Dans son Petit éloge de l'outre-mer, François Garde raconte que, lorsqu'il était en poste au sein du ministère des DOM-TOM, sa fille de cinq ans annonçait : « Mon papa travaille au ministère des bonnes pommes ». Cette exquise déclaration lui permet de nourrir le début de son chapitre « Manger (et boire) » de non moins succulentes énumérations de fruits, plats et saveurs ; il le conclut par une analyse des vertus comparées des rhums antillais et réunionnais.
Cependant l'outre-mer n'est pas un pays : il n'a pas droit aux majuscules, ni à une référence dans l'index des atlas. C'est une transversale - une diagonale ? un zigzag ? - reliant des îles (seule la Guyane échappe au statut insulaire) devenues françaises par un caprice plus ou moins sanglant de l'Histoire. Antilles, Réunion, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna, Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Terres australes et antarctiques françaises, Clipperton… elles auraient pu battre pavillon anglais ou néerlandais. Elles pourraient aussi s'affranchir, obtenir leur indépendance, pour peu que la majorité de la population le demande.
Le grand mérite de ce petit livre est justement de nous présenter de façon à la fois pédagogique, malicieuse et fervente cette patrie éclatée, les liens plus ou moins paradoxaux qui la relient à la métropole, ceux qui transforment, à leur insu, ces territoires dispersés en entité et ceux que l'auteur a tissés, au fil des postes occupés dans les terres ultramarines, avec ces dernières comme avec leurs habitants. Défauts et merveilles… il ne cache ni les uns, ni les autres. Le chapitre « Marcher » décline sur le mode perecquien du « Je me souviens » les vallées dans lesquelles on s'égare, les gifles des buissons, la boue, le givre, mais aussi les vols de perruches et le thé silencieux de l'amitié.
Le Petit éloge de l'outre-mer fait image, depuis la couverture que balise un merveilleux lambrequin vert d'eau – feston de feuilles et fruits stylisés – jusqu'à la table des matières, cascade d'infinitifs : « Partir – Marcher – Dire (…) Choisir – Écouter – Ne jamais vraiment revenir… »
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Le bleu outremer et les alizés ne se découvrent que sous les tropiques.
Les objets aux autres couleurs locales peuvent s'exporter mais ne trouvent jamais bien leur place en métropole. Les spécialités culinaires n'ont pas non plus la même saveur une fois exportées.
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Il faut aussi que je vous parle de la pluie. Car l'outre-mer est pluvieux. Kerguelen dépasse à cet égard tous les records envisageables. La Guyane compte deux saisons, la petite saison des grandes pluies et la grande saison des petites pluies. Saint-Pierre et Miquelon s'enveloppent d'épais brouillards sept mois sur douze. Dans les Hauts de La Réunion, lorsque la bruine et la brume fusionnent en un sabayon humide qui avale tout le paysage, on dit joliment, non pas "il pleut", mais "ça farine". Et parfois, lorsque passe non loin une dépression tropicale, les trombes d'eau qui s'abattent peuvent être si abondantes que les pare-brise des voitures prennent des allures de vitres de passerelle d'un remorqueur de haute mer en pleine tempête...
Augustin Trapenard accueille Tatiana de Rosnay pour "Poussière blonde", roman qui raconte la rencontre entre une femme de chambre et Marilyn Monroe, paru chez Albin Michel. A ses côtés, Sonia Kronlund présente "L'Homme aux mille visages", l'histoire d'une extraordinaire imposture éditée chez Grasset, François Garde évoque "Mon oncle d'Australie", paru chez Grasset. Régis Jauffret publie, lui, "Dans le ventre de Klara", aux éditions Récamier, et Julia Malye, âgée d'à peine 18 ans, présente son premier roman, "La Louisiane", paru chez Stock.