Il ne fallait pas forcément courir après les idées, s'acharner sur des brouillons, c'était au roman de faire les premiers pas. Il fallait simplement être dans des bonnes conditions pour le recevoir quand il frapperait à la porte de l'imagination. Les mots avançaient vers moi avec la grâce de leur invisibilité. (p 85)
Je critiquais l'étroitesse affective des autres, mais je pouvais commencer à me demander si, sous mes airs concernés, je n'avais pas moi aussi une tendance à traverser la vie d'une manière autonome. Cette solitude qui était la mienne, et que je constatais régulièrement, j'en étais responsable. Je faisais partie de mon époque, ce temps où aucune idée n'est suffisamment forte pour nous lier les uns aux autres. La guerre, la politique, la liberté, et même l'amour sont des luttes devenues pauvres, pour ne pas dire inexistantes. Nous sommes riches de notre vide. Et il y a quelque chose de confortable à tout ça, comme à la beauté d'un endormissement progressif.
"Pourquoi la bêtise est-elle plus mémorable que la beauté ?"
"C'est un hôtel qui a combien d'étoiles ?
- Deux.
- Eh bien maintenant, ça fait trois, si ma fille s'installe avec toi."
J'ai adoré cette phrase. Pendant des mois, j'ai surnommé Louise : ma troisième étoile.
La directrice avait finalement opté pour l'agressivité. C'est toujours la défense des coupables.
"les souvenirs sont une espèce de point d'arrivée; et peut-être sont ils aussi la seule chose qui nous appartient vraiment."
dans la chambre, face à son corps, une image m'a saisi : la mouche. Une mouche posée sur son visage. C'était donc ça la mort. Quand les mouches se posent sur nous et qu'on ne peut plus les chasser.
Les premières fois sont la suprématie des souvenirs.
Que veulent les vieux ? Ils s’isolent lentement, sur ce chemin qui les conduit à la blancheur. Tout ce qui fait la matière des conversations disparaît. Et on est là, comme des veilleurs de chagrin.
La haine des autres a toujours été la meilleure façon de combler sa propre vacuité.