autres livres.
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la première partie de ce livre ma plus , le père qui essaye de surpassé la mort de son enfant. J'ai été moins emballé par la suite la rencontre le voyage
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