Avec sa Révolution française,
Pierre Gaxotte nous permet de sortir de l'aveuglement issu du romantisme révolutionnaire. S'appuyant sur sa grande érudition et son talent d'historien, il dénoue l'écheveau des événements, de leurs causes, de leurs répercussions. Il nous donne à voir aussi à quel point l'histoire en marche s'est nourrie de la profonde médiocrité de ses acteurs : arrivistes, cupides, mesquins, coupables de crimes de droit commun et ne tenant l'apparence de leur génie qu'à celui des circonstances et de l'histoire. On mesure enfin à quel point la révolution a été une véritable boucherie, du début à la fin.
Les portraits que
Pierre Gaxotte brosse des principaux protagonistes sont très réussis :
- Malesherbes : « Il se met en quatre pour allumer la révolution et protéger les incendiaires »,
- Mirabeau : « On parlait couramment de sa bassesse, de sa vénalité, de ses vices. Il parviendra à séduire, à convaincre, à arracher certains votes, il aura de l'influence, il n'aura jamais l'autorité. »
- Danton : « Très endetté, dévoré de besoins, esclave d'un tempérament tyrannique, il se jeta dans la révolution comme un moissonneur dans un champ. Eloquence brutale, figure de dogue, mufle puissant : c'est le Mirabeau de la Canaille. »
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Robespierre : « Il a peu vécu et son expérience des choses est bornée. le club [des Jacobins] est une société artificielle construite au rebours de la société véritable. Il a l'intelligence formaliste, sans grande prise sur le réel ? Au club, l'action ne compte pas, mais la parole. »
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Saint-Just : « S'il n'était pas d'une bravoure à toute épreuve, on dirait que c'est un théoricien excité ».
- Siéyès : « Il bénéficie de la force immense attachée à ceux qui ont l'art de se faire désirer. […] Il est mystérieux, profond, inintelligible. »
- Fouché : « Il avait vécu misérablement, tâtant de tous les métiers, rôdant autour du pouvoir, prêt à toutes les besognes pourvu qu'elles fussent bien payées. »
On sort de cette lecture avec un immense sentiment de gâchis et d'occasions manquées.