Cette montée vers la complication intellectuelle et esthétique a débouché un jour d'une cinquantaine de milliers d'années sur la projection de formes sur des objets ou des parois, formes qui, en elles-mêmes, ou, à plus forte raison, associées, prenaient un sens ; même si leur groupement n'était pas linéaire, c'était bel et bien une écriture. Et ces dessins, peintures, gravures, signes vont couvrir des millions de roches à travers le monde, à découvert ou en cavités en fonction des possibilités offertes par les pays où ils ont été créés. Or il se trouve que, pour beaucoup de raisons, dont certaines sans doute nous échappent, Lascaux est devenu une sorte de grotte emblématique, de grotte symbole, symbole de l'art préhistorique, de sa beauté, de son mystère, de son antiquité, de sa conservation.
Depuis trois millions d'années, l'Homme sait qu'il sait, et la possession de cette conscience lui a fait percevoir les formes au point d'oser en créer ; tapant sur une pierre avec une autre, il a "transformé" au sens propre, la première et, à partir de ce moment d'audace et d'imagination, il n'a plus cessé d'inventer, élaborant des formes de plus en plus compliquées, de plus en plus belles aussi, et de plus en plus efficaces lorsqu'elles étaient destinées à des fonctions. Le préhistorien suit parfaitement ainsi l'évolution des formes réalisées par les préhistoriques mais aussi l'évolution de leur perception des formes naturelles en découvrant par exemple leur intérêt grandissant pour les couleurs, les densités, les curiosités au point de les collecter pour le plaisir, pour s'en servir ou pour s'en orner le corps.
Ces représentations de grands mammifères herbivores et carnivores qui dominent l'art pariétal expriment la proximité spirituelle qui existait alors entre les humains et les animaux. Les grands artistes de la grotte de Lascaux étaient en même temps de grands prédateurs ainsi qu'en témoigne leur connaissance intime des espèces figurées.
Au cœur de ces sociétés de chasseurs, la production d'objets matériels décorés et d'art rupestre accompagnait et soutenait peut-être une multitude de pratiques sociales.
Au Paléolithique les animaux nourrissaient, en effet, les Hommes et leur imaginaire.
Philippe Grosos et Jean Michel Geneste, en partenariat avec Boris Vincent vous présentent leur ouvrage "Préhistoire : nouvelles frontières" aux éditions Maison des sciences de l'homme.
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